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La répression de l'infraction de viol sur mineur en droit burundais à  la lumiere de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989


par Jean Bosco MUHUNGU
Université de Nantes - Master 2 en Droit International et Europeen des Droits Fondamentaux 2021
  

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C. ARTICULATION ET JUSTIFICATION DU PLAN.

La démarche suivie fait ressortir deux éléments. La répression de l'infraction de viol sur mineur(e) à la lumière de la CIDE en droit burundais s'articule autour d'une répression approximative de l'infraction du viol sur mineur au Burundi à travers le cadre normatif et les mécanismes institutionnel(Partie1) néanmoins, cette répression est perfectible en vue d'atteindre les objectifs de la CIDE. (Partie 2).

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PARTIE 1 : UNE REPRESSION APPROXIMATIVE DU VIOL SUR MINEUR EN DROIT BURUNDAIS.

La répression approximative du viol sur mineur en droit burundais s'analyse à travers une reconnaissance relative du mineur comme sujet de droits (Chapitre 1) et une évaluation de la répression du viol sur mineur aux résultats peu effectifs (Chapitre 2).

Chapitre 1 : Une reconnaissance relative du mineur comme sujet de droits au Burundi

La reconnaissance relative du mineur comme sujet de droits s'analyse à travers une reconnaissance transversale du mineur comme sujet de droits au Burundi (Section1) et une reconnaissance contrastée de l'enfant comme sujet de droits au Burundi (Section2).

Section1 : Une reconnaissance transversale du mineur comme sujet de droits au Burundi.

La reconnaissance transversale du mineur comme sujet de droits s'analyse à travers une reconnaissance internationale et régionale garanties du mineur comme sujet de droits (Paragraphe 1) et une reconnaissance interne atténuée du mineur comme sujet de droits (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Une reconnaissance internationale et régionale, garantie du mineur comme sujet de droits

La reconnaissance internationale et régionale du mineur comme sujet de droits s'analyse à travers une reconnaissance universelle de la CIDE et de la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant relative au Burundi(A) et une reconnaissance régionale des droits de l'enfant nuancée (B).

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A. Une reconnaissance universelle de la CIDE et de la Charte africaine des droits et du bien- être de l'enfant relative au Burundi

Si la CIDE garantit les droits sur le plan universel, régional et au Burundi(1), la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant est une garantie nuancée entre droits et devoirs de l'enfant au Burundi (2).

1. Une CIDE garantissant les droits de l'enfant sur le plan universel, régional et au Burundi

Le principe de l'intérêt supérieur de l'enfant, droit à la vie, à la survie et au développement, constituent deux fondamentaux de la CIDE (a), tandis que les interprétations des dispositions de CIDE par le Comité des droits de l'enfant légitiment ce dernier(b).

a. Une CIDE garantissant l'intérêt supérieur de l'enfant, le droit à la vie, à la survie et au développement, deux fondamentaux de la CIDE

Si l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale138, ni la Convention, ni le Comité des droits de l'enfant ne donne de définition ni de critère de l'intérêt supérieur de l'enfant. Mieux, le Comité rappelle que les valeurs et les principes de la CIDE (art.2, 3, 6 et 12) devraient être appliqués dans le cas d'espèce. Il s'en suit que les principes de non-discrimination, de droit à la vie, à la survie et au développement et du respect des opinions de l'enfant doivent être pris en considération pour déterminer ce qui constitue l'intérêt supérieur de l'enfant dans une situation donnée. La détermination de l'intérêt supérieur de l'enfant doit correspondre à l'esprit de la Convention prise dans son entièreté, particulièrement dans la considération que la CIDE place dans l'enfant en tant qu'individu, en tant que sujet des droits civils et politiques , avec ses opinions et ses sentiments propres, en même temps que bénéficiaire de protections spéciales139.Il va sans dire que l'intégrité physique et morale, éléments fondamentaux de protection de viol sur mineur rentrent dans la sphère de l'intérêt supérieur de l'enfant.

138 Ce principe est également reconnu par la CDPH pour toutes les décisions relatives aux enfants handicapés (art.7)

139 HODGKIN, R., NEWEL, P. op.cit., p.42

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b.Une CIDE légitimée par l'interprétation du Comité des droits de l'enfant

La recommandation n°45 de l'Observatoire générale n°5 donne de plus amples éclaircissements sur l'interprétation de l'intérêt supérieur de l'enfant. « 45. Pour garantir que l'intérêt supérieur de l'enfant est une considération primordiale dans toutes les décisions qui concernent les enfants et que toutes les dispositions de la Convention sont respectées dans la législation et au stade de l'élaboration et de l'exécution des politiques à tous les niveaux du gouvernement, il faut qu'existe un processus permanent d'analyse des effets des décisions sur les enfants( qui prévoie les effets de toute proposition de loi, de politique ou de crédits budgétaires touchant les enfants et l'exercice de leurs droits) et d'évaluation de ces effets (évaluation des effets concrets de l'application des décisions).Ce processus doit être intégré dans le gouvernement à tous les niveaux et le plus précocement possible dans les dispositifs d'élaboration des politiques. Les gouvernements doivent s'astreindre à une auto surveillance et à une auto-évaluation. Mais le Comité juge également indispensable que soit mis en place un suivi indépendant des progrès réalisés sur la voie de la mise en oeuvre de la Convention assuré, par exemple, par des comités parlementaires, des ONG, des établissements universitaires, des associations professionnelles, des groupes des jeunes, et des institutions indépendantes de protection des droits de l'homme »140.

A travers cette Observation générale du Comité des droits de l'enfant, à côté du pouvoir d'interprétation, l'idée de suivi-évaluation se précise. Quant à la mise en oeuvre des engagements des Etats qui ont ratifié la CIDE, elle doit se faire sans délais. « L'Etat partie ne saurait se servir d'argument pour différer la mise en oeuvre des engagements liés à l'intérêt supérieur de l'enfant141 ».

Aux termes de la CIDE, « les Etats parties s'engagent à prendre toutes les mesures législatives, administratives et autres qui sont nécessaires pour mettre en oeuvre les droits reconnus dans la présente Convention ». Dans le cas des droits économiques, sociaux et culturels, ils prennent ces mesures dans toutes les limites des ressources dont ils disposent, s'il y a lieu dans le cadre de la

140 Recommandation n° 46 de l'Observatoire générale n° 5 du Comité des droits de l'enfant

141 Recommandation n° 45 de l'Observatoire générale n° 5 du Comité des Droits de l'enfant

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coopération internationale142. Cette coopération ou solidarité internationale ne saurait néanmoins de servir d'excuse à l'Etat du Burundi pour renier son rôle premier dans la mise en oeuvre de la CIDE.

La CIDE ,forte des interprétations de son Comité, apparait comme un instrument juridique le plus parfait pour assurer une protection du viol sur mineur en ce sens qu'elle donne même aux décideurs qui élaborent les politiques, au législateur et au juge une référence de l'intérêt supérieur de l'enfant dans la prise de leurs décisions.

d. Une action de la CIDE appuyée par les Organisations internationales

La CIDE reçoit de plus en plus l'appui des organisations internationales les plus divers dans son action en faveur des droits de l'enfant. Certains relèvent du système onusien comme l'UNICEF. L'UNICEF est un acteur majeur statutaire143 de la CIDE dans la protection des droits de l'enfant. Au compte de ses réalisations au Burundi et en rapport avec le sujet, on cite le projet de formations des policiers et des magistrats sur la justice pénale à côté de l'IBCR..

e .Une action de la CIDE appuyée par les Organisations non-gouvernementales

D'autres acteurs interviennent dans la mise en oeuvre des droits de l'enfant au sein de l'Etat du Burundi. Il s'agit des organisations non-gouvernementales. L'ONG Avocat Sans Frontières a eu à financer l'aide légale au Burundi en faveur des personnes démunies dans le cadre de la reconstruction du secteur judiciaire.

f. Une action de la CIDE appuyée par la société civile burundaise

La société civile burundaise a été particulièrement active dans son appui au gouvernement burundais, dans la mise en oeuvre de la prévention, de la protection, de la répression et de la prise en charge des mineurs victimes du viol. On citera notamment la ligue des droits de l'homme ITEKA et l'Association « Femmes juristes » qui appuient le gouvernement à documenter et à mener des études sur le viol.

142 Article 4 de la CIDE 143Art.45 de la CIDE

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2. Une Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant, garantie nuancée entre droits et devoirs de l'enfant au Burundi

La Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant a été adoptée lors de la Conférence des chefs d'Etats et de Gouvernement de l'OUA qui s'est tenu à Addis Abeba en date du 9 au 11 juillet 1990144. Elle s'inspire largement de la CIDE, mais ne manque d'y ajouter des exceptions culturelles qui confirment la règle. Contrairement à la CIDE, la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant, consacre à côté des droits de l'enfant, les devoirs de l'enfant. La question devient alors celle de savoir si ces devoirs ne viennent pas réduire la portée des droits garantis et reconnus à l'enfant145 par la CIDE.

La Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant dispose que « tout enfant a des responsabilités envers sa famille, la société, l'Etat, et toute autre communauté reconnue légalement, ainsi qu'envers la communauté internationale, ainsi s'ensuit-il un devoir d'oeuvrer pour la cohésion de la famille, de servir la communauté nationale, de préserver la solidarité de la société, les valeurs culturelles africaines et l'indépendance et l'intégrité de son pays afin de contribuer à la réalisation de l'unité africaine146 » (article 31).Cette disposition tranche avec la conception individualiste de la CIDE et de la philosophie libérale de l'enfant en tant que personne. L'universalisme des droits de l'enfant de civilisation individuelle se retrouve dilué par la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant qui reconnaît des devoirs de l'enfant envers sa communauté. C'est dans ce débat de fond qu'il faudra interpréter la problématique de la répression du viol sur mineur en doit burundais.

3.Une reconnaissance du mineur comme sujet de droits par la CIDE atténuée au Burundi

Le non adaptation de la CIDE au droit burundais tient d'abord à une faible corrélation entre la CIDE et la coutume burundaise (a), une inadaptation due au retrait de la République du Burundi de la CPI, limite l'effectivité de la répression du viol sur mineur (b).

144 AHG/Rés.197(XXVI), texte in African Journal of International and Comparative Law, mars 1991, Tome3, p.195

145 Article 31 de la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant

146 Ibidem

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a. Une faible corrélation entre la CIDE et la coutume burundaise.

Il est unanimement admis que la coutume constitue une source de droit au Burundi147. L'environnement n'est pas bon protecteur pour les enfants dans les pays où les mentalités et les traditions sont favorables à la violence148.Or, à titre illustratif, la bastonnade est encore pratiquée au Burundi:« Nta mwana adakubitwa149». C'est l'intérêt de la famille élargie et de la communauté qui compte avant tout, l'intérêt supérieur étant laissé au second plan150.

Au Burundi, la CIDE a consacré une toute nouvelle conception de l'enfant. Auparavant, l'enfant était perçu comme un être fragile à protéger contre lui-même, contre autrui, contre les risques de la vie.151.Par ailleurs, certains auteurs comme Guy Raymond152 estiment que la CIDE reconnaît à l'enfant des droits et libertés dont l'exercice peut générer des difficultés par rapport aux prérogatives des parents.

De même, Guillemette Meunier estime qu'un équilibre droit être trouvé entre les droits et responsabilités de la famille d'un côté et le renforcement de l'aptitude de l'enfant à devenir protagoniste dans l'exercice de ses droits et responsabilités de l'autre153.A ce propos, nous estimons que les intérêts des parents ne vont pas toujours dans le sens de l'intérêt supérieur de l'enfant.

Malgré ces débats, la perception des droits de l'enfant a évolué au fil des années. Selon Frydman « Du respect de la morale familiale (...), la période contemporaine consacre la subjectivisation du droit, manifestation de la postmodernité qui a présidé à un déplacement de ce contrôle vers des rapports interpersonnels au sein de la famille 154». Les Etats ont déplacé leur centre d'intérêt

147Ordonnance de l'administrateur général du Congo du 14 mai 1886, -Principes à suivre dans les décisions judiciaires, B.O. 1886, p.188.Approuvé par décret du 12 novembre 1886 et rendu exécutoire au Burundi par l'O.R.U n° 11/82 du 21 juin 1949

148 http : // www.unicef.org/french/protection/indexe_environment.html, UNICEF ? Protection de l'enfant contre la violence et le mauvais traitement, consulté le 30 mars 2021

149 BIKONYORI I., et NININAHAZWE J. M., Protection juridique de l'enfant contre toute forme de violence en droit burundais, Université du Burundi, Mémoire, Bujumbura : Inédit, 2014

150 FVS/Amade Burundi, Module de formation aux droits de l'homme en général et de l'enfant en situation difficile, Bujumbura, aout 2004, p.11.

151 ROSENCZVEIG J.P., Le droit des enfants, Montrouge : Bayard, 2011, p. 19.

152 RAYMOND G., Droit de l'enfance et de l'adolescence : Le droit français est-il conforme à la Convention internationale des Droits de l'enfant ? Paris : Litec, 1995, p. 109-110.

153 MEUNIER, G. L'application de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant dans le droit interne des Etats Parties, Paris : L'Harmattan, 2002, p. 76

154 FERRON, F., op. cit. , p.375, mis en ligne le 21 mars 2003, (consulté le 30 mars 2021) : URL : http://journals.openedition.org/clio/303 ;DOI : https://doi.org/10.4000/clio.303

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du pater familias vers les membres de la famille pris individuellement, le mineur, dispose des droits protégés et exigibles à l'Etat.

Avec la CIDE, l'enfant devient sujet de droits et il se voit donc reconnaitre tous les droits de la personne, au premier rang desquels se trouvent les droits humains fondamentaux (liberté de pensée, de conscience, d'expression, etc.). Doté de pensées et de sentiments, il participe à l'orientation de sa vie et il peut prendre des décisions le concernant. Son opinion doit être prise en compte même s'il ne dispose pas d'une pleine capacité de décision.

Cette conception de l'enfant est celle développée par les « New social studies of childhood », approche interdisciplinaire qui a émergé dans les années 1980-1990 et qui défend l'idée selon laquelle les enfants sont des « acteurs sociaux » à part entière et non seulement des adultes en devenir155. En plus des droits humains de base, la CIDE reconnaît ainsi à l'enfant des droits renforcés (ex : droit à l'intégrité physique et morale) et des droits spécifiques (ex : droit d'être plus protégé que la femme du viol suite à son absence de consentement) liés à ses besoins spécifiques et à sa condition d'enfant156.

Certains auteurs comme Guy Raymond157 estiment que la CIDE reconnaît à l'enfant des droits et libertés dont l'exercice peut générer des difficultés par rapport aux prérogatives des parents. Ainsi G. Raymond s'interroge: comment peut-on concilier cette liberté de pensée, de conscience et de religion de l'enfant avec le contrôle des parents.

D'autres auteurs mettent plutôt en avant les droits des parents sur l'enfant. L'idée dominante est alors que l'enfant appartient aux parents qui peuvent donc en faire ce qu'ils veulent. Jean-Pierre Resenczveig, juge pour enfants en France, fait la remarque suivante concernant certains parents : « Lorsqu'on leur dit qu'ils n'ont pas le droit de battre leur enfant, ils ont l'impression de ne plus être les parents. Ils confondent autorité et violence158 ». Cette idée est prédominante au Burundi. Les parents restent convaincus qu'ils peuvent décider en lieux et places de l'enfant, peu importe l'intérêt supérieur de l'enfant. Le juge pénal peut de nos jours, sur base de la CIDE sanctionner l'auteur de la bastonnade sur l'enfant au Burundi.

155 NIKITINA, O.-DEN BESTEN, « What's New in the New Social Studies of Childhood? The Changing Meaning of `Childhood» in Social Science», Social Science Research Netwok, 15 octobre 2008, ( http://papers.ssrn.com/so13/papers.cfm?abstractid=1285085) (consulté le 27 mars 20121), cité par Elsa Bourget, La protection des droits des enfants placés en institution en Haïti, Mémoire ,Inédit, Université de Nantes, 2004, p.28

156 ROSENCZVEIG, J.P., op.cit., p. 19-20.

157 RAYMONDG., Droit de l'enfance et de l'adolescence : Le droit français est-il conforme à la Convention internationale des Droits de l'enfant ? Paris : Litec, 1995, p. 109-110.

158 ROSENCZVEIG, J.P., op.cit., p.34

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Malgré ces débats, la perception des droits de l'enfant a évolué au fil des années. Selon Frydman, « Du respect de la morale familiale (...), la période contemporaine consacre la subjectivisation du droit, manifestation de la postmodernité qui a présidé à un déplacement de ce contrôle vers des rapports interpersonnels au sein de la famille 159».Selon lui, les Etats ont déplacé leur centre d'intérêt de pater familias vers les membres de la famille pris individuellement, le mineur, dispose des droits protégés et exigibles à l'Etat sans passer par les aménagements raisonnables de l'autorité parentale.

Lavallée et Zermatten, en 2015 estiment que « A partir du XX e siècle, l'enfant est devenu un sujet des droits fondamentaux au même titre que l'adulte, même s'il existe une difficulté à doser les droits de l'enfant du fait de l'existence de mouvements antagonistes ». Les nostalgiques du passé existent partout, mais comme la CIDE les a devancé, ils doivent changer.

De ce qui précède, on peut en déduire que la réaction sociale face au viol a connue des périodes timides, mais que progressivement elle s'est affirmée, puis s'est affinée et s'affine encore de nos jours.Le droit positif burundais, avec le temps tend à empiéter sur l'espace juridique jadis réservée à la coutume en matière de protection de la répression du viol en général et du viol sur mineur, grâce notamment à la ratification de la CIDE.

b. Une inadaptation due au retrait du Burundi de la CPI, limite de l'effectivité de la répression du viol sur mineur

Le Burundi a ratifié le Statut de Rome de la Cour pénale international.160 En ratifiant ce statut, le Burundi a donné plein effet à la CPI de qualifier et de juger les auteurs des violations les plus graves comme les crimes contre l'humanité, y compris le viol. Le droit à l'intégrité physique et morale à travers la répression du viol sur mineur ne peut être effectif que s'il est attaché à une sanction en cas de violation de ce dernier. A ce propos, le Burundi a pris la décision de se retirer de la CPI161. Ce retrait rétrécit la protection des mineurs contre le viol, étant donné que la CPI ne pourra plus juger les auteurs de viol compris comme un crime contre l'humanité.

159 FERRON L., « Georges VIGARELLO, Histoire du viol XVIe-XXe siècles, Paris, 1998,357p, », in Clio. Histoire, femmes et sociétés, 9 1999 mis en ligne le 21 mars 2003, consulté le 30 mars 2021 : URL : http://journals.openedition.org/Clio/303 ; DOI : https://doi.org/10.4000/clio.303

160Adopté à Rome le 17 juillet 1998

161 Loi n°1/014 du 18 octobre portant retrait de la République du Burundi du Statut de Rome de la Cour Pénale International

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B. Une reconnaissance régionale des droits de l'enfant nuancée et en perspective au Burundi

La reconnaissance régionale des droits de l'enfant nuancée et en perspective s'effectue à travers une reconnaissance de la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant, consacrant les valeurs culturelles : source du manque d'universalité dans la mise en oeuvre des droits de l'enfant(1) et une perspective de ratification du Protocole de Maputo, catalyseur des droits de l'enfant(2).

1. Une reconnaissance de la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant consacrant des valeurs culturelles: source du manque d'universalité dans la mise en oeuvre des droits de l'enfant

La Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant a été adoptée lors de la Conférence des chefs d'Etats et de Gouvernement de l'OUA qui s'est tenu à Addis-Abeba en date du 9 au 11 juillet 1990162. En plus de la reconnaissance des devoirs de l'enfant, la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant reconnait une certaine importance à la coutume et les valeurs culturelles africaines163. En cela, elle rejoint le droit burundais qui reconnait la coutume comme source du droit164.

Cette disposition tranche avec la conception individualiste de la CIDE et de la philosophie libérale de la personne et de l'enfant encore que la cohabitation de la coutume judéo-chrétienne de la CIDE et les coutumes africaines n'est pas toujours aisée. L'Afrique a plusieurs coutumes difficiles à mettre sous une même coupole. Il y a lieu de noter la différence de conception de l'enfant dans la civilisation islamique, vaudou, chrétienne ou animiste et les droits qu'elles entendent donner à l'enfant. Quoique l'esprit et la lettre de la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant semble neutre, l'effectivité de la mise en oeuvre des droits garantis souffre, certes à des degrés divers des différences culturelles, certaines coutumes étant contra legem aux yeux de la CIDE.

162 AHG/Rés.197(XXVI), texte in African Journal of International and Comparative Law, mars 1991, Tome3, p.195 163Art.31 de la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant

16414 mai 1886-Ordonnance de l'administrateur Général du Congo, Principe à suivre dans les décisions judiciaires, B.O., 1886, p.188.

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En réplique, le Comité des droits de l'enfant tend à condamner « les valeurs culturelles » qui vont à l'encontre des droits de l'enfant165.

2. Une perspective de ratification du Protocole de Maputo, catalyseur des droits de l'enfant

Le Protocole de Maputo de la CEDEF revêt des intérêts transversaux qui impactent positivement les droits de la femme et de l'enfant. A s'en tenir au cas du Burundi, la ratification du Protocole de Maputo permettrait à la femme de succéder sur les propriétés foncières en milieu rural, ce qui n'est pas pour le cas aujourd'hui. Or, cette ratification constituerait un renforcement des droits patrimoniaux qui ne manquerait pas d'impacter positivement sur l'accès du mineur à la justice. La pauvreté de l'enfant constitue un des handicaps d'accès de ce dernier à la justice.

Paragraphe 2. Une prétendue universalité de la CIDE sans association de la population burundaise

L'absence d'association de la population burundaise dans la ratification de la CIDE passe par une absence du Parlement dans la phase précédent la ratification la ratification de la CIDE (A) et une participation mitigée du Parlement dans les phases de vote et de vulgarisation de la loi de ratification de la CIDE : Une occasion manquée d'universalisme au Burundi(B)

A. Une absence du Parlement dans les phases préparatoires sur la ratification de la CIDE

Si la CIDE et la Constitution sont deux textes de loi de même rang, les mécanismes d'adoptions et d'appropriation de la population ne sont pas de même rang(1).Quant au Parlement, il est peu associé dans la domiciliation des traités (2).

1. La CIDE et la Constitution : Deux textes de loi de même rang avec deux mécanismes d'adoption et d'appropriation inégale

La procédure législative burundaise n'associe pas la population dans la phase préparatoire de ratification des Conventions internationales en général ni de la CIDE en particulier. Selon la Constitution burundaise du 7 juin 2018, « les droits et devoirs proclamés et garantis par les

165Cfr le 2 e rapport d'évaluation sur le Burundi

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textes internationaux relatifs aux droits de l'homme font partie intégrante de la Constitution »166. S'agissant de la ratification et de la garantie des traités et accords internationaux au Burundi, « Le Président de la République(...) est le garant de l'indépendance nationale, de l'intégrité du territoire et du respect des traités et accords internationaux167 ». Les traités ont une valeur constitutionnelle au Burundi.

La CIDE,à la différence de la Constitution burundaise de 2018 qui est adoptée par référendum168, passe par une loi de ratification pour sa domiciliation. Il va sans dire que le referendum est le mode de consultation populaire le plus large. Les périodes de rédaction du projet de la Constitution et la campagne électorale précédent le scrutin constitue un mode d'information de la population et un moment privilégié des débats publics. La conséquence des deux modes de de textes juridiques de même rang constitutionnel, à savoir la CIDE et la Constitution, ne sont pas connus ou reconnus par la population burundaise de la même façon. A côté d'une Constitution au contenu relativement connue, la CIDE reste méconnue du Burundais moyen.

2. Un Parlement peu associé dans la phase préparatoire de la CIDE :

une universalité de la CIDE sans partenariat d'acteurs majeurs au Burundi

Dans la phase préparatoire de l'adoption des lois, le Parlement joue un rôle majeur dans ses attributions classiques. Il s'agit de la fonction de vote de la loi169, du contrôle de l'action gouvernementale170,de la fonction de représentation du peuple et de la diplomatie parlementaire« La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce, soit directement par la voie du referendum, soit indirectement par ses représentants. Aucune partie du peuple, aucun individu ne peut s'en attribuer l'exercice171 »Dans la phase préparatoire de la ratification des lois ordinaires, des questions orales peuvent être organisées pour entendre le Ministre se prononcer sur un sujet quelconque et partant, informer l'opinion nationale lors des descentes des parlementaires dans leurs circonscriptions172. Une telle activité n'existe pas pour une loi d'adoption d'une Convention internationale comme la CIDE. Lors des votes de lois, la Commission parlementaire permanente saisie au fond convoque le membre du Gouvernement en

166Art. 19 de la Constitution du 7 juin 2018

167 Art.96 Idem

168 Référendum du 17 mai 2018

169Art163 de la Constitution du 7 juin 2018

170 Art 163 de la Constitution du 7 juin 2018

171Art. 7 de la Constitution du 7 juin 2018

172 Art. 31.1 du réglement intérieur de l'Assemblée nationale du 22 juin 2018

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charge la loi objet d'analyse dans les travaux en commission173. La Commission parlementaire peut formuler des amendements. Durant ces navettes, même les particuliers peuvent participer dans le processus législatif en formulant des amendements174.Si les Parlementaires ne connaissent que très peu de chose à propos d'une Convention internationale comme la CIDE, la population est d'avantage moins informée. Cette sous-information de la population peut, non seulement porter sur le contenu de la CIDE, mais aussi de son existence.

B. Une participation mitigée du Parlement dans les phases de vote et de vulgarisation de la loi de ratification de la CIDE : Une occasion manquée d'universalisme au Burundi

La participation mitigée du Parlement se fait par un vote de ratification de la CIDE sans débats de fond en tant que limitation de la volonté populaire(1), puis en tant que limitation dans la vulgarisation(2).

1. Un vote de loi de ratification de la CIDE sans débats de fond au Parlement : une limitation de l'expression de la volonté générale du peuple et du non appropriation de la CIDE

Le vote des lois au niveau de la séance plénière de l'Assemblée nationale s'accompagne des débats de fond en général pour les lois ordinaires. Mais ces débats de fond n'ont pas lieu pour les lois de ratification. Le membre du Gouvernement porteur du projet de Convention expose le projet ex cathedra et les rares questions que les parlementaires peuvent poser ne sont que des questions de clarification, de compréhension ou de forme. Des questions pourtant dignes d'intérêt dans la mise en oeuvre des droits garantis par la CIDE restent en souffrance lors de cette séance. Il s'agit notamment des éclaircissements sur l'adaptation d'un cadre légal de mise en oeuvre de la CIDE, des moyens de mise en oeuvre de cette Convention et de leur provenance et surtout des questions qui cadrent mal avec les réalités burundaises.

Le réalisme juridique conduit à se poser la question de savoir pourquoi, si la Convention de Vienne sur le droit des traités autorise les ratifications avec réserve, comment est-ce que un Etat

173 Art.98 du réglement intérieur de l'Assemblée nationale du 22 juin 2018

174 Art.31.2 du réglement intérieur de l'Assemblée nationale du 22 juin 2018

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peut-il formuler des réserves alors que les débats sur le fond restent inachevés? Le constat est que toutes les Conventions internationales ratifiées par le Burundi le sont sans réserve, tandis que leur mise en oeuvre constitue une problématique malheureusement.

2. Un vote de loi de ratification de la CIDE sans débats de fond au Parlement : une limitation de la vulgarisation imparfaite de la CIDE

La vulgarisation des lois est mise en oeuvre lors des descentes sur les lieux des parlementaires sur des questions thématiques dans le cadre de la fonction de la représentation du peuple. Il s'agit d'un rendez-vous de donnant-donnant, lors duquel les parlementaires développent des échanges avec les électeurs de leurs circonscriptions ou pas, sur des thèmes émergents comme les droits de l'homme. Lors de ce rendez-vous, les parlementaires recueillent des doléances de la population à transmettre éventuellement à qui de droit.

Ainsi, le défaut d'appropriation de la CIDE par les parlementaires durant les diverses phases d'avant et pendant la loi de ratification, va produire un sentiment ou un gout d'inachevé chez le parlementaire. Naturellement, ce dernier aura de la peine à aborder devant son électorat, une matière dont il ne maitrise pas la portée.

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"Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots"   Martin Luther King