B- La mesure de la libéralisation
financière
La libéralisation financière n'est pas une
notion facilement mesurable, car il est difficile de la quantifier. Cependant
Plusieurs index ont été construits pour tenter de la mesurer. Il
serait impossible de tous les recenser. Nous allons nous limiter à
présenter les plus connus.
Gamra et Plihon (2007), puis Gamra et Clévenot (2008)
construisent un index de libéralisation financière qui prend en
compte les trois secteurs (secteur financier interne, marchés financiers
et compte de capital). Pour chaque secteur ils identifient trois
régimes : parfaitement libéralisé, partiellement
libéralisé, et réprimé. Un système financier
est considéré comme parfaitement libéralisé si les
trois secteurs sont parfaitement libéralisés. Et il est
considéré comme partiellement libéralisé, si au
moins un secteur n'est que partiellement libéralisé (voir tableau
1 en annexe). Les variables de la libéralisation financière
prennent la valeur 2 lorsque la libéralisation financière est
totale, 0 en situation de répression financière et une valeur
comprise entre 0 et 2 en situation de libéralisation partielle.
Reprenant la méthodologie de Kaminsky et Schmukler (2002), Gamra et
Clévenot (2008) écrivent l'indice de libéralisation
financière comme une somme pondérée de l'indice de
libéralisation des trois secteurs (libéralisation du secteur
financier interne (LSFI), des marchés financiers (LMF), et du compte de
capital (LCC)). L'indice de libéralisation financière (LF) est
donc :
LF= 1/3*LSFI + 1/3*LMF + 1/3*LCC
Abiad et Mody (2005)ont utilisé six mesures du
caractère répressif du système financier,
agrégées en rythme annuel, afin de saisir les différentes
dimensions de la réforme financière :
· Contrôles sur le crédit, comme la
canalisation du crédit vers les industries ou secteurs
favorisés, et coefficients de réserves obligatoires excessivement
élevés.
· Contrôles sur les taux
d'intérêt, que les taux soient fixés par l'État
ou soumis à des planchers, à des plafonds ou à des marges
de fluctuation.
· Barrières à l'entrée sur le
marché, telles que l'agrément obligatoire, la limitation de la
participation des banques étrangères et les restrictions
relatives à la spécialisation des banques ou à
l'établissement de banques universelles.
· Réglementations régissant les
sociétés financières -comme les restrictions portant sur
l'embauche de personnel, l'ouverture d'agences et la publicité- et
l'établissement de marchés de valeurs.
· Domination de sociétés d'État
dans le secteur financier.
· Restrictions aux transactions financières
internationales, notamment la non-convertibilité de la monnaie et
l'emploi de taux de change multiples.
Dans chacune de ces catégories, ils attribuent une note
les : 0 = répression totale, 1 = répression partielle, 2 = large
libéralisation, et 3 = libéralisation totale.
Concernant la mesure de la libéralisation du compte de
capital, on distingue deux catégories de mesures de l'ouverture du
compte de capital : les mesures formelles ou de jure qui
reflètent l'existence de barrières légales au mouvement
international de capitaux et les mesures en volume ou de facto qui
quantifient les flux actuels et les stocks de capitaux étrangers. Les
indices de jure se basent le plus souvent sur les informations
extraites du rapport annuel sur les régimes et les restrictions de
change « AREAER » publié chaque année par le FMI
(Lajili, 2015).
On distingue, en ce qui concerne les indices de
jure, la variable AREAER (Annual Report on Exchange Arrangements and
Exchange Restrictions) du FMI. C'est une variable binaire indiquant le
degré d'ouverture du compte de capital. Elle comprend six
catégories. Elle prend la valeur 0 si le pays en question a au moins une
restriction sur les transactions en compte de capital, et la valeur1 dans le
cas contraire (aucune restriction). Ensuite la variable SHARE. C'est un ratio
entre le nombre d'années sans contrôle sur les mouvements de
capitaux, divisé par le nombre total d'années dans
l'échantillon. Elle varie entre 0 et 1 et est construite à partir
des données de l'AREAER. Ces deux variables sont de moins en moins
utilisées dans la littérature empirique. Figure aussi dans cette
catégorie de jure l'indice Quinn du nom de son auteur.
Construit aussi à partir des données du « AREAER » sur
les transactions concernant le compte de capital, il est disponible pour 94
pays pour la période 1950- 2004, par période de 5 ans. Il varie
entre 0 et 4 selon un degré de restriction décroissant : 4
représente une économie totalement ouverte. On a aussi l'indice
OPENNESS également basé sur les données de l'AREAER, qui
est un indice allant de 0 à 14, avec une augmentation de 0.5 points.
Enfin, l'indice KAOPEN de Chinn et Ito (2007) mesure l'ampleur de l'ouverture
du compte de capital. Il se base sur les 4 principales catégories de
restriction sur le compte extérieur contenues dans l'AREAER : la
variable indiquant la présence d'un taux de change multiple; lavariable
indiquant la présence de restrictions sur les transactions courantes
(degré de convertibilité de la monnaie domestique et nature des
restrictions sur l'utilisation d'une monnaie étrangère entre
résidents); lavariable indiquant la présence de restrictions sur
les transactions du compte de capital; et lavariable indiquant la
présence de restrictions lors du rapatriement des
bénéfices par les exportateurs. Cet indice est disponible pour
105 pays, pour la période allant de 1970 à 2015.
Les mesures de facto font principalement
référence aux flux de capitaux (investissements directs
étrangers et investissements de portefeuille) et aux stocks de capitaux
(actifs et passifs étrangers), (Lajili, 2015). L'indicateurde Lane et
Milesi-Ferretti (2007), principal indicateur de cette
catégorie,résume les actifs et passifs étrangers de 178
pays entre 1970 et 2007. Il se construit comme la somme des actifs
étrangers du pays i à l'instant t additionnée de la somme
des engagements étrangers du pays i à l'instant t, le tout
divisé par le Produit intérieur brut du pays i à l'instant
t exprimé en dollar américain.
Cependant certains auteurs reconnaissent la difficulté
de fournir un critère satisfaisant de mesure de la libéralisation
financière. Celle-ci en effet est difficilement mesurable. C'est
pourquoi dans leurs études ils contournent le problème en
utilisant certainsindicateurs pour cerner la portée de la
libéralisation financière. Ce faisant l'utilisation des
indicateurs comme la masse monétaire M2, les crédits
privés, le taux d'intérêt, etc. tous rapportés au
PIB, et souvent associés à l'utilisation des variables dummy ou
dummies, qui sont des variables binaires prenant la valeur 0 avant
lalibéralisation financière et la valeur 1 après (on
considère ici qu'un système financier est soit
réprimé, soit libéré, sans qu'il soit possible de
donner le degré de libéralisation) est opérée.
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