B. Les mesures d'accompagnement.
Ces dispositions ne seraient s'il n'y a pas des mesures prises
pour faciliter leur mise en oeuvre. Ces conceptions sont des bases sur
lesquelles vont s'appuyer des réformes en profondeur de la mise en
valeur du monde rural malgache.
1)
L'obligation de
résultat.
Les terres sont une denrée rare qu'il faille
ménager. Son appropriation ne signifie nullement qu'on peut en faire
tout ce dont on voudrait. L'Etat exige que des résultats soient
tangibles. Les paysans ont l'obligation d'aménager sa parcelle. Le
non-suivi de cette règle peut conduire au retrait de la parcelle au
profit d'autrui. Dans les zones de grands aménagements, comme Marovoay
ou Alaotra, l'Etat peut dicter le type de mise en valeur que chaque
propriétaire doit suivre.
Il faut cependant noter que les terres peuvent être
transmises de génération en génération si
l'héritier s'engage à travailler la terre. Mais il lui est
interdit de le vendre ou de l'affermer. Cette disposition est prise pour
empêcher l'apparition d'une « bourgeoisie paysanne. »
2) La mise en place de la
coopérative.
Cette disposition a été prise suivant le
modèle des pays communistes qui ont mis en commun leurs moyens de
production. La collectivisation a pour but d'alléger les coûts
d'exploitation. La mise en commun des efforts peut en effet induire une
dynamique qui influera sur les résultats de la production. Parmi ces
coopératives, on peut citer la COOPAREMA qui est une émanation de
la préséance de l'AREMA dans les différentes actions
accomplies jusque là. Son étude aurait
été grandement un plus, malheureusement, les archives y
afférentes sont introuvables.
D'autres dispositions ont été aussi prises pour
faciliter la mutation du paysage agraire malgache. C'est ainsi qu'il y a eu la
création de la BTM, une banque qui saurait aider et conseiller les
paysans dans leur investissement. La réforme agraire démontre une
volonté certaine du pouvoir de faire évoluer l'espace rurale
malgache. Le tissu industriel n'était pas pour autant
délaissé ; au contraire, l'AREMA voulait « frapper un grand
coup » en mettant en place une politique ambitieuse : l'investissement
à outrance.
III. L'investissement à outrance : Un échec
patent.
Vers la fin des années 1970, en 1977 plus
précisément, Madagascar semblait avoir atteint un certain
équilibre dans ses balances commerciales. Cela est dû notamment
à un concours de circonstance favorable : La Grande-île a pu
écouler, sur le marché international, son café avec des
bénéfices, le Brésil ayant été touché
par une vague de froid qui a hypothéqué ses récoltes.
A. Un souci de
rééquilibrage de la
présence sur le
territoire
national ( cf.
fig.12).
L'Etat malgache est présent sur tout le territoire
malgache. Cette présence se manifeste à travers les
sociétés publiques ou fermes d'Etat qui ont été
érigées dans toute l'île. Cette situation est voulue car la
nouvelle approche édictée par la charte veuille que les actions
soient décentralisées. L'Etat dans cette démarche se
propose de venir auprès de la population pour leur apporter son soutien.
C'est une nouvelle politique qui tranche avec celle en vigueur sous la
première république.
L'AREMA a toujours eu comme souci le
rééquilibrage de la présence des activités
initiées par le gouvernement sur le territoire national. Cette politique
ne diffère en rien à celle préconisée par le PSD.
Au contraire, elle a renforcé celle de l'ancien parti tenant du
pouvoir.
La différence réside dans l'approche : le PSD
est considéré comme beaucoup plus capitaliste qui ne se soucie
guère plus que de l'intérêt économique de ses
activités ; l'AREMA par contre a une approche plus sociale de ses
projets. Le parti de M. RATSIRAKA pense ainsi avoir un plus grand poids
auprès de la population.
Figure 12 : Répartition des sociétés
contrôlées par l'Etat en terme de pourcentage sur le
territoire. Source : Archive BNI-CL
Figure 13 : Représentation graphique de la
répartition des sociétés publiques à
Madagascar. Source : Archive BNI-CL.
Certes, cette prise de position avait permis de créer
(ou de s'approprier via la nationalisation) des sociétés à
travers la grande-île, mais la politique de rééquilibrage
des investissements au niveau des Faritany n'avait pas que des avantages. Elle
avait poussé l'Etat malgache dans une course effrénée vers
l'investissement à outrance qui la plupart du temps était
mal-calculé.
B. Les investissements à outrance et
les sociétés
nationalisées (cf.
fig.13).
L'ancien régime a été critiqué
pour ses prises de position trop timorée dans les investissements. Du
fait de la conjoncture en bonne voie, notamment avec les devises
apportées par la vente du café, l'Etat malgache pensait que le
moment était venu de franchir le cap et de faire de grands
investissements. Cette politique a permis l'acquisition de nouveaux moyens de
transport (les fameux Ikarus venus de l'Europe de l'Est) et de labour (1.000
tracteurs venus d'URSS) - le développement de nouvelles infrastructures
- la construction de nouveaux centres universitaires dans les Faritany etc.
C'étaient de grands projets forts louables qui devaient porter ses
fruits à long terme.
La représentation graphique ci-dessus représente
une partie de ces investissements alliés aux sociétés
nationalisées de force. Elle permet de constater de visu la
prédominance dans les actions menées des industries ayant trait
avec le monde agricole. On peut citer entre autres la SIRAMA qui était
présente dans trois Faritany (Mahajanga, Toamasina, Antsiranana) et dont
le capital s'élève à 927.400.000Fmg - la KAFEMA
présente à Antsiranana et Fianarantsoa avec un capital de
26.260.000Fmg.
Mais l'industrie a été une grande
déconvenue de cette politique. Avec des usines surdimensionnées
ou mal-implantées, les techniciens ont confondu vitesse et
précipitation. Des complexes aux normes internationales ont ainsi vu le
jour sans pour autant fonctionner. Divers exemples sont à relever en ce
domaine :
· C'est le cas de l'Abattoir de Mahajanga situé
à l'entrée de la ville, sur la RN4. Ce grand ensemble dans les
années 80 n'avait que peu fonctionné. Vers la fin des
années 80, il a même été fermé. La seule
activité qui s'y faisait était le prêt de son groupe
électrogène à la JIRAMA dont la centrale thermique
n'arrivait pas à alimenter la ville en électricité avec de
fréquentes pannes dues au délestage...
· Les complexes de fabrication d'outillage agricole TOLY
ont aussi été un de ces exemples. Présents sur trois sites
avec un capital de 660.000.000Fmg, TOLY n'avait jamais fonctionné...
· Les usines LALASOA et la ZEREN (respectivement
pour la transformation du soja et la confection d'engrais) sont souvent
citées en exemple comme les usines n'ayant pas fonctionnées, mais
d'autres usines ont aussi vivoté comme le FAMAMA (Famokarana Mahabibo
Malagasy) à Mahajanga ou encore l'usine de construction de voiture
Karenjy à Fianarantsoa.
Tableau 4 : Liste exhaustive de quelques-unes des
sociétés nationalisées et/ou créées par
l'investissement à outrance. Source ; Archive BNI-CL/Min. de
l'industrialisation
Société Localisation Nombre Capital en
(Fmg) Activités
d'employés
AFM (Abattoir frigorifique de Mahajanga - -
Mahajanga)
ANM (Abattoir frigorifique de Morondava - -
Morondava)
COROI (Comptoir de commerce et de représentation pour
l'océan indien)
FAMAMA (Famokarana Mahabibo malagasy)
Nationale - - Importation de
marchandises - exportation de produits agricoles
Mahajanga - - Plantation et
transformation d'anacarde
FIARAFY Fianarantsoa 34 - Industrie automobile
HASYMA (Hasy malagasy) Toliara, Mahajanga 790 1.701.600.000
Collecte et transformation
du coton
JIRAMA (Jiro sy Rano Malagasy) Nationale 5.008 53.768.050.000
Entreprise de distribution
de l'électricité et de l'eau potable
KAFEMA (Kafe malagasy) Ambanja, Manakara 85 26.260.000 Industrie
caféière
LALASOA Antananarivo - - Transformation du soja en
lait de soja
LANSU (Langouste du Sud) Fort-Dauphin - - Pêche et
commercialisation de la langouste
MAMISOA Antsirabe - - Transformation du soja en
huile
SECREN (Société d'exploitation, de Antsiranana
1.108 2.000.000.000 Construction navale
construction et de réparation navale)
SEVIMA (Société d'exploitation de la Antananarivo
- - Industrie de mise en
viande à Madagascar) conserve de viande
SICE Nationale - - Commerce et distribution
SINPA (Société d'intérêt national des
Nationale - - Collecte et
produits agricoles commercialisation de
produits agricoles
SIRAMA (Siramamy malagasy) Mahajanga, 7.328 219.000.000
Industrie sucrière
Brickaville, Nosy-Be
SIRANALA (Siramamy Analaeva) Morondava 950 500.000.000 Industrie
sucrière
SOAVOANIO (Société Sambava Sambava - - Plantation
et
voanio) transformation de l'huile
de coprah
SOLIMA (Solika malagasy) Nationale 1.570 2.504.500.000 Industrie
pétrolière
SOMAPALM (Société malagasy pour le palmier
à huile)
SOPRAEX (Société promotion pour les produits
agricoles d'exportation)
Toamasina - - Plantation et
transformation de palmier à huile
Fianarantsoa - - Recherche en produit
pharmaceutique
Madagascar)
SUMATEX (Sud malgache textile) Toliara 788 - Industrie
textile
TOLY Toliara, Farafangana, - 660.000.000 Confection
d'outillage
Morondava mécanique
Tranombarotra ROSO Nationale - - Commerce et distribution
ZEREN Toamasina - - Transformation engrais
chimique
IV. La décentralisation de l'enseignement
supérieur, un travail à long terme.
La réforme de l'enseignement supérieur a
été prévue dans la charte de la deuxième
république33. Trois axes principaux ont été
proposés et mis en relief : la démocratisation - la
décentralisation et la restructuration de la pédagogie de
l'enseignement. Ces axes sont sensés apporter une nouvelle dynamique
dans la formation des futurs cadres de la nation.
Dans ce contexte, le gouvernement, s'est proposé
d'accroître le nombre d'étudiants qui vont fréquenter le
« banc » des facultés. L'augmentation du crédit
alloué à l'aide financière [la bourse estudiantine] a
été une des solutions proposées. De 3.000 boursiers en
1974, on est passé à 12.000 en 1979 : 60% des étudiants
bénéficient d'une bourse dont 70% avec le taux maximal. Cette
réforme de l'accession à la formation supérieure a
été renforcée par la mise en place de nouvelles
infrastructures : les Centres Universitaires Régionaux.
A. Les CUR : Des centres
d'enseignement supérieur de proximité (
cf. tableau
5).
Centre universitaire Matière
enseignée
Antananarivo Droit - économie - gestion - sociologie,
Lettres et Sciences Humaines, Médecine, Sciences -
Mathématiques - Physique et chimie
Antsiranana Filière électromécanique
Fianarantsoa Mathématiques, Physique, Ecole normale
niveau 3
Mahajanga Médecine dentaire
Toamasina Gestion
Toliara Lettre, Sciences, Ecole Normale, Philosophie
Tableau 5 : Représentation des «
spécialités » de chaque CUR. Source : Archive MENRES.
Les CUR ont été érigés pour
décentralisés l'enseignement
supérieur. il faut pourtant
voir que cette politique n'a vraiment pas résolu le problème dans
la mesure où les CUR étaient des centres
spécialisés en un domaine d'études précis. Par
conséquent, la mise en place d'un réseau sensé
décongestionné la concentration des étudiants à
Antananarivo n'avait pas eu l'effet escompté. Une grande partie de la
population estudiantine est toujours regroupée dans la Capitale.
Un autre constat révèle aussi que la
concentration d'étudiants dans les cités universitaires,
notamment à Antananarivo ne signifiait pas forcément augmentation
de la population estudiantine. Certaines personnes « squattaient »
les cités universitaires alors qu'elles ne sont plus inscrites dans les
facultés. Cette situation a été favorisée par un
climat de « laisser-aller » qui a gangrené le système
administratif malgache. Il a fallu attendre les années 90 pour voir
l'Etat reprendre en main la situation. L'assainissement a ainsi permis de
réduire de plus de la moitié, le nombre de l'effectif estudiantin
dans la Capitale : on est actuellement à 15.000 étudiants pour
Antananarivo.
B. Les CUR : Des exemples
d'investissement à
outrance clé en main
(cf.
fig14-15-16).
L'Etat malgache avait déboursé 30 milliards de
FMG pour la construction des CUR. Ces investissements ont été
contractés dans le cadre de la politique de l'investissement à
outrance. Madagascar travaillait avec des entreprises qui apportaient leur
savoir-faire en construction. Parmi les entreprises contactées, on peut
citer la FABRICA IMBALLAGI34 qui a transporté de Milan, en
Italie, les bâtiments préfabriqués et assemblés,
à Madagascar.
Tableau 6 : Les travaux effectués par
province. Source : Afrique-Asie, numéro spécial, 23
juin-6juillet 1980.
Type de construction
|
Antsiranana
|
Mahajanga
|
Toamasina
|
Toliara
|
Fianarantsoa
|
Antananarivo
|
Logement étudiant
|
500 (I)
|
|
500 (I)
|
300 (T)
|
500 (T)
|
1.500 (I)
|
|
500 (C)
|
|
500 (C)
|
300 (I)
|
|
1.500 (C)
|
Salle de cours
|
17 pour 50
|
7 (C)
|
1 pour 200
|
3 (T)
|
6 de 100 places
|
10 (I)
|
|
places (T)
|
|
places (I)
|
2 de100 et de
|
(T)
|
37 (C)
|
|
10 pour 100 places (T)
|
|
12 (C)
|
200 places (I)
|
|
|
|
15 pour 200 places (C)
|
|
|
|
|
|
Amphithéâtre
|
1 de 150 places
|
1 de 750 places
|
1 de 750 places
|
2 de 750 places
|
1 de 750 places
|
1 de 1.000
|
|
(I)
|
(C)
|
(I)
|
(I)
|
(T)
|
places (I)
|
|
2 de 750 places
|
|
1 de 750 places
|
|
|
2 de 750 places
|
|
(C)
|
|
(C)
|
|
|
(I)
|
|
|
|
|
|
|
2 de 1.000 places (C)
|
|
|
|
|
|
|
4 de 750 places
|
|
|
|
|
|
|
(C)
|
Restaurant
|
1 de 600 places
|
1 de 600 place
|
1 de 600 places
|
1 de 600 places
|
1 de 600 places
|
1 de 600 places
|
|
(I)
|
(C)
|
(C)
|
(I)
|
(T)
|
(I)
|
|
|
|
|
|
|
1 de 600 places
|
|
|
|
|
|
|
(C)
|
Logement professeur
|
10 (I)
|
10 (I)
|
10 (I)
|
20 (I)
|
10 (I)
|
15 (I)
|
|
|
|
|
|
|
20 (C)
|
Surface aménagée
|
31.073 m2
|
5.630 m2
|
25.747 m2
|
20.775 m2
|
14.226 m2
|
86.323 m2
|
|
N.B. : (T) : Entreprise locale - (I) : FABRICA IMBALLAGI - (C) :
CONACO
La répartition de ces installations est certes
inégale pour chaque CUR, mais il faut tenir compte des
spécialisations de chaque centre auquel on avait adjoint les
infrastructures. Malgré tout, on retrouve la volonté de l'AREMA
de mettre en place un réseau national pour l'éducation
supérieure.
Ces réseaux complètent les réformes
déjà amorcées dans l'enseignement primaire et secondaire.
Le but avoué est que les jeunes malgaches puissent accéder
à un minimum de savoir. Cela leur permettra d'oeuvrer pour le
développement de leur région respective et par ricochet de
madagascar.
187 logements étudiants, 33 logement de professeurs, 11
salles de cours de 100 places, 4 salles de cours de 200 places, 15 salles de
projection, 3 restaurants, 7 amphithéâtre.
Figure 14 : Représentation des surfaces
aménagées pour les CUR. Source : Archive Min.
Industrialisation.
Figure 15 : Représentation de la capacité
d'accueil des réalisations. Source : Archive Min.
Industrialisation.
Figure 16 : Représentation des réalisation
effectuées. Source : Archive Min Industrialisation.
|