2. Valorisation des fruitiers sauvages
à N'dali
Dans cette section, nous présentons les
différentes valorisations que font les populations riveraines de N'dali
à propos des espèces fruitières sauvages recensées.
2.1. Analyse des pratiques de valorisation traditionnelles
des fruitiers sauvages
Les populations de N'dali utilisent les différentes
parties des fruitiers sauvages pour plusieurs fins en utilisant des
méthodes traditionnelles. Ainsi, ils transforment les fruitiers pour
l'alimentation, la commercialisation et comme sources de médecines
traditionnelles comme nous l'avons vu plus haut. Nous ne donnerons pas tous les
détails pour chaque espèce mais nous présentons ici, les
pratiques de valorisation traditionnelle pour trois espèces
fruitières sauvages à N'dali.
Les riverains de N'dali utilisent les graines de
néré (Parkia biglobosa) qui permettent d'obtenir la
« moutarde » (voir Figure 7) après transformation
locale, servent à l'alimentation. De plus, ils sèchent les
graines de l'espèce et l'écrasent pour obtenir un poudre qui pour
faire des jus à la fois consommée et commercialisée par
certains. Son processus de fabrication peut se résumer comme suit :
? Récolte des gousses de
néré
Collecte : Les gousses de néré sont
récoltées directement sur l'arbre ou ramassées
lorsqu'elles tombent naturellement au sol. Cela se fait
généralement à la main.
Séchage : Les gousses récoltées sont
séchées au soleil pour faciliter l'extraction des graines.
? 2. Extraction des graines
Ouverture des gousses : Les gousses séchées sont
ouvertes manuellement pour en extraire les graines. Cela se fait
généralement en les cassant avec un outil ou en les frappant
légèrement.
Nettoyage : Les graines extraites sont ensuite
nettoyées pour enlever les débris et les résidus de
gousses.
? 3. Cuisson des graines
Cuisson initiale : Les graines nettoyées sont bouillies
dans de grandes marmites pendant plusieurs heures. Cette cuisson initiale
permet de ramollir les graines et de faciliter la fermentation
ultérieure.
Égouttage : Après cuisson, les graines sont
égouttées pour enlever l'eau excédentaire.
? 4. Fermentation
Emballage : Les graines cuites sont ensuite emballées
dans des feuilles de bananier ou de teck et placées dans un contenant
hermétique, souvent des jarres en terre cuite ou des récipients
en plastique.
Fermentation : Les graines sont laissées à
fermenter pendant plusieurs jours (généralement 3 à 4
jours). La fermentation naturelle transforme les graines en une pâte
odorante et collante, appelée "afitin". Ce processus est crucial pour
développer le goût caractéristique de la moutarde de
néré.
? 5. Séchage et conditionnement
Séchage : Après fermentation, l'afitin est
souvent séché au soleil pour augmenter sa durée de
conservation. Le séchage peut durer plusieurs jours en fonction des
conditions météorologiques.
Conditionnement : Une fois séchée, la moutarde
de néré est stockée dans des récipients propres et
secs, prêts à être utilisés ou vendus.
? 6. Utilisation culinaire
Préparation : Avant utilisation, la moutarde de
néré séchée peut être
réhydratée et incorporée dans divers plats. Elle est
souvent utilisée comme assaisonnement dans les sauces et les soupes,
apportant une saveur umami unique.
Conservation : La moutarde de néré se conserve
longtemps si elle est bien séchée et stockée dans des
conditions appropriées.
Figure 7 : Images de fruits de
néré, poudre et moutarde
Source : enquête de terrain
Les écorces de karité (Vitellaria
paradoxa) sont utilisées pour traiter la dysenterie et les
hémorroïdes. Des amandes de cette espèce sont extraites du
beurre de karité pour la fabrication des pommades et de savon par les
populations riveraines de N'dali. Le beurre de karité est utilisé
à la fois comme huile de cuisine mais aussi de pommade pour la peau
surtout durant la saison pluvieuse pour lutter contre la fraîcheur. Le
savon est utilisé dans la cosmétique et aussi pour la
commercialisation.
Le processus de fabrication du beurre de karité peut se
résumer en 6 étapes comme suit :
Etape 1 : L'apprêt de l'amande
Les noix sont collectées dans les champs ou
achetées sur le marché auprès des vendeurs. La plupart du
temps, c'est plutôt directement l'amande qui est vendue sur le
marché.
Lorsque les noix sont collectées, elles sont au
préalable cuites au feu pendant environ deux (02) heures. Elles sont
ensuite séchées au soleil. Cette opération peut prendre
plusieurs jours (au moins cinq) dépendamment du temps et de la
température.
Les amandes sont donc extraites par décorticage
facilité par l'opération précédente. Elles sont
ensuite lavées à l'eau puis séchées au soleil
pendant deux (02) à trois (03) jours. Elles deviennent à cette
étape la matière première prête à entamer le
processus proprement dit de la préparation du beurre de
karité.
Etape 2 : La réalisation de la pâte
des amandes
La production du beurre de karité commence par le
concassage des amandes de karité. Il se fait généralement
dans un mortier et la durée de l'opération est fonction de la
force de celui qui l'exécute. Les amandes sont alors réduites en
particules.
Cette farine de particules obtenue après pilonnage est
torréfiée dans une marmite au feu afin qu'elle ne se
noircisse.
La torréfaction dure environ entre vingt (20) et vingt
et cinq (25) minutes. La farine torréfiée est refroidie pendant
dix (10) à quinze (15) minutes à l'air libre.
Les particules torréfiées passent alors au
moulin pour être moulues. Il en sort une pâte à beurre
très épaisse.
Rappelons que l'opération du moulin est assez complexe
et nécessite un opérateur qui maîtrise la technique. Elle
prend bien assez de temps et sa rapidité est fonction de la
qualité de l'amande et de l'expérience du meunier.
Etape 3 : L'extraction de
l'écume
La pâte épaisse obtenue est coupée en de
petits morceaux dans de bassine contenant de l'eau de cinq (05) litres ou dix
(10) litres environ en fonction de la pâte que l'on veut y mettre.
Le mélange est ensuite baratté jusqu'à
obtenir une pâte fine et molle. La couleur marron foncé du
départ devient plus claire après environ quarante (40) minutes de
barattage.
Il faut y ajouter ensuite de l'eau tiède et la faire
bouillir. L'eau tiède va permettre de séparer le beurre des
autres composants de l'amande, notamment les impuretés qui se
déposent au fond du récipient. On y ajoute alors suffisamment de
l'eau et le beurre encore sous la forme de la pâte remonte à la
surface du fait de sa masse par rapport à l'eau.
Le beurre (écume) est ainsi extrait. Il ne reste
qu'à le récupérer.
On peut y ajouter encore de l'eau pour le débarrasser
des impuretés restées et le rendre donc plus propre.
Etape 4 : Le raffinage de
l'huile
Une fois retiré, le beurre (écume) est
malaxé et remis au feu avant d'être cuit pendant environ deux (02)
heures de temps. La pâte se fond et se transforme peu à peu en
liquide très noir. A l'aide d'une tige, il faut remuer le liquide pour
accélérer l'évaporation de l'eau et le dépôt
des impuretés au fond de la marmite.
Peu à peu l'huile apparaît et le liquide noir
s'éclaircit. L'huile apparaît maintenant à la surface et se
transforme progressivement. On reconnaît que l'huile est prête
lorsqu'elle devient plus claire. Alors, il ne faut plus trop remuer pour ne pas
mélanger l'huile aux impuretés qui sont au fond de la marmite.
Lorsqu'une couche épaisse se forme à la surface,
il faut cesser de remuer.
La marmite est alors descendue du feu.
Il faut alors ramasser délicatement l'huile et laisser
le déchet au fond de la marmite. Il faut la laisser refroidir pendant
une durée de dix (10) à quinze (15) heures environ selon la
période froide ou chaude.
Etape 5 : L'homogénéisation de
l'épaisseur du beurre
L'huile complètement refroidie, est transvasée
(le lendemain) dans une autre marmite pour laisser à nouveau les
déchets déposés. L'huile est maintenant
décantée et pure.
L'huile est remuée avec une tige bien propre pendant
une durée de 20 à 30 minutes environ pour
homogénéiser l'épaisseur. Elle devient plus épaisse
et assez lourde.
Etape 6 : Le conditionnement du beurre de
karité
C'est la dernière phase du processus de production.
Le produit obtenu à la fin de l'étape
précédente est légèrement réchauffé.
Cette opération dure environ 5 minutes sur un feu doux.
Pendant ce temps, les moules (ici des calebasses) sont
lavées avec de l'eau chaude pour les débarrasser de l'ancienne
huile qu'elles contiennent. Les calebasses sont spécifiquement
utilisées ici pour donner une forme au beurre après sa
solidification.
Avant de verser l'huile dans les différentes
calebasses, elles sont plongées dans une substance gluante qui facilite
le démoulage une fois l'huile solidifiée.
Le beurre est alors descendu du feu.
À l'aide d'une mesure en fonction du prix et de la
catégorie, le beurre est coulé dans ces calebasses et
laissé dans les calebasses pendant une (01) heure environ.
Figure 8 : Images des amandes de
karité et ses dérivés (beurre et savon)
Source : enquête de terrain
Les poudres issus de la transformation locale de baobab
(Adansonia digitata) sont utilisées comme condiment qui sont
autant consommées que vendues par les personnes qui ont participé
à l'étude. Sa corde issue de l'écorce de baobab servent
à attacher les animaux et le processus de fabrication peut se
résumer comme suit :
? Récolte de l'écorce de
baobab
Sélection des arbres : Les artisans choisissent des
arbres de baobab matures pour récolter l'écorce. Les jeunes
arbres ne sont pas utilisés pour éviter de les endommager et pour
assurer la durabilité de la ressource.
Décorticage : L'écorce est soigneusement
retirée de l'arbre en bandes longitudinales. Cette opération est
réalisée avec précaution pour permettre à l'arbre
de régénérer son écorce.
? 2. Préparation de l'écorce
Découpage et Déchiquetage : Les bandes
d'écorce sont découpées en morceaux plus petits et
déchiquetées en fines fibres. Ce processus peut être
effectué manuellement ou à l'aide de simples outils de coupe.
Trempage : Les fibres obtenues sont ensuite trempées
dans l'eau pendant plusieurs heures, voire plusieurs jours. Le trempage aide
à assouplir les fibres et à les rendre plus faciles à
travailler.
? 3. Séchage
Séchage au soleil : Les fibres trempées sont
étalées au soleil pour sécher. Cette étape permet
de réduire l'humidité et de préparer les fibres pour le
tissage. Le séchage peut prendre plusieurs jours en fonction des
conditions météorologiques.
? 4. Torsion et Tressage
Torsion des fibres : Les fibres séchées sont
torsadées pour former des fils plus épais et plus solides. Cette
torsion se fait généralement à la main, chaque brin
étant soigneusement roulé pour obtenir une texture
homogène.
Tressage : Les fils torsadés sont ensuite
tressés ensemble pour former la corde. Le tressage peut varier selon
l'épaisseur et la longueur souhaitées pour la corde. Les artisans
utilisent différentes techniques de tressage pour obtenir des cordes de
différentes résistances et usages.
? 5. Conditionnement
Finition : Une fois la corde tressée, elle est
coupée à la longueur désirée et les
extrémités sont sécurisées pour éviter
qu'elles ne se détachent.
Stockage et transport : Les cordes finies sont
enroulées et stockées dans des conditions appropriées
jusqu'à leur utilisation ou leur vente sur les marchés locaux.
Utilisations des Cordes de Baobab
Applications agricoles : Les cordes de baobab sont souvent
utilisées pour attacher des animaux, sécuriser des charges et
construire des structures agricoles.
Usages Domestiques : Elles servent également dans les
tâches domestiques quotidiennes, telles que la fabrication de nattes, de
paniers et d'autres objets artisanaux.
Applications Artisanales : Les cordes peuvent être
utilisées pour créer divers articles d'artisanat, ajoutant une
valeur esthétique et culturelle à leur utilité
pratique.
Figure 9 : Feuilles
séchées de baobab et la corde issue de ses écorces
Source : enquête de terrain
De l'espèce Elaeis guineensis, les villageois
extraient le palmier d'huile. Traditionnellement, son processus de fabrication
traditionnelle allant de la récolte à l'extraction de l'huile, se
déroule en plusieurs étapes bien définies.
? Récolte des régimes de
palme
Sélection et Coupe : Les régimes de
palme, qui contiennent les fruits de palme, sont sélectionnés et
coupés des arbres. Cela se fait généralement à
l'aide d'une machette montée sur une longue perche pour atteindre les
régimes situés en hauteur.
Transport : Les régimes coupés sont
ensuite transportés vers le site de transformation. Ce transport se fait
souvent manuellement ou à l'aide de charrettes ou de bicyclettes.
? Stérilisation
Cuisson à la vapeur : Les régimes de
palme sont soumis à une cuisson à la vapeur pour ramollir les
fruits et faciliter l'extraction de l'huile. Traditionnellement, cette cuisson
se fait en plaçant les régimes dans de grands tambours ou des
fosses spécialement conçues pour cet effet, et en les recouvrant
d'eau bouillante.
Durée : La cuisson peut durer de 30 à
90 minutes selon la quantité de régimes et l'intensité de
la chaleur.
? Battage
Séparation des fruits : Après la
stérilisation, les fruits sont séparés des régimes
par battage. Cela se fait généralement en frappant les
régimes contre une surface dure ou en utilisant des outils manuels.
Collecte des fruits : Les fruits
séparés sont ensuite recueillis et prêts pour
l'étape suivante.
? Macération et Pressage
Macération : Les fruits sont placés
dans des mortiers ou des grandes cuves et sont pilés ou broyés
pour détacher la pulpe des noyaux. Cette opération permet de
libérer l'huile contenue dans la pulpe.
Pressage : La pulpe broyée est ensuite
pressée pour extraire l'huile. Traditionnellement, cela se fait en
utilisant des presses manuelles ou en tordant des sacs contenant la pulpe pour
faire sortir l'huile.
? Clarification
Décantation : L'huile extraite est ensuite
décantée pour séparer les impuretés. L'huile est
souvent recueillie dans des récipients où elle est laissée
au repos pour permettre aux particules solides de se déposer au fond.
Filtration : Parfois, l'huile est filtrée
à l'aide de tissus ou de tamis pour améliorer sa
pureté.
? Conditionnement
Récupération : L'huile clarifiée
est collectée et transférée dans des récipients de
stockage, tels que des bidons ou des jarres en terre cuite.
Conservation : L'huile est conservée dans des
conditions appropriées pour éviter la
détérioration. Elle est prête à être
utilisée pour la cuisine ou vendue sur les marchés locaux.
? Aspects Culturels et Sociaux
Participation communautaire : La production de
l'huile de palme est souvent une activité communautaire, impliquant
plusieurs membres de la famille ou de la communauté.
Tradition et transmission : Les techniques de
fabrication traditionnelle sont transmises de génération en
génération, assurant la préservation des méthodes
ancestrales.
Figure 10 : Huile de palme et le
fruit
Source : notre enquête
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