De la limitation de la responsabilité civile du transporteur aérien face au principe de la réparation intégrale.par Pascal Claude Muhima Université Libres des Pays des Grands Lacs - Licence en droit 2019 |
SECTION II : LIMITES DE LA RÉPARATION DES PRÉJUDICES CAUSÉS PAR LE TRANSPORTEUR AÉRIENLorsque la responsabilité du transporteur aérien est reconnue, le dommage subi par l'utilisateur est indemnisé jusqu'à concurrence d'un certain montant fixé par la convention de Montréal et la loi congolaises sur l'aviation civile. Il s'agit d'une limitation de réparation, c'est-à-dire d'un plafond au-delà duquel le transporteur, tenu de réparer le dommage, ne peut pas indemniser72. C'est pourquoi, avant de placer un mot sur le montant de la limite de la responsabilité du transporteur aérien (sous-section deuxième), il est important de nous interroger sur ce qui avait motivé les rédacteurs de ces instruments juridiques à instaurer un système limitant la responsabilité civile du transporteur aérien (sous-section première). SOUS-SECTION I : JUSTIFICATION DE LA LIMITE DE LA RESPONSABILITÉ DU TRANSPORTEUR AÉRIENPour dégager les raisons qui justifient la limitation de la responsabilité civile du transporteur aérien ; il importe distinguer selon qu'on est face au système varsovien (§1), ou sous l'empire de la convention de Montréal et la loi congolaise (§2). §1 Du fondement de la limitation sous l'empire de la Convention de VarsovienLe transporteur aérien jouit d'un régime qui lui permet de voir sa responsabilité limitée et de bénéficier d'immunités grâce à certains clauses et événements particuliers. La limitation de responsabilité est née, en droit aérien de considérations purement économiques73. Le but premier était d'attirer le capital afin de développer leurs industries nouvelles, relativement couteuses et dangereuses (A). Comme il a été difficile aux rédacteurs des normes en la matière d'incorporer cette raison principale et d'autres qui sont secondaires, nous tenterons de dégager le fondement légal de la limitation de la responsabilité du transporteur aérien (B). 72 VOY RODIERE, « Limitation de responsabilité pour tous les dommages justifiés » in BT 1979, p14, Cité par V. EMMANUEL BOKALI et C. DOROTHE SOSSA, Droit des contrats de transport de marchandises par route, Op. Cit., p.100. 73 Ch. LE BOZEC, Que reste-t-il de l'influence du droit maritime sur le droit aérien, mémoire de Maitrise en droit, Université McGill, Montréal, National Library of Canada, Octobre 1999, p.39. Page | 30 A. Développement de l'industrie naissante comme fondement désuète de la limitation de la responsabilité du transporteur aérien La Convention de Varsovie a été adoptée à une époque où l'aviation commerciale était une industrie naissante qu'il convenait, à tout prix, de protéger afin d'assurer la pérennité de son développement, et ainsi éviter sa disparition (A.1) ; ainsi que faire permettre aux assureurs en matière aéronautique d'indemniser les victimes des dégâts énormes qui résultaient du transport aérien (A.2). A.1. Lutter contre l'effondrement de l'industrie aéronautique Il a été nécessaire de convenir d'un régime qui soit de nature à protéger les transporteurs aériens contre une responsabilité illimitée de sorte de ne pas les décourager. Autrement dit, la Convention de Varsovie avait choisi d'instaurer une responsabilité limitée et plafonnée afin de garantir la pérennité de l'activité du transport aérien. Une responsabilité illimitée aurait pour conséquence de freiner son essor74. Aussi, pour éviter que l'application du principe de la réparation intégrale en cas de dommage résultant du transport aérien, n'entraine la ruine des compagnies, les parties contractantes (à la Convention de Varsovie) se sont convenues de limiter le montant de la réparation à un certain seuil75. Cependant, cela n'est pas une bonne raison de justifier la limite de responsabilité, sinon n'importe quelle industrie pourrait cesser d'indemniser ses créanciers sous prétexte qu'elle pourrait disparaître, et qu'une meilleure solution serait de la subventionner76. Ceci est appuyé aussi par l'idée selon laquelle, l'évolution foudroyante de la technologie qui rend rare les accidents, les conditions actuelles du transport dans son ensemble ne sont plus les mêmes, ni dans le transport aérien ni dans les autres modes de transport. Les aéronefs sont munis de puissants moteurs qui ont largement augmenté la rapidité et la fiabilité des différents vaisseaux transportant les passagers et les marchandises à tel point où la compagnie qui observe les normes de sureté et de sécurité connait rarement d'accident. 74 SAMIRA BENBOUBKER, Risque, Sécurité et responsabilité dans le transport multimodal, Op. Cit., p333. 75 A. KAHINDO NGURU, cours de droit aérien précité, P7. 76 DRION, p.16, paragraphe16, cité par V. DIEGO RAMIREZ, La limitation de responsabilité dans le transport multimodal, Mémoire présenté à la Faculté des études supérieures en vue de l'obtention du grade de L.L.M. en droit des affaires, Université de Montréal, disponible sur http://www.papyrus.bib.umontreal.ca/-handle/1866/2370/11758361.P... , aout 2006, p.99. Page | 31 |
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