A. La révision des accords de coopération
franco-malgache.
En 1973, l'accord de coopération établie entre le
Gouvernement malgache et celui de la France en 1960 a été
dénoncé par la partie malgache. De nouvelles dispositions ont
été prises
sous l'impulsion de M. RATSIRAKA, Ministre des Affaires
étrangères à l'époque. La révision de cet
accord fait suite à la recherche d'une plus grande « autonomie
» tant politique qu'économique vis à vis de l'ancienne
puissance coloniale. Cette révision tente de légitimer par des
actes, les revendications de 1972. On parlait déjà à cette
époque de « Partenaire égal »...
Parmi les mesures les plus spectaculaires de cette
révision, on peut citer : la transmission entre les mains des Malgaches
du contrôle des bases militaires occupées par l'armée
française sur le territoire malgache (dont celle de
Diégo-Suarez), la sortie de la zone Franc etc. Cette relative
indépendance retrouvée va être renforcée par une
restructuration de l'administration de base de la société
malgache.
B. La consécration du « fokonolona »
Le Colonel RATSIMANDRAVA conduisait une réforme de
l'administration du territoire avec la mise en place du fokonolona. Cette
stratégie répond à un souhait : voir une population plus
responsable, s'impliquer davantage de son développement. On parlait
alors de « maîtrise populaire du développement ».
L'ordonnance n° 73.009 du 24 mars 1973 consacrait le
Fokontany comme étant l'unité administrative et économique
de base dans lequel s'exerce le pouvoir et les prérogatives du
fokonolona. Cette réforme de l'administration va donner la
priorité à la population de base de prioriser ses besoins. Mais
cela n'a pas toujours été le cas car très vite cette
institution a été politisée rendant les discussions au
sein même de l'institution opaque et inaccessible à la
majorité des gens.
La transition prenait fin en 1975 après l'assassinat de
M. RATSIMANDRAVA. Le CSR (conseil suprême de la révolution)
apparaissait. M. RATSIRAKA était élu président de ce
conseil. C'est de cette institution que la deuxième république va
naître.
II. L'avènement de la deuxième
république.
Le 15 juin 1975, RATSIRAKA devenait la tête pensante de
la nouvelle institution créée par le Directoire Militaire, le
CSR. Au lendemain de cette nomination, il a enclenché la politique de
nationalisation de toutes les banques et les sociétés
d'assurance, assumant ainsi un virage de 180° dans la politique de la
conduite des affaires nationales. Très vite, l'Etat contrôlait une
grande partie de l'économie nationale. A la fin de l'année 1976,
61% de l'économie malgache est contrôlée par
l'Etat24. Les grandes entreprises privées
étrangères ont presque toutes été
nationalisées. A ce propos, Mme RABESAHALA disait que cette politique
traduisait en fait un désir de la part des Gouvernants de se
réapproprier les moyens de production pour que les Malgaches puissent
« se rendre maître de leur propre destiné...
»
Par ailleurs, avec ses proches collaborateurs, il s'est
attelé à la rédaction de la nouvelle constitution
[aboutissant à la naissance de la RDM] et de la nouvelle politique qu'il
voulait mettre en oeuvre. Cette politique est condensée dans la «
Charte de la révolution socialiste » plus connue par les Malgaches
sous l'appellation « Boky mena »
A. La charte de la
Révolution socialiste
malgache : assise de la
politique de la
RDM.
Les Malgaches étaient descendus dans la rue en
197225, pour réformer leur administration. Par ce geste, bien
des jeunes aspiraient à la « malgachisation » de
l'administration. Dans la charte, on pouvait lire, à la page 15 :
« Au lendemain de l'indépendance de 1960, les administrateurs
français partis, on les a remplacés par des administrateurs
malgaches mais en fait les grandes décisions continuaient de relever des
assistants techniques. » Il fallait trouver un moyen pour traduire en
acte ce rejet d'une administration contestée. La « charte de la
révolution socialiste. Tous azimuts. » a été la
réponse apportée par le nouveau pouvoir qui s'est
24 in « La marche de la liberté » de
RAFENOMANJATO
25 La révolution de 1972 n'est pas sans
rappeler les mouvements qui se sont déroulés aux USA et en France
vers la fin des années 60, avec le rejet d'une société
capitaliste. Les jeunes de ces pays ont fait savoir qu'ils attendent un peu
plus que ce que la société de consommation leur offre ; un peu
plus d'humanité...
constitué. Surfant sur la vague du communautarisme, elle
prône la « décentralisation effective26 » du
pouvoir et l'égalité de tous aux yeux de l'Etat.
1) La position de Madagascar sur
l'échiquier politique
international.
Rompant avec la ligne directive du régime de
TSIRANANA, l'Etat malgache s'est ouvert au régime de l'Est. Cette
politique a été initiée pour contrecarrer la main mise de
l'occident sur les affaires internes de Madagascar. Dans la p. 26 de la Charte,
on peut lire : « Madagascar se doit de ne compter que sur ses propres
efforts et ne considérer les efforts extérieurs que comme des
compléments. (...) Toute aide qui ne nous aide pas à nous passer
de l'aide étrangère doit être refusée...
»27 Cette position avait éloigné Madagascar
de ses anciens partenaires comme le régime apartheid de l'Afrique du
Sud, le régime sioniste d'Israël.
Cette attitude, les Dirigeants l'ont appelée le
neutralisme positif. Les Malgaches se définissent comme ne faisant
partie d'aucune des idéologies forces que le monde véhiculait
à cette époque de guerre froide. Ils se déclinent comme
étant la troisième force qui lutte contre toute forme de
ségrégation et d'impérialisme et aspirent à la paix
dans le monde.
2) La politique
intérieure
proposée par la
charte.
La constitution de la deuxième république
s'inspire librement de la charte. C'est donc à cette charte que se
réfèrent les grandes lignes de la politique intérieure de
Madagascar. D'ailleurs, une grande partie des chapitres du livre traite de cet
aspect.
La base de la société malgache est le socialisme
comme il a été défini dans la charte. Ce choix a
été conforté par la préexistence dans la
société malgache d'un embryon d'une société
26 En 1991, les ténors du HVR vont demander la mise en
place de la décentralisation effective de Madagascar. En fait, les bases
de cette décentralisation ont déjà été
imaginées bien avant. Seule sa mise en application était
restée vaine.
27 Cette prise de position ne concerne pas
seulement Madagascar. Bien des Pays d'Afrique s'y sont alignés. On peut
relever, l'année 2003, le cas du Zimbabwe qui avait refusé l'aide
humanitaire proposée par l'occident sous prétexte que
c'était des produits OGM alors que la population avait souffert du
passage d'un cataclysme naturel.
d'entr'aide sur lequel on va s'appuyer. Les critères du
socialisme, tel que les Malgaches le conçoivent, s'articulent autour des
faits suivants :
· Eradication de l'exploitation de l'homme par l'homme
· Suppression de l'injustice et de
l'inégalité
· Création d'un pouvoir révolutionnaire
défenseur de l'intérêt des couches laborieuses
· Existence d'une administration efficace
· Prise en main par l'Etat des moyens de production
· Existence à la base d'un organisme de gestion de
l'économie
· Décentralisation du pouvoir - de l'avoir - du
savoir - du savoir-faire et du faire-savoir.
Ces faits intègrent ce que l'on appelait en ces temps
le centralisme démocratique. Ce que l'on voulait ériger
était une société qui s'occuperait de tout le monde avec
un total respect de l'individu. Tout le monde devait travailler pour le bien de
la communauté. Les décisions prises par la majorité au
sein de la communauté ont force de loi et s'appliquent à tous. La
société a été organisée en cellule
décisionnelle au sein duquel les représentants de la base ont
droit de parole. L'AREMA compte sur cette nouvelle dynamique pour enclencher
les réformes économiques sensées réorganiser la
prise en main de l'essor des différentes régions de
l'île.
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