§2. Perspectives
Bien que certains auteurs aient vu dans la proclamation de la
responsabilité de protéger une simple «réforme de
caractère linguistique»66, nous sommes d'avis que cette
notion contribue tout de même à faire évoluer la situation
sur le plan international. Contrairement au «droit d'ingérence
humanitaire», qui n'a jamais été reconnu sur le plan
ou celui qu'il subit parce que des êtres humains sont
massacrés sans que le Conseil de sécurité ne lève
le petit doigt»
64 J. Noel, le principe de non-intervention :
théorie et pratique dans les relations interaméricaines,
Bruxelles, Bruylant, 19811, p. 236.
65 En effet, la Résolution 1769 du Conseil
de sécurité du 31 juillet 2007 qui prévoyait le
déploiement renforcé des Nations Unies et de l'Union africaine
n'aura pas eu l'effet escompté sur le terrain. La mission des Nations
Unies et de l'Union africaine Au Darfour (MINUAD) s'était fixé
comme objectif à atteindre une présence de quelques 26 000 hommes
en plus des 7 000 soldats débordés de l'Union africaine sur le
terrain depuis 2004. Cet objectif n'a pourtant jamais pu être atteint. Au
17 juin 2008, le nombre total des personnels en uniforme de la MINUAD
s'élevait à 10 190 hommes (soldats, officiers, policiers) et 3
443 civils volontaires recrutés sur le plan national et international.
De plus, les ressources matérielles notamment en termes
d'équipements s'avèrent également insuffisants, (Rapport
du Secrétaire général sur le déploiement de
l'Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour, 17 juin
2008, doc. ONU S/2008/400).
66 L. Boisson de chazournes et L Condorelli ,
De la responsabilité de protéger ou d'une nouvelle parure
pour une notion déjà bien établie, RGDIP, 2006, p.
17.
31
juridique67, la responsabilité de
protéger fait l'objet d'un consensus mondial. Pour la première
fois, la communauté internationale a reconnu la nécessité
d'intervenir en cas de violations massives des droits de l'homme et du droit
international humanitaire et a défini les cas justifiant une telle
immixtion.
A ce sujet, Le professeur De la Pradelle dira de cette
résolution: «L'innovation est indiscutable. Jamais auparavant l'ONU
n'avait autorisé certains de ses membres à conduire une
opération de police armée à seule fin de secourir une
population affamée»68. Tous les Etats ont accepté
le fait qu'ils partagent désormais une responsabilité solidaire
dans les cas d'atrocités perpétrées sur des êtres
humains et que le bien-être des populations doit être
considéré comme un bien commun à l'humanité.
Le rapport de la CIISE présente un apport important
dans les cas qui ne satisferaient pas aux exigences de légalité.
En effet, les critères développés pourront le cas
échéant être utilisés comme garde-fou, servant
à mesurer la légitimité d'une action militaire,
menée aux fins de protection des populations vulnérables.
Même s'il paraît évident que la recherche a posteriori de la
légitimité est le signe d'une absence de droit et, à tout
le moins, d'un doute à son sujet.
En tout état de cause, l'émergence de la
l'obligation de protéger suppose que l'inaction du Conseil de
sécurité face aux génocides, crimes contre
l'humanité, nettoyages ethniques ou crimes de guerre pourra être
considérée comme un fait internationalement illicite pouvant
engager la responsabilité de l'Organisation d'une part, et celle de
l'Etat d'autre part. Dans cette perspective, optique, les Etats qui s'opposent
ou empêchent l'action nécessaire du Conseil de
sécurité dans les cas susmentionnés pourraient engager
leur responsabilité internationale.
67J-M. Sorel , Le chapitre VII de la Charte des
Nations Unies, Colloque de Rennes de la Société française
de droit international, Paris, Pedone, 1995, p. 741.
68 C. Sommaruga, Le droit international
humanitaire au seuil du 3e millénaire : bilan et perspectives,
Genève, 2000, p. 63.
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