B. L'organisation du pouvoir socialiste
révolutionnaire.
Le 21 décembre 1975, les Malgaches ont
été appelés à un référendum qui va
légitimer l'arrivée de M. RATSIRAKA au pouvoir. Avec un Taux de
participation s'élevant à 93.01%, les Malgaches ont
répondu « OUI » à hauteur de 93.77% aux questions qu'on
leur a soumis. La deuxième république est née.
Désormais, le pouvoir peut mettre en oeuvre les politiques qu'il
s'était fixées de réaliser.
1) Les
institutions de
la deuxième
république
(cf. organigramme
3).
communiste » qui prônait la « lutte des
classes ». On sait que l'idéologie de la deuxième
république s'ordonne autour du « socialisme révolutionnaire
» s'inspirant directement des pays de l'Est. De cette idéologie
découlait l'organisation des institutions. Néanmoins, on retrouve
les trois organes « primaire » de pouvoir dans les textes en vigueur
:
Pouvoir legislatif
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Pouvoir exécutif
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Fonction juridictionnelle
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Assemblée Nationale populaire
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Président de la république
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Haute cour constitutionnelle
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Gouvernement
Organigramme 3 : Organisation du pouvoir sous la
deuxième république.
· L'exécutif est assez complexe car il est
formé de trois entités : le Président de la
république, le CSR (Conseil Suprême de la Révolution) et le
Gouvernement. Le pouvoir octroyé au Président de la
république est large (on verra ses attributions en détail dans un
autre point). Le CSR qui est l'émanation de l'organe érigé
par le Directoire militaire est le garant de la conformité des actions
gouvernementales aux règles définies par la « Charte de la
révolution socialiste ». Enfin, le gouvernement est «
l'exécuteur » des objectifs définis par le
Président.
· Le pouvoir législatif est monocaméral
avec l'Assemblée Nationale Populaire. Le pouvoir de
légiférer aurait dû échoir à cette
assemblée, pourtant elle ne l'a exercé que
modérément.
· Le troisième organe est la Haute Cour
Constitutionnelle. Elle contrôle la constitutionnalité des lois et
fait aussi office de juge électoral.
2) Un Chef d'Etat
omnipotent.
A l'instar des régimes dans les pays africains,
l'exécutif s'est étoffé pour asseoir son emprise sur la
cour des affaires nationales. La Constitution de la deuxième
république a été faite pour privilégier le pouvoir
de l'exécutif, notamment celui du Chef de l'Etat (sans pour autant
léser ceux des autres institutions). Ce choix n'est sans doute pas
dû au hasard : la république avait
besoin d'un régime fort pour soutenir les
réformes qui vont être entreprises et c'est d'autant plus
nécessaire que la Grande-île venait de sortir d'une « crise
majeure » à laquelle il fallait apporter des réponses.
Le Président de la république cumule de
nombreuses fonctions qui lui permettent de peser de tout son poids sur
l'échiquier politique : il est à la fois le Chef de
l'exécutif et du Conseil Suprême de la Révolution (CSR).
Par ailleurs en conseil des ministres, il peut légiférer sous
forme d'ordonnance. De ce fait, il cumule à la fois le pouvoir
exécutif et normatif... Ce dernier point fait que le Parlement devient
quasi-spectateur de la vie nationale.
C. CADOUX disait à ce propos : « Et le Pouvoir
qui avait manifestement au départ (1975) une coloration
collégiale -le Président de la république décidant
`en Conseil Suprême de la Révolution'- a rapidement glissé
au système présidentialiste(...) »28 Ce qui
démontre que l'esprit avec lequel le pouvoir a été
érigé véhiculait, au départ, un besoin fort de
concertation qui s'est peu à peu délité au profit d'un
pouvoir personnel « frisant l'autocratie ». On verra d'ailleurs dans
un autre point que le système proposé par le Colonel
RATSIMANDRAVA a été repris par les Dirigeants de la
République Démocratique de Madagascar (RDM) : il s'agit du
concept de fokonolona élargi en un système qu'est le VIP ou
« Vondrom-bahoaka ItsinjaramPahefana ».
3)
L'Avant-garde de la
Révolution Malgache
(AREMA) et le Front
National pour la Défense de la
République (FNDR)
.
Le régime du parti unique n'existait pas sous la
deuxième république. Il n'en est pas moins que c'est l'Etat qui
contrôlait les activités politiques. Le Front National pour la
Défense de la Révolution ou FNDR a été mis en
place. Son existence est même reconnue par la Constitution. Les Partis
politiques sont appelés à se regrouper au sein de cette
institution. Ce qui revient à dire qu'il y avait une tentative de
créer une « pensée unique » dans les activités
des Partis. Ceux qui étaient en dehors du front étaient
considérés comme des « hors-la-loi »... En
théorie, le FNDR aurait pu résoudre bien des problèmes car
il aurait dû être un lieu d'échange pour les
Partis qui, dans l'ensemble, ont soutenu la nouvelle
république. En définitive, c'est l'un des talons d'Achille du
nouveau pouvoir en place.
Graphe 1 : Exemple de résultat d'une élection
« régionale » en 1977. Source : Ministère de
l'Intérieur.
Les Malgaches, il est vrai, ont tendance à encenser
leurs dirigeants. C'est sans doute dû au fait de la culture du respect
des aînés (Les Dirigeants étant identifiés au «
ray aman-dreny »). Durant l'ère TSIRANANA, le PSD dominait
outrageusement la scène nationale car c'était le « parti du
Président ». Avec l'arrivée de RATSIRAKA au pouvoir, son
parti, l'AREMA devenait de facto le parti avec lequel il fallait compter. Lors
des principales élections qui ont eu lieu durant cette période,
l'AREMA est quasiment en statut de monopole (cf. graphe 1) occultant peu
à peu le FNDR. Cette fissure au sein du Front se reflétait
surtout à la base. Si les ténors des grands partis affichaient un
« front », il en va autrement au niveau local. L'AREMA (zanak'i
dada... )29, selon le dire de certains, faisait la
grosse-tête et snobait ses « partenaires » qui ne se privaient
pas non plus de le faire savoir...
L'exemple qu'on a pris (cf. graphe 1) montre le
résultat de l'élection des membres du conseil des
Firaisampokontany en 1977. Il y est visible que le parti AREMA était en
position de force. Et c'est d'autant plus vrai que dans les diverses
élections qui se sont effectuées à
Madagascar, tant au niveau national qu'au niveau des
collectivités locales, ce parti est toujours en nette position de
domination et a gagné beaucoup de sièges. Antananarivo
était la seule agglomération où son influence était
moindre. L'AKFM y est encore bien implanté comme pendant la
première république. Néanmoins, la dominance certaine de
l'AREMA dans les assises du pouvoir - au niveau des différentes
entités territoriales - lui a permis de mettre en oeuvre la
stratégie que le parti voulait appliquer au niveau des différents
démembrements de l'administration territoriale.
CHAPITRE g. UNE
STRATEGIE SPATIALE MISE EN ECHEC PAR UNE
CONJONCTURE INTERNATIONALE
DEFAVORABLE.
A
u niveau international, Madagascar a embrassé une
nouvelle ligne directive s'ordonnant autour de la politique tous-azimuts :
nouer des relations avec tous Pays
susceptibles d'aider la Grande-île. Cette ouverture a
été mise à profit pour défendre sur le plan
international le choix des Malgaches pour une société plus juste
et équitable dans la droite ligne du non-alignement ( un neutralisme
positif). Avec une organisation tout acquise à sa cause, le nouveau
parti au pouvoir, l'AREMA, a pu mettre en oeuvre les directives
formulées par la « Charte de la révolution »,
directives qui ont tenté de transformer positivement le territoire
national par le biais de la mise en place du VIP - de la réforme agraire
- de l'investissement à outrance et de la réforme de
l'enseignement.
I. Le VIP : Un concept valable mais une pratique
incohérente.
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