PARTIE I
CONSECRATION DE L'ETUDE D'IMPACT
ENVIRONNEMENTAL AU CAMEROUN
Les questions environnementales apparaissent comme une
préoccupation des plus actuelles des relations internationales vu le
nombre de concertation d'envergure internationale qui y est consacré
depuis la fin des années 70. La question écologique appelle
aujourd'hui et davantage demain l'intervention de tous les acteurs sociaux dont
les Etats, les organisations internationales gouvernementales et non
gouvernementales, la société civile et les particuliers. Le motif
de cette interpellation étant sérieux - car l'environnement dans
lequel nous vivons se porte mal -, il s'impose la nécessité pour
les Etats, principaux acteurs de Doit International, et plus
particulièrement pour le Cameroun de jeter les bases juridiques d'une
protection de l'environnement (chapitre I), lesquelles définiront,
conformément aux normes du DIE les moyens et méthodes de sa mise
en oeuvre (chapitre II).
CHAPITRE I : LES FONDEMENTS DE L'EIE AU CAMEROUN
Les préoccupations environnementales ont
été consacrées par le DIE dans la Déclaration de
Stockholm (1972) en son principe 1 :« l'homme a un droit fondamental
à la liberté, à l'égalité et à des
conditions de vie satisfaisantes, dans un environnement dont la qualité
lui permette de vivre dans la dignité et le bien-être ».
De même que dans la Déclaration de Rio (1992) en son principe 1 :
« les êtres humains (...) ont droit à une vie saine et
productive en harmonie avec la nature ».
Le droit à un environnement sain, de qualité
convenable pour le développement de la personne, écologiquement
équilibré ou approprié au développement de la vie
concerne non seulement les hommes, mais aussi les
éléments de la nature qui l'entourent dans la
mesure où ils forment un tout écologiquement indissociable. C'est
pourquoi les lois29 et règlements30 nationaux
conformément au DIE organisent le droit de chacun à un
environnement sain.
Le nouveau droit à un environnement sain concerne les
générations présentes. Mais
l'irréversibilité de certaines atteintes au milieu naturel et aux
espèces
animales et végétales affecte
nécessairement les générations futures. La
consécration juridique de la prise en compte du long terme est la
reconnaissance du droit des générations présentes de
protéger l'environnement sur le long terme en
préservant les biens du patrimoine commun31.
Car il faut le souligner,
l'environnement est désormais considéré
comme un patrimoine commun de l'humanité. Et parce que
considéré comme tel, sa préservation doit être
l'affaire de tous et la notion de développement durable est là
pour nous le rappeler. La Déclaration de Rio en a fait allusion dans ses
principes 3 et 432 . Une définition de cette notion est
donnée par la Commission Mondiale sur L'Environnement et le
Développement, « le développement durable est un
développement qui répond aux besoins du présent sans
compromettre la capacité des générations futures à
répondre aux leurs »33.
Comme le soulignait fort à propos M. KAMTO,
l'étude d'impact est assurément l'institution la plus
spécifique et sans doute aussi la plus originale du Droit de
l'Environnement. Elle est au coeur du développement
durable34.
Selon la Déclaration de Rio, l'intégration des
préoccupations environnementales dans toutes les autres politiques de
développement35 doit être
29 Voir notamment le Préambule de la Constitution du
Cameroun ; la loi n°001 du 16 avril 2001 portant Code Minier au chapitre V
du titre V, article 85 à 88 ; la loi n° 99/013 Du 22
Décembre 1999 portant code pétrolier en son chapitre II, titre V,
article 82 et 83
30 Voir le décret n° 2000/465 du 30 juin 2000
fixant les modalités d'application de la loi no 99/013 du 22
décembre 1999 portant code pétrolier qui consacre tout un titre
(Titre X) tout entier à la protection de l'environnement et les mesures
de sécurité. Le chapitre III de ce titre X traite
spécialement de l'étude d'impact environnemental en ses articles
67 à 72.
31Cours tronc commun de M. Prieur sur les Principes
Généraux du Droit de l'Environnement, Master de Droit
International et Comparé de l'Environnement, actualisation 2004/2005.
32Principe 3 : « Le droit au
développement doit être réalisé de façon
à satisfaire équitablement les besoins relatifs au
développement et à l'environnement des générations
présentes et futures >> ; Principe 4 :« Pour
parvenir à un développement durable, la protection de
l'environnement doit faire partie intégrante du processus de
développement et ne peut être considérée comme
isolément >>.
33Commission mondiale sur l'environnement et le
développement, 1988
34M.KAMTO, « Droit de l'environnement en
Afrique >>, Edicef, 1996, p.95
35Principe 4 de la déclaration de Rio
(1992).
une réalité. C'est ainsi que son intégration
dans toutes les décisions publiques et privées doit être
une exigence fondamentale pour garantir le développement durable.
L'intégration des considérations
environnementales dans les politiques et activités de
développement économique et social, a émergé de
façon significative au niveau de la Communauté Internationale au
cours de la Conférence de Stockholm de 1972 sur les
établissements humains. C'est ainsi que la Division du
Développement Durable de la Commission Economique des Nations Unies pour
l'Afrique a, dans le cadre de la mise en oeuvre de son programme biennal
2004-2005, intégré l'évaluation de la pratique des EIE en
Afrique dans son programme d'activités36. Le Cameroun pour sa
part a entrepris un certain nombre de réformes institutionnelles
intégrant des normes de protection de l'environnement.
La mise en place des réformes institutionnelles a
permis entre autres, l'institutionnalisation des études d'impact
environnemental comme outil pour la quête du développement
durable37, grâce notamment à la mise en place d'un
cadre juridique spécifique (section I) et celle d'un cadre
institutionnel (section II).
SECTION I : LES FONDEMENTS NORMATIFS
La normalisation constitue l'une des techniques de
réglementation les plus prisées à l'heure actuelle en
droit de l'environnement38. Cependant cette notion a un statut
ambivalent. Les normes environnementales peuvent être soit juridiques,
« énoncé sous forme de langage, incorporé
à un ordre juridique et dont l'objet est soit de prescrire à des
sujets de droit une obligation de faire ou de ne pas faire, soit d'accorder
à ces sujets des autorisations de faire ou de ne pas faire, soit
d'habiliter des organes de l'ordre juridique à exercer certaines
activités selon une certaine procédure39 » ;
soit techniques, dispositions particulières, sous forme de
chiffres, taux, tableaux et listes qui ont pour objet de préciser la
portée des normes générales de portée plus
juridique. Il peut s'agir, selon l'avis général, soit de
substance dont le rejet dans un milieu donné est interdit ou
réglementé, d'espèces qu'il convient de protéger
intégralement ou partiellement40, on parlera selon le cas
alors de normes de qualité, de produits, de procédés ou
d'émission41. Mais, ce ne sont pas de ces dernières
qu'il s'agit dans cette section. Il est question ici du premier type de
normalisation, c'est-à-dire les normes juridiques.
EIles s'articulent autour des normes à caractère
internationales (§-1) et celles à caractère nationales
(§-2).
36L e rapport sur la pratique des EIE au Cameroun
préparé pour la Commission Economique pour L'Afrique des Nations
Unies rédigé par Dr TEKEU Jean-Claude est édifiant
à ce sujet.
37La notion de développement durable
revêt trois dimensions : économique, social et environnementale
38Stéphane DOUMBE-BILLE, thème II : `la
normalisation environnementale' in Séminaire de formation aux textes
juridiques (1er atelier), Yaoundé, Brain Trust, 2003,
p.29.
39Dictionnaire de Droit International Public,
Bruylant, Bruxelles, 2001 p.752.
40Stéphane DOUMBE-BILLE, idem.
41 Dictionnaire de Droit International Public, p. 756
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