II. le dur apprentissage de la démocratie.
Une transition de près de deux ans (Fin 91-début
93) va aboutir à la mise en place de la troisième
république. Cette dernière est encore au stade de balbutiement
car les prérogatives même de l'Etat restent encore floues.
37 « Madagascar ne baissera jamais les bras ! »
38 In « Stratégie pour l'an 2000 : du Tiers-monde
à la troisième puissance mondiale. »
A. Une constitution plus libérale.
1) Le parlementarisme comme
institution.
La nouvelle constitution a été approuvée
par le peuple sans que personne ne sache exactement vers quelle « nouvelle
aventure », Madagascar s'est engagé. Une nouvelle période
est en marche. Une période durant laquelle les Malgaches semblaient
avoir repris le goût d'espérer en une nouvelle ère de
prospérité. Cela se traduisait par des enthousiasmes
spontanés qui est contagieux : l'élan pour l'aide aux
sinistrés du Sud durant la famine des années 90 en est un bel
exemple ; on se donne la main pour aller de l'avant.
D'ailleurs, les nouveaux maîtres des céans ne
tarissent pas d'éloge envers le « nouveau-né. »
ANDRIAMANJATO Richard disait que c'était « une belle
constitution que beaucoup de Pays nous enviaient... » lors d'un des
entretiens qu'il avait accordé à la presse durant son mandat de
Président de l'Assemblée Nationale (AN) de la toute nouvelle
république. Mais cet état de grâce n'était que de
façade car en réalité, l'Etat malgache était
ingouvernable : « Trop de liberté tue la liberté » ; et
c'est d'autant plus vraie que, pour un Pays qui vient de sortir d'une longue
période de sevrage intellectuel, la Grande-île semble être
retombée dans un de ses travers, la précipitation.
La troisième république, due sans doute au
traumatisme des ères précédentes, a voulu limiter le
pouvoir entre les mains d'un seul homme. Pour ce faire, le parlementarisme a
été érigé en institution rendant le Chef de l'Etat
presque spectateur des actions du gouvernement. Ce dernier étant
désigné par les membres de l'assemblée. C'est une
situation assez paradoxe du fait même que le pouvoir passe entre les
mains d'une personne désignée (le Premier- ministre.) Alors que
la personne élue, en l'occurrence le Président de la
république n'a que très peu d'influence sur la cour des affaires
nationales. La limite de ce parlementarisme poussé est
révélée par ce que son illustre
président39 qualifie de « géométrie
variable. » Aucun groupe parlementaire n'est stable et les
députés changent d'opinion au gré des situations...
2) L'utopie du
régime parlementaire
: un exécutif
tiraillé.
M. ZAFY était le nouveau président de la
république élu au suffrage universel direct au mois de mars 1993.
Son pouvoir était pourtant restreint par un système
privilégiant le parlementarisme. Cet état de fait mettait le Chef
de l'Etat en concurrence direct avec le Chef du gouvernement. C'était
une faille dans la nouvelle constitution qui a suscité bien des remous
dans les décisions prises par le pouvoir exécutif.
Le point de vue des deux chefs de l'exécutif
divergeaient la plupart du temps. Leur lutte se faisait sur fond d'ambition
personnelle... Le chef du gouvernement préconisait la droite ligne
fixée par le FMI et la PAS tandis que le Président de la
république cherchait à s'extraire de ce cycle infernal en faisant
appel à des investisseurs étrangers.
a. Le flottement du Fmg : Une décision politique
courageuse.
Au tout début de la PAS (année 80 - début
90), le Fmg a été dévalué. C'était l'Etat
qui prenait des mesures afin de garantir la convertibilité de la monnaie
malgache. Pourtant en avril 1994, le gouvernement de M. RAVONY a
décidé de faire flotter le Fmg : c'est le Marché
Inter-bancaire de Devise (MID) qui va déterminer le prix du Fmg. L'Etat
n'interviendra plus. C'était l'expression pleine de la
libéralisation.
C'était une politique risquée car Madagascar
venait de sortir d'une assez longue période de crise. Les Malgaches
n'ont pourtant pas bronché conscients certainement que la réforme
devait passer par des sacrifices. Il faut pourtant noter que cette
démarche avait eu des répercussions sur le portefeuille des
ménages malgaches. Le prix des denrées ont augmenté
dû à l'inflation. Le semblant de stabilité perçu
à la fin des années 80 a tout d'un coup fait place à une
dure réalité : les Malgaches sont pauvres et de grands chemins
restent à parcourir avant de s'en sortir...
b. L'affaire des financements parallèles : Une
situation de crise.
en grande partie responsable de la paupérisation de la
population malgache. Cette population, il avait commencé à le
comprendre durant ses longues pérégrinations à travers
l'île : les fameux « Mada-raid ».
Les financements parallèles n'avaient pas eu les
résultats escomptés. Au contraire, ils n'ont fait qu'aggraver la
situation. Madagascar avait négocié des emprunts à des
taux d'intérêt exorbitants (encore une idée que l'histoire
a déjà démontré les limites...) qui ont fait
décoller sa dette extérieure (cf. graphe 3). De plus, certains
parmi les partenaires approchés par l'Etat malgache se sont
révélés être de « grands escrocs
internationaux. » Une situation qui n'a fait que ternir l'image de la
société malgache en voie de démocratisation et en
quête de reconnaissance sur le plan international.
3J Vers
le retour à un
régime de type
présidentiel
modéré.
Le premier amendement de la constitution de la
troisième république a été avalisé par
referendum sous l'impulsion du Président ZAFY. Il a voulu reprendre en
main la nomination du Premier-ministre afin d'avoir un peu plus d'influence sur
ce poste et par conséquent de faire avaliser sa politique. Son coup de
force est passé bien qu'on ait enregistré un taux d'abstention
élevé de la part des électeurs. Désormais, le
Président pouvait peser de tout son poids sur les décisions que
le gouvernement va prendre.
De ce fait, le pouvoir de l'AN a été quelque peu
émoussé. Elle n'émet plus que des propositions quant
à la nomination du futur premier-ministre. Malgré tout, il faut
savoir que l'AN pèse encore de tout son poids sur l'adoption du budget
de fonctionnement de l'Etat. Cette réforme est toujours en vigueur
aujourd'hui. Cette nouvelle organisation est représentée par
l'organigramme ci-après.
85
Fonction juridictionnelle
Haute Cour Constitutionnelle Nomination (6ans)
Pouvoir legislatif
Pouvoir exécutif
Chef du Gouvernement
Gouvernement
Sénat Suffrage au second degré pour les 2/3
(6ans)
Parlement Suffrage universel direct (4ans)
Président de la République Suffrage universel
direct (5ans)
Organigramme 5 : Représentation de l'organisation des
principaux pouvoirs à Madagascar durant la
troisième république.
Par ailleurs, le Parlement s'attaquait aussi à une
grande réforme de l'administration du territoire. Suivant ce qui a
été inscrit dans la constitution, le découpage territorial
a changé et c'est à l'AN de déterminer sa mise en place.
De grands débats s'y raccordent car la décentralisation est
devenue un point essentiel dans la construction du nouveau régime. On
peut dire même que c'est sa pierre angulaire...
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