1.2. De la qualité juridique actuelle des
agents et cadres administratifs et techniques de la CENI en droit positif
congolais
Dans nos analyses précédentes nous nous sommes
rendus compte que les agents et cadres administratifs et techniques de la CENI
prestent dans les structures administratives permanentes de la CENI et qui
constituent en effet, son administration. Et les services qu'ils exercent sont
purement et simplement des services administratifs et techniques
électoraux et leurs conditions de services sont régis par le
statut particulier déterminé par le règlement
administratif et financier de la CENI. Et ils sont tenus au respect des
principes éthiques et déontologiques qui sont fixés par le
code de bonne conduite de la CENT. En effet, si l'on s'en tient à ces
éléments, d'aucuns n'hésiterons pas un seul instant de
dire que ces agents et cadres sont juridiquement parlants des fonctionnaires
par rapport à la CENI, mais pas vis-à-vis de l'Etat congolais,
cette qualification posera problème par le fait que ces agents et cadres
n'ont aucun rapport administratif ou aucune relation juridique directe avec la
fonction publique congolaise. Et cette dernière n'a explicitement aucun
droit de contrôle sur leur gestion par la CENI
Dans un langage vulgaire et ce, au regard de situations
ci-haut évoquées, les agents et cadres administratifs et
techniques de la CENI peuvent être qualifié
fonctionnaires-travailleurs ou des « chauves-souris », cet
espèce animal tout à fait particulier qui n'appartient ni la
famille des bêtes à quatre pattes ni moins des oiseaux alors qu'il
a d'une part les traits caractéristiques d'un oiseau, et les traits
caractéristiques de la souris (bête) de l'autre part. Autrement
dit des agents qui n'ont pas leur qualité propre dans l'ordre juridique
congolais.
Mais, si l'on en tient également dans la logique de la
définition du fonctionnaire sur le plan du droit administratif telle que
définie par la doctrine, on se rendra compte qu'un tel argument aussi ne
tiendra pas car au sein de la CENT ne sont nommés et
révoqués par la décision du Président de la CENI
délibérée en Assemblée Plénière
conformément aux dispositions de l'article 38 du RAF que le
secrétaire national exécutif, les secrétaires
exécutifs provinciaux et les chefs d'antennes. Les
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autres catégories d'agents et cadres administratifs et
techniques doivent faire impérativement objet de recrutement et par la
suite, « signer un acte d'engagement » (250) qui n'est
rien d'autre que le contrat. La nomination est donc, une exception et le
recrutement par acte d'engagement est le principe dans ce statut.
Alors, est-ce que pour dire que les agents et cadres
administratifs et techniques de la CENI recrutés sous l'acte
d'engagement (contrat), sont des salariés du droit du travail ? La
réponse à cette question selon nous, est négative car
l'analyse comparative que nous avions faites sur le statut des agents et cadres
administratifs et techniques de la CENI au regard du statut des travailleurs de
code du travail en RDC, a prouvé à suffisance que ces agents et
cadres ne peuvent se voir le droit de travail leur soit appliqué dans
leurs relations avec la CENI.
A cet effet, la qualité juridique des agents et cadres
administratifs et techniques engagés sous l'acte de contrat, trouve une
réponse satisfaisante dans un cas similaire issu de l'Arrêt
Berkani du 25 mars 1996(251) où le Tribunal des conflits en
France s'est résolu de rompre des décennies de complications et
incertitudes en jugeant que les « Personnels non statutaires travaillant
pour le compte d'un service
(250) Articles 55 bis, 56, 57, 58, 62 du règlement
administratif et financier de la CENI.
(251) Dans cet arrêt, le Tribunal de conflit avait
enregistré dans son secrétariat en date du 06 novembre 1995, une
lettre par laquelle le garde de Sceaux, ministre de la Justice avait transmit
au tribunal le dossier de la procédure opposant M. Berkani au Centre
régional des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) de
Lyon-Saint-Etienne devant le Conseil de prud'homme. En effet devant ce dernier
en date 14 mars 1994, le Préfet de la région de Rhône-Alpes
avait présenté un déclinatoire de compétence
tendant à ce que le Conseil de prud'homme de Lyon se déclare
incompétent et renvoie devant la juridiction administrative la demande
par laquelle M. Berkani réclamait la condamnation du CROUS de
Lyon-Saint-Etienne à lui payer des indemnités de préavis,
de licenciement, de congés et de dommages-intérêts pour
licenciement sans cause réelle et sérieuse. En date du 03 juillet
1995, le conseil de prud'homme de Lyon avait rendu son jugement condamnant
CROUS de Lyon-Saint-Etienne à payer à M. Berkani 25 849, 78 F au
titre de l'indemnité de licenciement, 16 326, 20 Fau titre de
l'indemnité compensatrice de préavis, 1 632, 60 F au titre des
congés payés et 146 935, 80F à titre de
dommages-intérêts pour licenciement abusif. Cependant, en date du
03 août 1995, le Préfet du Rhone avait pris l'arrêté
en élevant conflit devant le Tribunal de conflit. Devant ce dernier M.
Berkani avait présenté ses observations tendant d'une part
à ce que l'arrêté de conflit soit déclaré nul
tant en raison de sa tardiveté que de l'appel interjeté par le
CROUS de Lyon-Saint-Etienne devant la cour d'appel de Lyon et d'autre part
à ce que la compétence du conseil de prud'homme soit
confirmée. De sa part, le Ministre du travail et des affaires sociales
avait en date du 15 décembre 1995 présenté ses
observations tendant à ce que soit déclaré nul le jugement
du 03 juillet 1995 du Conseil de prud'homme de Lyon et à ce que
l'arrêté de conflit soit confirmé, par motifs que l'article
21 du décret du 5 mars 1987 dispose que les personnels ouvriers sont des
agents contractuels de droit public (...). Le Tribunal de conflit se
déclarant compétent, avait considéré dans son
arrêt que « les personnels non statutaires travaillant pour le
compte d'un service public à caractère administratif sont des
agents contractuels de droit public quel que soit son emploi.
Considérant que M. Berkani a travaillé depuis 1971 en
qualité d'aide de cuisine au service du CROUS de Lyon-Saint-Etienne, il
s'ensuit que le litige l'opposant à cet organisme, qui gère un
service public à caractère administratif, relève de la
compétence de la juridiction administrative et que c'est à juste
titre que le préfet de la région de Rhône-Alpes,
préfet de Rhône, a élevé le conflit. , Lire : T
confl. 25 mars 1966, Berkani c. CROUS de Lyon-Saint-Etienne in Jean
Pélissier/ Antoine Lyon-Caen/ Antoine Jeammaud/ Emmanuel Dockès,
Les Grands arrêts du droit du travail,4ème
édition, Dalloz, Paris, 2008, p. 33.
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public à caractère administratif sont des agents
(fonctionnaires) contractuels de droit public, quel que soit leur emploi
».
Partageant la même position de l'arrêt
précité, nous disons quant à nous que les agents et cadres
administratifs et techniques de la CENI sous l'acte d'engagement, sont des
« fonctionnaires contractuels électoraux ».
La conséquence logique de cette qualification juridique
ce que, que ce soit les fonctionnaires nommés et les fonctionnaires
contractuels électoraux, dans leurs liens juridiques avec la CENI, il ne
peut jamais exister un procès équitable dans tout éventuel
le litige qui surgirait dans leurs relations.
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