Connaissance, Développement, division internationale du travail. Quelle place pour les pays émergents? Le cas de la Chine et l'Inde( Télécharger le fichier original )par Erick ATANGANA Université Paris 1 Panthéon Sorbonne - Master Economie de l'industrie et des services 2006 |
1.1.2.2 La marginalisation des pays du Sud dans les investissements intensifs en connaissanceLa figure 1 (page 13) nous montre que plus de 70% du budget de la R&D est répartie entre les Etats-Unis, le Japon et l'Union Européenne. En somme, les phénomènes cités plus haut tels que : - La recherche de compétences spécifiques liée à la division cognitive du travail, basée non pas sur une logique technique, mais sur une logique d'acquisition de nouvelles connaissances ; - Les spécialisations Nord-Sud dans la segmentation internationale des processus productifs, qui positionnent les pays émergents dans la phase aval, non propice à l'acquisition et au développement de nouvelles technologies ; - Le phénomène de récupération des avantages comparatifs qui entraîne les relocalisations. Ces relocalisations qui quant à elles s'expliquent (dans le cas des secteurs intensifs en connaissance) par la nécessité de réagir efficacement et rapidement à la demande de plus en plus versatile et instable. L'instabilité de la demande est le résultat du changement du régime du cycle de l'innovation qui est passé d'un régime incrémental à un régime continu favorisant l'obsolescence rapide des connaissances ; Conduisent à une polarisation des activités au sein de la Triade. L'étude des flux des IDE permet de mieux appréhender ce phénomène. Selon l'AFII11(*), Les projets de R&D sont essentiellement originaires de firmes nord-américaines et dans une moindre mesure ouest-européennes, la part des investisseurs asiatiques étant par contre extrêmement réduite. Les firmes US représentent à elles seules 44,6 % des projets d'investissement. L'Europe de l'Ouest arrive en seconde position des régions d'origine. Trois pays se détachant nettement, les sociétés d'origine allemande, française et britannique représentent à elles seules 24,5 % des projets. Le rapport de la CNUCED (2006), présente, les fusions acquisitions des firmes transnationales des pays développés comme l'un des principaux stimuli de l'IDE. Un nombre croissant d'opération sont également le fait des fonds communs de placement. Elles ont augmenté de 88% entre 2004 et 2005. La plupart des multinationales ayant des actifs à l'étranger sont également issus des pays développés. Tableau 1. : les 25 premières multinationales non financières classées selon leurs actifs à l'étranger (en millions de dollars) Source : CNUCED/Université Erasmus, World Investment Report 2006, tableau A.I.11 de l'annexe, (www.unctad.org/fdistatistics) Les firmes américaines et Européennes forment le peloton de tête, on peut quand même remarquer la présence de la firme coréenne Hutchinson Whampoa en dix-septième position. Tableau 2. : entrées et sorties d'IDE dans les vingt premiers pays ou territoires entre 2004 et 2005 (milliards de dollars). Source : World investment report 2006, tableau B1. de l'annexe, et base de données sur les IED/STN (www.unctad.org/fdistatistics) Le tableau 2 montre qu'en ce qui concerne, les entrées d'IDE, un pays comme la Chine se retrouve en très bonne position dans le monde. Troisième après le Royaume-Uni et les Etats-Unis. Mais les sorties d'IDE sont l'apanage des grands pays industriels et la Chine est presque en dernière position. Les pays développés sont la principale source d'IDE, l'Union Européenne reste en tête, avec les Pays-Bas qui occupent la première place. Les entrées d'IDE dans les pays développés ont augmenté de 37% entre 2004 et 2005. La CNUCED (2006) les évalue à 544 milliards de dollars, soit environ 60% du total mondial. Sur ce chiffre, 78% sont allés à l'Union Européenne. Plus de 90% des IDE entrés dans les pays développés provenaient des pays développés. Mais les pays émergents semblent prendre de plus en plus d'ampleur dans ce mouvement puisqu'ils se situent aujourd'hui à 17% du total mondial. Si on se base essentiellement sur l'Europe en ce qui concerne les investissements en R&D, on observe que 80% (Tableau 4) des projets R&D sont issus des pays de la Triade, de même, la majeure partie des firmes contributives sont soit américaines, Japonaises ou Européennes (tableau 3). Même si les pays émergents présentent une certaine avancée, (0 à 5,6%), leur part dans les projets de R&D en Europe reste quand même minime. Tableau 3. Les principales multinationales investisseuse en R&D à l'étranger en Europe entre 2002 et 2005 Source : AFII 2006 : les investissements internationaux dans les centres r&d en Europe Tableau 4. : Répartition des projets de R&D selon la région d'origine entre 2002 et 2005 en Europe (%)
Source : AFII 2006 : les investissements internationaux dans les centres R&D en Europe L'internalisation de la R&D est un mouvement qui se fait encore pour l'essentiel à l'intérieur des pays de l'OCDE. Mais qui profite aussi, de manière croissante à une poignée de pays en développement d'Asie (Chine et Inde en tête) et d'Europe de l'Est. La part de l'Asie dans les dépenses de R&D à l'étranger des firmes US est ainsi passée de 3,4 à 10 % entre 1994 et 2002, tandis que celle de l'Europe déclinait de 69,6 % à 58,8 %. Le mouvement semble s'accélérer : entre 2002 et 2004, la moitié des projets internationaux de R&D dans le monde se serait ainsi localisée, selon la CNUCED (2005), dans les pays en développement. Au total dans cette section, nous avons essayé de développer un argumentaire qui pourrait permettre d'arriver à la conclusion selon laquelle il existe une polarisation des activités de R&D au sein de la Triade. Pour appuyer ce constat nous avons souligné précisément le rôle de la transition vers l'économie de la connaissance qui elle-même a permis le passage de la division technique du travail vers la division cognitive du travail. La division cognitive du travail est basée sur une logique d'acquisition et de créations de connaissances. Nous avons également spécifié la nature des spécialisations internationales dans la DIPP, qui en effet positionne plutôt les pays émergents dans les phases intensives en travail. C'est-à-dire en aval dans la chaîne de valeur. La forte intensité capitalistique des pays développés les amènent à se spécialiser sur des paquets technologiques. Et les pays émergents dotés d'une forte intensité en travail se situent plutôt au bout de la chaîne. C'est-à-dire dans la production des biens finals. Ce positionnement des pays en développement est plutôt un handicap dans leur processus d'acquisition et de développement des technologies (Lemoine et Unal-Kesenci 2002). Puisqu'il ne permet pas d'améliorer rapidement leur capacité technologique de sorte qu'ils puissent participer de manière active à l'économie de la connaissance. Cependant, il convient de préciser que ces analyses, malgré leur pertinence ne sont pas sans soulever un certain nombre de problèmes voire même de contradictions.
* 11 Agence Française pour les investissements Internationaux |
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