3.4.2 L'Homme cet être unique
Aristote affirmait « L'homme est le seul animal politique
»Platon disait « Lhomme est le seul animal bipède »puis
Rabelais dajouter « Le rire est le propre de lhomme »
Descartes de démontrer « L'homme est le seul
animal doué de raison »Thomas Huxley approfondissait « L'homme
est le seul animal moral »Engels et lécole marxiste clamaient
« L'homme, c'est l'outil», « L'homme est le seul animal culturel
»pour les anthropologues et Lévi-Strauss de préciser qu'il
est le seul à observer letabou de linceste.Chomsky de son
côté concoit que « L'homme est le seul animal doué dun
véritable langage » David Premack poursuit « L'homme est le
seul animal pédagogique »et Boris Cyrulnikdit « L'homme est le
seul animal historique»A chaque époque, pour chaque penseur
ils'agit de concevoir l'Homme dans sa spécificitédans son
unicité cest-àdire de lextraire du monde naturel. Or c'est aussi
ce qui se passe dans notre corpus, LHomme est toujours ce que les autres ne
sont pas, /l'homme blanc typé occidental/ et porteur de
<mélioration> est toujours l'antithèse des autres
éléments auquelsil est juxtaposé et qui sont
connotés négativement.
Boris Cyrulnik observe :
« Que de blessures narcissiques pour payer nos
progrèsCopernic nous apprend que la Terre n'est pas le centre de
l'universDarwin découvre que l'homme, fils de Dieu, participe au monde
animal ; Freud nous fait comprendre que notre esprit rationnel est
géré par notre inconscient irrationnel et main- tentant
voilà qu'on découvre le psychisme animalson accès au
social, au langage et au symbole. »20
Malgré ces blessures narcissiques, ces avancées
épistémologiqueslHomme ne cesse de vouloir se découvrir et
mettre en avant son particularisme qui fait de lui un être
d'exception.
3.4.3 La place de la femme
Ce que nous voulons montrer est la manière dont le
discours scientifique, lorsqu'il parle de l'évolution de l'Homme, puise
dans les faits objectivement naturels et glisse parfois vers des arguments
quieux, sont culturels. Dans le discours artistique et ence qui concerne la
sexuation, le postulat est le suivantL'Homme est anatomiquement plus fort que
la femme car ayant une masse musculaireplus dévelopée que l'on
peut qualifier de donnée naturelle objective. Pour autant, les
représentations glissent vers quelque chose de beaucoup plus
culturalisé du type la femme s'occupe des enfants et est eaclusivement
reliée à la sphère de la maternité pendant que
lhomme chasse . Et ce sans doute où le féminisme a
échoué ou plutôt s'est mal fait comprendrecest quil ne
sagit pas de remettre en cause les différences naturelles qui subsistent
entre lhomme et la femme seule la femme peut accoucher, seul l'homme peut
produire du sperme etc) mais de remettre en cause les postulats culturels qui
scindent univers masculin et univers féminin du type le monde appartient
à l'homme et le foyer à la femme. On est à ce moment dans
les expressions figées, dans un imaginaire social dont le mode de
fonctionnement est le stéréotype. A ce propos, Boris Cyrulnik
nous livre lanecdote
20 ?? ??t, p 16.
« Chaque année, dans mon séminaire pour
jeunes psychiatres, un étudiant soutient l'idée que «
chacune de nos cellules possède un programme génétique
différent, XX pour les femmesXY pour les hommes. Toutes les constantes
biologiques diffèrent selon le sexeaucun métabolisme nest
superposable, le dimorphisme sexuel est un des plus flagrants des
espèces vivantes »Chaque année, il provoque
l'hostilité d'une étudiante qui lui répond que « cest
le capitalisme qui donne aux femmes l'envie du pénis »parce que
« ce sexe a été valorisé par ce système
économique pour mieux rentabiliser les hommes et asservir les femmes
». Ces deux raisonnements ne s'excluent pas.Ce nest pas parce qu'une
culture asservit les femmes quil faut en conclure que les différences de
nature n'existent pas»21
Or réequilibrer les différences culturelles
entre hommes et femmes ne peut s'effecteur dans un premier temps, qu'au travers
de la LangueAutrement dit si lon veut que la femme est sa place dans la
société, encore faut-il quelle lest en Langue22.
Nadeije Laneyrie-Dagen, historienne en Artsnous
explique23 que la Renaissance redécouvre l'Antiquité
qu'elle considère comme un ge dorAussi, leshumanistes de 'époque
ne peuvent faire d'exception sur la représentation du corps, tellement
présent, notamment dans la statuaire :
« Les canons imitent autant que faire se peut ceux de
lAntiquité, car on pense qu'autrefois les corps étaient plus
beaux. Les artistesde laRenaissance essaient donc de retrouver les proportions
idéales dans la statuairedesAnciens ou dans les textes qui en parlent
(Vitruve) Etils sen inspirent. Cet équilibre formel correspond
également à la représentation morale que lon se fait de la
décence et de la convenance. La Renaissance a dautant mieux
adopté les idées de l'Antiquité qu'elle pouvait les
adapter à la morale chrétienne. Léonard, Raphaël...
ont peint les corps dans des poses retenues, ainsi que les visages. Car le
visage, lui aussi, doit obéir aux lois des proportions et de la
symétrie. Dans le cas contraire, il est considéré comme
laidOr la beauté physique est à cette époque, indice de
beauté morale. »
Ainsi, le corps tel qu'il est mis en avant par le discours
scientifique est celui, emprunté au discours artistique et religieux,
idéalisé que nous a légué laRenaissance
enrevisitant es mythes de l'Antiquité. Or ce corpscest avant tout celui
de lhomme. Nadeije LaneyrieDagen préçise :
« L'idéal de la beauté est
indéniablement masculinCest ce que ne cessent de montrer les
traités d'anatomie, qui prennent pour modèle le corps de l'homme.
»
21, p 90.
22Nous pensons notamment
àlimportanteexploration proposée par AnneeMarie Houdebinetes
collègues concernant la féminisation des noms de
métierssVoirLa féminisation des noms de métiers en
français et dans d'autres langues, Paris Editions L'Harmattant, 998.
23Voir l'entretien de l'Express visiblesur Internet
à'adresse
http ://www.lexpressfr/mag/tentations/dossier/beaute/dossierrasp
ida=3998998p=1
En outre, aux alentours de 1400, le peintre Cennino Cennini
décritdans le Livre de l'art, les proportions idéales du corps
masculinEt il ajoute« Celles de la femme, je n'en parlerai pas, car elle
n'a aucune mesure parfaite»
L'idée de l'infériorité du corps
féminin sera longue à disparaître ettrouve sa justification
dans le discours religieux. Au début du XVIIe siècle, Rubens
affirme dans a Théorie de la figure humaine : « l'homme seul en la
personne d'Adam a été créé àlimage de Dieu
formée à partir de la côte d'Adam, Eve nest quun reflet
imparfait du projet divin, une sorte de sous-produit ». Or, nous l'avons
constaté à travers létude de notre corpus, e corps de
l'Homme c'est le corps de l'hommesuivi de tous les insus culturels qui rallie e
sexe masculin à l'univers sémantique du terme évolution.
La femme reste, dans la représentation de l'évolution par le
discours scientifique et artistique, cantonnéeàdes schèmes
stéréotypiques non valorisés et non valorisants. Lon peut
même parler de forme topique c'est-à-dire « croyances
présentées comme communes à une certaine
collectivité »24. Effectivement, l'image de la femme
dans notre corpus souffre dêtre dépendante des divers lieua
communs évoqués plus haut : <maternité>,
<foyer><faiblesse> etc.
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