Essai sur la diffusion du modèle européen du procès équitable à la politique uniforme de résolution des litiges relatifs aux noms de domaine " UDRP "par Yassin EL SHAZLY Université Lumière-Lyon 2 - Master 2 recherche, mention ? Droits de l?Homme ? 2006 |
§i. L'égalité des armesLe droit a un procès équitable inclut le respect du principe d'égalité des armes1. Cela signifie que chaque partie doit se voir offrir une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport a son adversaire2. Un juste équilibre doit donc être maintenu entre les parties pour rendre la justice effective3. L'effectivité apparalt comme la scour jumelle de 1 Hélène SURREL, <<L&égalité des armes >>, in La diffusion du modèle européen du procès equitable, op. cit., pp. 299- 329. 2 Dans une série d&arrêts de condamnation ("Borgers c/ Belgique" du 30 octobre 1991"; "Lobo Machado c/ Portugal" du 20 février 1996; "Vermeulen c/ Belgique" du 20 février 1996 ; "Van Orshoven c/ Belgique" du 25 juin 1997, "KDB et JJ c/ Pays-Bas" du 27 mars 1998, et enfin "Reinhardt et Slimane Kaid c/ France" du 31 mars 1998), la Cour européenne a mis en cause le role du Parquet près les Cours de cassation, en reprochant aux avocats généraux auprès des Cours suprêmes de ne pas respecter le principe de l'égalité des armes entre toutes les parties au sens de l'article 6-1 de la Convention européenne, et en leur faisant grief notamment : d'avoir communication du rapport et des projets des conseillers rapporteurs, alors que les autres parties n'y ont pas accès ; de ne pas communiquer leurs conclusions écrites aux parties a la procédure; d'avoir la parole en dernier a l'audience ; d'assister ensuite au délibéré avec les magistrats du siège. 3Voir, parmi d'autres, l'arrêt Ankerl c. Suisse du 23 octobre 1996, § 38, disponible sur http://cmiskp.echr.coe.int/tkp197/search.asp?sessionid=906223&skin=hudoc-fr (consulté le 15 juin 2007). l'équité1.Dans son arrêt Delcourt du 17 janvier 1970, le juge européen a annoncé que malgré le silence de l'article 6, l'égalité des armes fait partie essentielle de la notion du procès équitable: le principe de l'égalité des armes n'épuise pas le contenu de ce paragraphe; il ne constitue qu'un aspect de la notion plus large de procès équitable devant un tribunal indépendant et impartial ))2. Dans l'affaire DeHaes et Gi9sels c. Belgique, la Cour a rappelé la signification de ce principe qui suppose un équilibre entre les parties: le principe de l'égalité des armes - l'un des éléments de la notion plus large de procès équitable - requiert que chaque partie se voie offrir une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport a son adversaire ))3. Selon la Cour l'exigence de l'égalité des armes, au sens d'un <<juste équilibre>> entre les parties, vaut en principe aussi bien au civil qu'au pénal4. Ce principe implique que les parties puissent participer a égalité a la recherche de la preuve5, et il suppose, en outre, que les parties disposent des mêmes moyens pour faire valoir leurs arguments6. 1 Bertrand FAVREAU, <<Aux sources du procès équitable ; une certaine qualité de la justice >>, in Le procès équitable et la protection juridictionnelle du citoyen, op. cit., pp. 7-21. 2 CEDH, du 17 janvier 1970, Delcourt c. Belgique, § 28, disponible sur http: cmiskp.echr.coe.int tkp197 view.asp?item=1&portal=hbkm&action=html&highlight=delcourt&sessionid=899 542&skin=hudoc-fr (consulté le 15 juin 2007). 3 CEDH, 24 février 1997, DeHaes et Gi9sels c. Belgique, § 53, disponible sur http: cmiskp.echr.coe.int tkp197 view.asp?item=1&portal=hbkm&action=html&highlight=DeHaes%20%7C%20et% 20%7C%20Gijsels%20%7C%20c.%20%7C%20Belgique&sessionid=899542&skin=hudoc-fr (consulté le 15 juin 2007). 4CEDH, 27 octobre 1993, Dombo Beheer B.V. c. Pays-Bas, requête no14448/88, § 30, disponible sur http: cmiskp.echr.coe.int tkp197 view.asp?item=1&portal=hbkm&action=html&highlight=dombo&sessionid=8995 42&skin=hudoc-fr (consulté le 15 juin 2007). 5Tel n'est pas le cas, par exemple, lorsque au cours du procès en première instance, le Ministère public décida, sans en informer le juge, de ne pas divulguer certaines preuves au nom de l'intérêt public. CEDH, 16 janvier 1993, Rowe et Davis c. Royaume-Uni, disponible sur http://cmiskp.echr.coe.int/tkp197/search.asp?sessionid=899.'42&skin=hudoc-fr (consulté le 15 juin 2007). 6Tel n'est pas le cas, par exemple, lorsqu' une partie est empêchée de répondre aux observations écrites présentées au tribunal constitutionnel par l'avocat de l'Etat. CEDH, 23 juin 1993, Ruiz-Mateos c. Espagne, § 63 disponible sur http://cmiskp.echr.coe.int/tkp197/view.asp?item=1&portal=hbkm&action=html&highlight=RuizMateos%20%7C%20c.%20%7C%20Espagne&sessionid=899542&skin=hudoc-fr (consulté le 15 juin 2007). 6CEDH, 30 octobre 1991, Borgers c. Belgique, § 24, disponible sur http://cmiskp.echr.coe.int/tkp1q7/search.asp?sessionid=8qq.'42&skin=hudoc-fr (consulté le 15 juin 2007). Par exemple, dans l'affaire Dombo Beheer B.V. c Pays-Bas1, le requérant, une société a responsabilité limitée, avait intenté une action civile contre une banque pour prouver l'existence d'un accord verbal lui accordant des facilités de crédit sur compte courant. Deux personnes uniquement avaient assisté a la réunion au cours de laquelle cet accord aurait été passé : l'une représentant le requérant et l'autre la banque. Toutefois, seule la personne représentant la banque avait été autorisée par le tribunal national a déposer comme témoin. La société requérante s'était vue refuser le droit de citer son représentant au motif que celui-ci s'identifiait a elle. Les Juges de Strasbourg, cependant, relevèrent que, pendant les négociations pertinentes, les deux représentants avaient agi sur un pied d'égalité, chacun d'eux étant habilité a traiter au nom de son mandant et que l'on voyait mal, dès lors, pourquoi ils ne purent pas déposer tous les deux. La société requérante ayant ainsi été placée dans une situation de net désavantage par rapport a la banque, la CEDH conclut a une violation de l'article 6(1). D'ailleurs, l'égalité des armes en tant que composante2 de la notion du droit a un procès équitable est associé aussi au principe de contradictoire, c'est-à-dire la faculté pour une partie a une instance civile de prendre connaissance des observations ou pièces produites par l'autre, ainsi que de les discuter: le principe de l'égalité des armes représente un élément de la notion plus large de procès équitable, qui en globe aussi le droit fondamental au caractère contradictoire de l'instance ))3. Dans ce contexte, les apparences d'une bonne justice doivent faire une attention particulière au principe de 1Dombo Beheer B.V. c. Pays-Bas, précité. 2 En mettant en ouvre les principes fondamentaux du droit communautaire, la CJCE dépasse le cadre de l'article 6 tel qu'il est appliquée par la CEDH. Cette extension est centrée principalement au respect des droits de la défense comme une composante de la notion du procès équitable. Dans l'arrêt Fiskano du 29 juin 1994, la CJCE a jugé que << le respect des droits de la défense dans toute procédure ouverte a l' encontre d'une personne et susceptible d'aboutir a un acte faisant grief a celle-ci constitue un principe fondamental du droit communautaire et doit être assuré, même en l'absence de toute réglementation concernant la procédure en cause . Fiskano AB c. Commission des Communautés européenne, C-135/92, disponible sur lex.europa.eu/smartapi/cgi/sga doc?smartapi!celexplus!prod!CELEXnumdoc&lg=fr&numdoc=61992J0135 (Consulté le 15 juin 2007) : V0 également, Jean-Pierre SPITZER, <<Le procès équitable devant la cour de justice des communautés européennes >>, in Le procès équitable et la protection juridictionnelle du cito yen, op. cit., pp. 101-114. 3 Ruiz-Mateos c. Espagne, précité § 63 ; l'arrêt Brandstetter c. Autriche du 28 aoüt 1991, § 66 disponible sur http://cmiskp.echr.coe.int/tkp197/view.asp?item=1&portal=hbkm&action=html&highlight=RuizMateos%20%7C%20c.%20%7C%20Espagne&sessionid=899542&skin=hudoc-fr (consulté le 15 juin 2007). l'égalité des armes et de contradictoire comme l'essence du droit de la défense1. Ces principes concernent tant les procédures civiles que pénales2. Par ailleurs, il faut noter que selon la jurisprudence de la CEDH, il y une distinction a la fois théorique et aussi pratique entre l'égalité des armes et le principe de contradictoire. D'une part, l'égalité des armes, au sens de juste équilibre entre les parties, ne s'applique qu'entre les parties en litige et non pas entre une partie et une juridiction indépendante3. Par contre, le principe de contradictoire concerne non seulement les parties entre elles, mais aussi les parties et le ministère public4, et même les parties et une juridiction indépendante, et les parties et un tiers a la procédure, et 1 CEDH, 30 octobre 1991, Borgers c. Belgique, § 24, disponible sur http: cmiskp.echr.coe.int tkp197 view.asp?item=1&portal=hbkm&action=html&highlight=Borgers%20%7C%20c.% 20%7C%20Belgique&sessionid=899542&skin=hudoc-fr (consulté le 15 juin 2007). 2 Pourtant dans les affaires pénales, le principe de l'égalité des armes se confond partiellement avec les garanties spécifiques de l'article 6(3) et il lui est accordé une portée beaucoup plus large. Par exemple, la CEDH a conclu, en l'affaire Bönisch c. Autriche, a la violation de l'article 6(1) parce qu'un témoin cité par la défense ne s'était pas vu accorder les mêmes prérogatives qu'un autre témoin expert désigné par l'accusation. CEDH, 6 mai 1985, Bönisch c. Autriche, disponible sur http://cmiskp.echr.coe.int/tkp1q7/search.asp?sessionid=8qq.'42&skin=hudoc-fr (consulté le 15 juin 2007). En outre, la Commission a estimé, dans l'affaire Jespers c. Belgique, que le principe d'égalité des armes ainsi que l'article 6(3)b imposaient l'obligation aux autorités d'instruction et d'investigation de communiquer tous les éléments pertinents qu'elles détiennent ou auxquels elles ont accès, susceptibles d'aider l'accusé a se disculper ou a obtenir une atténuation de sa peine. Cette règle s'étend même aux éléments susceptibles de saper la crédibiité d'un témoin de l'accusation. Dans l'affaire Foucher c. France du 18 mars 1997, la CEDH affirma que lorsqu'un défendeur désireux d'assurer luimême sa défense se plaint d'une atteinte a ses droits de la défense, en ce qu'il n'aurait pu ni accéder a son dossier pénal ni obtenir une copie des pièces y figurant, et se révèle par conséquent incapable de préparer une défense adéquate, ily a violation du principe d'égalité des armes combiné a l'article 6(3). 3 CEDH, 18 février 1997, Nideröst-Huber c. Suisse, n° 104/1995/610/698, disponible sur http://cmiskp.echr.coe.int/tkp197/view.asp?item=1&portal=hbkm&action=html&highlight=Nider%F6stHuber&sessionid=906223&skin=hudoc-fr (consulté le 15 juin 2007). 4 Dans un arrêt en date du 3 octobre 2006, la Cour européenne des droits de l&homme a condamné la France pour rupture de l&égalité des armes en ce qu&elle permet au Procureur général d&exercer son droit d&appel pendant 2 mois a compter de la date du jugement (art. 505 C. proc.pén.), alors que le délai accordé au prévenu pour faire appel n&est pas aussi long. La Cour contredit ainsi la jurisprudence de la Cour de cassation aux termes de laquelle "le délai plus long dont bénéficie le ministère public pour faire appel n&est pas contraire a l&exigence d&un procès équitable posé par l&article 6-1 Conv. E.D.H. dès lors que le prévenu bénéficie également d&un droit d&appel et d&un délai lui permettant de l&exercer utilement" (Crim., 27 juin 2000, Bull. crim., n°243). CEDH, BEN NACEUR c. FRANCE, 3 octobre 2006, requête no 63879/00, disponible sur http://fdv.univ-lyon3.fr/publication/gazette/C.E.D.H. 3 octobre 2006.pdf (consulté le 15 juin 2007). couvre toute les phases de la procédure, y compris celle de l'expertise technique si celleci a une influence prépondérante sur la décision du juge1. D'autre part, le juge européen distingue entre l'égalité des armes et le contradictoire en matière de communication des pièces aux parties. En principe, le déséquilibre d'informations est sanctionné sur la base du principe de l'égalité des armes, et l'égal défaut de transmission d'information sur la base du droit a une procédure contradictoire2. Par exemple, l'affaire Van Orshoven c. Belgique3 concernait un docteur en médecine faisant l'objet d'une procédure disciplinaire. Le requérant avait interjeté appel contre une décision prononçant sa radiation du tableau de l'ordre des médecins, mais la Cour de cassation avait rejeté son pourvoi. Il se plaignait qu'à aucun moment de la procédure devant la Cour de cassation, il n'avait pu répondre aux conclusions de l'avocat général (qui ne lui avaient d'ailleurs même pas été communiquées). Les Juges de Strasbourg estimèrent que, compte tenu de l'enjeu de la procédure pour le requérant et de la nature des conclusions de l'avocat général, l'impossibilité pour l'intéressé d'y répondre avant la cloture de l'audience avait méconnu son droit a une procédure contradictoire. Celui-ci implique en principe la faculté pour les parties a un procès de prendre connaissance de toute pièce ou observation présentée au juge et de la discuter. Partant, il y a avait eu violation de l'article 6(1). |
|