Section I - La pratique très prisée de
certaines sûretés classiques
De nombreuses sûretés très prisées
sont utilisées dans la pratique bancaire. Nul doute qu'il est tenu
compte, et de la simplicité de constitution, et de la facilité de
réalisation. De la sorte, le banquier tient compte des divers moyens qui
sont mis à sa disposition pour assurer le remboursement du crédit
qu'il consent à son client.
Entre autres garanties très prisées que peut
exiger un banquier dans l'octroi des crédits, l'on peut évoquer
la pratique des assurances (§ I), la domiciliation bancaire des salaires
(§ 2) et enfin, l'escompte des effets de commerce (§ 3).
Les garanties de crédit bancaires au
Cameroun Mémoire de DEA Droit des affaires,
Université de DOUALA, FSJP, 2003 - 2004, Présenté par
Bertin YMELE KEMBOU, Sous la Direction du Dr Jean GATSI et la Supervision de
Prof. MODI KOKO
§ 1 - La pratique des
assurances
L'assurance-crédit est aussi connue sous le nom de
couverture de la garantie de crédit. Elle est née en Europe au
milieu du 1 9ème siècle. Né après la
première guerre mondiale, elle a servi à encourager les
exportations vers des pays jugés trop risqués pour les
échanges en compte ouvert165.
L'assurance crédit connaît un succès sans
cesse croissant tant ses applications sont diverses. En effet, c'est un contrat
par lequel un assureur garantit un créancier contre le risque de non
recouvrement de sa créance. La garantie est due contre le versement
d'une rémunération ou prime à l'assureur, dont le montant
est fonction non seulement de l'importance et de la durée du
crédit, mais aussi de la nature du risque. Ce qui nous conduit d'une
part à étudier la technique des assurances (A) et ensuite le
mécanisme de l'assurance-crédit (B).
A - La technique des assurances
La pratique des assurances dans ce contexte concerne
essentiellement l'assurance-crédit. La technique des assurances est de
manière indéniable très prisée dans la pratique du
commerce international166, où elle couvre des risques divers
et variés. Son expansion sur le plan interne laisse paraître que
c'est un moyen permettant au banquier de sécuriser même les petits
crédits qu'il accorde soit aux entreprises, soit aux
ménages167.
L'assurance crédit demeure une opération
d'assurance168 couvrant les risques engendrés par l'octroi du
crédit. Contrairement à la France où des organismes
spécialisés garantissent les banques contre les risques de non
paiement à l'échéance à l'instar de la
COFACE169, il n'existe, à notre connaissance, pas de
structure pareille au Cameroun à l'heure actuelle. Ce qui nous fait
supposer que soit cette assurance est prise auprès de certains
établissements de crédits par le mécanisme de la
banque-assurance qui est une opération de banque selon le
165Aussi l'expédition des marchandises
à des distances lointaines telles que l'Australie, la
Nouvelle-Zélande et l'Inde nécessitait également ce type
de couverture. Cf Mécanismes d'assurance et de garantie du crédit
à l'exportation, Guide pratique à l'attention des pays en voie de
développement et en transition, service d'appui au commerce, Centre du
commerce international, disponible à la bibliothèque de la
chambre de commerce de Douala.
166Sur la question, voir J. M. MOUSSERON et autres,
op. cit., p. 293 et suivants, n° 675 et suivants.
167 Voir notamment la Décision à
caractère général n° 6/76 du 30 août 1976
fixant les modalités d'octroi des petits crédits
d'équipement et d'investissement, modifiée par la décision
à caractère général n° 2/83 du 9 août
1983.
168 A la seule différence qu'elle n'est malheureusement
pas soumise aux dispositions du code CIMA.
169 Compagnie Française d'Assurance au Commerce
International.
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Decret n° 90/1469 portant définition des
établissements de crédit, soit auprès des compagnies
d'assurances, ce qui est d'ailleurs très rare.
L'assurance crédit est donc un élément
essentiel de l'infrastructure économique. Elle permet aux exportateurs
ainsi qu'à leurs banques d'accepter les risques liés aux
opérations de commerce extérieur, tout en évitant les
risques de sinistre catastrophique. Elle permet également aux
entrepreneurs d'emprunter des fonds pour créer ou développer
leurs entreprises, voire pour couvrir des risques divers.
Ainsi peuvent être couverts par l'assurance
crédit les risques commerciaux d'une part, et les risques politiques
d'autre part. En ce qui concerne les risques commerciaux, il s'agit
principalement de la défaillance et de l'insolvabilité du
débiteur au moment du paiement. La défaillance concerne le non
paiement de la créance à l'échéance. A la demande
du créancier, l'assureur garantit le paiement de la créance
à l'échéance par le débiteur. Cette garantie est
transmise au tiers porteur de la traite, et prend la forme cambiaire de
l'aval170.
Le risque d'insolvabilité du débiteur peut
être constaté par une procédure collective ouverte à
l'encontre du débiteur ou simplement par l'écoulement d'un
délai de carence prévu dans la police d'assurance. «
L'assurance insolvabilité » est une technique financière
encore en pleine expansion. Pour l'instant et sur le plan interne, elle ne
concerne que les opérations de crédit à court terme entre
commerçants. Elle n'est pas encore utilisée en matière de
crédit à la consommation171.
En ce qui concerne les risques politiques, ils sont
liés à des événements naturels, à des
troubles, guerre ou changements politiques remettant en cause les relations
avec l'étranger. La conception des risques de guerre est très
large. Il s'agit en effet de toute situation ou tout événement
susceptible de causer une instabilité dans un Etat172.
D'autres risques politiques peuvent être liés au transit ou au
transport173, et également au transfert174.
170 C'est un mécanisme similaire à celui d'une
lettre de change. D'où l'appellation de « assurance-aval », J.
L. RIVES-LANGE et M. CONTAMINE-RAYNAUD, op. cit., p. 421, n° 425 et J. M.
MOUSSERON, p. 315, n° 748.
171 J. L. RIVES-LANGE et M. CONTAMINE-RAYNAUD, op. cit.
172 Il peut s'agir de guerre, soulèvement, révolte
et autres.
173 Grève ou lock-out entraînant la fermeture du
port de livraison, ce qui peut entraîner ou occasionner le
dépérissement des marchandises.
174 Changement de la parité des monnaies modifiant le prix
initialement prévu, il doit faire l'objet de stipulations
particulières annexées au contrat principal.
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Prof. MODI KOKO B - La mise en oeuvre de l'assurance
crédit
Les échanges commerciaux nationaux et internationaux
étant pour la plupart financés par les banques, la
sécurité des fonds décaissés doit être mise
en avant. Ainsi, une police d'assurance est souscrite pour l'ensemble des
créances en jeu. Elle est souscrite par le créancier ou le
fournisseur, et transmise au banquier au moment où celui-ci
décide de mobiliser la créance de son client. En pratique, ce qui
est transmis au banquier, ce n'est point la police, mais le droit à
indemnité qui y est rattaché175. Ce qui fait que
l'assurance ne couvre que le risque d'insolvabilité définitive et
laisse le souscripteur - fournisseur ou client de la banque - supporter une
partie du non paiement.
Dès que survient le sinistre176, l'assureur
est tenu de payer l'indemnité due au banquier. L'assureur qui a
effectué un paiement est par priorité, subrogé dans les
droits et actions de l'assuré177, notamment ceux
dérivés du contrat178. Ainsi, il dispose d'un recours
contre le débiteur défaillant.
L'assurance crédit peut servir en définitive
trois objectifs : permettre de s'assurer que le paiement a toutes les chances
d'être effectué sans problème ; rassurer la banque sur le
fait que l'emprunteur est prudent et conscient de la nécessité de
protéger son investissement contre des événements qui
risquent d'empêcher le remboursement ; enfin et surtout, faire office de
garantie pour l'obtention d'un prêt.
Une autre forme non moins importante des assurances concerne
les assurances-vie. Elle est utilisée surtout dans le crédit aux
particuliers, en particulier immobiliers. Elle est souscrite par le
débiteur au bénéfice du banquier et garantit non pas le
risque d'insolvabilité, mais celui de décès. Elle
protège à la fois les héritiers et les banquiers,
exposés à une renonciation à la succession. Dans le cas
typiquement Camerounais, l'assurance-vie est le plus souvent utilisée
pour l'obtention du crédit destiné à l'habitat
social179, acquisition des terrains et, amélioration de
l'habitat180. Il est prévu que les parties - banquier et son
client - peuvent conclure d'un
175 Par exemple, lorsqu'un entrepreneur souscrit un contrat
d'assurance-crédit, il reste lui-même assuré avec toutes
les obligations que cela implique.
176 Nom donné à un fait dommageable susceptible de
mettre en oeuvre l'engagement d'un assureur répondant à la
réalisation du risque couvert par une police d'assurance.
177 L'assureur peut opposer au banquier toutes les exceptions
dont il dispose à l'égard de l'assuré.
178 Voir notamment J. M. MOUSSERON et autres, op. cit., p. 315,
n° 750.
179 Décision à Caractère
Général numéro 1/76 du 25 mars 1976 déterminant les
garanties exigées des demandeurs de crédit pour l'habitat social,
modifiée par Décision à Caractère
Général n° 1/92 du 10 avril 1992. Recueil de texte en
matière bancaire au Cameroun, disponible à la bibliothèque
de la BEAC, Douala.
180 Décision à caractère
général n° 6/76 du 30 août 1976, fixant les
modalités d'action de petits crédits d'équipement et
d'investissement, modifiée par la décision à
caractère général n° 2/83 du 9 août 1983.
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commun accord, d'un remboursement trimestriel ou semestriel du
prêt, n'entraînant aucune charge supplémentaire pour le
client181. Mais il n'est prévu aucun organisme spécial
chargé de veiller à la bonne marche de cette technique de
garantie ou de sa mise en oeuvre. Un effort se doit d'être fait à
ce niveau comme c'est le cas du FOGAPE182 pour les petites et
moyennes entreprises. En dehors des assurances, les parties peuvent convenir
d'utiliser aussi comme garantie, la domiciliation bancaire des salaires.
§ 2 - La domiciliation bancaire des
salaires
La domiciliation bancaire des salaires s'applique beaucoup
plus aux crédits consentis aux particuliers. Il s'agit d'une «
attestation de virement irrévocable des salaires ou des revenus ».
La domiciliation consiste en la désignation du domicile où un
effet est payable. Il peut s'agir d'une banque ou d'une bourse. Le
domiciliataire étant ici la banque.
En général, la banque demande au client
emprunteur de faire virer son salaire ou son traitement au compte ouvert dans
ses livres et à maintenir cette domiciliation tant que le crédit
n'est pas remboursé183. En application de la décision
à caractère général numéro 6/76 du 30
août 1976 fixant les modalités d'octroi des petits crédits
d'équipement et d'investissement, modifiée par la décision
à caractère général numéro 2/83 du 9
août 1983, les crédits accordés par les banques et
établissements financiers pour l'acquisition des véhicules
automobiles, du petit équipement et de terrain, pour amélioration
de l'habitat ainsi que pour obligations familiales et (...), sauf disposition
réglementaire contraire, peuvent être garantis par une attestation
de virement irrévocable des salaires ou des revenus.
Lorsque le prêt est accordé au ménage, les
revenus du conjoint peuvent également entrer dans le calcul de la
quotité cessible du demandeur. Il s'agit en effet de ses salaires et
autres revenus. En outre, les parties peuvent aussi convenir d'un remboursement
trimestriel ou semestriel du prêt sans que cela n'entraîne des
charges supplémentaires pour le client184.
181 Article 6 du texte ci-dessus.
182 Fonds d'Aide et de Garantie des Petites et Moyennes
Entreprises. C'est un organisme régi au Cameroun par
le Décret n° 84/5 10 du 13 juin 1984 portant
création et organisation du FOGAPE.
183 F. PELTIER, Introduction au droit du crédit, Banque,
2ème édition, 1990, p. 57.
184 Article 6 de la Décision à Caractère
Général n° 02/83 du 9 août 1983.
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Le banquier trouve dans cette pratique une
sécurité appréciable. La domiciliation des salaires et
certaines créances lui confère une quasi-certitude d'être
remboursé : les mensualités dues au titre du prêt sont
généralement prélevées quelques jours seulement
après le virement au compte du salaire ou du traitement185,
si bien que le compte présente un crédit suffisant pour permettre
le prélèvement186.
Le client demandeur de crédit est-il tenu exclusivement
de « domicilier » ses salaires et revenus chez ce banquier ? Plus
clairement, commet-il une faute s'il domicilie ses salaires et traitements chez
un autres banquier ? Dans la pratique, une clause allant dans ce sens est
insérée dans le contrat de crédit. Et en cas de violation
par le client, le banquier est admis à invoquer la
déchéance du terme et à exiger un remboursement
immédiat au motif que la « dignité du crédit est
altérée »187. D'où la révocation du
crédit. Mais la solution est incertaine lorsqu'il n'existe pas de clause
expresse prévoyant une telle éventualité.
En général, cette garantie est très
prisée pour les crédits à moyen terme (48 mois pour le
crédit automobile, pour l'acquisition du terrain, amélioration de
l'habitat) et à court terme (24 mois pour le petit équipement et
12 mois pour enveloppe familiale188). Ainsi, les clients ayant fait
domicilier leurs salaires bénéficient-ils
généralement d'une ouverture de crédit189. Il
en va de même des effets de commerce déposés pour
escompte.
§ 3 - L'escompte des effets de
commerce190
L'escompte des effets de commerce est une opération par
laquelle un banquier acquiert la propriété d'un effet de commerce
en échange de la remise à son client d'une somme d'argent
correspondant au montant de cet effet, diminuée d'une
rémunération prévue et de la juste compensation de ses
coûts et frais. Selon la pratique, le porteur de l'effet de commerce
185 F. PELTIER, op. cit.
186 J. L. RIVES-LANGE et M. CONTAMINE-RAYNAUD, op. cit., pp.
419-420, n° 424.
187 Ibid.
188 Les enveloppes familiales ont au terme de l'article
3-4°, pour but de faciliter la fondation d'une famille par des prêts
au mariage, et son entretien lors de certains événements comme le
baptême, communion, décès, rentrée scolaire.
189 F. DEKEUWER-DEFOSSEZ, Droit Bancaire, Mémentos Dalloz,
1991, p. 119.
190 Un effet de commerce est un titre négociable qui
constate l'existence au profit du porteur d'une créance à court
terme et sert à son paiement. Il peut s'agir d'une lettre de change,
d'un billet à ordre, d'un cheque ou d'un bordereau nantissement.
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l'endosse191 en propriété à son
banquier qui lui en verse immédiatement le montant nominal sous
réserve de son encaissement à l'échéance.
De cette conception ressort une controverse doctrinale et
jurisprudentielle au sujet de la nature juridique de l'escompte. Une partie de
la doctrine considère l'escompte entre autres comme une cession de
créance ou cession de titre, de prêt, d'un simple endossement ou
d'une véritable opération de crédit192. Du
point de vue de la jurisprudence, les décisions divergent selon que l'on
se retrouve devant la chambre civile ou la chambre criminelle de la Cour de
cassation française. La première considère l'escompte
comme une cession créance, ou il y a transfert de titre en
propriété au banquier193. La seconde s'est
prononcée en faveur d'un prêt194. Mais notre
tâche ici ne consiste pas en l'étalage des diverses controverses,
mais tout simplement en l'étude de l'escompte d'un effet de commerce
considéré comme une garantie du crédit accordé par
le client au banquier. Ce qui nous conduit à l'analyse d'une part, de la
convention d'escompte (A) et d'autre part, du dénouement de l'escompte
(B).
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