CONCLUSION
GENERALE
Le viol est un crime qui ne cesse de se propager malgré
sa sévère répression. Dans le procès dont il fait
l'objet, les acteurs de la justice peinent à prouver de façon
indéniable sa véracité. A moins que heureusement le
prévenu plaide coupable, chose qui est rare comme nous avons eu à
en faire part tout au long de notre travail.
L'absence d'une définition légale de viol dans
le Code pénal burundais amène souvent des confusions entre
celui-ci et les autres infractions de tendance sexuelle telle que l'attentat
à la pudeur et les outrages publics aux bonnes moeurs. C'est ce qui rend
la tâche plus complexe aux magistrats dans l'application de ces
textes.
Dans le premier chapitre réservé aux
généralités, nous avons présenté les notions
de viol et les infractions de tendance sexuelle telles que l'attentat à
la pudeur, les outrages aux bonnes moeurs. Nous avons distinguer le viol commis
sur des mineurs du viol commis sur des majeurs. ce premier puni
sévèrement, n'exige pas l'absence de consentement parmi ses
éléments constitutifs. En fin de compte ce chapitre nous a donc
permis de connaître précisément le sens et la
réglementation du crime de viol, ses différentes formes, ses
caractéristiques et distinctions avant de chercher à atteindre la
véracité de sa perpétration ou commission.
Le deuxième chapitre a consisté en l'analyse
juridique des divers modes de preuves auxquels recourent les services de la
justice pour établir le responsable du crime de viol. Nous avons d'abord
décrit les preuves en général tout en soulignant que le
droit retient en règle générale le principe de la
liberté de preuve. Pour dire que la preuve est établie par tous
les moyens à l'exception des moyens probatoires prohibés telle
que la torture. Les voies probatoires les plus employés ont
été décrites notamment l'aveu, le témoignage, les
constations matérielles et les présomptions.
Plus particulièrement en matière de viol, nous
avons démontré que les voies de preuve les plus courantes sont
les témoignages oculaires et auriculaires, l'aveu qui est rare vu le
caractère secret du crime en question et les expertises
médico-légales. Nous avons aussi montré la
précarité de ces moyens de preuve de viol qui sont souvent
utilisés. S'agissant des interrogatoires, nous avons observé que
la confrontation des déclarations des différentes personnes ayant
joué un quelconque rôle dans le crime commis peut aboutir, par
analyse, à des mensonges. Nous avons cité le cas de la divergence
entre les déclarations de la victime majeure et la déposition du
témoin oculaire.
L'analyse des expertises médico-légales peut
aussi faire conclure dans un sens ou dans un autre. Ainsi, une expertise
mentionnant que la victime mineure parvenue chez le médecin dans trois
semaines qui présente encore des traces de sang récent laisse le
juge penser que la victime a été violentée après
l'arrestation du prévenu.
Nous avons en outre présenté les
différentes conclusions qui sont tirées par l'expert lesquelles
laissent parfois l'OMP et le juge au dépourvu. Par exemples « il
n'y a pas de signe d'un traumatisme au sexe ; rien à signaler ; viol
difficile à confirmer ni à infirmer », etc.
Le dernier chapitre réservé aux perspectives de
modernisation des moyens de preuve nous a conduit à deux sections. D'une
part, nous avons relaté les difficultés éprouvées
par les enquêteurs lors de l'utilisation des voies de preuve disponibles
dans notre pays en matière de l'infraction de viol. Nous avons alors
démontré la fragilité du témoignage. Il peut
être faux de bonne foi, il peut être faux de mauvaise foi selon la
moralité du témoin. Il peut avoir été
soudoyé. Des promesses de dons, d'argent, de contrepartie dans une autre
affaire sont monnaie courante dans notre monde judiciaire. Surtout quand il y a
décalage temporel entre le moment du crime et l'enquête. Les
témoins s'alignent facilement en deux camps opposés alors que
tous déclarent avoir assisté à la commission du crime ou
avoir quelque information sur le viol commis.
L'expertise médico-légale dont nous avons
relevé les mentions les plus utilisées est destinée
à établir la matérialité des faits. Dans notre
pays, le médecin se contente de dire qu'il y a des lésions, des
inflammations, les déchirures de l'hymen ou l'absence de
virginité et conclut que les rapports sexuels ont été
tenté ou ont eu lieu.
Cependant, il n'indique pas de qui sont les spermes
laissés sur les organes de la victime, de qui sont les traces de doigts,
les écorchures constatables sur l'endroit examiné.
La suspicion ne suffit pas d'autant plus qu'il existe aussi
des viols inventés dans le but d'un règlement de compte,
calculés pour obtenir, d'un patron, de l'argent, etc. Nous avons donc
montré que les capacités médicales de nos hôpitaux
ne sont pas en mesure d'individualiser les résultats obtenus. Nous avons
dès lors présenté dans la seconde section les
différentes techniques mises en oeuvre dans les pays
développés pour établir le vrai auteur des faits
génétiques qui s'individualisent, la dactyloscopie, le
détecteur de mensonge ; la narcose ou sérum de
vérité, la photographie, l'enregistrement, l'hypnose, etc.
Particulièrement pour le cas du viol, nous avons
noté que le recours aux exemplaires génétiques et à
la dactyloscopie établit bien précisément et
sûrement de qui sont les traces laissées sur la victime en les
comparant à celles prélevées sur le suspect. Dans tous les
cas, même quand le prévenu appréhendé n'est pas
finalement le vrai auteur selon les examens effectués, il y a lieu de
comparer les traces retenus aux autres éléments à
prélever chez d'autres suspects possibles dans le but de
découvrir en fin de compte le vrai auteur des faits
incriminés.
En somme, les moyens probatoires disponibles dans notre pays
sont précaires et ne permettent pas aux enquêteurs de prouver la
responsabilité du prévenu accusé de viol. A savoir que les
témoins peuvent facilement mentir, peuvent être achetés vu
d'ailleurs la gravité ou la lourdeur des peines infligées
à l'auteur condamné et que l'expertise requise au Burundi
n'indique pas le coupable des faits matériels constatés sur les
organes génitaux de la victime ; Quelle justice rendre à cet
égard ? Le juge se perd dans le doute ou s'aventure à trancher
injustement.
Nous ne manquerions pas à recommander :
§ Au gouvernement : d'envisager l'utilisation des
technologies modernes utilisées dans les pays développés
dont les empreintes génétiques et la dactyloscopie qui
établissent bien précisément et sûrement de qui sont
les traces sur la victime en les comparant à celles
prélevées sur le suspect afin d'épauler la justice dans la
recherche de la preuve.
§ A la magistrature :
- De considérer le problème de la preuve en
matière de viol comme un cas qui requière plus d'attention en
mettant au point un régime spécial de la preuve spécifique
au viol
- De traiter avec célérité les dossiers
de viol. En effet la lenteur de la justice dans le traitement de ces dossiers
fait souvent disparaître les preuves.
§ Aux autorités de la police nationale :
- Envisager des formations constantes pour équiper
véritablement leurs agents et de leur doter de tout le nécessaire
pour l'accomplissement effectif de leur tâche. Cela s'avère
être très nécessaire dans la lecture et
l'interprétation du certificat médico-légal.
- Recruter des agents ayant au préalable des
connaissances juridique et de faire respecter véritablement la loi en
veillant à l'applicabilité des dispositions légales.
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