I.2 CONDITION D'EMERGENCE DU PROJET URBAIN :
Pour que le projet urbain, comme démarche, soit
adopté, il faut que certaines conditions soient mises en places, et que
nous essayons ici, à travers nos lectures, de les cerner dans les points
qui suivent :
1. Redistribution et reconnaissance des
rôles: le projet urbain s'est déployé comme
synonyme d'une rupture épistémologique, ou la profession de
chaque urbaniste se trouvait remise en question, et c'est ainsi que l'Etat
centraliste-fort devient alors un << Etat arrangeur >> [F.Ascher :
2007 : 18], << régulateur >> visant entamer des actions
<< légitimes >> avec un << pouvoir amoindris >>.
Cela se fait avec une << densification >> des réseaux
d'acteurs locaux Impliqués dans le territoire en question avec un
portage nécessairement politique.
6 En suivant les pas de la France, L'Algérie s'est
dotée en 2006 d'une loi dite << loi d'orientation de la
ville>>, qui pour le moins, nous semble assez ambitieuse car elle est
encore loin de la pratique.
7 «Pour une meilleure « image sociale » et une
plus grande valeur économique ». [Grafmeyer et Authier : 2008
: 108].
8 «Produit bien par elle-même un reclassement
brutal des modes de vie, des trajectoires et des activités locales, elle
est en même temps un révélateur et un
accélérateur de changement sociaux dont elle n'était pas
l'unique déterminant ». [ibidem]
2.
Le décloisonnement des compétences
: accompagnant la <<construction sociale >> de nouveaux
savoir-faire urbain et corrélativement, l'émergence de
capacités nouvelles << d'expertise >>. Et ce par l'ouverture
mutuelle entre les disciplines sans << hiérarchie >>, qui
auparavant étaient << hermétiques >> les unes par
rapport aux autres, et s'approprier la << coopération>>
comme un nouveau paradigme de la pratique urbaine.
3. La flexibilité : Daniel
Carrière, directeur de l'association <<centre ville pour tous
>>, stipule que si on part des schémas de résolution
très rigide, on risque de faire des dégâts. « Il faut
oublier, parfois, ce que l'on sait ! » [J-S Borja et al : 2010 : 99]
pour que la coopération soit effective. Cela veut dire qu'il faut mettre
son savoir-faire de spécialiste derrière soi et négocier
avec un langage simple, limpide et << concret >>. Cela ne veut
surtout pas dire que le spécialiste délaisse son savoir d'expert,
mais il doit tout juste chercher le bon moment pour l'introduire.
C'est-à-dire le temps comme rythme ou démarche via laquelle,
l'acteur entame son action. D.Barthelot nous éclaire sur ce point en
disant : << La règle, mal utilisée,
sans projet ou comme projet a montré ses limites dans la
définition et l'encadrement de la forme urbaine >> [2000 :
207]. Ainsi, « L'espace normé
ne crée pas le projet>> [J.Dubois : 2006]. De cela, il nous
est clair que le projet urbain cherche une << flexibilité >>
par l'introduction de << l'incertitude >> qui s'installe non pas
par manque de savoir et d'expertise mais par le flou qui texture la
réalisation.
4. La multi-temporalité urbaine :
d'après Roncayolo [2000, op.cit], la ville est l'articulation de trois
temps, le temps de la création, de la négociation et celui
d'usage. Le réajustement de ces trois temps se présente comme un
rétablissement difficile d'une <<a-synchronie >>, ce qui
rend l'espace comme un véritable << accordéon >>,
beaucoup plus lié au temps qu'à la distance. Entre autre le
projet urbain est une conception du <<temps de la continuité
>> [Ingallina : 2008 : 118], en conjuguant les temps, les plus lents avec
les plus rapides. Pour ce faire, il est indispensable que les parties prenantes
intéressées, par le projet urbain comme démarche,
conjuguent ces temps d`une façon cohérente, afin d'éviter
que la chronologie du projet même devienne problématique et
intervienne négativement sur le cadre de vie des habitants comme c'est
le cas pour le quartier de Sidi el houari à Oran, ou le temps du projet
(plus de dix huit ans) a influé négativement sur le patrimoine et
a permis sa dégradation. Cela nous éclaire que Le temps des
ajustements entre formes et société
échappent à nos << déterminismes >> et
à notre << prévisibilité >> pour partie et
peut être pour l'essentiel.
5. La qualité du processus comme
finalité : La conception du projet urbain comme <<
processus social>> [Roncayolo 2000, op cit] où les habitants, les
groupes, et les responsables interagissant entre les contraintes de l'espace et
la fabrication du destin social (pratiques sociales, espace public...). Il est
alors impossible de concevoir la notion de projet urbain indépendamment
de cette notion de << processus >>, tant dans la construction que
dans la réalisation matérielle. Le projet urbain est une
notion qui n'est éclaircie ni trop tôt, ni trop
mécaniquement, [...], est plus productive d'expériences et de
réflexions que lorsqu'elle se fige et entre dans le
carcan de procédures imposées9. Le
projet urbain s'intéresse donc à la qualité du
processus.
|