Cet autre projet, exemple type de réalisation d'EIE
était un projet routier. La situation géographique (1) de cette
région a permis de mettre sur pied un plan de gestion de
l'Environnement156 (2) qui malheureusement comme toute oeuvre
humaine présentait des limites (3).
1- Situation géographique et écologique
du projet
La route Bertoua-Garoua Boulaï longue de 258 km, est
située dans l'Est du Cameroun. C'est une région dont les biotopes
rencontrés sont constitués de vestiges dégradés de
la forêt, de la savane arbustive ou herbeuse sillonnée d'une
réserve de galerie forestière. Sur le plan faunique, les grands
mammifères sont rares et la petite faune quant à elle est
très riche, avec toutefois peu d'espèces rares ou
menacées. La région appartient au domaine des sols
ferralitiques.
Sur le plan hydrographique, il y a l'existence de plusieurs
cours d'eau appartenant soit au bassin du Congo, soit au bassin de la Sanaga.
La région possède un climat tropical humide ou
sub-équatorial à quatre saisons avec une température
moyenne annuelle de 1 564 mm. Le peuplement de la zone est
caractérisé par une ethnie majoritaire des Gbaya157
qui vivent dans les villages sédentaires et pratiquent l'agriculture
itinérante sur brûlis, qui est l'un des obstacles majeurs pour la
conservation des écosystèmes forestiers dans la région.
2. La réalisation du projet et le PGE
a) La réalisation du projet
Initiée en 1992, l'étude d'impact
environnemental de la route a été réalisée par le
Bureau d'étude TRATEBEL sur fonds et supervision de l'Union
Européenne. L'étude a permis d'identifier des impacts
négatifs sur l'environnement biochimique et socio-économique,
ainsi que des impacts positifs notamment la facilité et la
réduction
155 Rapport sur la pratique des Etudes d'Impact Environnemental
(EIE) au Cameroun, décembre 2004, p.21-22
156 Ce projet intervient comme le précédent
à une date antérieur à la Loi-cadre du 05 août 1996
157 Cette région est en outre composée des
Képéré, des Pol subdivisé chacun en clans.
des coûts de transport, l'augmentation des revenus des
populations riveraines, l'accès facile aux formations sanitaires.
Parallèlement, un plan de gestion environnemental a
été proposé pour l'étude et s'articulant autour des
impacts ci-après :
· compensation des cultures et tombes sous l'emprise des
travaux ainsi que des maisons ;
· programme de sensibilisation en matière de
transmission des maladies sexuellement transmissibles et du VIH/S IDA ;
· diminution des impacts visuels et de l'érosion par
les banquettes ;
· contrôle de la pollution atmosphérique par
arrosage ;
· contrôle de la pollution des sols par les
hydrocarbures grâce à la construction d'une aire de stockage ;
· la minimisation de la destruction du couvert
végétal par le marquage systématique des arbres et pour
des programmes de plantation d'arbres ;
· la réduction du risque d'accident en imposant une
limitation des vitesses et en construisant les ralentisseurs ;
· la protection du patrimoine culturel et
archéologique par l'intégration d'un volet surveillance
archéologique ;
· la résolution des conflits sociaux entre
riverains et le personnel du chantier grâce au recrutement des villageois
et l'utilisation des tâches à haute intensité de
main-d'oeuvre.
L'étude a été réalisée
conformément aux directives de l'Union Européenne et du
Ministère Camerounais des Travaux Publics'58. En l'absence du
Comité Interministériel de l'Environnement'59, seul le
Bailleur de fonds'60 a approuvé l'étude.
b) La mise en oeuvre du PGE
Concernant la mise en oeuvre du Plan de Gestion
Environnemental, les activités y relatives ont été
exécutées par l'entreprise en charge des travaux, mais
également par quatre autres prestataires de services pour les volets des
mesures d'accompagnement, le tout sur la supervision du volet environnement de
la Mission de Contrôle des travaux.
Les opérations environnementales mises en oeuvre par
l'entreprise, ont porté essentiellement sur :
· L'élaboration d'un plan de gestion
environnemental de l'entreprise comprenant entre autres : le règlement
intérieur pour le respect de l'environnement par le personnel du
chantier ; le plan sanitaire et sécuritaire ; le plan de gestion de
déchets ; l'intégration des bases vie dans la nature ; le plan
d'abattages des arbres ; le plan de protection de l'environnement des sites ;
les mesures liées aux dégagements d'emprises ; le recalibrage des
lits des rivières ; le
158 C 'est le ministère sectoriellement compétent
car il s'agit d'un projet routier
159 Ce comité a été créé
quelques années plutard et plus précisément par le
décret du 3 septembre 2001. 160 Il s'agissait dans le cas
d'espèce de l'Union Européenne.
revêtement des talus en terre végétale ;
la remise en l'état des différentes aires ; la remise en
l'état des sites de carrière en roche massive ; l'expertise des
biens ; le rétablissement des accès des riverains ; les actions
de lutte contre la pollution des milieux récepteurs et les nuisances qui
en résultent ;
· Le volet d'accompagnement du projet relatif à
la prévention des MST/SIDA, comprenant l'étude du milieu, la
formation des pairs éducateurs et la sensibilisation des groupes cibles,
la mise à disposition des préservatifs et la prise en charge
psychosociale, le suivi évaluation. Son exécution a
été confiée à Une Organisation Non
Gouvernementale161 française ;
· Le volet surveillance archéologique a
été réalisé par l'Institut de Recherche pour le
Développement (ORSTOM/IRD), conjointement avec l'université de
Yaoundé I et le Ministère camerounais de la Culture. Ce volet
comprenait, le repérage des vestiges mobiliers de surface,
l'évaluation de l'ampleur des vestiges sur le plan chronologique et leur
état de conservation, la réalisation de sondage et, l'analyse et
le traitement des données ;
· Pour ce qui est du volet plantation d'arbres à
finalité sécuritaire et paysagère, il a été
mis en oeuvre par l'ONG AFVP et par les deux cabinets privés: JMN
consultant et FORM Ecology consultant. Les activités de ce volet
comprenaient la sensibilisation et l'animation des populations et élites
locales; l'analyse des sols et le choix des espèces à planter ;
la production des plants ; la plantation ; l'entretien et le suivi.
Cette mise en oeuvre du plan de gestion environnemental a
donné des résultats dont les principaux sont :
· près de 170 hectares de talus de remblais
engazonnés ;
· plus de 23 000 arbres d'écran paysager
plantés à l'entrée des aires d'occupation temporaire de
l'entreprise et 15 000 arbres sécuritaires plantées dans les
traversées de villages ;
· environ 90 000 litres d'huiles usagées
collectées puis recyclées en industrie.
A côté de ces résultats quantifiables, il
y aurait lieu de relever d'autres résultats tout aussi importants mais
difficilement quantifiables, notamment :
· la disponibilité des données
archéologiques susceptibles d'être exploités pour
la
conception d'une politique nationale de protection du patrimoine culturel ;
· le début d'une prise de conscience chez les
populations riveraines en matière de protection de l'environnement et
des dangers des maladies sexuellement transmissibles et du VIH/SIDA.
161 jl s'agit de l'Association Française des Volontaires
de Progrès en agrégé AFVP.
3- Les faiblesses du projet
Malgré les résultats positifs relevés
plus haut, des faiblesses ont été relevées lors de la mise
en oeuvre des actions environnementales du projet. Parmi celles-ci, figurent en
particulier :
· les faibles capacités des populations riveraines
à comprendre et à participer activement aux actions de protection
de l'environnement162 ;
· les capacités insuffisantes de l'entreprise
à mettre en oeuvre correctement et efficacement les prescriptions
environnementales, faute d'un personnel spécialisé;
· l'imprécision des clauses environnementales du
marché de l'entreprise, du fait d'une prise en compte insuffisante ou
inappropriée des prescriptions du plan de gestion environnement de
l'étude d'impact ;
· l'absence d'un plan de suivi et de surveillance de
l'impact à long terme des résultats de la mise en oeuvre du plan
de gestion environnementale.
Ces deux projets, l'un touchant l'exploitation du
pétrole et l'autre le domaine routier sont des exemples de
réussite d'EIE au Cameroun. En effet, même s'ils ont
été réalisés antérieurement à la mise
en fonctionnement du Comité Interministériel de
l'Environnement163, ils l'ont été conformément
aux directives et normes internationales en vigueur en la matière. Tel
fut le cas également du projet de réalisation du barrage de Lom
Pangar.