Conclusion du chapitre
Parler de la consécration dans l'ordre constitutionnel
camerounais d'une citoyenneté promotrice de l'intérêt
général nous a conduit à analyser la centralité du
lien entre ces deux notions avant d'en dégager ensuite la
portée.
Ainsi, la centralité du lien entre la
citoyenneté et l'intérêt général
découle de ce que les deux rattachables à la République.
La citoyenneté est un élément dérivatif de la
République alors que l'intérêt général en est
une aspiration. Et, en tant que telle, l'intérêt
général se bâtit au Cameroun autour de l'idéal
d'unité nationale. Dans ce cadre, nous avons montré que cette
édification passe par la considération de la Nation comme la
communauté des citoyens qui, sans s'effacer, doivent d'une certaine
manière se dissoudre dans l'enveloppe nationale unie qui
sécrète par ailleurs un ensemble de valeurs communes liées
à la citoyenneté. De la sorte, relativement à la
conception de la citoyenneté en droit constitutionnel camerounais,
l'unité nationale de même que ces valeurs, se posent comme des
contenants ayant pour contenu l'intérêt général.
En outre, nous avons analysé la corrélation
entre l'intérêt général et la société
civile. Cette dernière, se démarquant du pouvoir politique, se
constitue comme un rempart de l'intérêt général,
qu'elle garantit en fait à travers divers mécanismes
Par ailleurs, la mise en exergue de la portée du lien
intérêt général et citoyenneté s'est
avérée nécessaire, car elle a permis de
révéler la fragilisation qui caractérise de plus en plus
ce lien, à cause notamment de la montée de l'individualisme.
Mais cette analyse nous a aussi permis de relever et
d'analyser le rapport entre l'intérêt général et la
participation politique. Cette dernière pouvant contribuer soit à
l'optimalisation du lien entre la citoyenneté et l'intérêt
général, soit à son relâchement.
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CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
La définition des droits et devoirs du citoyen dans le
préambule de la Constitution pose certes les bases d'un statut du
citoyen. Mais en les inscrivant dans son dispositif même, cela
contribuerait certainement à leur conférer une plus grande
autorité et opposabilité.
Concrètement, des titres distincts de la Constitution
doivent être consacrés respectivement aux droits et aux devoirs du
citoyen. Tel est en effet le cas dans la Constitution de plusieurs Etats
africains à l'exemple du Togo ou du Congo.
De même que des titres de la Constitution sont
consacrés distinctement aux autorités exécutives,
législatives ou judiciaires, cela pourrait tout aussi être le cas
pour le citoyen ; car, comme ces autorités, il est un pilier essentiel
de l'Etat.
Par ailleurs, cette démarche devrait être
similaire pour la société civile au regard du rôle qu'elle
joue dans la promotion et la préservation du bien-être des
citoyens ; de ce point de vue elle se pose comme un accompagnateur, un adjuvant
majeur de l'Etat.
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SECONDE PARTIE :
LE DYNAMISME DE LA CITOYENNETE EN DROIT CONSTITUTIONNEL
CAMEROUNAIS
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Comme tout concept juridique, la citoyenneté n'est pas
restée stable au regard du droit constitutionnel camerounais. Mais au
contraire, selon une approche dynamique253, l'on peut voir que suite
à sa consécration automatique et probante par l'accession du
Cameroun à l'indépendance, elle a connu un processus de
maturation progressif, entrainant une évolution de son contenu et
même de ses fonctions254.
D'ailleurs, Aristote semblait reconnaitre le caractère
dynamique de la citoyenneté en affirmant que : « le citoyen
lui-même est nécessairement différent d'une constitution
à l'autre »255. Dans le même sens, Sandrine
Maillard disait que : « Le concept de citoyenneté est un concept
que nous pouvons qualifier de dynamique »256.
De caractère fluctuant, c'est-à-dire
vouée à s'adapter aux changements de l'univers social, politique,
juridique, culturel et même économique au sein de l'Etat, la
citoyenneté camerounaise a dû subir des chocs divers dans ce
cadre-là. De la sorte, autant que Paul Valéry répondait
à la question de savoir qu'est-ce que le droit en disant que « Nous
le savons et nous ne le savons pas »257, s'il nous était
aussi demandé de répondre à la question l'on serait tout
autant porté de dire que nous le savons en même temps que nous ne
le savons pas.
Etant donné que notre étude à ce niveau
entend traiter de la question du comment, nous entendons recourir ici à
la méthode explicative 258 . C'est dans cette optique que
nous entendons mobiliser tous les outils et techniques qui nous permettront
à terme de rendre compte de la réalité de notre
thématique qui, « loin d'être un stock acquis,
représente un véritable programme à développer
»259.
En somme, il importe de déterminer et de regrouper de
façon cohérente et objective les aspects saillants et
significatifs de la tendance à la fluctuation de la citoyenneté
en droit constitutionnel camerounais. Dans ce cadre, nous traiterons d'une part
la citoyenneté différenciée (chapitre. I), et d'autre part
la dissociation du lien entre appartenance à la Nation et
citoyenneté (chapitre. II).
253 Lire à ce sujet Madeleine Grawitz, op. cit.,
p. 83.
254 La fonction de la citoyenneté réside dans ce
qu'elle est un attribut fondamental de la Républiqie, et donc dans ce
cadre, sert à réaffirmer les bases de cette dernière.
255 Aristote, La politique, op. cit., p. 70.
256 Sandrine Maillard, L'émergence de la
citoyenneté sociale européenne, presses universitaires
D'aix-Marseille-PUAM, 2008, p. 38.
257 Paul Valery, Regards sur le monde actuel et autres
essais, Gallimard, 1988, p. 31.
258 Madeleine Grawitz, op. cit., p. 419.
259 Olinga Alain, « Le citoyen dans le cadre constitutionnel
camerounais », op. cit., p.165.
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