B/ Les liens entre les grandes variables
économiques
Avant de traiter des relations de « causes à
effets » entres les variables économiques majeures, il serait
judicieux de s'arrêter sur les phénomènes
économiques décisifs pour le marché des changes.
1. Variables probantes pour le marché
des changes :
Le sujet était et est toujours un tournant
incontournable pour un grand nombre de praticiens sur le marché des
changes. Quels sont donc les phénomènes à l'origine des
mouvements sur ce marché et quelles explications théoriques
à considérer ?
Depuis la mise en place du système de change flottant
en 1973, les taux de change ne varient plus qu'à l'intérieur
d'une marge de fluctuation autorisée mais plutôt en fonction de
l'offre et de la demande et au jour le jour. Il n'y a donc plus de prix
officiel d'une monnaie.
Les théoriciens ont considéré ainsi le
taux de change comme un « prix d'équilibre de flux de
devises » et ont développé des relations
interprétatives stables entre le change et un certain nombre d'autres
variables. On distingue entre les explications basées sur les
fondamentaux et celles basées sur les anticipations du taux
lui-même.
Mais on se limitera d'étudier brièvement la
première catégorie dans cette section.
Il s'agira donc de traiter :
ü La théorie de la parité des pouvoirs
d'achat (PPA) et le taux de change réel ;
ü La théorie de la parité des taux
d'intérêt (PTI) ;
ü La balance commerciale et la balance courante.
- La version absolue de la PPA est
une relation d'équilibre entre le taux de change et le niveau des prix,
mais pas ce n'est pas une relation causale. Elle préconise que le taux
de change réel demeure constant tant que les fondamentaux de
l'économie, à savoir la demande ou l'offre, n'ont pas
changé. Il en résulte que, sur le court terme, les chocs de
nature monétaire (appréciation ou dépréciation de
la monnaie) n'ont aucune influence sur le taux de change réel.
Cependant, il est difficilement envisageable d'imaginer que,
sur des périodes de plusieurs années, le taux de change
réel n'évolue pas. On s'accorde donc à dire que les
bouleversements à CT que l'on observe ne sont pas à priori
incompatibles avec l'ajustement à LT des cours de change à leur
niveau d'équilibre de PPA.
- La version relative estime que si
le taux de croissance des prix est de x % à l'étranger
et de y % dans l'économie nationale, alors le change nominal
d'équilibre évoluera de z=(x-y) %.
On aura :
Si x-y>0 une
appréciation de la monnaie nationale
Si x-y<0 une
dépréciation de la monnaie nationale
- La PTI repose sur une relation
inverse entre taux d'intérêt et taux de change.
Si le taux d'intérêt est élevé, ou
est prédit à la hausse, c'est perçu comme un signe de
faiblesse de la devise. Si, par contre, cette devise supporte un taux faible,
cela veut dire qu'elle a tendance à s'apprécier par rapports aux
autres, le différentiel de change compensant le différentiel de
taux.
- L'utilisation des la balance
commerciale ou des transactions
courantes est très fréquente : un
déficit place un pays dans une situation nette acheteuse de devises
contre la monnaie nationale, qui se déprécie alors
automatiquement. Un excédent, à l'inverse, génère
des opérations de ventes de devises contre la monnaie nationale sur le
marché, ce qui pousse celle-ci à la hausse.
Toutefois, qu'il s'agisse de la PPA, la PTI ou des liaisons
avec la balance courante ou commerciale, l'anticipation du taux de change est
très difficile à réaliser à court terme.
2. Dépendances entre variables
économiques :
Et si l'on se demandait comment se déterminent ces
grands phénomènes reconnus à l'origine des fluctuations du
taux de change ?
Répondre à ce questionnement fera l'objet de
cette seconde section.
Il convient d'abord de préciser que les mouvements
économiques à court comme à moyen terme sont souvent
regroupés dans un modèle macro-économique où on
confronte les mouvements passés - présentés sous formes
d'équations à coefficients pré calculés sur la base
de l'historique - pour déterminer les influences qu'elles s'exercent
entre elles.
On retiendra à ce titre, « le modèle
néo-keynésien élémentaire » qui nous
offre une vue d'ensemble sur cette formation.
Offre
-production intérieure
-importations
Revenus
-salaires
-intérêts, dividendes, transferts...
Demande
- consommation des ménages
- variations de stock
- investissement en logement
- dépenses de l'état
- exportations
- investissement des entreprises
Tensions
-chômage
-capacités de production
Artus et Muet(2), Artus, Deleau et Malgrange
Les enchainements sont les suivants : «
on part de la demande anticipée par les entrepreneurs, qui
détermine le niveau de la production intérieure et donc la
séparation de l'offre entre production et importations. La production
détermine le niveau d'emploi et en prenant en compte la population
active, le chômage. Les salaires sont expliqués par le niveau de
chômage et contribuent à la formation des coûts de
production qui sont avec les tensions sur les capacités de production,
à la base du processus de détermination des prix et des
revenus. » Eric Vergnaud, indicateurs économiques et
marchés financiers, p63.
L'architecture de ce modèle est
décomposée en 3 blocs :
- un
bloc « réel » :
concerne l'offre et la demande des biens et services ;
- un bloc
« nominal » : concerne les
salaires et les prix ;
- et un bloc «
monétaire » : concerne les
équilibres financiers.
Et on représente l'ensemble des causalités par
le schéma suivant :
Bloc réel
Bloc monétaire
Variables financières
Bloc nominal
Tension
Décisions de politique monétaire
Coût du capital
Consommation
Prix des importations
Inflation
Investissement
Compétitivité
Activité
Décisions de politique monétaire
PTI (-)
Portefeuilles (+)
Eric VERGNAUD indicateurs économiques et
marchés financiers -p 66
A présent, nous allons passer en revue les deux boucles
« demande/offre » et
« salaires/prix ».
2-1/ Détermination de l'offre et de la
demande
L'offre et la demande représentent sans doute les
concepts les plus vénérables et les plus essentiels de la
théorie économique. Pour simplifier, on pourra dire que les
modèles actuels supposent que l'offre s'adapte à une demande qui
est déterminée par ailleurs. Les entreprises sont donc
contraintes de s'adapter à la demande puisqu'il n'existe pas d'offre
explicite : sur la base des formulations de capital au travers des
décisions d'investissement et de travail par le niveau des embauches,
elles sont amenées à déterminer en même temps leur
production et leurs variations de stocks.
² Comportement des
entreprises :
Ils sont tantôt des variables de demande (en phase de
démarrage de l'activité, les stocks sont reconstitués et
la variation est donc positive), tantôt des variables de l'offre (lorsque
les entreprises font face à une demande qui dépasse la production
intérieure, le déstockage permettra de satisfaire cette demande
extérieure sans recourir aux importations).
Les stocks jouent un important rôle
d'équilibrage, leur détention s'explique par le souci permanent
de sécurité minimale vis-à-vis des approvisionnements
à court terme sans supporter pour autant les dépenses et les
coûts qui peuvent en résulter.
Au-delà de cet objectif général, il
existe d'autres motifs, on citera entre autres :
Ø motif de transaction :
en prenant compte des coûts de financement (mobilisation de
ressources) et des coûts de détention (manutention,
dépréciation, assurance, loyers, énergie...), on cherche
à optimiser le ratio stock/ventes ;
Ø motif de
spéculation : soit on prévoit que les prix
vont augmenter soit on anticipe que certains produits seront indisponibles dans
l'avenir ;
Ø souhait de réduction des
délais de livraison amène les entreprises à
accroître leur stock...
Les variables qui expliquent la variation de stocks sont
donc :
- Les anticipations sur la production
- Le ratio stock/ventes
- Le carnet de commandes
- Les délais de livraison
- Le prix des matières premières, de la
production et à la consommation
- Les taux d'intérêt
L'offre hors déstockage est égale à la
somme de la production intérieure et des importations. A partir de ce
niveau de production, on détermine les besoins en facteurs de
production :
- le capital, donc la politique d'investissement et le niveau
des capacités utilisées ;
- le travail, donc l'emploi et ses conséquences sur le
taux de chômage.
L'espérance de profit attendu est déterminante
pour les décisions d'investissement, elle dépendra de la valeur
anticipée des ventes et du cout de l'investissement au moment où
il sera réalisé.
L'investissement dépend donc de l'anticipation sur
la demande, de l'utilisation des capacités de production, de la
rentabilité de l'investissement et du coût relatif
capital/travail.
Les embauches dépendent de l'évaluation du
volume d'emploi nécessaire à produire le montant des biens et
services qui pourra remplir la demande compte tenu du stock de capital
installé.
Il s'agit du cycle de productivité dont nous allons
décrire les différentes phases.
· Dans une phase d'entrée en
récession, puisqu'un ajustement de la production à
grande échelle est coûteux, les entreprises ne réagissent
pas immédiatement en licenciant, mais procèdent à une
réduction des heures supplémentaires, puis de la durée de
la semaine de travail. La productivité par salarié va donc
diminuer.
· Dans une phase d'expansion, la durée de
travail va croître et le recours aux heures supplémentaires
s'amplifiera. La productivité va donc augmenter et atteindre ses niveaux
les plus hauts du cycle économique. Eric VERGNAUD
indicateurs économiques et marchés financiers -p 74
Lorsqu'il y a déséquilibre entre la production
et les capacités de production, entre l'emploi et la population active
ou entre la production et l'emploi, des tensions se manifestent (chômage,
emplois vacants, déséquilibre temporaire entre la production et
les capacités productives...)
² Comportement des ménages :
La consommation dépend de cinq variables :
- les revenus : plus le
revenu augmente, plus la consommation marginale à consommer augmente, la
corrélation est ici positive. L'épargne jouant un rôle de
tampon à court terme.
- les prix : on
distingue à ce niveau deux liaisons, la première
appelée « fuite devant la monnaie » pousse les
gens à avancer leurs dépenses s'ils anticipent une inflation
rapide. La seconde les pousse à privilégier l'épargne en
défaveur de la consommation.
- le chômage :
pèse lourdement sur la consommation puisque les sans emplois
construisent des épargnes de précaution.
- les taux
d'intérêt : une hausse des taux directeurs,
encourage l'épargne (effet de substitution) ou favorise la consommation
actuelle (effet de revenu).
- l'investissement en
logement : il faut séparer ceux qui
achètent des logements dans une optique de consommateur ou
d'investisseur.
Les premiers seront plus sensibles au couple revenu/prix et
les seconds aux taux d'intérêt et à l'anticipation des
revenus des ménages.
² Commerce extérieur :
Les importations et les exportations dépendent de trois
types de variables :
- une variable de revenu réel, en l'occurrence de
demande intérieure ;
- une variable qui traduit l'influence des prix relatifs, la
compétitivité des exportations ;
- une variable qui mesure la tension sur l'appareil de
production
La demande extérieure est matérialisée
par l'indicateur de demande mondiale, qui indique sur les parts de
marchés possédées. Pour augmenter les exportations, il
faut augmenter le degré de compétitivité.
On retiendra la formule suivante :
Compétitivité des
Prix des exportations des concurrents exprimés dans leur
exportations de X = monnaies
* taux de change effectif de la monnaie de X
Prix des exportations du pays X
La demande intérieure est la somme des dépenses
des ménages en consommation et en investissement de logement, de
l'investissement des entreprises et des dépenses de l'Etat.
Elle sera élevée si la production
intérieure ne peut satisfaire la demande intérieure.
|