Foncier en Afrique : quelle législation foncière comme outil de cohésion sociale et de développement économique ?( Télécharger le fichier original )par W. Paul DABONE Ecole Nationale des Régies Financières du Burkina - Inspecteur des Impôts 2008 |
III - QUELQUES RAISONS DES DIFFICULTES D'INSTITUTION D'UNELEGISLATION FONCIERE UNIQUE L'institution d'une législation foncière est un acte d'abord politique car la législation constitue le support juridique de la politique. Quant à la politique foncière, son choix est déterminé par le projet de société que le politique veut mettre en oeuvre.2 La décision d'institution d'une législation foncière unique a été prise au Burkina, par les autorités politiques qui ont institué la RAF. Les raisons qui semblent avoir rendu cette initiative quasiment impossible pourraient provenir à notre avis, de l'approche de la question foncière par le pouvoir politique. Pour étayer nos assertions, nous rappellerons l'approche des autorités coloniales afin d'établir un parallèle entre elle et l'attitude de l'autorité politique qui a institué la RAF. a) - L'autorité politique coloniale. Les premiers actes règlementaires institués par l'autorité politique coloniale avaient pour conséquence juridique, la non reconnaissance de droits fonciers détenus par la coutume, comme ressemblant au droit de propriété français. Pour ce faire, elle a commencé par instituer 1 `'L'appropriation de la terre en Afrique noire», Editions karthala, Paris, 1991, page 30. 2 `'L'appropriation de la terre en Afrique noire», éditions Karthala, Paris, 1991, page 19. Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - l'immatriculation et la publicité comme seules procédures permettant la naissance et la conservation des droits détenus sur les immeubles et opposables aux tiers.1 L'anthropologue américain Paul BOHANNAN,2 abonde dans ce sens lorsqu'il explique que le colonisateur a approché le droit foncier coutumier avec, a priori, les trois jugements suivants :
Pour rappel, après avoir constaté le manque d'adhésion des populations africaines à ce concept, des procédures intermédiaires ont été instituées pour leur permettre de faire constater, exercer, conserver et convertir au besoin leurs droits fonciers coutumiers. b) - L'autorité politique de la RAF : Son attitude semble être une reprise de celle de l'autorité politique coloniale. Elle annule les droits fonciers coutumiers en faisant entrer les terres détenues en vertu des coutumes dans le DFN. Elle annule l'existence de ces droits en supprimant la procédure prévue par le régime foncier colonial et reprise par celui post colonial pour les purger. Elle laisse cependant les populations `'se débrouiller» avec les responsables coutumiers pour obtenir les terres et n'intervient pour les gérer qu'après que ceux-ci aient donné leur quitus. Les régimes politiques de la Haute Volta colonie française au Burkina Faso ont eu une approche similaire des droits fonciers coutumiers dont la conséquence est la dualité des législations, toute chose qu'ils ont voulu éviter. De notre point de vue, deux raisons expliquent cela : - Le choix politique. Les différentes autorités politiques du Burkina ont fait le choix d'instituer une législation foncière unique. Pour ce faire, la législation foncière coutumière devait disparaître. Ce choix a été opéré dans le but de disposer d'une législation foncière efficace et véritablement au service « du développement et du 1 Décret du 26/07/1 932 modifiant le décret du 24/07/1 906, article 21. 2 « Land, Tenure and Land-Tenure », African Agrarian systems, oxford, 1963, page 106. Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - progrès1 ». Le choix alternatif aurait pu être celui d'une législation foncière unifiée qui rassemblerait les forces de celles qui étaient en présence en s'appuyant sur leurs points convergents et en résolvant les divergences par une action politique continue. - La procédure mise en oeuvre pour instituer la législation foncière unique. Elle a consisté à user de la légalité législative pour annuler la législation foncière coutumière. Une telle approche traite le régime foncier coutumier en ignorant une partie de sa composante : l'aspect religieux. En effet, en réfutant toute prérogatives au régime coutumier, les autorités politiques essaient de combattre le religieux avec le légal. L'histoire du Burkina démontre éloquemment les faiblesses d'une telle approche, que M. OUEDRAOGO Moussa, confirme dans son écrit décrivant l'attitude de ces mêmes autorités lorsqu'elles doivent acquérir la terre rurale2. La mise en place d'une législation foncière unifiée qui accorde à tous les acteurs une part de pouvoir et partant de responsabilité aurait pu être une solution alternative qui aurait permis d'opérer sur l'aspect juridique du régime foncier coutumier, les modifications nécessaires en évitant les contraintes de l'aspect religieux. |
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