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Les impacts des incitations monétaires sur l'effort des salariés: positifs ou négatifs?

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par Pheakdey VIN
Université Lumière Lyon 2 - Master 2 Recherche 2007
  

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Introduction au chapitre IV

Comme la théorie de l'évaluation cognitive a précédemment indiqué, les incitations monétaires nuisent à la motivation intrinsèque et donc à l'effort des salariés lorsqu'elles sont perçues par ces derniers comme un moyen de contrôle, c'est-à-dire qu'elles ne satisfont pas les besoins psychologiques des salariés tels que le besoin de compétence et le besoin d'autonomie ou d'autodétermination dans une exécution des tâches intrinsèquement intéressantes. Au contraire, si elles ne sont pas perçues comme un moyen de contrôle, non seulement elles ne nuisent pas à la motivation intrinsèque, mais aussi elles la favorisent. Depuis longtemps, il y a une controverse entre les points de vue des psychologues et des économistes au sujet des effets des incitations monétaires sur le comportement des salariés au sein de la firme. Les approches économiques standard des incitations généralement assument que les incitations monétaires comme les récompenses contingentes à la performance peuvent augmenter l'effort des salariés et donc leur performance alors que les études des psychologues montent que ces incitations peuvent conduire à la réduction d'effort des salariés, en particulier dans les activités intrinsèquement motivantes. Même s'il y a ces points de vue contradictoires, les études d'expériences récentes des économistes partagent également le point de vue des psychologues qui estiment que les incitations monétaires évincent la motivation intrinsèque, et donc l'effort des salariés.

Dans la section 1 du chapitre, nous allons montrer les études expérimentales et empiriques des psychologues et des économistes, ainsi que le modèle principal-agent étudiant la motivation intrinsèque, pour constituer le support de l'effet d'éviction de la motivation intrinsèque par les incitations monétaires. Cependant, les travaux récents sur la motivation intrinsèque indiquent que la dichotomie traditionnelle entre la motivation intrinsèque et extrinsèque semble moins évidente - les récompenses extrinsèques ne sont pas nécessairement nuisibles, mais peuvent plutôt jouer un rôle complémentaire à la motivation intrinsèque parce que ces récompenses peuvent être internalisées et intégrées par les salariés. Dans la section 2, nous allons donc exposer la nouvelle perspective de l'interaction entre la motivation intrinsèque et les récompenses extrinsèques en général ou les récompenses monétaires en particulier dans le cadre théorique psychologique de l'autodétermination - nous étudierons comment et dans quelles conditions les salariés internalisent et intègrent leur motivation extrinsèque et puis nous réexaminerons les effets des récompenses monétaires.

Section 1 : Les incitations monétaires sont nuisibles à la motivation intrinsèque et à l'effort

Dans cette section, nous allons présenter non seulement les évidences expérimentales réalisées par les psychologues, mais également par les économistes, ainsi qu'un modèle économique, pour supporter l'effet d'éviction de la motivation intrinsèque et de l'effort par les incitations extrinsèques, spécifiquement les incitations monétaires.

1- L'effet d'éviction de la motivation intrinsèque

L'argument que nous évoquons ici considère que les incitations monétaires peuvent réduire la motivation intrinsèque à accomplir une activité [Deci et Ryan, 1985; Kreps, 1997], et donc nuire à l'effort. A partir de l'explication dans la section 2 du chapitre précédent, l'idée sous-jacente est que la motivation intrinsèque et la motivation extrinsèque sont chacun source d'effort mais que leur introduction simultanée est contreproductive, les incitations monétaires - et les incitations extrinsèques en général - exerçant un effet d'éviction (Crowding out effect) à l'encontre de la motivation intrinsèque [Deci et al., 1999a]. De plus, en psychologie expérimentale, l'effet négatif des récompenses monétaires sur la motivation intrinsèque est connu sous le vocable de coûts dissimulés ou coûts cachés de la récompense (Hidden cost of rewards).

Selon la théorie de l'évaluation cognitive [Deci et Ryan, 1985] précédemment étudiée, les incitations monétaires sont susceptibles de démotiver l'individu si elles sont perçues comme un moyen de contrôle puisqu'elles affectent alors négativement le besoin d'autonomie et le sentiment de compétence des salariés. Le sens de l'autodétermination des agents peut être altéré lorsque l'intervention des incitations monétaires est perçue comme une restriction de leur autonomie. De même, si cette intervention se traduit par un renforcement du contrôle, elle sera perçue comme une non reconnaissance de leur compétence et donc les incitations monétaires évincent la motivation intrinsèque des individus. En outre, le contrôle subi dans les entreprises sous la forme d'incitations financières est vécu par les salariés comme aliénant et déshumanisant [Etchart-Vincent, 2006]. Le modèle principal-agent84(*) proposé par James Jr. [2005] établit ainsi que la motivation intrinsèque est évincée par la rémunération extrinsèque lorsque cette dernière est perçue par l'agent comme un moyen de contrôle dans son activité.

Une autre approche intéressante est celle liée à la théorie de l'auto-perception (Self-perception). Les individus parfois ne connaissent pas parfaitement les raisons de leurs comportements, plus précisément dans quelle mesure les caractéristiques inhérentes à la tâche (motivation intrinsèque) déterminent leurs comportements [Fehr et Falk, 2002; Sliwka, 2003; Moussaoui, 2004]. Par conséquent, ils vont inférer les motifs de leurs comportements à partir des circonstances qui ont conduit à l'accomplissement de la tâche. Selon cette théorie, les individus ont tendance à attribuer les motifs de leurs actions aux stimuli les plus dominants. En l'absence d'incitations externes, notamment d'incitations monétaires, les individus attribueront leurs raisons d'agir aux caractéristiques inhérentes à la tâche. Si des incitations monétaires sont mises en oeuvre pour une activité, alors un individu conclut qu'il exécute cette activité en raison de ces incitations, en développant une désutilité de l'effort [Kreps, 1997; James Jr., 2005]. Ceci correspond à l'économie standard de motivation qui confirme que seules les incitations externes de type monétaire sont mises en avant, ce qui pousse les agents à croire que la raison d'accomplir une tâche revient à ce type d'incitation. Ainsi, la conception de la motivation de la personne pour le travail se trouve également modifiée. Par contre, si les incitations externes sont réduites ou arrêtées, les agents cesseront d'accomplir la tâche en question puisque la source commanditaire de l'action s'est déplacée de l'intérieur à l'extérieur.

Cependant, cet effet d'éviction n'est pas automatique [Moussaoui, 2004; Osterloh et Frey, 1999]. En effet, chaque intervention des incitations monétaires comporte deux aspects pour les individus : (i) l'aspect contrôleur qui renforce l'impression du contrôle externe et le sentiment d'être dirigé de l'extérieur ; (ii) l'aspect informateur sur l'appréciation par les autres, de leur compétence et leur performance, ce qui renforce leur sens de contrôle interne. Suivant que le premier aspect est dominant ou le second aspect qu'il l'est, la motivation intrinsèque est évincée ou renforcée.

Les résultats de méta-analyse de 128 expériences de Deci et al. [1999a; 1999b] indiquent que les récompenses tangibles tendent à avoir un effet essentiellement négatif sur la motivation intrinsèque. Même lorsque des récompenses tangibles sont offertes comme indicateurs de bonne performance, elles diminuent typiquement la motivation intrinsèque pour des activités intéressantes. En outre, quand les organisations optent pour l'utilisation des récompenses pour contrôler le comportement, les récompenses sont susceptibles d'être accompagnées par une plus grande surveillance, évaluation et compétition, qui se sont également avérées miner la motivation intrinsèque [Deci et Ryan, 1985]. Ce sapement est particulièrement vrai pour les compensations monétaires qui ont été perçues par les sujets d'expérience comme un moyen de contrôle et ont donc tendu à évincer la motivation intrinsèque [Osterloh et Frey, 1999]. Selon Deci et al. [1999a], l'effet d'éviction est plus fort avec les récompenses monétaires qu'avec les récompenses symboliques. Deci et al. [1999a] concluent également que l'effet d'éviction est également plus grand avec les récompenses attendues qu'avec les récompenses inattendues. De plus, pour eux, les récompenses inattendues et les récompenses non-contingentes à la tâche (Task-noncontingent rewards) n'ont pas un effet néfaste sur la motivation intrinsèque parce que les individus n'exécutent pas la tâche afin d'obtenir ces récompenses, ainsi ils ne se sentent pas contrôlés par ces récompenses. Ces auteurs indiquent également que les récompenses ne minent pas la motivation intrinsèque pour une activité qui n'est pas intrinsèquement motivante (c'est-à-dire, une tâche simple et inintéressante). Par conséquent, aucun effet d'éviction ne peut avoir lieu s'il n'y a aucune motivation intrinsèque en premier lieu [Osterloh et Frey, 1999]. Cette condition tient pour les tâches simples. Dans ce cas, selon ces auteurs, l'évidence empirique prouve que l'effet des prix augmente l'effort et la performance des individus. Lazear [2000] fournit un exemple empirique, dans une compagnie de pare-brise, que nous avons présenté dans la partie précédente ; les tâches d'installation de pare-brise sont considérées simples.

Bien que reconnue par les psychologues sociaux [Deci et Ryan, 1985], l'idée que « fournir des incitations extrinsèques pour des employés peut être contreproductif parce qu'il peut détruire la motivation intrinsèque de l'employé, ce qui conduit à diminuer le niveau d'effort et les bénéfices nets pour l'employeur » est juste un fait stylisé en économie85(*). Néanmoins, les économistes accumulent l'évidence pour cet effet, connu sous le nom de l'éviction de la motivation [Frey et Jegen, 2000]86(*). Ces auteurs ont expliqué l'effet d'éviction de la motivation intrinsèque des salariés par le graphique ci-dessous.

Figure 8: L'interaction entre l'effet d'éviction et l'effet du prix87(*)

Effort

Récompense

S'

S

A

A"

A'

B

C

R

O

Cette figure illustre la relation entre la récompense monétaire et l'effort des individus. La courbe (S) représente l'offre de l'effort du travail basé sur l'effet relatif des prix. Si une récompense (R) est payée pour effectuer le travail, l'effet des prix augmente l'effort du travail de A à A'. Lorsqu'une certaine motivation intrinsèque du travail est assumée exister, la quantité d'effort du travail (OA) est assurée même si aucune compensation monétaire n'est payée. Si la motivation intrinsèque du travail est minée, la courbe d'offre du travail est décalée vers l'arrière à S'. Ainsi, une augmentation de la récompense de O à R conduit à déplacer l'effort du travail de point B à C. La figure est dessinée de telle manière que l'effet de motivation domine l'effet des prix : l'augmentation de la récompense réduit l'effort du travail de A à A"88(*). Cependant, les auteurs ajoutent que quand la motivation intrinsèque a été complètement évincée, une augmentation de la récompense accroît l'effort du travail (mouvement le long de S').

Gneezy et Rustichini [2000] dans son étude expérimentale corroborent la relation présentée sur la figure 8 au dessus. Ils ont constaté que les incitations monétaires plus élevées induisent un plus grand effort, et puis un rendement élevé. Mais ce rendement ou performance peut être inférieur(e) par rapport au cas de la nulle compensation, en raison de l'introduction de la compensation monétaire. En conséquence, les auteurs ont considéré que des agents sont motivés par des facteurs extrinsèques et intrinsèques et que l'introduction des incitations monétaires sape la motivation intrinsèque. Fehr et Gächter [2002] ont rapporté les résultats semblables d'une expérience dans laquelle un principal a offert un contrat aux agents pour fournir l'effort en échange du paiement. Dans certains contrats, le principal a offert seulement les salaires fixes. Les résultats confirment que des contrats incitatifs évincent la réciprocité ou la coopération volontaire qui peut être considérée comme un type spécial de motivation intrinsèque, c'est-à-dire que les contrats incitatifs, en moyenne, ont obtenu des niveaux d'effort plus bas des agents par rapport aux contrats de salaire fixe. Ils ont montré que le groupe d'individus à qui l'on a proposé des contrats basés sur des incitations explicites a fourni moins d'effort que le groupe d'individus pour qui l'on fait appel à la norme de réciprocité pour les inciter à produire les efforts désirés. Ce qu'il faut souligner au passage c'est que, malgré le fait que le recours à des incitations monétaires engendre un surplus total plus faible que celui obtenu par les incitations basées sur la réciprocité, les « principal » préfèrent le premier mécanisme incitatif, puisqu'ils ont la possibilité de s'approprier la plus grande part du surplus. Fehr et Falk [2002] soulignent également l'existence de motivations sociales non monétaires, comme le désir de réciprocité ou celui d'éviter la désapprobation sociale et le désir de travailler dans les tâches intéressantes, qui sont puissamment incitatives en soi et peuvent être détruites par les incitations monétaires.

Gächter et Falk [2000] étudient expérimentalement les effets pervers des contrats incitatifs explicites sur la réciprocité. Leur résultat prouve que les contrats incitatifs ont évincé la réciprocité89(*) et ont mené à un degré élevé de comportement opportuniste des individus. Ils voient ceci comme une évidence que l'introduction des incitations pécuniaires dans un rapport réciproque supporte des coûts cachés dans le sens où elle peut affaiblir des incitations totales pour la provision d'effort.

D'après Freeman [1997], le travail volontaire est une illustration typique de la motivation intrinsèque dans le sens où les individus accomplissent des tâches pour leur intérêt et non pas pour une récompense monétaire. Frey et Goette [1999] ont essayé de tester l'hypothèse de l'effet d'éviction de la motivation intrinsèque en utilisant une approche économétrique. Ils utilisent un ensemble de données de Suisse pour évaluer comment les récompenses financières affectent l'effort des volontaires mis dans le travail volontaire. Leurs résultats montrent que, d'une part, la taille des incitations financières poussent les volontaires à fournir plus d'effort, et d'autre part, le fait d'être payé pour son volontariat baisse significativement le niveau d'effort fourni d'environ quatre heures en dessous de la moyenne. Par conséquent, les résultats de Frey et Goette sont en conformité avec l'évidence expérimentale en psychologie sociale, indiquant que les récompenses financières peuvent réduire la motivation intrinsèque et l'effort des individus pour une activité.

Une autre confirmation du désintérêt des employés pour une tâche lorsqu'elle est régulée par des incitations financières ou par du monitoring est le travail de Bewley [1995]. Celui-ci avait collecté 344 interviews avec 372 décideurs sur le marché du travail, car il y avait plus d'un répondant à certaines interviews. Cette interview a été faite de 1992 à 1994. Particulièrement, les praticiens semblent conscients des pièges possibles des arrangements de paiement à la performance. Ils se rendent compte que l'intervention externe via des incitations monétaires ne devrait pas être utilisée en tant que moyen de contrôle, car elle peut miner les réalités intrinsèques comme un moral ou la créativité du travail. Alors, Bewley ressort de cette étude que les employés ont plusieurs opportunités pour tricher et exploiter les employeurs. C'est pour cette raison qu'il ne faut pas compter uniquement sur les incitations financières et la coercition pour les motiver. Il faut faire appel à d'autres moyens en renforcement dont l'effet est complémentaire. Ainsi, il ne faut pas perdre de vue que la nature de la tâche accomplie par un employé procure de la satisfaction (estime de soi, autonomie, reconnaissance de sa compétence, etc.) en dehors du revenu qui lui est associé. Par conséquent, des employés qui ne se sentent pas reconnus, qui ne peuvent pas prendre des initiatives ne donneront pas le meilleur d'eux-mêmes, même si l'on augmente les incitations financières et/ou l'on renforce les contrôles.

L'effet d'éviction de la motivation intrinsèque par les incitations monétaires est aussi confirmé par le résultat dans l'expérience du laboratoire d'Irlenbusch et Sliwka [2005]. Ils conçoivent une expérience pour explorer une nouvelle explication possible sur la question : pourquoi les incitations extrinsèques peuvent évincer l'effort ? Ils se sont intéressés en particulier par l'influence que l'arrangement de rémunération à la pièce peut avoir sur la perception cognitive des agents de la situation. En comparant les niveaux d'effort dans leurs deux traitements, ils trouvent un effet d'éviction étonnamment clair, c'est-à-dire que l'effort s'avère être considérablement inférieur dans le traitement où les incitations explicites sont introduites. Les bénéfices et le bien-être sont également plus élevés dans le cas où seulement des salaires fixes sont introduits. En outre, l'effort moyen et l'efficacité globale sont sensiblement plus élevés sous des salaires purement fixes si les agents n'ont pas antérieurement éprouvé le salaire variable. En revanche, une fois que des salaires à la pièce ont été éprouvés, il peut mener à de plus mauvais résultats (effort des individus inférieur) bien que le système de compensation ait été changé en salaires fixes dans la deuxième période. Ainsi, l'utilisation des salaires à la pièce change considérablement la perception des agents de la situation et évince leur motivation intrinsèque.

Selon James Jr. [2005], la clef pour comprendre l'éviction de la motivation se conçoit par un modèle dans lequel l'utilité d'un agent reflète (a) soit des facteurs extrinsèques et intrinsèques si les récompenses extrinsèques ne sont pas perçues comme un moyen de contrôle, (b) soit des facteurs extrinsèques seulement si les récompenses extrinsèques sont perçues comme un moyen de contrôle. Il y a beaucoup d'évidences en psychologie et en économie soutenant cet effet d'éviction. Les récompenses extrinsèques peuvent être perçues comme un moyen de contrôle dans deux conditions. La première condition est quand la taille de la récompense est grande. L'évidence empirique suggère également que la taille de récompense est négativement liée à la motivation intrinsèque. La raison est que les processus par lesquels un agent rationalise son comportement peut devenir ainsi accablé par le « salience » des récompenses extrinsèques qu'il est rationnellement obligé d'attribuer son comportement à la compensation plutôt qu'à ses préférences intrinsèques. Cette idée a été également reconnue par Kreps [1997] qui a dit que lorsque l'individu entreprend une tâche sans être soutenu par des incitations monétaires, il rationalise l'effort mis en oeuvre, ce dernier étant perçu comme le reflet du plaisir trouvé dans l'accomplissement de la tâche - ce plaisir stimulant à son tour l'effort. Mais si les incitations extrinsèques sont mises en place, alors l'individu attribue son effort aux seules incitations et développe une désutilité de l'effort. En d'autres termes, selon Deci et al. [1999b], les grandes récompenses peuvent contraindre un agent à reconnaître que le locus de la causalité est externe plutôt qu'interne, et ce qui est perçu comme un moyen de contrôle. Ceci minera le besoin inhérent de l'agent de l'autonomie, et par conséquent, ne fournit aucune satisfaction intrinsèque pour s'engager dans le comportement contrôlé.

La deuxième condition est que l'objet de la motivation intrinsèque d'un agent est également la source des récompenses. Par exemple, si un agent est initialement intrinsèquement motivé à agir dans l'intérêt d'un principal qui paye également les salaires aux ouvriers, alors l'introduction des incitations par le principal pourrait être perçue par l'agent comme tentative de manipulation. Cette perception minera le besoin de l'agent de l'autonomie, ce qui entraîne un effet d'éviction de la motivation. Cependant, si l'agent est motivé par les normes généralisées comme « provide an honest day's work for an honest day's pay » qui par la nature sont externes aux intérêts plus étroits du principal, alors les incitations extrinsèques présentées par le principal ne pourrait pas être perçu comme un moyen de contrôle mais plutôt comme affirmation de la compétence. Ainsi, cela va supporter plutôt qu'évincer la motivation intrinsèque des agents.

Dans ce qui suit, nous allons montrer, en empruntant les travaux de James Jr. [2005], un simple modèle principal-agent dont l'objectif est de démontrer comment la taille de la compensation monétaire et l'objet sur lequel la motivation intrinsèque de l'agent est placée interagissent afin d'induire un agent, maximisant l'utilité comportant les éléments extrinsèques et intrinsèques, à se comporter comme si la motivation intrinsèque est évincée.

* 84 Nous allons démontrer ce type de modèle principal-agent qui est proposé par James Jr. [2005] dans la sous-section 2. Selon cet auteur, l'effet d'éviction se produira davantage lorsque les intérêts du principal et ceux de l'agent se confondent que lorsque l'agent est intrinsèquement motivé par des valeurs générales, distinctes du principal.

* 85 Kreps, D. M. [1997], « Intrinsic Motivation and Extrinsic Incentives », American Economic Review, vol. 87, n° 2, p. 360.

* 86 Frey et Jegen [2000] passe en revue les résultats des expériences psychologiques en perspective économique.

* 87 Frey, B. S. et Jegen, R. [2000], « Motivation Crowding Theory: A Survey of Empirical Evidence », Working Paper N° 49, Institute for Empirical Research in Economics, University of Zurich, p. 8.

* 88 Nous soulignons.

* 89 Dans leur contexte, ils se réfèrent à la réciprocité comme motivation intrinsèque parce qu'ils la voient comme une bonne volonté psychique innée de répondre en nature. Dans leurs expériences, la tâche expérimentale d'un choix d'effort peut être motivée par la motivation intrinsèque de la réciprocité bien que ce soit une tâche artificielle qui soit la plus susceptible de ne pas être exécutée par la satisfaction intrinsèque.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon