CONCLUSION GÉNÉRALE
La préoccupation centrale de notre réflexion
était de clarifier la problématique de la lutte contre les
changements climatiques au Cameroun. Pour ce faire, nous avons eu recours
à une approche chronologique, dans une analyse systémique
imposant inter et transdisciplinarité pour examiner de manière
critique des sources et informations recueillies. Cela nous a permis de rendre
compte sur les actions menées par le Cameroun en matière de lutte
et d'atténuation des changements climatiques ainsi qu'aux
capacités du pays à s'adapter aux effets néfastes de ce
phénomène, qui affichent un tableau mitigé.
Dans les deux premiers chapitres, il a été
nécessaire de présenter les généralités et
l'émergence de la conscience écologique sur la scène
internationale dans les années 60 et la CCNUCC. A partir des
années 70, des rencontres intergouvernementales à
caractère écologique, socio-humanitaire, scientifique se
généralisent. La conférence de Stockholm de 1972 en faveur
de l'environnement a pour conséquence la création en 1973 du
PNUE. En 1979, le climat est mis en avant avec l'organisation à
Genève de la première Conférence Mondiale sur le Climat.
Dès lors, la communauté internationale va se montrer soucieuse de
la protection de l'environnement. La décennie 80 est marquée par
l'élaboration des premiers instruments juridiques internationaux
relatifs à la protection de l'atmosphère et de la couche d'ozone
à savoir la Convention de Vienne et le Protocole de Montréal.
L'année 1988 marque un tournant décisif dans la construction de
la gouvernance climatique mondiale avec la création du GIEC, institution
chargée de mener les recherches sur les changements climatiques.
Sur le plan national, il est clair que les questions
environnementales n'étaient pas un souci majeur pour le pouvoir de
Yaoundé depuis les indépendances jusqu'en 1992. Mais après
la Conférence de Stockholm de 1972, une conscience écologique
quoiqu'embryonnaire émerge. En 1974, le Cameroun réagit par le
lancement de l'Opération Sahel Vert. Peu à peu le pays
procède à la mise sur pied des organes chargés des
questions d'environnement au sein du gouvernement. On note la création
de la Cellule de la Protection de l'Environnement (CPE) au sein du MINTP en
1977. Le 9 avril 1992, on assiste à la création du
Ministère de l'Environnement et de la Forêt le au sein duquel fut
érigée la Direction de l'Environnement.
Convaincue de l'existence des changements climatiques,
l'Assemble Générale de l'ONU approuva en décembre 1991 le
début des négociations de la CCNUCC. Un Comité
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Intergouvernemental de négociation de la Convention
constitué des négociateurs de 150 pays élaborèrent
la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques. Elle fut
signée à l'unanimité à la Conférence de Rio
de Janeiro au Brésil en juin 1992.
La CCNUCC est le document de base d'un vaste programme
à moyen et à long terme sur la lutte contre les
dérèglements climatiques. Son but ultime est de stabiliser les
concentrations des GES dans l'atmosphère. Elle est guidée par des
principes auxquels les parties doivent s'appuyer dans le strict respect de
leurs engagements. Outre les engagements généraux, chaque partie
en fonction de son niveau de développement avait des obligations
particulières.
Pour assurer sa mise en application effective, une batterie de
mécanismes institutionnels et financiers a été mise sur
pied. Sur le plan institutionnel, la Conférence des Parties est l'organe
suprême de la Convention. D'autres organes tels que le Secrétariat
à la Convention, l'organe subsidiaire de conseil scientifique et
technologique et d'autres furent créés. Dans le but de fournir
des ressources financières favorisant sa mise en application, un
mécanisme financier a été créé.
L'institution chargée de les gérer était le FEM
créé en 1991. De même, une coopération
interétatique a été prescrite pour assurer et surveiller
la collaboration entre les parties.
Pays aux spécificités géographiques
particulières, considéré comme une "Afrique en
miniature", pays appartenant au bassin du Congo deuxième poumon
vert mondial, membre de plusieurs organisations à vocation
environnementale, possédant un écosystème riche et
varié, pays littoral menacé par la désertification dans sa
partie septentrionale ; le Cameroun avait ainsi plus d'une raison de signer la
CCNUCC le 14 juin 1992 et de la ratifier le 19 octobre 1994.
Les deux derniers chapitres présentaient d'une part les
réalisations opérées par le Cameroun dans la lutte et
l'adaptation au réchauffement climatique ; d'autre part les entraves et
manquements qui limitent la marge de manoeuvre du Cameroun dans sa croisade
contre les dérèglements climatiques. Avec pour principales
sources d'émission les secteurs de l'énergie, de l'industrie, la
pression démographique avec l'agriculture, les émissions
liées à l'affectation des terres et de forêts et le secteur
des déchets, le pays est vulnérable aux effets du changement
climatique. Pour y faire face, il a initié des actions pour
atténuer ses émissions des GES.
L'Etat du Cameroun s'est illustré à
l'élaboration des cadres juridique et institutionnel chargés de
règlementer et de piloter les activités liées à la
protection de l'environnement et de lutte contre les changements climatiques.
Cette architecture a servi de base au lancement de plusieurs projets. Par le
concours des acteurs du secteur privé et des partenaires au
développement, le Cameroun a lancé en 1996 le PNGE. Après
l'entrée en vigueur du Protocole de Kyoto, le pays s'est inscrit dans la
logique des projets MDP avec la création du Comité National MDP
le 16 janvier 2006.
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Le pays a manifesté sa volonté dans ce combat
contre les changements climatiques en créant l'ONACC en 2009. Il a aussi
adhéré au processus REDD et REDD+ dans l'optique de
réduire les émissions issues de la déforestation et de la
dégradation des forêts. Dès lors, un Comité de
Pilotage et un Secrétariat REDD+ ont été établis en
2012. Des réalisations conséquentes ont été
enregistrées telles que le lancement des projets pilotes REDD en
février 2008, l'élaboration de la R-PIN et la R-PP. D'autres
activités de recherches et documents ont été produits pour
aboutir à l'élaboration de la stratégie nationale REDD+ en
janvier 2018.
Le combat du Cameroun contre les changements climatiques est
freiné par plusieurs facteurs. Ces obstacles sont d'une part
inhérents à la CCNUCC et à la communauté
internationale et d'autre part aux mobiles internes liés à la
gouvernance du pays. L'incertitude scientifique, la marginalisation des pays du
Sud dans le Protocole de Kyoto ont développé un manque de
motivation des parties et renforcé les clivages Nord-Sud. L'échec
de la négociation d'un accord consensuel et contraignant a
favorisé l'apparition d'accords et projets variés ce qui
fragilise l'action internationale en matière de gouvernance
climatique.
En outre, la mal-gouvernance, d'autres facteurs
exogènes plombe l'action du pays contre les dérèglements
climatiques. En effet, la présence d'un cadrage juridique embryonnaire
et balbutiant, la corruption légendaire et les lenteurs administratives
sont à l'origine du retard et de l'échec de plusieurs projets. En
plus, il faut noter l'insuffisance et l'absence des moyens techniques et
financiers alloués aux activités de lutte contre le changement
climatique. Cet état des choses limite l'action du Cameroun dans la mise
en application effective dans la CCNUCC.
Face à ces difficultés, des solutions ont
été proposées pour une mise en oeuvre optimale de la
CCNUCC pour une résilience et une adaptation efficace aux changements
climatiques. La première solution est le renforcement des
capacités des acteurs nationaux, des institutions techniques nationales
et l'implication de toutes les parties prenantes. Il est nécessaire
d'élaborer un cadre juridique spécifique à la lutte contre
les changements climatiques. La mise en place d'une approche
intégrée entre le développement et changement climatique
pour atteindre ses objectifs socio-économiques doit aussi être
prise en compte.
Les changements climatiques étant un chemin de
non-retour, limiter leurs effets étant presque illusoire, l'adaptation
est donc primordiale. C'est dans cette logique que le Cameroun a
élaboré en 2015 le Plan National d'Adaptation aux Changements
Climatiques (PNACC). C'est un vaste programme d'adaptation axé sur 20
projets concernant des secteurs de l'agriculture ; l'élevage ; la
pêche et l'aquaculture ; foresterie, sylviculture et la faune ; l'eau,
assainissement et santé ; énergie, mines et industrie,
développement urbain et travaux public.
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