D-3.2. Impact sur la balance courante et la dette
publique
Comme nous l'avons analysé dans la première
partie, l'une des conséquences de la chute des prix et de la demande des
produits d'exportation sera la détérioration de la balance
courante, comme le montre la figure D.8 suivante :
Figure D. 8: Evolution de la balance courante du
Cameroun (en % PIB) entre 2007 et 2009
-1
-2
-3
-4
2
0
1
2007 2008
Programmation initiale Révision
2009
Source : Rapport FMI N°09/65
(février2009)
Une autre conséquence serait une légère
remontée de la dette publique du Cameroun entre 2008 et 2009 qui avait
drastiquement chuté après l'atteinte du Point d'Achèvement
de l'Initiative PPTE en 2006 suivie de la remise et/ou de l'annulation de la
majeure partie de ses dettes comme le montre la figure D.9.
Figure D.9: Evolution de la dette publique du
Cameroun (en % PIB) entre 2004 et 2009
40
70
60
50
30
20
10
0
2004 2005 2006 2007 2008 2009
Révision Programmation initiale
Source : Rapport FMI N°09/65
(février2009)
En résumé, la chute des recettes Etatiques,
conséquence de la chute des prix et de la demande d'exportation, est un
canal de transmission de la crise avec des impacts négatifs sur le solde
budgétaire, les réserves officielles de change, la balance
courante et la dette publique.
En définitive, il ressort de cette analyse d'impact
que, la prédominance des banques étrangères au Cameroun,
la raréfaction des transactions sur le marché interbancaire, le
rationnement du crédit à l'économie nationale, la
consistance de la position extérieure nette des banques, la chute des
prix et de la demande des produits exportés sont des potentiels canaux
de transmission de la crise au Cameroun. Ils pourraient se manifester par des
pertes bancaires, un bank run, une crise de liquidités, une
chute importante des recettes Etatiques, d'importants déficits courants
ou une remontée de la dette publique.
E. Recommandations
Face aux risques qui pèsent sur les pays
émergents, « les investisseurs privés fuient les
marchés émergents, et seulement un quart des pays les plus
vulnérables dispose des ressources pour empêcher une hausse de la
pauvreté », déclare la Banque Mondiale (2009 b) dans
son Communiqué de presse n°: 2009/245/EXC tenu à Washington
le 8 mars 2009.
Le Cameroun fait partie des trois quart des pays qui ne
disposent pas de ressources nécessaires pour faire face à la
crise et empêcher une paupérisation croissante. En effet, le
gouvernement camerounais ne dispose pas de base taxable solide et
diversifiée ou d'investissements suffisamment importants et par
conséquent, ne pourrait pas avoir la même capacité
d'intervention (recapitalisation des banques et entreprises en
difficulté, par exemple) que les gouvernements des pays avancés.
Au vu des taxes déjà très élevées et des
tensions sociales observées depuis février 2008, les
autorités camerounaises ont exprimé leurs intensions de ne pas
augmenter les taxes (FMI (2009 c), P. 10). Pour faire face à la
crise, le Cameroun devra mobiliser des ressources supplémentaires non
issues du pétrole et non issues aussi des taxes sur les produits de
première nécessité en particulier. En bref, il
apparaît que le Cameroun ne dispose pas d'une grande marge de manoeuvres
financières pour faire face à la crise. Il lui reste donc
à trouver des voies et moyens pour éviter que les risques qui
pèsent sur le pays ne se réalisent.
Sur le plan financier, nous avons montré qu'il
existait des risques de pertes bancaires, d'un bank run, et d'une
crise de liquidités. On observe déjà le resserrement des
conditions de crédit à l'économie nationale. Or, il
n'existe aucune réelle politique de sauvetage du système
financier camerounais en cas de problèmes. Pour
atténuer les risques qui pèsent sur le système financier
camerounais, le gouvernement pourrait:
· en partenariat avec les autres pays de la CEMAC,
initier un projet visant à réaménager le cadre juridique
du marché interbancaire de la CEMAC afin de minimiser les risques de
contrepartie et permettre ainsi la reprise et le bon fonctionnement de ce
marché interbancaire (la mise sur pied d'un système «
repo » (ou « cession-rétrocession »)
par exemple) ;
· garantir les dépôts des clients, ce qui
pourrait à terme changer la structure des dépôts (de
dépôts à vue aux dépôts à terme) et
permettre d'atténuer le risque d'un bank run. Cette
résolution doit être accompagnée d'une
réglementation préventive pour éviter que les banques
n'adoptent un comportement opportuniste (aléa moral) ;
· améliorer le climat des affaires, ce qui
pourrait avoir pour effets l'attrait de plus d'investissements et inciter
à terme les banques à augmenter la part de crédit à
l'économie nationale et minimiser ainsi les risques de concentration
(placements extérieurs).
Au niveau de l'économie réelle, la chute des
prix et de la demande de produits exportés ou la
détérioration des termes d'échange sont des canaux par
lesquels la crise pourrait se transmettre au Cameroun. Il paraît
difficile de trouver des solutions à court terme pour influer les prix
ou la demande extérieure, le Cameroun étant un « petit
pays »28 au sens du commerce international. Cependant,
à moyen terme, le Cameroun pourrait :
· conquérir de nouveaux marchés pour
augmenter sa demande extérieure et surtout assurer ses recettes
Etatiques. Par exemple, la conquête du marché de la
sousrégion ou d'autres pays africains avec ses produits vivriers
(banane, tubercules, farine, maïs, etc.) est un atout à exploiter
;
· éviter la « pro-cyclicité »
entre les recettes fiscales et les recettes budgétaires en diversifiant
la source de ses recettes (par exemple, augmenter ses investissements de
portefeuille dans les grandes entreprises tant nationales
qu'internationales).
Au niveau des finances publiques, la chute des prix et de la
demande des produits exportables aura des conséquences néfastes
sur le budget de l'Etat, les réserves officielles de change, la balance
courante et la dette publique. Le risque ici est celui de la remontée de
la dette publique. Seule une utilisation avec prudence les marges
budgétaires apparaît comme une solution adéquate.
28 C'est un pays qui n'a aucune influence sur les
cours mondiaux de ses produits exportés et considère les prix
comme données du marché.
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