Le rétablissement de l'Etat de droit dans une société en reconstruction post-conflictuelle: l'exemple de la sierra léone( Télécharger le fichier original )par Jukoughouo Halidou Ngapna Institut des Droits de l'Homme de Lyon & Université Pierre Mendès France de Grenoble - Master 2, Recherche, Histoire du Droit, Droit et Droits de l'Homme 2007 |
II. Des crises politiques à répétition : coups d'Etat, parti unique et socialisme (1961-1992)La plupart des pays africains ont connu les mêmes difficultés aux lendemains des indépendances. L'application du modèle occidental a souffert dans la plupart de ces pays d'une mauvaise assimilation ou d'un manque de préparation des dirigeants. La corruption et le tribalisme ont souvent été à la base des politiques de gouvernement, ouvrant ainsi la voie aux divers détournements des deniers publics et à la mauvaise répartition des richesses nationales. La relative stabilité de la jeune République sierra léonaise ne survivra pas à la mort du président MARGAÏ qui sera remplacé par son frère Albert MARGAÏ en 1964. Ce dernier est vite confronté à des sérieuses difficultés ; le mécontentement des leaders non Krio qui ont été écartées des rennes du pouvoir commence à déstabiliser le pouvoir en place. Ayant de solides attaches dans l'armée, ils conduiront pas moins de quatre coups d'Etat qui emmèneront brièvement Siaka STEVENS à la tête du pays entre 1967 et 1968. Ce dernier reviendra au pouvoir en 1971 à la faveur d'un énième coup d'Etat et installera un modèle autocratique qui élimine progressivement toute opposition. La création de l'All People's Congress23(*) (APC) en 1978 viendra couronner cette démarche d'instauration d'un parti unique qui définira la politique de l'Etat mise en oeuvre par le gouvernement. C'est une administration à la socialiste. L'Etat providence prôné par le président STEVENS sera vite sujet à la corruption, aux détournements de la part des ministres et aux trafics en tous genres. Tous ces facteurs aggravés par l'inflation galopante due à la dette extérieure exorbitante et à une masse monétaire sans cesse en augmentation causeront de graves pénuries et une tension considérable au sein de la population. Le mauvais état de santé du président facilitera sa mise à l'écart par Joseph MOMOH qui tentera de redresser l'économie et de rétablir la démocratie. L'armée se fera l'écho de l'impatience de la population et des appétits croissants des militaires. L'échec du coup d'Etat de 1987 poussera le gouvernement à prendre des mesures drastiques et à instaurer un « état d'urgence économique » qui se terminera par le rétablissement du multipartisme et l'organisation des élections générales en 1992. Mais entre temps, les multiples restrictions rigoureuses imposées à la population de plus en plus miséreuse, qui doit aussi supporter l'afflux massif des populations civiles du Libéria voisin qui fuient la guerre civile, exacerbent les tensions. Pour punir la Sierra Léone de sa participation à la force d'interposition dans son pays, afin de s'assurer d'une base arrière solide et de bénéficier des richesses du pays voisin, Charles TAYLOR24(*) facilitera en 1991 la création d'un mouvement rebelle qui attaquera le pays par l'Est. * 23 Le parti de tous les Sierra Léonais. * 24 Voir le rapport de l'International Crisis Group, « Sierra Leone : Time For a New Military and Political Strategy, » rapport n° 28, du 11 avril 2001 et les charges présentes dans l'acte d'inculpation Prosecutor Vs Charles Ghankay TAYLOR, SCSL-03-02 du 7 mars 2003. |
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