CHAPITRE II : FACTEURS EXPLICATIFS DU
COMPORTEMENT DYSFONCTIONNEL DE L'AUDITEUR : UNE REVUE DE LA
LITTERATURE
Dans le cadre d'une mission de certification des comptes, la
contrepartie attendue de chaque collaborateur d'audit par le manager (CAC ou
l'expert-comptable) en échange des multiples rétributions est
l'accomplissement parfait de leurs rôles. Selon Forgarty (1992) ce
rôle de l'auditeur renvoi à l'ensemble des comportements et
attitudes attendus de ce dernier par le manager dans le cadre de son travail.
Cependant, en raison de certains facteurs, ces collaborateurs sont souvent
tentés d'adopter des comportements de natures dysfonctionnelles
susceptibles de mettre en mal la qualité de leur travail ou même
d'altérer les relations entre les membres de l'organisation. Pour
Robinson & Bennett (1995), il s'agit des attitudes qui violent les normes
organisationnelles et qui de ce fait menacent le bien-être de
l'entité ou de ses membres. L'objet de ce chapitre est donc de faire une
revue de la littérature sur l'ensemble des facteurs
démontrés à avoir une influence significative sur le
comportement des collaborateurs d'audit dans le cadre de leur mission de
vérification. A cet effet, l'objectif de ce chapitre est de
présenter les théories explicatives de ces comportements
dysfonctionnels à savoir la théorie d'agence, la théorie
des échanges sociaux et la théorie du LMX (section I) et puis en
section (II) les facteurs déterminants des comportements dysfonctionnels
des collaborateurs d'audit.
SECTION I : LES THEORIES
EXPLICATIVES DU COMPORTEMENT DYSFONCTIONNEL DE L'AUDITEUR
Les analyses que nous avons effectuées tout au long du
chapitre précédent, nous amènent à définir
un cadre de lecture théorique permettant d'expliquer le comportement des
collaborateurs d'audit au cours de leurs missions de certification des comptes.
Cette section est donc consacrée au développement de la
théorie d'agence, des échanges sociaux et du
leader-member-exchange (relation-supérieur-subordonné) qui
constituent les principaux théories retenues dans le cadre de ce travail
pour tenter de donner une explication à l'émergence des
comportements dysfonctionnels des auditeurs réducteurs de la
qualité d'audit.
1. La théorie d'agence
La théorie d'agence est un cadre
théorique permettant de donner une explication claire de l'essence des
missions de vérifications au sein des organisations. Comme l'indique la
littérature sur la gouvernance des entreprises, les
intérêts des parties prenantes sont largement contradictoires
même si dans une certaine mesure, ils s'apparentent être
convergent. Sur le plan théorique, cette divergence
d'intérêt s'analyse en tant que relation d'agence. Toutefois, dans
le cadre de l'audit comptable et financier, cette relation d'agence peut
s'analyser à trois niveaux à savoir : entre les actionnaires
propriétaires de l'entreprise et les managers, entre les utilisateurs de
l'information comptable et financier et les cabinets d'audit garant de la
qualité de cette information, et en fin entre les associés
copropriétaires du cabinet d'audit et les collaborateurs
salariés. Pour tenter de donner une explication au comportement
dysfonctionnel des auditeurs, nous nous intéressons dans le cadre de ce
paragraphe à ce troisième niveau de relation d'agence née
de la divergence d'intérêt entre les associés et les
collaborateurs des missions d'audit. A cet effet, il sera question pour nous
d'abord de donner une définition et objectif de cette théorie
puis son évolution historique et en fin son application dans le contexte
d'étude.
1.1. Présentation de la théorie d'agence
Pour Ross (1973), une relation d'agence est
créée entre deux ou plusieurs personnes lorsqu'une des parties
désignée comme agent agit au nom et pour le compte de l'autre
dite principale dans un domaine décisionnel particulier. Dans le
même ordre d'idée, Jensen et Meckling (1976) pensent que,
l'entreprise est conçue comme une structure
conflictuelleconstituée d'agent aux intérêts divergents et
contradictoires. De ce fait, ils définissent une relation d'agence comme
étant un contrat dans lequel une ou plusieurs personnes ont recours aux
services d'une autre personne pour accomplir en leur nom une activité
quelconque. Ce qui implique une délégation de l'autorité
décisionnelle. Cet argumentaire trouve tout son sens dans les travaux de
Prat et Zeckhauser (1985) qui vont définir la relation d'agence comme
toute relation entre deux invendus telle que la situation de l'une
dépende de celle de l'autre. Dès lors, l'application de la
théorie d'agence va excéder le cadre de l'entreprise pour
s'appliquer à toutes les relations pouvant exister entre deux personnes.
Cependant sur le plan purement organisationnel toutes les entreprises peuvent
être perçues comme des noeuds de contrat entre le principal et
l'agent plus ou moins clairement formalisés où d'autres agents
se trouvent à leur tour être à la fois des principaux
à l'égard d'un autre agent (Jensen et Meckling, 1976). Dans le
cas de notre étude, cette situation peut s'illustrer avec la relation
entre les associés des cabinets d'audit responsable de la certification
et les seniors qui ont la responsabilité de conduire l'équipe
à la réalisation de la mission d'audit. Toutefois, il est
indispensable de signaler que la théorie d'agence est fondée sur
le principe de rationalité c'est-à-dire que chacun cherche
à maximiser son utilité et de ce fait anticipe rationnellement
les effets de cette relation d'agence sur ses résultats futurs. Pour
conclure, nous prenons la définition de Charreaux (1987) pour dire
qu'une relation d'agence existe du moment où
l'associé-copropriétaire du cabinet d'audit (CAC ou
L'expert-comptable) délègue son autorité
décisionnelle aux collaborateurs d'audit (auditeurs juniors et seniors)
pour conduire la mission de certification des comptes.
L'objectif qui sous-tend la théorie d'agence est
d'analyser les formes organisationnelles et proposer des mécanismes pour
réduire les conflits pouvant naitre et qui sont inducteur de coût
car le caractère divergent des intérêts entre les parties
les place dans une situation conflictuelle dans le cadre de leur
coopération. Ces conflits sont générateurs de coût
qui à leur tour amoindrissent les gains issus de la coopération
dans la mesure où l'agent à la latitude d'adopter un
comportement parmi plusieurs possibilité car son action susceptible
d'affecter le bien-être des parties est difficilement observable. Pour
parvenir à cet objectif de résolution des problèmes de
coordination entre les parties sur un marché ou au sein d'une
organisation. Cette théorie s'est développée au tour de
deux approches à savoir :
La théorie positive de l'agence dont l'objectif est
d'expliquer les formes organisationnelles comme mode de résolution de
ces conflits.
Et la théorie normative qui vise à proposer les
mécanismes permettant de réduire les coûts issus des
conflits de coopération entre les acteurs.
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