III- Renforcement de l'action de l'Etat pour une adaptation
aux effets néfastes des
changements climatiques
L'Afrique, malgré ses faibles taux d'émission,
reste le continent le plus exposé aux désastres probables
engendrés par le réchauffement climatique. Au-delà des
conséquences dramatiques des changements climatiques, ce
phénomène ira davantage crescendo. Malgré la
prise de conscience et l'engagement des acteurs, les changements climatiques
poseront et généreront de nouveaux défis globaux au plan
économique, social, environnemental et même
sécuritaire38. Tout au long de leur histoire, les peuples et
les sociétés ont réussi avec plus ou moins de
succès à s'adapter ou à faire face au climat, à ses
variations et aux phénomènes extrêmes39. Le
phénomène des changements climatiques étant
déjà sur le chemin de non-retour, car ils sont
inévitables, il est urgent pour le Cameroun de s'adapter aux effets
néfastes de ce phénomène. Dans cette partie, nous
insisterons sur les solutions pour une lutte efficace contre les changements
climatiques et une adaptation réelle. Nous proposerons, d'une part, le
renforcement des capacités de l'Etat et l'inclusion de toutes les
parties prenantes. D'autre part, nous présenterons la stratégie
camerounaise d'adaptation au changement climatique.
35 SAHA, «les instruments
économiques...», p.99.
36 Ngwanza Owono, La mise en oeuvre de la
Convention-Cadre..., p.57.
37 Bennani, La convention des Nations Unies sur les
changements climatiques..., p.16.
38 Réponse au changement climatique en Afrique
: une approche par la gouvernance des territoires, ARGA, 2015, p.13.
39 Ibid.
121
A- Renforcement des capacités de l'Etat pour une
participation inclusive de toutes les parties prenantes
Le renforcement des capacités est une tâche
définie assignée aux gouvernements dans l'Agenda 21. C'est :
L'ensemble des moyens humains, scientifiques, techniques,
administratifs, institutionnels et financiers. Le renforcement des
capacités vise principalement l'aptitude à évaluer et
résoudre les problèmes cruciaux que posent les choix politiques
et les modalités d'application des différentes formules de
développement, en appréciant à leur juste valeur les
possibilités et les limites de leurs répercussions sur
l'environnement selon les circonstances particulières à chacun
des pays40.
La lutte contre le réchauffement climatique se fait
dans un cadre bien déterminé. Ledit cadre est réalisable
grâce à une structuration gouvernementale bien
élaborée. Cela passe par une nomenclature institutionnelle et
normative fiable pour une bonne gouvernance climatique. Pour y parvenir,
l'association des questions de changement climatique et des questions
économiques et le renforcement des partenariats sont
nécessaires.
1- Elaboration d'un arsenal juridique propre à
la lutte contre les
changements climatiques
Le climat est devenu une préoccupation importante. Il
devient nécessaire que des textes de loi y soient
consacrés41. Pour réussir le pari de
l'atténuation et l'adaptation aux événements climatiques
extrêmes, le Cameroun doit se doter des lois propres à ce domaine.
Au même titre que le secteur environnement, le secteur du changement
climatique peut être contrôlé par des lois. En effet, la
lutte contre les changements climatiques fait partie de la protection de
l'environnement. L'adoption des lois soit sur le contrôle des actes
d'application, soit sur les manquements qu'on pourrait observer à
l'application pourrait être indispensable pour ce secteur. Dans le
même ordre d'idées, il est impérieux d'adopter des lois
contraignantes et sanctionnant tout contrevenant.
Avec des conséquences qui impliquent les secteurs
économiques, sociaux, politiques et bien d'autres, il est urgent que des
lois efficaces soient adoptées. En effet, il serait impérieux que
des commissions environnement et changement climatique soient mises sur pied au
parlement. Ces dernières, avec l'appui des ministères et
institutions concernés, mettraient au-devant du parlement les questions
climatiques avec pour conséquence la proposition et l'adoption des lois.
Le travail qui doit être fait que ce soit au niveau de la REDD+ et de la
CDN, est de voir comment faire des propositions de loi par rapport à tel
ou tel domaine. Dans le domaine des énergies renouvelables par exemple,
il faut des textes de loi qui allègent les taxes
40 Agenda 21, chapitre 7.
41 Mevono Mvogo, Application par le Cameroun...,
p.43.
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douanières par rapport aux énergies
renouvelables, solaires...42 De même, il est indispensable
d'élaborer des textes de loi taxant les secteurs d'activités les
plus polluants. Des textes de loi par rapport à la taxation des tous les
domaines de l'économie camerounaise de telle manière que quand
vous achetez un timbre de 200 ou 500 Franc CFA qu'on sache que dans cet argent
qu'on puisse prélever 2 ou 10 francs. Les textes proposés
serviront à accompagner le Cameroun dans sa lutte contre les
dérèglements climatiques43.
2- Redynamisation institutionnelle pour une
participation inclusive et le renforcement des capacités de la ressource
humaine
Le renforcement des capacités consiste à
améliorer les compétences techniques et les moyens
institutionnels de l'Etat. Il vise à participer à toutes les
initiatives destinées à favoriser la recherche sur les
changements climatiques, l'atténuation et l'adaptation aux effets des
changements climatiques44. De ce fait, il est impérieux
d'assurer l'amélioration du rôle des différentes
institutions liées à la lutte contre les changements climatiques.
Cela doit passer par l'adoption d'un ensemble de mesures visant à
inciter la sensibilisation, l'éducation des fonctionnaires et
populations sur les enjeux des changements climatiques. Par ailleurs, il est
impératif d'établir une collaboration institutionnelle avec
l'ensemble des acteurs impliqués dans le processus de mise en
application de la CCNUCC.
La définition d'un cadre institutionnel clair et la
mise en place de structures cohérentes, fonctionnelles et efficaces
constituent une démarche primordiale pour le Cameroun. C'est à
cette condition qu'il peut espérer récolter les fruits des
efforts qu'il a consentis depuis 1992. En effet, les dispositions
internationales prises et à prendre, notamment en termes de financement
de projets de développement durable, de transfert de technologie et de
renforcement des capacités, bénéficieront d'abord et avant
tout aux pays qui auront fait un effort d'organisation des structures, pris les
mesures nécessaires pour garantir la visibilité et la
transparence des procédures et donné la preuve de leur
crédibilité45.
Les pouvoirs publics ont non seulement la
responsabilité des accords internationaux et de la mise en oeuvre des
plans nationaux, mais aussi celle de susciter la mise en mouvement de tous les
acteurs sur le terrain. Il revient donc aux pouvoirs publics d'améliorer
le cadre institutionnel à la mise en oeuvre de la CCNUCC46.
L'Etat doit rendre plus accessible les méthodes et moyens à
l'information sur les questions climatiques. Cela contribuera à
l'atteinte
42 T. Kagombe, Coordonnateur national du CDN-Cameroun
au MINEPDED.
43 Ibid.
44 Ngwanza Owono, La mise en oeuvre de la
Convention-Cadre..., p.62.
45 Bennani, La convention des Nations Unies sur les
changements climatiques..., p.16.
46 Ngwanza Owono, La mise en oeuvre de la
Convention-Cadre..., p.63.
123
optimale de toutes les couches de la société. De
même, l'Etat pourra procéder au reboisement et à la
plantation des arbres dans les zones touchées par la
désertification. Cette activité permettra une adaptation
communautaire47. Dans les projets REDD+, les communautés de
zones boisées doivent recevoir un appui technique, être
formées pour cartographier et faire l'inventaire des forêts. Cela
aurait d'autres avantages pour le programme national REDD+ tels la transparence
et la connaissance de l'utilité de la gestion communautaire des
forêts48.
La nature et l'état des changements climatiques, tout
comme les scénarii prospectifs appellent donc à dépasser
le principe de l'action réaction et la juxtaposition d'initiatives et de
politiques sectorielles pour engager une pensée stratégique et
endogène basée sur les collectivités locales49.
Dans leur structuration, les institutions chargées de ces questions
devraient se rapprocher des populations locales et autochtones qui sont
bénéficiaires des différents projets. La
décentralisation telle que voulue par la constitution du 18 janvier 1996
devrait intégrer les questions de changements climatiques dans les
administrations communales. De ce fait, l'Etat doit soutenir et renforcer les
capacités locales afin de développer l'intérêt
à la gestion de l'environnement.
L'Etat doit développer et renforcer les
capacités des opérateurs politiques, économiques et
sociaux en vue d'intégrer les préoccupations climatiques. Il doit
optimiser les ressources nationales tant humaines que financières lors
de la préparation des études de base autour des
problématiques de changement climatique. Développer et renforcer
les capacités des opérateurs dans les domaines de formulation, de
gestion et de suivi des projets. L'Etat doit organiser des sessions de
formation sur l'évaluation des impacts des changements climatiques sur
les différents secteurs socio-économiques du pays ainsi que sur
les mesures d'adaptation. Renforcer les capacités des institutions de
recherche scientifique et de recherche-développement dans divers
domaines liés aux changements climatiques. Renforcer les
capacités du pays sur les plans systémique, institutionnel et
individuel dans les domaines de la vulnérabilité, l'adaptation,
la limitation des émissions des GES, l'observation systématique
des variations climatiques et la mise sur pied d'une base de données.
47 J. Somba et al, Performances économiques
des actions d'adaptation au changement climatique dans le bassin de la Volta,
UICN, 2013, p.24.
48 M.M. Skutsh et al, «Suivi communautaire dans
le cadre de la REDD+», In Réaliser la REDD+ : Options
stratégiques et politiques nationales, Bogor, CIFOR, 2010, p101.
49 Réponse au changement climatique en
Afrique..., p.15.
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3- Mise en place d'une approche intégrée
entre développement et
changement climatique
Les dérèglements climatiques sont devenus l'un
des obstacles au développement. Ils sont une menace pour
l'éradication de la pauvreté en Afrique et en Asie du
Sud50. Cela se manifeste au Cameroun à travers la baisse de
la production agricole, la hausse de la fréquence des désastres,
les inondations, la destruction des infrastructures et la dégradation de
l'état de santé dans les zones vulnérables. Dès
lors, il est nécessaire d'apporter des stratégies et
réponses fiables. Ces stratégies doivent analyser et
intégrer les enjeux socio-économiques dans la lutte contre les
changements climatiques. Les politiques de développement
économique doivent s'arrimer aux défis climatiques.
A l'approche de l'échéance pour les 100
milliards de dollars prévu par le FME d'ici 2020, le Cameroun doit
renforcer son partenariat avec les bailleurs51. Le pays doit
procéder à la conception d'un panachage de politique optimal pour
catalyser les capitaux. Déployés dans le domaine climatique, ces
fonds pourront servir pour l'appui et la mise en oeuvre des technologies
propres52. Ces nouvelles sources d'énergie (solaire,
éolienne etc.) catalyseront à leur tour le développement
de l'économie verte par conséquent à la création de
la richesse et des emplois.
La politique climatique contient deux volets qui sont la
réduction des causes du changement climatique en limitant les
émissions des GES l'adaptation aux effets du changement climatique. Le
premier renvoie à une politique globale. Le deuxième volet
renvoie à l'adaptation qui est une politique locale et
territorialisée selon les effets du changement climatique prévus
et les vulnérabilités propres à chaque territoire.
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