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Le recours à  la force et le principe de non immixtion dans les affaires intérieures des états


par Bonheur Bisimwa
Université officielle de Bukavu (U.O.B) - diplome de graduat en relations internationales 2020
  

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CHAPITRE II : APPLICABILITE ET VALIDITE DU PRINCIPE DE RECOURS A LA FORCE FACE AU PRINCIPE DE NON IMMIXTION DANS LES AFFAIRES INTERIEURES DES ÉTATS

Les principes de non-recours à la force et de non-immixtion ayant un caractère coutumier, ils sont toutefois soumis à certains fléchissements ou exceptions. Pour dire que dans certaines circonstances les Etats peuvent recourir à la force ou s'immiscer dans les affaires relevant de la compétence exclusive des autres soit aux fins humanitaires (section I), ou soit dans une perspective de faire respecter le droit international (section II). Cependant, ces exceptions ne vont pas sans soulever des critiques ou des observations du point de vue des relations internationales (section III).

Section I : L'INTERVENTION AUX FINS HUMANITAIRES

§1. Genèse de l'intervention humanitaire

En réalité, l'histoire des relations internationales a été marquée depuis longtemps par la pratique des interventions d'humanité, développée surtout au XIXe siècle et ayant principalement pour but la protection des nationaux de l'Etat intervenant, au cas où leurs vies étaient menacées46. Ainsi, les premiers balbutiements doctrinaux de cette notion remontent de très longtemps.

En effet, parmi les auteurs classiques de l'école du droit naturel qui se sont penchés sur la notion d'intervention d'humanité, on peut citer notamment Saint Thomas D'Aquin47 qui estime qu'« un souverain a le droit d'intervenir dans les affaires intérieures d'un autre lorsque ce dernier maltraite ses sujets », et Grotius48. Grotius écrivait, en évoquant la souveraineté des Etats : « Mais le droit de la société humaine ne sera pas exclu pour cela, lorsque l'oppression est manifeste... C'est ainsi que Constantin prit les armes contre Maxence et contre Licinius ; que d'autres empereurs des Romains les prirent, ou menacèrent

46 Hajer Gueldich, droit d'ingérence et interventions humanitaires : état de la pratique et du droit international, Paris, Dalloz,p.54.

47 Saint thomas d'Aquin cité par C-H.Thuan, « De l'intervention humanitaire au droit d'ingérence », in FENET, Paris PUF, 1994, p. 100.

48 Grotius cité par O. Corten et P. Klein , « Droit d'ingérence ou obligation de réaction non armée », in RBDI, 1990/2, p.369.

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de les prendre contre les Perses, s'ils cessaient de persécuter les chrétiens à cause de leur religion ».

Leurs idées ont été soutenues par d'autres auteurs tels que Vattel49, Puffendorf, Suarez, De Vittoria et même Saint Augustin. Sur la base de toutes ces pensées, allait se développer, au XIXe siècle, la doctrine d'intervention d'humanité.

De même, Gustave Rolin-Jacquemyns, avait écrit à propos de la légitimité de la pratique d'intervention : « lorsqu'un gouvernement, tout en agissant dans la limite de ses droits de souveraineté, viole les droits de l'humanité, par des excès de cruauté et d'injustice qui blessent profondément nos moeurs et notre civilisation, le droit d'intervention est légitime. Car quelque respectables que soient les droits de souveraineté et d'indépendance des Etats, il y a quelque chose de plus respectable encore, c'est le droit de l'humanité ou de la souveraineté humaine qui ne doit pas être outragé »50.

En dépit du fit que le droit naturel a été remplacé au XIXe siècle par le droit positif, en tant que socle du droit international, cela n'en en rien empêché la persistance de la thématique de l'intervention pour des fins humanitaires dans les doctrines française, britannique et américaine.

A ce sujet, Stowell enseigne que lorsque les habitants d'un pays sont de manière persistante victimes des atrocités graves et abusives, et qui dépassent les limites de raison et de justice dans lesquelles doit se maintenir le gouvernement, un Etat tiers peut intervenir à juste titre et employer la force pour secourir les victimes51. Dans l'affaire Espagne c/Grande Bretagne (sentence du 23 octobre 1923), l'arbitre Max Hubert avait souligné que : « L'intérêt d'un Etat de pouvoir protéger ses ressortissants et leurs biens doit primer le respect de la souveraineté territoriale, et cela même en l'absence d'obligations conventionnelles. Ce droit d'intervention a été revendiqué par tous les Etats, ses limites seules peuvent être discutées

»52.

L'intervention humanitaire, dite au XIXe siècle « intervention d'humanité », a souvent servi d'excuse légale aux politiques des grandes puissances. Dans bien des cas, elle

49 J-M. Henckaerts, Droit international humanitaire coutumier,vol.1,Bruxelles, Bruyllant,2006,p.357.

50 G. Rolin-Jacquemyns,op. cit., p.675.

51 E. StowelL , « La théorie et la pratique de l'intervention », in RCADI, 1932/II, page 138.

52 Affaire Espagne c/Grande Bretagne, Rapport du 23 octobre 1924, in RSA, volume II, page 641.

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dissimulait mal ses mobiles politiques53. Elle a notamment été mise en avant pour la protection de personnes et spécialement de nationaux contre un péril imminent les opérations d'Entebbe par Israël en 1976, de Kolwezi par la France en 1978 et de Taba par les États-Unis en 1980). La Cour internationale de Justice a indirectement émis une appréciation négative à l'égard de cette dernière opération dans son arrêt relatif à l'affaire du Personnel diplomatique et consulaire américain à Téhéran.54

La résolution de Wiesbaden sur le principe de non-intervention dans les guerres civiles, l'Institut de droit international a avancé la règle d'après laquelle : « les États tiers s'abstiendront d'assister les parties à une guerre civile sévissant sur le territoire d'un autre État ». Il a cependant admis à l'article 4 de la même résolution, la règle d'après laquelle : « devrait être tenu pour licite l'envoi de secours ou d'autres formes d'aides purement humanitaires en faveur des victimes d'une guerre civile ».C'était déjà dégager la voie qui devait conduire à l'affirmation, quelques années plus tard, du « devoir d'ingérence humanitaire ».

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry