INTRODUCTION:
FOISONNEMENT DES PRATIQUES, PLURALITÉ D'ACTEURS
ET GENESE D'UN QUESTIONNEMENT
Le projet1 urbain fut adopté suite à
l'échec de l'urbanisme déterministe, celui du plan, afin que
l'urbanisme incarne de nouveau sa raison d'être comme <<discipline
opérationnelle » d'analyse et de transformation de l'espace urbain,
et qu'en aucun cas avoir la maîtrise comme fin en soi. En effet,
l'urbanisme de part sa définition, est une science, art ou technique de
l'organisation spatiale des établissements humains [F.Choay : 2005 :
911]. Il se définit aussi comme pratique renouvelée sans cesse,
visant la découverte des lois dont le fonctionnement spontanée
était jusqu'alors demeuré caché, et à les appliquer
délibérément dans la conception et l'organisation de
l'espace [idem : 912]. Autrement dit, l'urbanisme est la pratique qui se
reconnait par la théorie qui découle de son action. De ce fait,
le projet urbain constitue une sorte de cristallisation ou d'une
maturité de plus de cent ans d'exercice. De part sa
légitimité2, il fût rapidement adopté par
une pluralité d'acteurs, pouvoirs publics, urbanistes provenant de
toutes <<disciplines confondues », et même l'habitant qui, par
l'avènement de projet urbain comme une nouvelle manière de faire
l'urbain, a pu s'approprier le rôle << d'acteur » au lieu de
simple << usager ».
Nos diverses lectures sur la question du projet urbain nous
ont permis de cerner les différentes pistes de recherche, qui sont en
vogue aujourd'hui, dans deux grands répertoires : (i) L'approche typo
morphologique : qui tient à déceler les processus de la
morphogenèse de la forme urbaine. Elle fût Prônée par
l'école italienne d'après-guerre comme critique au courant
moderniste, avec Saverio Muratori et ses disciples Aldo Rossi, Carlo Aymonino,
Vittorio Gregotti. Elle a connu et connait une adoption internationale, en
France, avec Ph.Panerai et D. Mangin et dans les pays du Maghreb.
1 << Le projet, son étymologie, renvoie
à un vieux mot français qui, à travers le « pourject
», désigne un travail d'architecte : la construction du balcon, cet
élément lancé avec audace au dessus du vide, son extension
de sens indique que dans l'activité productive de l'homme, bien d'autres
dispositifs peuvent être envisagés, formulés comme
virtualités potentiellement réalisables » [D.pinson :
2000 : 79].
2 Dés la fin de XVII siècle, le mot design
(dessein) en anglais fût remplacé pour un moment par le mot
project dérivé du vieux français pour
décrire les nouvelles réformes socio-économiques à
l'oeuvre. Dés lors, le projet prend une nouvelle tournure et se trouve,
désormais, lié à des notions pour le moins attractifs :
innovation, création, identité et développement.
[J-P.Boutinet: 2006 : 13].
(ii) L'approche organisationnelle : qui tend à
comprendre les logiques via lesquelles le projet urbain est monté. Cette
approche prend souvent la nomination de << gouvernance », ou la
problématique se résume dans la fameuse question << A qui
le territoire appartient-il? ».
L'objectif de ce travail est de s'inscrire dans une approche
<< organisationnelle », et de contribuer au débat portant sur
l'action territoriale en milieu urbain. Il s'agit de mettre l'accent sur le
rôle des habitants-acteurs, dans le montage-réalisation du projet
urbain à travers une opération de réhabilitation urbaine
d'un quartier historique. Ce type de quartier occupe souvent une position
centrale dans la ville, ce qui double sa valeur aux yeux des pouvoirs publics
qui tentent, non seulement la réhabilitation du patrimoine bâti
mais aussi une revitalisation économique, en rendant le quartier propice
aux activités économiques. Par ailleurs, les habitants qui y
vivent se trouvent menacés par ce projet qui cherche à les
remplacer par de nouvelles populations pouvant s'adapter aux changements qui
auront lieu après la réhabilitation. Cela interpelle le sujet qui
est l'habitant et le remet au centre de la question urbaine. La
linéarité procédurale, via laquelle se déroule une
opération de réhabilitation d'un quartier, disparait pour laisser
place à l'incertitude, qui, elle, affectera le <<
déroulement » du projet ce qui peut, au lieu de réhabiliter,
laisser tomber en ruine des bâtiments à forte valeur patrimoniale.
Dans la perspective de mieux comprendre les enjeux et saisir les rapports qui
sous-tendent les acteurs. Nous avons fondé notre problématique
sur le déroulement et la stabilité du projet urbain en
confrontant l'action des habitants-acteurs avec la logique et la conduite
d'élaboration du projet de réhabilitation:
Quelle est l'influence que peut exercer
l'habitant-acteur sur la durée du projet de réhabilitation dans
une démarche de projet urbain? : Selon quelle logique le projet se
conçoit-il, et comment sera-t-il stabilisé?
Notre problématique s'inscrit dans la réflexion,
déjà enclenchée et encore en vogue, qui gravite autour de
la notion du projet urbain comme conduite, et l'introduction de l'habitant
comme acteur et son influence sur la conduite d'un projet d'aménagement.
En somme l'interrogation posée se pose nécessairement dans une
démarche diachronique. Notre démarche est instruite par une
problématique et un mode de raisonnement c'est-àdire par les
prémisses d'une série de notions théoriques, dont
l'articulation nous
permettra d'établir un cadre analytique et une grille de
lecture pour explorer la réalité empirique et interroger les
faits. Pour ce faire, nous avons procédé en deux temps.
(i) Déconstruction de l'action : de Re-production du
local pour comprendre les logiques des acteurs (l'habitant aussi) ; et de
l'action collective pour saisir les rapports qui sous tendent les acteurs et la
stabilité des interactions. (ii) Construction du cadre analytique en
capitalisant les acquis théoriques dans des schémas pour
appréhender l'approche d'une façon globale .Par la suite il nous
sera possible de situer l'habitant-acteur dans la chaîne des rôles
et comprendre sa ou ses logiques d'action et les modes stabilité du
projet.
Nous sommes partis de l'hypothèse
générale selon laquelle l'introduction de l'habitant comme acteur
dans l'action de la réhabilitation urbaine pose l'incertitude quant
à la réalisation et suppose un rapport de pouvoir pour stabiliser
le projet urbain.
Pour guider le déroulement de ce mémoire, nous
nous sommes basés sur un << terrain de réflexion >> :
le quartier de <<Sidi Elhouari >> à Oran, capital de l'ouest
Algérien. C'est un cas, qui est à notre sens <<
révélateur >> et << exemplaire >> de projet de
réhabilitation urbaine mis en attente en partie par l'action de
l'habitant lui-même. Bien que sa valeur patrimoniale soit reconnue
à l'échelle nationale et internationale3 (classement
UNESCO), et malgré les tentatives de valorisation via les POS successifs
qui ont commencé depuis 19924, le quartier connait encore un
processus de dégradation. Dix huit ans après le premier POS, le
projet de réhabilitation du quartier stagne. La chronologie du projet
est encore ouverte à l'incertitude et sa stabilité n'est pas
encore claire.
Conçu comme un protocole de recherche, notre
mémoire vise la validation de la problématique soulevée,
discuter les hypothèses adoptées, proposer un terrain(s)
d'étude et proposer des repères méthodologiques dans
l'intention de poursuivre la recherche dans le cadre d'une thèse. En
outre, nous tenons à apporter dans ce mémoire un état de
savoir autour de la question soulevée.
Le mémoire est structuré en cinq parties dont
les trois premières constituent le cadrage théorique. Dans la
première partie, nous tenons à revisiter la notion de projet
urbain à travers son évolution, ses conditions d'émergence
et ses valeurs. La deuxième partie du mémoire pose la
problématique de reproduction du <<local>> à travers
la confrontation
3 La ville d'Oran à organiser pour cet effet, un colloque
international, entre le 19 et le 21 octobre 2008.
4 L'algérie s'est dotée depuis 1990 de la loi
n° 90-29 du 1er décembre 1990 relative à
l'aménagement et l'urbanisme, où le PDAU et le POS sont
considérés comme les instruments d'urbanisme.
de notions de différents auteurs. Elle y pose in
fine la question de la gouvernance locale. La troisième partie
quant à elle, fait le point par un état de l'art, sans chercher
l'exhaustif, sur les différents modes d'appropriation du local par les
habitants, et sur les différentes approches « théoriques
» de l'action collective. L'apport théorique
développé dans les
trois premières parties nous permettra par la suite de
choisir un terrain(s) d'étude, quisera présenté
succinctement dans la quatrième partie. Nous conclurons, dans la
cinquième partie, notre réflexion par une
reprise-synthèse des différentes conclusions partielles à
laquelle nous joignons une esquisse de la méthodologie pour le(s) cas
d'étude choisi(s). Voir schéma ci-dessous.
CADRAGE THEORIQUE
II. logique de reproduction du ulocal
»:
· Confrontation des notions.
· Gouvernance locale
Comment approcher la réalité
complexe de l'action collective?
Comment le local se
reproduit-il ?
INTRODUCTION: Cadrer l'intention de recherche entre
problématique et hypothèses. uHabitant-acteur, durée et
stabilité du projet urbain »
I. Évolution du concept:
Le retour du u LOCAL »
III. Etat de l'art des approches sur l'action
collective:
· Modes d'Appropriation du local.
· Approche de l'action collective.
CAS D'ETUDE
Quel cadre pour approcher le rôle de l'habitant-acteur ?
Quels sont les critères de choix du cas d'étude ?
IV. Présentation du terrain
d'étude.
CONCLUSION
V. CONCLUSION: Reprise des conclusions partielles,
discussion des hypothèses et Esquisse méthodologique pour une
suite en thèse.
Figure 1: Le raisonnement suivi.
I. EVOLUTION DE LA NOTION DU PROJET
URBAIN : LE RETOUR DU « LOCAL»
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