4.2.4.6 La substitution
Définie comme « un processus de travail
entrepris par des acteurs pour effectuer certaines tâches en lieu et
place d'autres personnes », la logique de la substitution semble
caractérisée le comportement de certains acteurs dans les
districts sanitaires. Les données disponibles informent de l'existence
de cette stratégie d'acteur(substitution) dans la relation entre les
membres du CoGes, entre le personnel médical et paramédical,
entre les ICP et les membres du CoGes.
En effet, le rapport de l'évaluation de la
gestion des ressources financières des CoGes (Ministère de la
santé, 2002) faisait ressortir des insuffisances profondes au niveau des
rôles et des fonctions des différents membres, pourtant bien
définis dans les statuts. Ainsi, des ICP et des trésoriers se
substituent aux présidents dans l'ordonnancement des dépenses ;
des présidents et des ICP
42
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
tiennent les outils de gestion en lieu et place des
trésoriers. Des aides opérateurs font des interventions
chirurgicales devant l'absence des médecins. La mobilisation de cette
stratégie par les infirmiers, « outre le fait que cela peut leur
permettre, pour les moins honnêtes, d'accaparer quelques ressources, ils
veillent à maintenir leur pouvoir sur les communautés et à
montrer à leur hiérarchie administrative que leur centre de
santé fonctionne bien » (Ridde, 2005). Quant aux membres des CoGes,
cette démarche procède des intentions de malversation dans la
plupart des situations. Pratiquée avec de bonnes intentions, la
substitution favorise un meilleur fonctionnement des districts, elle est dans
ce cas louable.
4.2.4.7 Le mépris du service public
La dernière des logiques d'intervention, qui
pensons-nous s'applique au contexte de la décentralisation du
système de santé est le mépris du service public. Dans
leur course vers l'enrichissement, certains acteurs s'arc boutent sur l'Etat et
partant les biens publics. Que ce soit les entrepreneurs, les fournisseurs, les
cadres au niveau central et périphérique, les communautés,
tous font preuve d'une perception erronée de la chose publique. Il
suffit d'observer les rapports avec les matériels de l'Etat pour
comprendre la profondeur du mépris du service public. Cette situation
conduit à un gaspillage de ressources car le matériel atteint
rarement la longévité escomptée faute d'entretien.
Appliquer au processus de décentralisation, cette réalité
se traduit par les pannes fréquentes des ambulances, l'utilisation
à des fins personnelles du matériel médical, le
détournement du carburant, l'insalubrité de certains locaux, les
surfacturations, les absences injustifiées, les infrastructures
inachevées, les sessions de formation bâclées, etc. La
décentralisation sanitaire s'installe dans un contexte
général empreint de laxisme, de favoritisme, de laisser aller,
bref de corruption. Le sérieux, l'engagement sincère des acteurs,
gage d'un meilleur aboutissement du processus, laissent petit à petit la
place à la maximisation des avantages matériels et personnels.
Que ce soient les passations de marché, les activités de
supervision, de formation, de soins, rien n' est fait avec une application
certaine. La préoccupation première réside dans les prises
en charge et autres avantages matériels. La question fondamentale que
nous posons est la suivante : le personnel médical et paramédical
oeuvre- il dans le sens d'un aboutissement heureux du processus ? La mise en
oeuvre de la décentralisation ne saurait s'affranchir du prisme de la
faiblesse de conscience professionnelle et de l'effondrement progressif et
accéléré du civisme.
43
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
5. DISCUSSION ET RECOMANDATIONS 5.1
Discussion
|