Les Règles Générales du contrat
préliminaire
1. L'intérêt pratique du contrat
préliminaire
En matière de vente sur plans, de nombreuses raisons
font qu'il n'est pas possible ou du moins pas souhaitable de conclure
immédiatement le contrat définitif. En revanche, ces mêmes
raisons rendent fort utile le recours à un avant contrat qui dans
l'esprit du vendeur peut répondre à trois séries de
préoccupations différentes suivant le stade de l'opération
:
ü Sondage du futur acquéreur avant le lancement de
l'opération
ü Prise du temps nécessaire avant la
définition des prix et des prestations ce qui emmène le vendeur
à s'engager d'une manière prévisionnelle
ü que les éléments éventuels du
contrat soient ou non déterminés, le vendeur a le plus grand
intérêt à ce que l'acquéreur s'engage par un avant
contrat dans l'attente du contrat définitif.
C'est pourquoi, le législateur a ouvert la
possibilité de conclure un contrat préliminaire par lequel «
Le vendeur s'engage à réserver à un acheteur un
immeuble ou une partie d'immeuble en contre partie d'un dépôt de
garantie effectué à un compte spécial ».
Grâce à l'avant contrat les promoteurs peuvent se
prémunir contre un risque de mévente et garantir leur demande de
crédit auprès d'organismes bancaires.
2. La nature juridique du contrat
préliminaire
Concernant la nature juridique du contrat préliminaire,
une interrogation s'impose : s'agit-il d'une promesse de vente, d'un pacte de
préférence ou d'une convention sui generis ? La question n'a pas
qu'un intérêt théorique dans la mesure où la nature
juridique de cet acte conditionne l'étendue des obligations du
réservant.
Le législateur français21 semble y voir
une promesse de vente puisqu'il dispose dans l'article
L 261-1522 :
«est nulle toute autre promesse d'achat ou de vente
».
À quoi nous objectons qu'une promesse de vente suppose
un prix déterminé, ce qui n'est pas toujours le cas ici puisque
le prix n'est que prévisionnel. Certains auteurs23 ont
même jugé cet avant contrat comme une sorte de pacte de
préférence.
Ces divergences sont également apparues en
jurisprudence et ont été tranchées par un arrêt de
la troisième chambre civile de la cour de cassation, lequel arrêt
considère le contrat préliminaire comme un contrat sui generis
essentiellement synallagmatique. Toutefois ce sujet est toujours
controversé, 30 ans après l'application de l'arrêt sus
cité.
Mais en réalité ce problème n'a pas
trouvé de solution radicale car ce contrat n'est qu'un moule
obligatoire, certes, mais pouvant être complété par la
volonté des parties concernées en accroissant les obligations du
réservant, suivant la manière dont il aura été
établi. Il aura telle nature ou telle autre. Ainsi la nature juridique
ne peut être résolue simplement au regard du modèle
général, elle doit l'être au stade de chaque contrat
particulier.
Nous pouvons dire enfin que le contrat préliminaire est un
cadre à contenu variable dont le plancher est fixé par la loi et
le plafond par les contractants eux mêmes.
3. La forme du contrat préliminaire
La législation française notamment la Loi 67/3,
dans l'article R.261-17 prévoie que le contrat préliminaire doit
être établi par écrit, et en autant d'exemplaires.
21 Nous insistons ici sur le la législation
française car celle de l'Algérie n'a rien prévu dans ce
domaine ; cette dernière a surtout limité son intervention aux
généralités assez ambigües tout en laissant libre
initiative de la transaction aux deux contractants.
22 Quand la lettre «L
» ou la lettre «R» est
mentionnée au début du numéro de l'article cela
respectivement au texte législatif ou au texte réglementaire.
23 Par exemple : R. Saint Alary, ***** «La nouvelle
réglementation des vente d'immeubles à construire »,
Redi, 1968 et F. Collart dutillert, «Les contrats préparatoires
à la vente d'immeuble », Sirey, 1988
Pour ce qui est de l'enregistrement du contrat l'article
1840-A stipule que : «est frappée de nullité toute
promesse de vente unilatérale sous seing-privé qui n 'a pas
été enregistrée dans un délai de 10 jours
».
De son côté, le législateur
algérien, et particulièrement à travers la Loi 86/07 qui
stipule dans son article 31 que « ...le contrat de réservation
est établi en la forme « sous seing privé » et est
soumis à la formalité de l'enregistrement », ne donne
pas de détails sur la spécificité des deux contrats
(préliminaire et définitif) et ne les nomme pas clairement, il se
contente de l'obligation de formalisation de l'engagement des deux parties.
Article 09 du décret législatif 93/03 du 01 mars
1993 stipule également que :
«... un promoteur immobilier peut céder
à un acquéreur un immeuble ou une partie d'immeuble avant
achèvement, dans ce cas, la transaction est formalisée par un
contrat de vente sur plans, régi par les dispositions prévues au
présent chapitre ».
Cet engagement prendra obligatoirement la forme authentique du
contrat24, et sera soumis aux formalités légales
d'enregistrement et de publicité25.
4. Délai de rétractation
D'une manière générale, il est permis aux
réservataires de se rétracter dans un délai limité
fixé à sept jours dans la législation
française26 qui garantit ce droit à la
rétractation d'une manière générale dans tous les
contrats qui ont pour objet l'acquisition ou la construction d'un immeuble
à usage d'habitation. Ce délai prend effet à compter du
jour où le réservataire reçoit l'acte par lettre
recommandée et avec accusé de réception. Quant à la
législation algérienne, elle ne dit rien sur ce point.
Outre la copie originale destinée à
l'enregistrement le contrat de réservation est établi en autant
d'exemplaires et comporte des conditions générales et des
conditions particulières27.
24 Article 12 du décret sus cité et
l'article 35 du décret 86/38.
25 Article 09 du décret législatif 93/03
du 01 Mars 1993.
26 Article 72 de la loi 2000-1208 relative à la
solidarité et le renouvellement urbain.
27 Article 36 du décret 86/38.
L'article 37 du décret 86/38 revient avec
détails sur des conditions particulières et des conditions
générales qui sont naturellement annexées au contrat de
réservation et qui sont constituées d'un rappel exprès des
dispositions légales et réglementaires ayant trait aux rapports
souscripteurs à l'opération de promotion immobilière et
accédant notamment :
· les obligations et garanties du souscripteur à
l'opération de promotion immobilière à l'égard du
candidat accédant ;
· les sanctions administratives, civiles et pénales
des obligations et garanties précitées ;
· Les clauses nulles et de nul effet et celles interdites
;
· les clauses obligatoires.
Cette partie doit aussi reproduire toute obligation de
réparation des vices cachés ou apparents et d'en préciser
la responsabilité ainsi que toute obligation de garantie
d'achèvement, de bonne fin, de conformité, garantie
décennale où tout autre clause jugées nécessaires
à la bonne marche de l'opération.
Enfin selon l'article 38 du décret 86/3 6 il y a
obligation au promoteur de notifier le projet d'acte de vente au
réservataire un mois avant la date de la signature de l'acte.
5. Mentions obligatoires des contrats
Sous peine de nullité, certaines mentions ou indications
dans le contrat préliminaire sont obligatoires et s'imposent
d'elles-mêmes.
L'acquéreur doit savoir à peu près à
quoi s'en tenir, sur les prestations qui lui sont proposées ou offertes
et surtout le prix à payer.
Ces indications sont pour l'acquéreur la
référence particulière pour apprécier si le contrat
définitif est conforme ou non à ce qui à été
prévu dans le contrat préliminaire. Ce serait pour
l'acquéreur une raison légitime de refus de contracter.
Ces mentions obligatoires concernent particulièrement les
éléments suivants :
· la description entière du local
réservé ou de l'immeuble ;
· le délai d'exécution des travaux 28;
· le prix prévisionnel de vente et le cas
échéant les modalités de sa révision dans les
limites et les conditions prévues29 ;
· la date à la quelle le contrat définitif
pourra être conclu30 ;
· le prêt que le réservant déclare
faire obtenir au réservataire, avec précision du montant, les
conditions du prêt et le nom du préteur31 (pour ce
cas précis et en droit algérien le réservataire se charge
en plus des prêts financiers, de l'aide qu'attribue l'État par le
biais de la C.N.L au postulant répondant aux critères
arrêtés par la loi);
· le dépôt de garantie et sa restitution
éventuelle32.
Il faut noter que, concernant le volet du contrat
préliminaire, la réglementation française dès
qu'elle autorise le réservant ou le promoteur à ne pas
préciser ses engagements, elle lui octroie le droit de modifier
unilatéralement les caractéristiques du Bien à
réaliser. Ces dispositions dérogent aux textes protégeant
les droits du bénéficiaire33.
C'est d'ailleurs pour cette raison que la doctrine juridique
française suggère la fructification du contrat
préliminaire34 .
D'après un groupe de professeurs de droit
Français qui émettent des réserves sur cette proposition,
une telle entreprise paraît périlleuse et est
considérée comme une source peu fiable sur le plan juridique. Le
droit de la consommation et ces dispositions du secteur protégé
de la construction ne visent pas le même objectif et n'obéissent
pas à la même logique.
28 Cf. Article L.261-15,al .2 de la législation
française.
29 Cf. Article R.261 -15 de la législation
française.
30 Cf. Article R 261-26 de la législation
française.
31 Cf. Art R.261-26 de la législation
française.
32 Cf. Article L.626-27 de la législation
française.
33 Cf. la Loi du 01-02-1995.
34 MAYSON et PADOT « Faut-il rénover le
contrat préliminaire ? ».
En droit de la consommation, la protection est liée
à la situation non professionnelle du contractant, tandis qu'en droit de
la construction elle est liée à la destination de l'immeuble et
à l'existence des versements de fonds avant l'achèvement de la
construction. Or, les deux critères ne coïncident pas
forcément : une personne qui achète des locaux en l'état
futur d'achèvement ne bénéficie pas des règles du
secteur protégé mais par contre un promoteur qui achète un
appartement à construire chez un autre promoteur en profite.
Fusionner les règles des secteurs
protégés avec celles du droit de la consommation surviendrait
à déstructurer profondément les mécanismes
spécifiques du droit de la promotion immobilière. Seule une
réforme globale en la matière pourrait entreprendre une
réelle refonte.
Dans le même contexte la législation
algérienne fait obligation aux souscripteurs de certaines mentions
nécessaires dans le contrat de réservation sous peine de
nullité notamment 35:
- La description de la consistance de l'immeuble où la
fraction de l'immeuble vendu ;
- Le nombre de pièces principales et
l'énumération des pièces de services,
dépendances
et dégagement ;
- La surface habitable de l'immeuble et le cas
échéant celle représentant la fraction cédée
ainsi que sa situation ;
- La qualité de la construction,
- Le prix prévisionnel et les modalités de sa
révision ;
- Les conditions de modalités de payement ;
- Les délais de livraison ;
- Les pénalités de retard ;
- Les garanties et les moyens de financement ;
- La nullité de saurait être invoquée que par
l'accédant.
35 Article 30 de la Loi 86/07 relative à la
promotion immobilière.
On constatera sur une simple lecture que se sont les
mêmes éléments à quelques différences qui
sont cités dans la Loi de 1967 en France ce qui nous emmène
à conclure que ce sont des termes repris dans la législation
française par le législateur algérien et ce sont les
mêmes mentions qui seront plus tard rappelées par le décret
93/03 notamment l'article 10 qui utilise les termes d'acte de vente au lieu
d'acte de réservation qui à notre sens est le même.
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