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La discrimination dans le monde du travail au Togo.


par KOMLA DJIGNEFA YAO
Institut des hautes études des relations internationales et stratégiques - Master en Droit Privé Fondamental 2016
  

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Paragraphe 1 : Les difficultés inhérentes aux acteurs du monde du travail

Les acteurs du monde du travail sont classés en deux catégories. Il s'agit inéluctablement des premiers acteurs concernés et de leurs partenaires. La lutte contre la discrimination est le défi qu'ils doivent tous relever. Malheureusement, si les premiers acteurs du travail continus d'être responsables de la persistance de la discrimination (A), les actions de leurs partenaires pour éradiquer ce mal restent insuffisantes (B).

A- La responsabilité des principaux acteurs du monde du travail

Qui sont les premiers acteurs du monde du travail et en quoi peut-on dire qu'ils sont responsables de la discrimination ? Les employeurs et les employés sont les principaux acteurs du monde du travail et chacun se rend responsable de la survenance ou de la persistance de la discrimination d'une manière ou d'une autre.

Selon le législateur, le chef d'entreprise a l'obligation de prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir les discriminations directe et indirecte et le harcèlement sexuel167. Il s'agit d'une obligation de prévention. Mais à voir clair, il s'agit d'une obligation de moyens que le législateur impose à l'employeur. Nous estimons que cette obligation définie par l'ancien article 1137 du Code Civil Français qui impose à l'employeur de mettre en oeuvre toutes les mesures nécessaires pour empêcher la propension de la discrimination dans son entreprise n'est pas de nature à assurer une lutte efficace contre ce fléau puisque les obligés ne sont nullement liés à une obligation de résultat. D'où la nécessité de réécrire l'article 42 du CTT.

Certains employeurs pratiquent la discrimination en méprisant son existence dans le monde du travail. Ils s'adonnent ainsi à cette pratique malveillante par ignorance ou par indifférence. Parfois même, certains se disculpent de leurs actions en rendant responsables leurs salariés de leurs actes révoltants. Très souvent, l'employeur, auteur de la discrimination pense agir en toute impunité car il pense être au-dessus de la loi.

167 Article 42 CTT

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L'employeur est dépositaire non seulement de la liberté contractuelle c'est-à-dire contracter ou ne pas contracter, du libre choix de ses collaborateurs, de la libre détermination du contenu du contrat mais aussi de la liberté d'organiser, de gérer ou de diriger son entreprise en donnant des ordres ou en édictant des sanctions à l'encontre des salariés, il prétend agir en toute légalité même lorsqu'il se rend coupable des pratiques qualifiées de discriminations.

De la responsabilité de l'Etat, nous supposons que, celui-ci manque de volonté politique. En effet, les postes les plus élevés de la hiérarchie sont pourvus par nomination. Malgré cela, les femmes ont toujours du mal à y accéder même avec l'étoffe, la carrure et les potentialités dont certaines disposent. Le nombre de femmes occupant des postes de décision demeure donc très dérisoire comme en témoignent ces faibles taux : le Conseil Supérieur de la Magistrature 22,22% ; le Gouvernement 18,51% ; les Présidents des Hautes Institutions de la République 11, 11% ; la Cour Constitutionnelle 11,11% ; les Préfets 5,12% ; les Présidents de Délégations Spéciales 0%168. De même, dans le domaine du sport on note une absence remarquable du football féminin. Cela fait déjà plus de 10 ans que la gent féminine demeure inactive, qu'elle est privée du ballon rond. Le ministère en charge de cette discipline reste inerte face à cette situation. Pas de championnat, pas de participation aux éliminations des compétions continentales et internationales. Plus grave, le Togo s'est retiré des éliminatoires de la CAN féminine le vendredi 5 février 2016 ce qui lui a valu une double pénalité de la part de la CAF : une amende de 1500000 Francs CFA et l'exclusion des éliminatoires de la CAN 2018.

On pourrait supposer que cette attitude de l'Etat premier pourvoyeur d'emploi est de nature à renforcer les auteurs de la discrimination dans le monde du travail dans la mesure où, s'il n'arrive pas lui-même à poser les bases d'une égalité telle que définie par les conventions internationales ratifiées et de les respecter afin de les faire respecter, on voit mal dans cette perspective comment les autres employeurs vont pouvoir le suivre dans sa démarche. D'ailleurs, ne dit-on pas souvent que « la charité bien ordonnée commence par soi-même ».

La discrimination peut émaner de soi-même. Dans ce cas, la victime est responsable de la discrimination dont elle se prévaut. Dans cette hypothèse, « l'individu peut intérioriser des sentiments et des situations en intégrant cette discrimination dans leur parcours professionnel. Des candidats peuvent ainsi s'auto-sélectionner pour des filières de formation en fonction de

168 Ce sont des chiffres de 2 févier 2017

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l'adéquation de leur apparence physique et des représentations en vigueur pour un métier précis »169.

L'ignorance des textes législatifs de même que la faible connaissance des critères de la discrimination par certains employés font que même discriminer ils ne s'en rendent pas compte. C'est la raison pour laquelle, ils émettent constamment cette interrogation : que faire lorsqu'on est discriminé ?

La preuve de la discrimination se trouvant difficile à rapporter, certaines victimes préfèrent opter pour le crime du silence. Ils se résignent à intenter une action devant les juridictions non seulement au risque de perdre leur argent mais aussi de perdre leur temps. En outre, ils décident de s'inscrire dans la posture de perdant en s'inculquant l'idée selon laquelle il n'est pas possible d'obtenir la réparation en matière de discrimination surtout par manque de confiance à l'appareil judiciaire. Aussi, certaines victimes préfèrent subir les atrocités de la discrimination afin de préserver leur emploi que de vouloir dénoncer leur employeur au risque de se retrouver au chômage. A notre avis, même s'il est extrêmement difficile de prouver la discrimination en droit togolais et que plusieurs obstacles handicapent sa révélation, nous estimons que certaines victimes s'inscrivent dans une démarche trop passive. Celle-ci aura d'ailleurs pour corollaire de conforter les auteurs de la discrimination dans leurs manoeuvres discriminatoires. Aussi, pourrait-on dire de la victime qu'elle se rend complice ou qu'elle cautionne les agissements de l'auteur de la discrimination.

A l'instar de la victime de la discrimination qui renonce à dénoncer son auteur, aussi par peur de représailles de la part de celui-ci, certains témoins à l'accoutumance optent pour le silence, alors que leur certification ou témoignage peut décanter la situation. Pourtant le CTT en son article 40 al 2 dispose qu'aucun salarié ne peut être sanctionné ni licencié pour avoir témoigné ou pour avoir relaté des pratiques discriminatoires. Ce texte est édité dans le but de protéger les témoins de la discrimination. Mais face au silence absolu que gardent certains d'entre eux, on estime que ce texte n'assure pas une protection absolue aux témoins puisque l'employeur disposant toujours de l'opportunité de sanctionner celui-ci.

Dans le monde du travail, on note une absence considérable de négociations. En effet, le dialogue social fait toujours défaut entre employeurs et employés. Habituellement, les

169 HIDRI (O.), « À la conquête du look de l'emploi : Stratégies d'insertion professionnelle des cadres commerciaux », Questions de Communication, n° 8 juillet 2005.

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négociations se soldent par un échec. Égoïsme et particularisme en sont les valeurs que véhiculent les parties à la négociation. Pourtant le dialogue social constitue une arme dont170 doit se prévaloir employeurs et employés pour parfaire la classification professionnelle afin de prévenir la discrimination.

Outre le fait que la responsabilité des premiers acteurs soit liée à la difficile élimination de la discrimination, l'insuffisance des actions de leurs partenaires n'est pas du reste.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand