II.1.3 ...ET DE TERRITOIRE :
J.Lévy a constaté que la notion du territoire
renvoie à plus de huit définitions [Julien
Aldhuy : 2009] que nous n'allons pas exposer ici, mais
justement pour dire que le territoire
requiert de nous un effort de définition en tant
qu'objet scientifique. Conventionnellement,
et d'après P.Merlin [2005 : 882], le territoire est
un étendu d'un espace « approprié » par un
individu ou une communauté. On emploi territoire
aussi pour désigner « l'espace délimité »
sur
lequel s'exerce « l'autorité » d'un Etat
ou d'une « collectivité » [...] et dans les deux cas,
la notion du
territoire n'est pas seulement spatiale, mais implique une
dimension « temporelle »
« d'appropriation » et de « constitution
». Selon quelle logique le territoire se re-produit-il?
D'après cette définition, le territoire semble
trouver son fondement autour de trois notions,
à savoir, << l'appropriation », <<
autorité exercée sur un espace délimité » et
le <<temps ».
(i) Appropriation? par qui ? de quoi et comment?
L'appropriation comme action consistant à prendre possession d'un objet
physique ou mental. Au sens juridique, l'appropriation peut être
légale ou illégale [F.Choay 2005 : 59]. L'appropriation dans le
sens des ethnologues, pour qui, l'appropriation est l'ensemble des <<
conduites de marquage » pour limité l'espace approprié, ce
qui nous renvoie à la <<dimension défensive ». Par
analogie, l'expression <<appropriation de l'espace » désigne
l'ensemble des conduites qui assurent un certain << maniement »
affectif et symbolique de l'environnement spatial en question
[ibidem]. A ce propos, Claude Raffestin [cité par Guy di
Méo : 2000], définit le territoire comme << une
réordination de l'espace [...] Il peut être
considéré comme de l'espace informé par la
sémio-sphère », c'est-à-dire l'ensemble des
signes culturels qui caractérisent les groupes d'une
société. Le territoire est définit différemment
selon les disciplines. Selon l'optique des géographes, le territoire
serait un produit des liens sociaux dans un espace. Liens sociaux saisis dans
le sens de P.Bouvier [2005 : 32], c'est-à-dire, structuration dans le
maillage des pratiques et des représentations. C'est << un
outil de régulation sociale à travers sa capacité à
reproduire l'organisation sociale dont il est le produit » [J.Aldhuy
: 2009]. Pour les économistes, le territoire est un <<
système de production ouvert » fonctionnant selon le principe de
la
<< consommation productrice >> [Lefebvre: 1986 :
432], c'est-à-dire par la taxe imposée sur les activités
économique (consommation d'espace), qui, elle (la taxe), sera
employée pour produire d'autre activités et ainsi de suite (un
cercle vicieux). L'économie se définit pratiquement comme une
connexion de flux et de réseaux [idem : 401] voulant regrouper
les lieux, avec leurs spécificités socioculturelles, et leur
conférant ainsi le sens << collectif >> sous formes de
<< modèles >> d'input-output. Tandis que pour le
politique, le territoire est tout d'abord une assise électorale, un
moyen de légitimations des actions publiques donc des régulations
politiques et sociales. C'est ce que Michel Lussault appelle : <<
régime de visibilité >> [Lussault : 2000].
(ii)Autorité ? pourquoi ? le territoire, qui est par
nature multi scalaire, a pour finalité de produire en tissant des
collectivités humaines, peu ou prou dans le respect de leur
appartenance socioculturelle, sous forme de réseaux de relation et de
flux entre les différents lieux qui le composent. Autrement dit, le
territoire est une << volonté >> de
<<production>> selon un mode de découpage
hiérarchisé et de << contrôle >>. Cette
question de << volonté >> de faire un territoire nous
renvoie à la question du << référentiel >> qui
est différent d'une échelle à une autre [Guy Di
Méo, cité par Julien Aldhuy : 2009]. Cela doit nous permettre
d'introduire l'idée selon laquelle il existe une <<tension
permanente >> entre territoire et territorialité, qui, elle, se
définit comme << une relation individuelle et/ou collective
[dans] un rapport complexe au(x) territoire(s) » [Di
Méo Guy cité par Julien Aldhuy : 2009 : 5]. Cette
territorialité témoigne de la multi dimensionnalité du
vécu (des habitants et des pouvoirs publics). Tandis que le territoire
serait considéré comme un moyen << d'ordonnancement>>
de la territorialité selon la logique de production (fonctionnelle), et
d'ailleurs, c'est pour cela que Raffestin [cité par Aldhuy : 2009 : 5]
définit le territoire comme << la prison que les hommes se
donnent ». Cette tension entre territoire et territorialité
pose la question de la <<pertinence>> du territoire
vis-à-vis les habitants du local.
(iii) Le temps? Le territoire se présente comme une maille
joignant le global au local
grâce à sa capacité en <<
réseau >> [Verpraet : 2000 : 53]. Cette mise en réseau se
présente comme un ordre, donc comme un temps [Lefebvre: 1986 : 343], en
répondant à la logique du territoire entendu comme
<<interface>> facilitant << l'accessibilité >>
inter-lieux et favorisant ainsi << l'intérêt collectif
>>. L'espace public est le lieu qui conforte cette idée de
d'accessibilité, donc de << mobilité >> qui est une
condition très importante dans la compréhension de l'espace
collectif, car elle constitue le fondement de la pensée sur la
fabrication de la ville [Ingallina : 2008 : 118]. Le territoire fortement
hiérarchisé se veut
organisateur de l'espace sous l'angle, de <<flux>>
et << croisement des flux >>, autrement dit, de la << gestion
des distance>> pour << contrôler >>, produire <<
efficacement >> et maîtriser le temps (des flux), car Le temps se
saisit dans le mouvement [Lefebvre: 1986 :114].
Intervenir sur le local avec la logique de territoire, veut
dire opposer la valeur d'échange (production et efficacité) avec
la valeur d'usage (la valeur de l'espace vécu). Cela veut dire que le
territoire tend à échanger l'usage des habitants (subjectif et
peu productif) par un usage hiérarchisé selon une logique de
production et d'efficacité. L'usage de l'espace est constitué
fondamentalement par cinq espaces [J.ALdhuy : 2009] : (i) Espace
résidentiel (ii) Espace d'approvisionnement (en biens et services),
(iii) Espace de loisir et de culture. (iv) Espace de travail et (v) Espace de
transport. Comme Exemple d'échange, nous citons l'exemple de la rue de
la république à Marseille, où l'ordre du territoire s'est
exprimé ouvertement et directement sous la langue de C.Valette, adjoint
maire délégué à l'urbanisme : << on a
besoin de gens qui créent de la richesse. Il faut nous
débarrasser de la moitié des habitants de la yille. Le coeur de
la yille mérité autre chose>> [cité par J-S
Borja et al : 2010 : 26]. Cette idée de territoire tend vers une
recomposition de la localité << statique >> pour la rendre
<< localité mobile>> [Bordreuil, cité par Bourdin :
2000 : 64], par une définition des services structurés autour de
la << vie quotidienne >>qui s'organise avec une certaine
régularité et se construit autour de trois éléments
[A.Bourdin : 2000 : 218-224]. (i) La constellation des biens et des services
centrés sur l'individu, la famille ou le domicile. (ii) Les
séquences, c'est-à-dire les types d'activités
enchainées que l'on connait et que l'on reproduit. Comme la
mobilité <<domicile-travail >>. (iii) Enfin le <<style
de vie >>, c'est-àdire l'ensemble des solutions
préférentielles choisies, associées à une structure
du sens, notamment une image de soi et de la quotidienneté, tel que la
proximité des espace de loisir, des centres de commerce, de travail, de
culture. C'est ce << mode de vie >> qui fait la valeur d'usage de
l'espace en question [Lefebvre : 1986 : 381].
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