UNIVERSITE OUAGADOUGOU
UNITE DE FORMATION ET DE
RECHERCHE/ SCIENCES HUMAINES
DEPARTEMENT DE SOCIOLOGIE
MEMOIRE DE MAITRISE DE SOCIOLOGIE
LES COMPORTEMENTS DES ELEVES DU
LYCEE TECHNIQUE DE OUAGADOUGOU FACE
AU DEPISTAGE VIH VOLONTAIRE
Présenté et soutenu par Sous la direction
de
Pascal Louis Germain COMPAORE SOUBEIGA
André
Mai 2OO6 Maître-assistant de
Sociologie
INTRODUCTION
Le dépistage volontaire est un enjeu fondamental dans
la lutte contre le SIDA car il se situe à l'interface d'une politique
efficace de prévention et de soins. En effet, l'absence de connaissance
de la sérologie ôte toute légitimité aux propos sur
la prévention d'une part et d'autre part empêche l'importante mise
en oeuvre de soins précoces.
Si donc, le départ de la prise en charge c'est de
connaître son statut sérologique, savoir qu'on est
séropositif peut être cependant vécu comme la
révélation d'une mort proche ; cette appréhension peut
trouver son fondement dans le fait que la lutte contre la «
séro-ignorance » pèche par l'absence d'une prise en charge
effective et élargie à toutes les catégories sociales.
Alors, pourquoi faire un test sérologique en face d'une
maladie incurable si l'on sait qu'un résultat positif peut
entraîner un rejet social, sans garantie certaine d'accès aux
soins anti-rétroviraux ?
C'est donc dans un contexte de discriminations possibles,
d'absence de thérapie curative et d'accessibilité relative aux
soins anti-rétroviraux que chaque groupe social et chaque individu
«s'approprient et réinterprètent »1
les informations provenant des multiples canaux possibles de communication, y
compris le discours biomédical.
Effectivement, «dans le domaine de la santé,
certaines informations restent très souvent abstraites et les
perceptions qu'ont les individus de ces questions sont bien souvent
faussées. Chaque individu a son propre système
d'interprétation de la maladie (cause, manifestation clinique ...) et
définit sa propre grille d'explication en fonction, bien
évidemment, du discours médical, mais aussi de sa propre
perception, de son système de valeur et de la réaction de son
entourage. »2
Ainsi, l'assimilation du dépistage volontaire ne se
fait pas sur un mode passif mais bien plutôt actif c'est-à-dire
selon les informations à l'origine des perceptions que les individus ont
sur la question du VIH/SIDA.
1 « Le monde profane se révèle beaucoup plus
poreux aux connaissances scientifiques qu'on ne le suppose
généralement même si la circulation de l'information ne se
fait pas sur le mode de l'acquisition passive mais sur le mode de
l'appropriation et de la réinterprétation » FASSIN Didier et
DOZON Jean Pierre, L'universalisme bien
tempéré de la santé publique. In critique
de la santé publique. Une approche anthropologique, Balland, 2001,
p17
2 GUILLAUME Agnès,
Les conséquences du sida : les difficultés de
la mesure. In Les sciences sociales face au sida. Cas africains autour de
l'exemple ivoirien, ORSTOM, 1995, p214
De ce qui précède, on peut soutenir que les
stratégies de mise en oeuvre d'un programme de dépistage
volontaire ne pourraient faire l'économie du degré d'information
et des perceptions d'une population cible déterminée. A cet
égard, notre intention de recherche se circonscrit au secteur de
l'éducation considéré comme «l'un des
secteurs sociaux les plus vulnérables à l'infection du VIH en ce
qu'il constitue un environnement d'apprentissages, de brassages et
d'interactions entre les jeunes scolarisés.»3
Nous nous sommes plus particulièrement
intéressé au cas du Lycée Technique de Ouagadougou (LTO)
qui a servi comme l'un des cinq sites d'accueil de la campagne de
dépistage en milieu scolaire et universitaire du 13 au 23 avril 2004. La
campagne a enregistré au total 954 volontaires dépistés,
933 résultats négatifs contre 21 résultats positifs soit
respectivement les taux de 97,8% et de 2,2%.
En ce qui concerne exclusivement le seul site du LTO, 343
élèves ont été volontairement
dépistés dont O3 tests positifs. Malheureusement, le
rapport4 ne donne pas la distribution des effectifs par
établissements d'enseignement car chaque site prenait en compte les
lycées environnants ; cela ne nous permet pas dans notre cas, de
comparer l'effectif total des élèves du LTO au nombre de ses
volontaires dépistés. Néanmoins, on peut d'ores et
déjà observer que ce site d'accueil du LTO a enregistré un
nombre de volontaires (les 343 élèves) très en
deçà de l'effectif de ce seul lycée à la date de la
campagne (1211 élèves).
Par ailleurs, du point de vue de l'objectif, la campagne se
voulait d'atteindre 25 000 élèves, étudiants et
enseignants. Que faut-il alors conclure du quorum de 954 volontaires
dépistés ? Une recherche sur le comportement, entendu comme choix
d'adhésion ou de refus, des élèves face au test
sérologique VIH paraît donc primordiale. Qu'est-ce qui explique la
différence de comportement ?
L'étude comporte deux grandes parties. La
première partie définit le cadre théorique et la
méthodologie de recherche ; la seconde quant à elle,
déploie l'analyse des entretiens de l'enquête de terrain et
apporte la réponse à notre interrogation initiale.
3 Burkina Faso -PNUD, Rapport sur le
développement humain. La lutte contre le VIH/SIDA, Ouagadougou, 2001,
p81
4 Association Laafi La Viim, Rapport de la
campagne de dépistage en milieu scolaire et universitaire, avril 2004.
Tous les chiffres relatifs à ladite campagne sont tirés dudit
rapport.
PREMIÈRE PARTIE : CADRE THEORIQUE ET
METHODOLOGIE DE RECHERCHE
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