II.1.3.1 Au-delà de Territoire, la
Territorialité ?
Il nous est clair maintenant que le territoire réunit
en son sein, l'espace de vie, l'espace vécu et l'espace perçu
[Guy di méo : 2000]. L'espace de vie (conçu) représente la
volonté de lier le global et le local en regroupant-associant les lieux
et en leur conférant une << valeur d'échange », et
l'espace vécu reflète la territorialité,
c'est-à-dire l'ensemble des « rapports existentiels » et
sociaux que les individus en groupe entretiennent avec l'espace qu'ils
produisent et reproduisent quotidiennement à travers les figures, les
images, les catégories et les objets géographiques « qu'ils
mobilisent » dans un projet de production [Guy di Méo : 2000].
Et c'est cette territorialité qui définit ou l'altérite
(l'espace perçu) de l'espace en question à travers les modes
d'appropriations des habitants et leur degré d'implication dans le
projet de production de l'espace. Le territoire est une sorte << maille
totale » [Debarbieux Bernard, cité par J.Aldhuy : 2009] et reste
ouvert et prêt à épouser toutes les combinaisons spatiales
que tissent les collectivités humaines. Tandis que la
territorialité se présente comme une nécessité
ontologique ayant le pouvoir de fixer les <<conditions de l'existence du
territoire » [G. Di Méo : 2000].
II.2 GOUVERNANCE LOCALE: LE QUARTIER COMME ECHELLE
D'ACTION.
Nous savons jusque là que la Re-production du local est
une question de tension entre la valeur d'échange qui a une
finalité externe basée sur une logique fonctionnelle, et une
valeur d'usage à finalité interne fonctionnant selon la logique
des sentiments, de temps long (logique du lieu). La gouvernance s'est alors
présentée à nous comme un fil conducteur qui doit nous
permettre de comprendre comment le conflit se résout-il ?
II.2.1 LA GOUVERNANCE COMME OSMOSE ENTRE LE GLOBAL ET
LE LOCAL ET LE QUARTIER COMME ECHELLE D'ACTION :
Le concept << gouvernance »,
Aujourd'hui en vogue, provient du terme médiéval
gubernantia qui renvoie à l'idée d'orientation des
conduites [Le Galès et Lascoumes : 2007 : 21]. La
littérature sur la gouvernance nous a renvoyé vers l'action et la
politique publique. Elle [la gouvernance] met l'accent sur << les formes
d'organisation horizontale et verticale de l'action publique » [Le
Galès, cité par A.Bourdin : 140]. La gouvernance diffère
de la gouvernementalité (démarche top down) [Le
Galès et Lascoumes : 2007 : 7], et tend à l'affaiblir au profit
d'autres autorités telles que la justice ou autorités
indépendantes...[Le Galès, cité par A.Bourdin : 140].
A travers la démarche de projet urbain saisi comme
technologie de l'action [A. Bourdin : 2000 : 160] et un outil pour le
développement local [Z. Maghnous Dris : 2008], les acteurs publics
tendent à déployer leurs stratégies en respectant les
divers intérêts, la localité comme la globalité.
Cela se fait, d'après J-P Gaudin [1997 : 57-95] selon une logique de
concurrence, d'attraction économique. Dans cette perspective l'action
publique se présente comme une stratégie d'occupation du
territoire (local) par les acteurs économiques en leur assurant un
environnement propice à l'activité économique. A.Magnaghi
[2003 : 29-32] distingue trois approches de développement local. (i)
L'approche fonctionnaliste s'appuie sur les réseaux longs forgés
par la mondialisation. Les lois économiques déterminent les
objectifs, les lieux, les modalités et les techniques de la production
et d'occupation de territoire. (ii) l'approche environnementaliste marque le
passage de l'économie du monde vide vers l'économie du monde
plein. Cela se fait par le truchement des cadres normatifs à haut niveau
de qualité environnementale. Cette approche reste sectorielle et ne
change pas les lois économiques dominantes. (iii) L'approche
territorialiste qui s'appuie sur le milieu naturel, le milieu construit et
l'homme. Cette démarche tend à « interpréter
l'identité de longue durée >> afin de retrouver ce que
Magnaghi appelle la « sagesse du lieu >>. Le « Glocal >>
comme certains auteurs aiment l'appeler ou la conception patrimonialiste du
local [Bourdin : 2000], mais Magnaghi va loin dans sa vision, il propose que le
local soit le point de départ pour une mondialisation par le bas. Une
« utopie concrète>> dit-il. La seule localité qui
résiste à la mondialisation est celle qui vit en autarcie, celle
que nous ne connaissons pas [Bourdin : 2000]. En attendant une
éventuelle matérialisation de cette utopie, nous
préférons continuer sur la lignée de l'approche
territorialiste, c'est-à-dire le « glocal >> ou «
patrimonialiste >>[A.Bourdin : 2000], la démarche qui conjugue les
intérêts à travers une médiation entre les
différentes échelles, de la parcelle à la ville, par
« l'embrayage » (agencement) [Ingallina 2008 :10]. Il s'agit
d'un processus itératif où les échelles de la
ville s'articulent. On assiste à travers ces jeux d'échelles
à une tendance qui remet le quartier au centre de l'action publique.
Défini comme division administrative de la ville ou partie ayant sa
physionomie propre et une certaine unité [Le petit robert: 2001],
le quartier est alors un espace marquant pouvant être identifié
par un ensemble d'indicateurs statistiques. Il suffit tout juste de taper le
nom d'un quartier dans le moteur de recherche de L' I.N.S.E.E, et voir la masse
d'information qui en découle, pour se rendre compte que le quartier est
saisi vraiment comme une «référence>>
priviligiée de l'action publique.
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