III. LA MAIN D'OEUVRE
Le maraîchage est une activité qui demande un
effort physique considérable et beaucoup de
disponibilité. L'entretien d'un champ depuis la semence
ou la pépinière jusqu'à la récolte nécessite
un ensemble de travaux souvent très pénibles. C'est pourquoi, les
maraîchers font appel à une main d'oeuvre de plus en plus
importante.
1. La catégorisation de la main
d'oeuvre
En effet on peut diviser cette main d'oeuvre en deux groupes:
la main d'ouvre locale, composée de populations autochtones et la main
d'oeuvre étrangère qui concerne les travailleurs saisonniers.
a) La main d'oeuvre locale
Elle est essentiellement composée de la population
autochtone. Les exploitations familiales étant les plus
répandues, le personnel champêtre est constitué de membres
d'une même famille. Le père de famille dispose d'un lopin de terre
qu'il exploite aves ses enfants. Ce sont les producteurs locaux dont leur
famille ont acquis un droit d'usage sur les terres. C'est ce qui explique la
présence des quinquagénaires et des sexagénaires dans le
site production. Même s'ils n'ont plus la force physique pour travailler
la terre, ils continuent à fréquenter les champs pour
superviser.
b) La main d'oeuvre
étrangère
C'est la main d'oeuvre extra familiale. Cette main d'oeuvre
concerne les travailleurs saisonniers venus de l'intérieur du pays. Les
régions du Nord et du Centre du Sénégal sont
frappées par les effets dévastateurs de la sécheresse et
de la baisse de la pluviométrie. Ces populations essentiellement
agricoles dont le temps de travail est désormais réduit à
la seule saison des pluies sont obligées de migrer en saison non
pluvieuse pour trouver du travail ailleurs. La zone des Niayes de par ses
attributs géographiques et climatiques offre à ces migrants une
possibilité de s'activer durant la saison non pluvieuse. Ce qui explique
leur présence dans la zone. On les appelle des « Sourga » ou
des « Norranes ».
Ces migrants peuvent aussi être de nationalité
étrangère. On note la présence de beaucoup de
guinéens dans cette zone. Contrairement aux nationaux, qui sont des
travailleurs saisonniers, les guinéens peuvent rester plusieurs saisons
de suite.
Cette main d'oeuvre étrangère a accès
à la terre grâce à un système de métayage de
location ou de confiage.
Le métayage est le système de mise en valeur le
plus répandu. C'est le système « beye seddo ». Comme
l'indique son nom en wolof, il consiste à un partage de la
récolte entre l'exploitant et le propriétaire terrien
après déduction des charges d'exploitation.
2. La classification de la main d'oeuvre
La diversité des acteurs nous permet de faire une
classification par sexe et une classification par âge.
a) La répartition par sexe
Comme les hommes, les femmes aussi participent à la
production maraîchère. En effet, nous avons rencontré
durant nos phases de terrain des femmes qui ont leur propre parcelle
d'exploitation.
Mais nos enquêtes nous ont révélé
qu'en termes de nombre elles sont très minimes par rapport aux hommes.
Sur les 125 maraîchers interrogés dans l'ensemble de notre site
d'étude, on a enregistré 14 femmes reparties comme suit.
Figure 15 : Répartition par sexe et par village
des maraîchers interrogés par village
Ce tableau fait état d'une répartition par sexe
très favorable aux hommes. Le pourcentage des femmes est de 11% alors
que celle des hommes est de 89 %.
Cependant cette répartition n'est pas uniforme dans
l'ensemble du site.
La présence des femmes est plus notée dans les
secteurs Nord et Nord Ouest du lac surtout dans les villages de Keur Mbir Ndao,
Mbidieume, Thieudeme, kemaye, Thiaye etc. La présence des femmes dans
cette partie du site s'explique par le fait que la nappe n'est pas très
profonde (3 à 4 mètres) et que la terre n'est pas difficile
à labourer. Ce sont des sols dior et dior deck essentiellement
sableuses. Dans cette zone l'entretien d'un champ ne nécessite pas une
grande force physique. Par contre, dans la partie située au sud et
à l'Est du lac, nos enquêtes révèlent que la
présence féminine est presque inexistante. Dans ce secteur, la
profondeur de la nappe avoisine 14 mètres alors que la
terre argileuse est très difficile à labourer. C'est le secteur
des sols deck et deck dior difficile à ameublir. Ce qui fait que dans ce
secteur le maraîchage est l'exclusivité des hommes.
b) La répartition par
âge
Cependant, cette part importante des hommes ne concerne pas
toutes les classes d'âge. La répartition par âge de la
population maraîchère laisse voir un schéma
diversifié. Dans tous les villages où nous avons mené des
enquêtes, il apparait clairement que la classe d'âge de (20
à 35 ans) reste la plus importante. Elle est suivie de prés par
celle de (35 à 50). La classe d'âge des plus de 50 ans est moins
représentative par rapport aux autres.
Ce qui fait que sur un total de 125 maraîchers
interrogé, 65 ont un âge comprise entre 20 et 35 ans 50 sont entre
35 et 50 ans et 10 sont ont plus de 50 ans.
Repartition par classe
d'age
20 à 35 ans 35 à 50 ans plus de 50 ans
Figure 16 : Répartition de la population
maraichère par classe d'âge
Cette répartition selon les tranches d'âge
traduit plusieurs réalités. Elle individualise trois groupes: les
jeunes (de 20 à 35 ans), les adultes (de 35 à 50 ans) et les
vieux de plus de 50 ans. L'analyse de la figure nous permet de constater que
les jeunes et les adultes restent les principaux acteurs de production. Ceux
groupes représentent 92% de l'échantillon. Ceci se traduit par le
fait que ces deux tranches d'âge sont les plus aptes à la pratique
de l'activité maraîchère. Rappelons que le maraîchage
est une activité qui demande une grande force physique et beaucoup de
disponibilité pour l'entretien des cultures.
Cette réalité précédemment
citée explique parallèlement la faible présence des
personnes âgées dans les champs (8%). Cependant notons que les
vieux sont les chefs de ménage et propriétaires de l'espace
foncier. Ils surveillent et supervisent les travaux champêtres. Ils
jouent un rôle moral très important de par le lien structurel
particulier qui existe entre les
activités économiques et la structure sociale. Ce
lien est très déterminant dans l'organisation du travail et la
gestion des moyens de production.
Les enfants sont aussi présents dans la production. Au
cours des visites de terrain, nous avons rencontré des enfants dans les
champs qui s'adonnent à des travaux comme le désherbage manuel,
l'application de l'engrais chimique etc. Ce sont eux qui assurent les
commissions entres les champs et les maisons. Le bol de riz sur la tète,
à dos ou à charrette, ils transportent quotidiennement les repas
des villages vers les champs.
Ce résultat confirme que dans ce secteur, le
maraîchage est une activité qui engage une bonne partie de la
population active. Cependant elle est l'activité dominante dans ce
secteur. Mais la péjoration des conditions climatiques pousse cette
population jeune à s'aventurer dans émigration.
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