La presse quotidienne nationale européenne peut-elle tirer profit du Web 2.0 ?( Télécharger le fichier original )par Marc LEIBA Institut des hautes études en communications sociales de Bruxelles - DESS de Journalisme Européen 2007 |
3. Quels modèles économiques à l'ère du Web 2.0 ?3.1. Deux versants, trois possibilitésNous l'avons rappelé, l'industrie de la presse a classiquement le choix pour se financer de faire payer le lecteur et / ou de démarcher des annonceurs. Sur Internet, les sites de journaux se sont retrouvés en face de trois options : facturer l'intégralité des contenus, proposer à l'inverse un accès libre à toutes les ressources du site et enfin composer une offre mixte. 3.1.1. Le tout payantLe Web 2.0 se caractérise comme on l'a vu par son esprit de fraternité numérique, d'ouverture, de communauté libre. L'argent n'y a pas cour, du moins pas entre l'internaute et le prestataire de service. Ce sont plutôt des conseils, de l'entraide, des connaissances qui font office de devise. Dans ce contexte, difficile de lever un impôt sur le contenu, par trop impopulaire, alors que les éditeurs avaient habitué l'internaute à la gratuité des informations. Un autre élément de taille plaidait en faveur du refus de cette solution. En effet, l'information, « par essence tout ce qui peut être numérisé, c'est-à-dire encodé en flux de bits » (ATTIAS, 2007) appartient à la catégorie de ce que les économistes appellent les biens d'expérience. Par bien d'expérience on entend des « biens qu'on ne connaît véritablement qu'après les avoir consommés » (BOMSEL, 2007, 184). La gratuité de contenus, même de qualité, surtout de qualité, permet ainsi à l'éditeur de donner un gage de transparence aux internautes et de lever l'incertitude quant à la valeur des informations proposées. La gratuité est en tout cas une étape vers une éventuelle tarification de l'offre, une période où l'éditeur fait ses preuves en matière de crédibilité éditoriale sur un autre support. Néanmoins, certains éditeurs parviennent à tirer leur épingle du jeu et à facturer la majorité de leurs ressources en ligne. Suivant l'exemple heureux du Wall Street Journal, le groupe britannique Pearson s'est décidé à appliquer ce modèle à ses sites d'information économique dont ft.com et lesechos.fr. Cette option est quasi exclusivement le fait d'éditeurs de presse spécialisée, car les informations qu'ils produisent bénéficient d'une forte valeur ajoutée en comparaison de l'information politique et générale, disponible en abondance sur la toile. Par exemple, Pearson indique qu'en 2005, le site Internet du Financial Times comptait 84 000 abonnés payants et que la publicité en ligne a progressé de 27 % par rapport à 200436(*). De plus, le ft.com a été visité en moyenne par 2,8 millions de visiteurs uniques par mois, soit une hausse de 33 % par rapport à l'exercice précédent (Les Echos, 28/02/2007). Quant au site Internet du premier quotidien économique français, lesechos.fr revendiquent 1,2 million de visiteurs uniques en moyenne par mois au cours de l'année 2006, et annoncent une profitabilité supérieure à 10 % (Challenges, 03/07/2007). Comme pour leur version imprimée, les quotidiens économiques jouissent d'un avantage comparatif certain par rapport à la PQN généraliste. L'information est de qualité en plus d'être facturée à des prix relativement élevés. Le ft.com propose des formules annuelles d'abonnement en ligne allant de 120 euros pour le service minimum (articles et archives) à 549 euros pour la formule premium (nombreux services financiers supplémentaires), et 365 euros pour lesechos.fr. Mais même sur Internet, le prix de ce genre d'abonnement n'est pas une barrière à l'achat puisque le coût est la plupart du temps supporté par l'entreprise et non pas par les particuliers. * 36 Pearson, rapport annuel 2005 |
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