Pratiques artistiques et télévision au Cameroun a l'ère du numériquepar ERNEST NDJOCK SOUME Université de Yaoundé I - MASTER EN ARTS DU SPECTACLE, CINEMATOGRAPHIE ET TELEVISION 2021 |
III-3-3- Les partenariats médiatiquesSouvent mais pas toujours, le média a plus d'influence et de visibilité que l'entreprise ; et l'entreprise plus de moyen que le média. Souvent encore mais pas toujours non plus, le média a plus de contenus que l'entreprise, et l'entreprise plus d'expertise de son secteur d'activité que le média. C'est ainsi que les échanges entre le média et l'entreprise se résument. L'entreprise achète de la visibilité dans les médias, et les médias consultent les experts de l'entreprise pour leurs contenus124. D'où la sollicitation des médias lors des événements de l'entreprise. La plupart des grandes chaînes de télévision fonctionnent actuellement avec des partenariats médiatiques. Le partenariat médiatique est un partenariat entre la chaîne de télévision et une entreprise privée, public ou parapublic. Ayant signé le contrat, la chaîne de télévision bénéficie de l'exclusivité de toutes les informations de la structure dans leur édition d'information. Le mode de paiement est ainsi différent des autres en ce sens que les factures sont payées annuellement. Dans le contrat, la chaîne peut exiger d'être payée sur la base du nombre de reportage effectué sur une année, tout comme ils peuvent fixer un taux forfaitaire. Le prix varie généralement entre 10.000.000 FCFA à 20.000.000 FCFA, voire plus. C'est la raison pour laquelle vous verrez une présence de la chaîne Info TV durant tous les événements organisés par l'ART (Agence de Régulation des Télécommunications), les reportages sur cet institution para-publique auront toujours un angle de traitement bien définit avec un timing plus long que les autres papiers journaux. En fonction de la teneur de l'évènement, le même papier du journal peut être diffusé durant 02 à 03 jours. C'est le cas d'Ariane TV avec le Cercle des Jeunes Aveugles Réhabilités du Cameroun (CJARC) qui a un partenariat de couverture médiatique. Le partenariat s'étend jusqu'à la réalisation des documentaires, des films 124 Consulté sur le lien https://www.emarketing.fr/thematique/media-1093/Tribune/Des-relations-presse-partenariat-média-235815.htm 118 d'entreprise, des spots publicitaires, notamment ceux des dons relatifs à la construction des salles de classe, aides financières etc. La CRTV est aussi le média prisé de certains ministères publics et de certaines entreprises privées comme l'IAI (Institut Africain d'Informatique). Canal 2 International rafle la mise avec les brasseries du Cameroun, Orange Cameroun et MTN Cameroun. Les campagnes promotionnelles de ces trois structures passent toujours par cette chaîne. Un autre opérateur ayant noué un grand partenariat avec Canal 2 est CANAL +. Ce type de partenariat est appelé partenariat média-média. Canal + est un groupe de Média nationale Française mais qui a aussi la particularité d'être un distributeur d'images par canal satellitaire. Toutes les publicités de ce distributeur passent par ladite chaîne. Certains spots sont même réalisés par l'équipe de Canal 2, lequel sera diffusé dans d'autres chaînes comme la CRTV. ? Le crawl Le Crawl, dans son expression littérale anglaise est un type de nage en surface le plus rapide. La télévision a emprunté le mot pour l'adapter en sa guise. Il représente en fait le message défilant horizontalement sur fond neutre ou coloré en superposition d'images diffusées. Pour faire simple c'est une bande plus ou moins défilante en télévision généralement positionné en bas de l'écran. Des informations diverses sont toujours diffusées par ce moyen comme : l'info journal, les avis de décès, avis de recherche, offres d'emploi, communiqués etc. Certaines chaînes de télévision utilisent même une bande supplémentaire pour d'autres informations spécifiques comme la Météo. C'est le cas de Canal 2 International, Bnews 1, Vision 4. Les prix varient d'une chaîne de télévision à une autre, soit 20.000 FCFA la diffusion journalière dans les chaînes à petite audience et pour un forfait mensuel de 200.000 FCFA. Nous pouvons citer à titre d'exemple CAM 10, Regard'Afrik TV. Par contre, les chaînes à forte audience acceptent les sommes de 25.000 Fcfa à 35.000 FCFA la diffusion journalière, ceci pour un montant mensuel de 600.000 FCFA à 1.050.000 FCFA. La longueur du texte contribue également à la hausse ou baisse du prix. Tableau N°12 : Grille tarifaire diffusion du crawl
Source : Auteur, tarif diffusion de crawl, Avril 2021. 119 Nous avons commencé par présenter les différentes voies financières d'une chaîne de télévision pour suivre la ligne rédactionnelle que nous nous sommes prescrites. Toutefois, pour capitaliser, il y a un catalyseur très important à mettre en jeu : l'audience. ? L'audience Dans ce chapitre consacré à l'économie de la télévision, nous n'avons pas parlé de l'audience dès les premières lignes non pas parce que nous avons fait une omission, mais dans le but d'attirer l'attention après ces chiffres élogieux que nous venions d'évoquer. L'audience est la base financière d'une chaîne de télévision ; elle est le témoin de visibilité, une mesure d'écoute et un repas féculant auprès des investisseurs et promoteurs ; c'est elle qui attire les annonceurs. Savoir qu'une chaîne de télévision est regardée par tel nombre de téléspectateurs, ou compte tel nombre d'abonnés plus que d'autres chaînes influence énormément dans le choix des annonceurs. La grande bataille de la télévision est donc aujourd'hui basée sur l'audimat. Des petites chaînes aux grandes chaînes, chacune se lance à la conquête de l'or, celle de l'audience. Cette bataille est plus observée auprès des médias privés que public car la publicité d'une manière générale est le meilleur moyen de se faire de l'argent. Pour ainsi avoir cet audimat, plusieurs facteurs entrent en jeu : La qualité des émissions, le genre des émissions, les horaires, etc. Concernant les émissions, elles doivent être de bonnes qualités sur des questions journalistiques et technico-artistique, la qualité des invités doit être de mise, savoir jouer sur la contradiction pour ce qui est des émissions politiques par exemple. Généralement, lorsque l'orientation de l'émission est bonne, les téléspectateurs accordent du crédit à l'émission et deviennent des fidèles téléspectateurs. En ce moment, les questions artistico-techniques deviennent des préoccupations de secondes zones. On peut citer à titre d'exemple l'émission « La vérité en Face » de la chaîne Équinoxe TV diffusée en Direct et qui, chaque soir, compte plus de 1000 téléspectateurs qui regardent en streaming sur Facebook. Nous avons « L'arène », émission de débat politique sur la chaîne Canal 2 Internationale chaque Dimanche soir dès 21h, et « Scène de Presse » sur la chaîne CRTV Premium. Répondre aux attentes techniques citées ci-dessus engendre d'autres éléments comme la qualité du matériel à utiliser pour le rendu des émissions. Il faut acquérir un bon plateau technique qui devra comporter des caméras professionnelles en Haute définition (HD), des lampes pour studio, des microphones, matériel de diffusion. Le maniement de ces appareils aux fins d'obtenir une bonne qualité d'image nécessite des techniciens chevronnés ; Il faut également associer à cet effet des journalistes compétents, sélectionner des sujets attrayants 120 pour chaque émission, faire une bonne étude sociologique du public, avoir une ligne éditoriale attrayante. Aujourd'hui, la bataille s'est resserrée dans l'univers du numérique à travers les plateformes comme : Facebook, YouTube qui permettent des diffusions en streaming. Les journaux télévisés sont plus suivis sur ces plateformes. L'avantage de ces plateformes est le « Replay », c'est-à-dire, la possibilité de regarder une émission après son heure de diffusion. On peut donc soit regarder l'entièreté, le début ou la fin de l'émission. Il n'y a donc pas de perte ou d'occasion ratée avec Facebook et YouTube. ? Les chaînes payantes La grosse part des marchés de télévision réside dans la rémunération des chaînes par les distributeurs. Il existe deux modèles de rémunérations à savoir : la « cession exclusive » et « non exclusive »125 par l'éditeur des droits de diffusion à un distributeur. Pour le premier cas, la rémunération des chaînes payantes exclusives, donc adossées à un distributeur unique, se fait sous forme de redevance forfaitaire annuelle pour un montant relativement élevé, puisqu'on empêche l'éditeur de céder les droits à un autre distributeur. À ceci s'ajoute une rémunération issue des recettes publicitaires, lequel est calculé sur la base du nombre de téléspectateurs et donc en partie à la taille de l'audience. Par contre, le deuxième cas, la « non exclusivité » est le modèle qui n'est pas adossé à un distributeur exclusif126. La rémunération dans ce cas n'est plus forfaitaire mais à géométrie variable à cause de la réévaluation fréquente de la part du distributeur, qui demande des comptes à la chaîne en termes d'audience. En dépit de cela, la chaîne perçoit plusieurs redevances, celles issues des fournisseurs d'accès internet (FAI). Mais lesdits revenus sont largement inférieurs à la seule redevance versée par un distributeur en exclusivité ; dès lors, Nathalie explique que « le prix appliqué est très inférieur à celui qui est appliqué dans le modèle standard »127. On se retrouve alors dans une situation selon laquelle si l'audience n'est pas suffisante, le distributeur se trouve en position de pouvoir réajuster la redevance versée à l'éditeur. Toutefois elles perçoivent aussi un complément de rémunération qui émane des recettes publicitaires qui 125 Autorité de la Concurrence (2010), décision n° 10-D-32, relative à des pratiques mises en oeuvre dans le secteur de la télévision payante, ( http://www.autoritedelaconcurrence.fr/pdf/avis/10d32.pdf). Consulté le 21 Mars 2021. 126 Nathalie, SONNAC, «Médias audiovisuels et concurrence. Le cas de la télévision payante », Revue d'économie industrielle [En ligne], 137 | 1er trimestre 2012, mis en ligne le 15 janvier 2014, p. 6. URL : http://journals.openedition.org/rei/5320 Consulté le 26 janvier 2021. 127 Idem, p. 7. 128 Idem, p. 7. 121 est calculé sur la base du nombre d'abonnés à la chaîne. Par contre, ici, « le montant obtenu est largement plus important que celui qui serait perçu par un distributeur en exclusivité »128. En définitive, pour les chaînes commerciales, l'audimat est financé par la publicité. La rémunération des chaînes distribuées en exclusivité vient du marché publicitaire. En d'autres termes, la chaîne non adossée à un distributeur en exclusivité voit son modèle d'affaires dépendre doublement du marché publicitaire. |
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