CHAPITRE II :
ACTION DES PRINCIPAUX FACTEURS ECOLOGIQUES
2.1. FACTEURS CLIMATIQUES
Parmi les facteurs climatiques on peut distinguer les
facteurs énergétiques constitués par la
lumière et la température, les facteurs hydriques
(précipitations et humidité de l'air) et les facteurs
mécaniques (les vents).
2.1.1. La
lumière
La lumière joue un rôle primordial dans la
plupart des phénomènes écologiques. Son intensité
conditionne l'activité photosynthétique. La durée de
l'éclairement au cours d'un cycle de 24 heures ou photopériode
contrôle la croissance et la floraison des plantes mais aussi l'ensemble
du cycle vital des espèces animales. Il faut cependant noter que le
rayonnement solaire est aussi dangereux pour les êtres vivants à
cause des radiations ultraviolettes qu'il contient. La lumière par son
intensité et ses fluctuations annuelles constituent un facteur limitant
pour les végétaux. A faible, comme à fort
éclairement, la photosynthèse est inhibée.
L'intensité locale du flux lumineux varie selon la
latitude et la saison. Au moment des solstices d'été, la
quantité d'énergie lumineuse reçue est à peu
près égale entre 20° et 80° latitude Nord. Les flux les
plus intenses sont relevés au moment des solstices d'été
dans les zones à climat méditerranéen chaud et où
ils peuvent approcher 120.000 lux. Cela provient de la grande transparence
atmosphérique propre à ces régions, alors que dans les
zones intertropicales, la forte humidité atmosphérique absorbe
une fraction très importante du rayonnement direct de sorte que les flux
y sont moins intenses.
2.1.1.1. Adaptation des végétaux
à l'éclairement
En fonction de l'intensité lumineuse pour laquelle
l'activité photosynthétique est maximale, on peut distinguer deux
sortes de plantes : les héliophytes et les
sciaphytes.
Les héliophytes ou plantes de lumière
sont des végétaux dont la croissance est maximale sous des forts
éclairements et qui ne tolèrent pas l'ombre d'autres individus.
Les plantes cultivées en général et les arbres des
forêts claires sont des héliophytes.
Les sciaphytes ou plantes d'ombre sont des
végétaux dont la croissance nécessite une ombre forte ou
très dense. C'est le cas des végétaux du sous-bois
(fougères, mousses) et les jeunes stades de la plupart des
espèces d'arbres de forêts. C'est dans le milieu aquatique que
l'on rencontre les plus sciaphyles des végétaux. Leur
activité photosynthétique est optimale sous une cinquantaine de
lux (unité de l'intensité de la lumière). Le degré
de sciaphilie ou d'héliophilie d'une espèce
végétale peut varier au cours de son cycle vital. Pour des
nombreuses espèces d'arbres, le stade jeune est sciaphile alors que le
stade adulte est héliophile.
2.1.1.2. La photopériode
Le terme photopériode est utilisé en physiologie
végétale pour désigner la durée de la phase
d'éclairement au cours d'un cycle de 24 heures. La photopériode
joue un rôle dans l'écologie des êtres vivants. On distingue
la photopériode courte caractérisée par la
prédominance de la phase obscure (ou scotophase) et la
photopériode longue pour la quelle la photophase ou phase
d'éclairement est plus longue que la scotophase.
2.1.1.2.1. La Photopériode et les
végétaux
Les plantes sont adaptées non seulement à
l'intensité lumineuse mais aussi à la photopériode. La
longueur des jours et des nuits varie au cours de l'année pour tous les
points du globe sauf à l'Equateur où il y a 12 h
d'éclairement et 12 h de nuit et aux équinoxes où les
durées des jours et de nuits sont les mêmes partout sur la
planète quelles que soient les localités
considérées.
L'adaptation des plantes à cette photopériode
(photopériodisme) est importante lorsque les plantes passent du stade
végétatif (croissance, développement) au stade reproductif
(floraison, formation des tubercules). En d'autres termes, la
photopériode joue un rôle essentiel dans la nature car elle
contrôle la germination des végétaux, leur croissance et
leur floraison. La floraison représente un des aspects les plus
spectaculaires du photopériodisme. Si on considère l'influence de
la photopériode sur les végétaux on peut
distinguer :
- les plantes des jours courts (plantes
nyctipériodiques)
Ce sont des végétaux dont la floraison
nécessite que la scotophase soit prédominante. Dans le
cas où la scotophase est de courte durée les bourgeons floraux ne
s'ouvrent pas. Ils restent en dormance jusqu'à ce que la
photopériode devienne satisfaisante. C'est le cas du blé d'hiver,
des certaines variétés de soja et des plantes tropicales comme la
canne à sucre. Une durée d'éclairement très longue
s'accompagne d'un gigantisme et de la suppression des fleurs. Les individus
restent alors stériles et il devient impossible de les multiplier par
leurs graines
- les plantes aux jours longs (plantes
héméropériodiques)
Ce sont des plantes qui exigent une photophase
prédominante. Il s'agit des céréales de printemps, de la
betterave, du céleri... Un éclairement insuffisant (moins de 12
heures) inhibe la floraison de ces plantes. Elles restent alors petites et ne
fleurissent pas.
- les plantes photoapériodiques :
Pour celles-ci, la floraison n'est pas influencée par
la photopériode.
2.1.1.2.2. La Photopériode et les
animaux
La photopériode joue également un rôle
très important dans l'écologie des animaux. Elle induit chez les
animaux des rythmes biologiques, journaliers ou saisonniers. Le plus
répandu est le rythme circadien qui correspond à une
périodicité de 24 heures et dont le contrôle est
assuré par la photopériode. Chez les vertébrés, par
exemple, l'activité journalière, l'alimentation et le repos
nocturne ou diurne et la ponte sont contrôlés par la
photopériode.
L'espèce humaine n'échappe pas à cette
influence de l'éclairement sur ses activités
écophysiologiques. Ceux qui effectuent des voyages aériens
intercontinentaux témoignent que notre organisme dans ses
activités digestives et son rythme veuille sommeil est sensible à
l'allongement ou au raccourcissement de la durée d'éclairement
provoqué par le décalage horaire. Si un jet volant à 1000
Km/h, en moyenne latitude, suit le soleil dans son déplacement et s'il
navigue d'Est en Ouest de sorte que l'heure d'arrivée soit égale
ou proche de l'heure de décollage, le voyageur ne voit pas le soleil se
coucher. Pour lui la journée peut durer même plus de 24 heures
selon son itinéraire sans qu'il ait envie de dormir. Un autre exemple
est celui de l'émigration verticale du zooplancton. Chez les arthropodes
terrestres (Insectes), on observe également une cessation
d'activités à diverses phases du cycle vital pendant la mauvaise
saison. Cet arrêt de développement appelé
diapause, est aussi conditionné par la photopériode.
2.1.2. La température
2..1.2.1. Les plantes et la
température
La température représente un facteur limitant de
toute première importance, car elle contrôle l'ensemble des
phénomènes métaboliques et conditionne la
répartition des espèces dans la biosphère. Sans chaleur,
le développement des plantes est impossible. A très basse
température, les échanges entre le sol et les plantes sont
impossibles et les fonctions physiologiques principales sont bloquées ou
fortement ralenties. L'assimilation chlorophyllienne ou photosynthèse et
la respiration sont très réduites ou annulées. Pour chaque
plante, on peut déterminer une température optimale qui convient
au développement et à la croissance en un moment donné et
qui se trouve à l'intérieur d'un intervalle de tolérance
plus ou moins grand. Les plantes qui supportent un large écart de
température sont dites eurythermes, celles qui ne supportent
pas de fortes variations de température tel que l'hévéa
brésilien (Hevea brasiliensis) sont des
sténothermes.
2.1.2.2. Action des températures
extrêmes sur les végétaux
Dans les régions tempérées, le froid est
nécessaire aux plantes pour que les fonctions vitales s'accomplissent,
en particulier lors du passage de l'état végétatif
à l'état de reproduction. Le froid supprime la dormance des
bourgeons formés en automne. Il induit la vernalisation
(processus préparatoire de la mise en fleur). Le pêcher exige pour
fleurir au printemps des froids intenses pendant l'hiver allant jusqu à
- 7degré Celsius.
Les températures extrêmes peuvent être
létales pour les plantes, mais avant que ces températures ne
soient atteintes, les végétaux réagissent ou s'adaptent
pour en limiter les dégâts.
Le cactus géant résiste à des
températures de 8,3°c pendant 19 heures. Si cette
température se maintient pendant 29 heures, la plante meurt. Ces
conditions thermiques sont d'autant plus difficiles à supporter qu'il
s'y ajoute d'autres facteurs écologiques. En haute montagne, par
exemple, les basses températures vont de paire avec un vent violent. Le
degré d'adaptation au froid augmente chez les végétaux
lorsqu'on passe des zones tempérées chaudes à des
latitudes de plus à plus septentrionales. Dans les régions
désertiques tropicales, les hautes températures sont
fréquentes et les amplitudes thermiques diurnes sont
élevées.
Pour limiter les effets néfastes de changements
thermiques on observe diverses adaptations chez les végétaux. Si
par exemple la température s'élève, la transpiration
augmente, ce qui occasionne un abaissement de la température à la
surface du tissu où se produit l'évaporation. Si la
température est très basse, la situation peut devenir dangereuse
surtout s'il se forme des cristaux de glace dans les tissus.
Le principe du chimiste français, Le Chatelier
s'applique aussi aux êtres vivants et s'énonce en ces termes
: « Toute intensification d'un facteur extérieur tend
à accroître la résistance de l'organisme à ce
facteur. »
Toutefois le facteur ne doit pas être brusque car les
adaptations ne s'acquièrent que progressivement. Le maximum de
résistance aux basses températures est l'effet des organes de
durée c'est à dire les graines, les bulbes, les rhizomes, les
tubercules, les bourgeons et les spores.
Il y a une corrélation directe entre la
résistance d'un organe végétal au froid et son
degré de déshydratation c'est à dire plus un organe
à moins d'eau plus sa résistance au froid est grande. C'est
pourquoi les jeunes pousses et les organes végétatifs riches en
eau supportent mal l'action du froid et gèlent
généralement à des températures comprises entre 0
et - 5°C. La plupart des espèces tropicales meurent aux voisinages
de 0°C et certaines d'entre elles gèlent même à la
température de l'ordre de 3°C.
Les plantes les plus résistantes aux hautes
températures sont celles des déserts subtropicaux. La
résistance maximale des plantes à la chaleur est le fait de
Cactées et les autres végétaux xérophiles (de
milieux secs) qui peuvent supporter jusqu'à 65°C.
Les Procaryotes (bactéries) supportent aussi les hautes
températures à cause de l'absence dans leurs cellules de la
membrane nucléaire et du fuseau mitotique qui sont de parties
thermolabiles.
2.1.2.4. Action de température sur les
animaux
Chez les animaux, la température agit sur le
métabolisme et l'activité vitale, la quantité d'aliments
consommés, la fécondité et l'activité sexuelle. Si
au considère la température on peut subdiviser les animaux en
espèces homéothermes et poïkilothermes.
Les homéothermes se caractérisent par une température
interne constante et indépendante de celle du milieu ambiant. Les
poïkilothermes ou hétérothermes, par contre, ont une
température interne variable. Ils peuvent être repartis en
organismes héliothermes, qui pour adapter leur
température interne basse s'étalent au soleil et en organismes
chimiothermes qui effectuent souvent beaucoup de mouvements pour
relever leur température corporelle. Les animaux meurent plus rapidement
par la chaleur que par le froid. Avant de mourir, ils passent par une
période presque inactive dite de torpeur.
2.1.2.5. Les animaux et
les températures extrêmes
Les animaux présentent aussi des adaptations aux
températures extrêmes.
1° Règle d'Allen
Chez les Mammifères des régions froides, on
observe une réduction importante des appendices (oreilles, cou, pattes,
queue) au fur et à mesure qu'on approche les pôles. Ce constat
appelé règle d'Allen traduit une forme d'adaptation des
espèces animales au froid. L'exemple classique montre que la taille des
oreilles des Renards diminue fortement des déserts subtropicaux aux
régions polaires. Le Renard de l'ancien monde ou fennec (Vulpes
zerda), vivant dans le désert chaud d'Afrique, a de très
grandes oreilles alors que le Renard roux d'Europe ou des régions
tempérées (Vulpes vulpes) a des oreilles très
petites. Le Renard arctique ou polaire (Alopex lagopus) quant à
lui, a des oreilles minuscules et un museau court. Le Renard polaire
réduit les pertes des chaleurs au niveau de ses oreilles minuscules
tandis que le fennec les favorise, le premier pour résister au froid, le
second, pour résister à la chaleur.
2° Règle de Bergmann
D'après cette loi, on observe au sein d'un ensemble des
vertébrés homéothermes appartenant à un groupe
systématique proche, un accroissement de la taille et de la masse
corporelle des espèces en fonction de la latitude. D'après cette
loi les espèces les plus petites se trouvent des tropiques et les plus
grandes à proximité des zones polaires. Cette observation
appelée loi de BERGMANN traduit aussi une forme d'adaptation des
espèces au froid. Les pertes des chaleurs sont liées à la
surface corporelle de l'animal or cette dernière est inversement
proportionnelle à la taille. Il s'ensuit une meilleure
résistance au froid des espèces les plus grosses. L'exemple est
donné par "les manchots". La plus petite espèce, le manchot de
Galopagos vit au niveau de l'Equateur. La plus grande, le manchot Empereur,
habite l'Antarctique.
3° La modification de la fourrure
Chez les mammifères des régions froides, la
fourrure est plus épaisse qu'en climat chaud. Son épaisseur
augmente avec la taille de l'animal.
Les espèces des régions tempérées
pour éviter la forte perte de la chaleur ont aussi pour la plupart des
robes sombres.
4° Le développement d'une couche
épaisse de graisse
Les animaux qui vivent dans les milieux froids ont tendance de
développer une grande couche de graisse autour du corps. C'est le cas de
la Baleine bleue qui vit dans les eaux froides et dont l'épaisseur de la
couche de graisse peut atteindre 1 mètre.
5° Adaptations éthologiques
Il a été constaté que pour éviter
les températures extrêmes certains animaux prennent l'habitude de
se cacher sous l'ombre ou dans des terriers pendant les heures chaudes ou
encore d'adopter des moeurs nocturnes.
6° Adaptations physiologiques
Parmi les adaptations physiologiques, on peut
citer celles qui sont liées au métabolisme. Quand la
température ambiante baisse le métabolisme de base
s'élève. Les animaux luttent souvent contre les hautes
températures par la réduction du métabolisme et par
l'augmentation des pertes de chaleurs grâce à la vasodilatation
périphérique et à la transpiration cutanée.
En effet, l'évaporation de la sueur se trouvant sur un
organisme animal permet d'abaisser la température corporelle. De
même plus la surface des vaisseaux augmente plus la perte de chaleur
excédentaire est favorisée.
Les Chéiroptères, les Rongeurs, les Insectivores
et quelques Carnivores terrestres entrent pendant la période froide
(hiver) dans un état de vie ralentie pour éviter la perte de
chaleur ; on parle alors de l'hibernation. Une situation
similaire appelée "estivation" s'observe aussi lorsqu'il y a
hausse de la température pendant l'été. L'hibernation et
l'estivation sont des phénomènes de quiescence. La
quiescence est une interruption momentanée du
développement ou d'activité observée chez certains animaux
dans le but de lutter contre soit un froid intense soit une forte chaleur ou
une période de sécheresse très marquée. Elle
diffère de la diapause, un arrêt qui apparaît
obligatoirement dans le cycle de vie de certaines espèces
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