I.1 EVOLUTION DU PROJET URBAIN :
Nous essayons de déceler, dans les lignes qui suivent,
l'évolution de la notion du projet urbain, en France, comme une nouvelle
manière de faire l'urbain, et comprendre ainsi les transformations
majeures qui ont affectées l'urbain. Pour certains auteurs, comme
Roncayolo [2000], Ingallina [2008] et Hayot [2000] , le terme de projet urbain
est apparu dans sa version conjoncturelle, à la fin de la grande
expansion des années 1960, où on essayait de dissocier une vision
très systématique et trop mécanique de l'espace et de
découvrir de nouvelle rationalités, moins détachée
des hommes, plus proches des conduites et des aspirations, et probablement plus
complexes. Et c'est ainsi qui est né l'urbanisme dit << des
aménageurs >> ou les rapports sociaux sont tournés presque
exclusivement, comme l'ont bien remarqué P.Merlin et
P.George5, vers une géographie urbaine
préoccupée de l'existence d'une armature urbaine à
l'échelle du territoire. Donc, une quête de maîtrise
<< a priori>> du fait urbain, en s'intéressant, à
organiser les flux de la force de travail au lieu de s'intéresser aux
modes de vie des habitants. Cette approche ne renvoie en aucun cas à la
notion sociologique, entendu dans le sens Durkheimien, c'est-à-dire,
participer dans le fonctionnement du système sociale. Les années
1960 ont été marquées par une montée du contentieux
et refus de plus en plus élargis de l'espace résidentiel <<
fonctionnaliste >>. Et l'Etat <<fort centraliste >> commanda
des << modèle culturels >> sur les <<modes d'habiter
>> et sur les pratiques sociales. L'approche fonctionnaliste, culturelle
ou non, n'a de vertu que le fait qu'elle a réduit l'habitant à un
simple << usager de l'espace >>. Dans les années 1960, les
premiers travaux de sociologues tels Henri Coing (1966) dénoncent les
effets sociaux de la rénovation urbaine et du relogement dans les
quartiers ouvriers parisiens. Avec l'avènement des années 1970,
les professionnels de l'urbain remirent en question les <<certitudes
radieuses >> [A.Hayot : 2000 : 17], surtout avec l'apport de la
sociologie qui a bien éclaircis la << complexité >>
du fait urbain. Néanmoins, Hayot stipule que cette approche même,
et malgré son apport clairement positif, est tombée dans le
piège de la négation de toute réalité
concrète du phénomène urbain. Les années 1980 quant
à elles, ont été vouées à revaloriser et
atténuer les ségrégations urbaines
5 Cité par Hayot [2000 : 16].
crées dans les années 60 et 70. On assistait
aussi dans cette période à un foisonnement d'initiatives, les DSQ
[développement social des quartiers], les DSU [développement
social urbain] et les ZEP [zone d'éducation prioritaire] et les OPAH
[opération programmées d'amélioration de l'habitat] ,
jusqu'à 1989, ou le président Mitterrand prononça pour la
première fois la notion de << politique de la ville6
>> qui tend à regrouper les initiatives partielles,
résoudre les conflits, et rétablir les dévalorisation
sociales en réhabilitant7 et rénovant8 la
vie des habitants dans tous ses aspects (économique, social,
culturel...). L'Etat intervient dans ce cadre à titre d'incitateur
[Grafmeyer et Authier : 2008 : 114] ou Etat animateur [J. Donzelot, cité
par Grafmeyer et Authier, Ibidem]. Et c'est ainsi que le <<
localisme >> fût créé et encore conforté par
une décentralisation des compétences données aux
collectivités locales. La volonté étant de traiter et
répondre aux problèmes à l'échelle ou ils se
posent. Le << localisme >> ainsi adopté, perçu comme
une <<construction sociale des populations>> [Michel Verret,
cité par Hayot : 2000 : 18] en leur ouvrant le champ de la participation
ou de l'auto-gestion. Il apparait donc comme un outil de planification et de et
une sorte de résistance à toute globalité conçue
a priori.
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