Gestion et exploitation des terres agricoles dans ville de Kinshasa: vers une agriculture favorable à la sécurité alimentairepar Yannick Bayina Loyola Université de Kinshasa - Licence en droit 2019 |
SECTION III. LES DROITS ET OBLIGATIONS DU CONCESSIONNAIREDans cette section, il est question d'analyser les droits du concessionnaire (§1) et ensuite les obligations du concessionnaire (§2). §1. Les droits Quant à ses droits, il est logique que les plantations, les constructions et les récoltes lui reviennent de droit, il a, en outre, le droit de jouir et d'occuper les terrains nécessaires à son activité et aux industries qui s'y rattachent, y compris la construction d'installations industrielles, d'habitations et de loisirs, et d'utiliser les ressources d'eau et de forêt produits par lui pour les besoins de l'exploitation, en se conformant aux normes définies dans l'étude d'impact environnemental et social ainsi que le programme de gestion de l'environnement du projet préalablement établi par lui ; de creuser des canaux et des canalisations et à l'intérieur d'établir des moyens de communications et de transport de toute nature dans le respect de la loi et de l'ordre public91. Le concessionnaire a le droit de céder et transmettre sa concession aux conditions prévues par la loi92. Le concessionnaire agricole a le droit de louer sa concession à un tiers qui est tenu de respecter la destination de celui-ci. Il en avise l'administration locale ayant l'agriculture dans ses attributions. Cependant, il reste tenu solidairement responsable avec le preneur vis-à- 89 C. KAKESA KUNYIMA, La gestion foncière, UNIKIN, Faculté des sciences/département de géoscience, IIème année de licence, 2019-2020, pp. 46-47. Inédit 90 Idem. 91 Art 32 de la loi n°11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux relatifs à l'agriculture, J.O.R.D.C., n° Spécial du 27 décembre 2011. 92 Art 38 de la loi n°11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux relatifs à l'agriculture, J.O.R.D.C., n° Spécial du 27 décembre 2011 . [35] vis de l'Etat pour les obligations souscrites dans le contrat agricole. Dans ce cas, la concession peut faire l'objet soit de bail à ferme, soit de bail à métayage, et ce, conformément à la loi et aux règles relatives aux baux ruraux93. §2. Les obligations Le concessionnaire agricole a, dans tous le cas, l'obligation de respecter la destination et maintenir la mise en valeur ; il est tenu de respecter les obligations particulières souscrites dans le contrat signé pendant la période provisoire ; il est également tenu de réaliser la production minimum convenue ; il est tenu aussi d'entretenir les tronçons reliant sa concession à la voie publique94; de construire les infrastructures nécessaires pour le stockage de sa production agricole95. Il sied de signaler qu'il est difficile aux tiers exploitants de respecter ses engagements en se basant loi. En outre, lorsqu'il y a maladies des cultures, tout exploitant agricole qui constate l'existence des organismes nuisibles dans sa concession est tenu d'aviser aussitôt l'autorité administrative compétente la plus proche96. En ce qui concerne les maladies des cultures l'Etat ne vient pas en aide lorsqu'il y'a une épidémie La loi soumet l'exploitant à d'autres obligations notamment, les règles sur l'environnement. Outre ces obligations et droits, le concessionnaire agricole doit respecter les minima des conditions de mise en valeur prévues à l'article 157 de la loi foncière. En cas d'inexécution ou de négligence grave dans l'exécution de charge de mettre et entretenir le fonds en valeur telles que stipulées dans le contrat, l'Etat peut prononcer la déchéance97. Le chapitre qui suit tente de faire une analyse sur la notion de sécurité alimentaire et son implication dans l'exploitation agricole avant de voir les terres agricoles kinoises et leur contribution à la sécurité alimentaire afin de donner les perspectives en matière de gestion des terres agricoles à Kinshasa. 93 Art 24 de la loi n°11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux relatifs à l'agriculture, J.O.R.D.C., n° Spécial du 27 décembre 2011. 94 Idem, Art 35. 95Ibidem, Art 37 alinéa 1er . 96 Ibidem, Art 44. 97 Article 19 point 2° de la loi n°73-021 du 20 juillet 1973 portant régime général des biens, régime foncier et immobilier et régime des sûretés, J.O.Z., n°3 du 1er février 1974, p.69. [36] CHAPITRE II. LES TERRES AGRICOLES KINOISES FACE A LA
SECURITE Dans le cadre de ce chapitre, il sera question de voir d'une part la notion de sécurité alimentaire et ses implications sur l'exploitation agricole (section I) et d'autre part les terres agricoles Kinoises et leur contribution à la sécurité alimentaire (section II). SECTION I. NOTION DE SECURITE ALIMENTAIRE ET SES IMPLICATIONS SUR L'EXPLOITATION AGRICOLE La notion de la sécurité alimentaire n'est pas unique et universelle. Elle évolue et change de nature selon les concepts différents et les périodes, conjoncture ou la fonction qu'elle assure. En effet, avant son apparition en 1970, elle était considérée comme un simple système d'approvisionnement en nourriture, par l'individu, ménage et population dans un Etat pour lutter contre la famine. Ce système a évolué puis succédé par un autre procédé « aide alimentaire »98. Les politiques d'aide alimentaire en vigueur à cette époque ont été conçues dans le contexte de l'après seconde guerre mondiale. Pour les Etats Unis, cette politique va très vite jouer un rôle de régulation des marchés et de promotion des exportations des produits agricoles américains. C'est dans ce contexte qu'en 1954, le congrès américain a voté la loi dénommée « vivres pour la paix ». Outre ses visées humanitaires, « luttes contre la faim dans le monde », cette loi mise à accélérer la consommation des produits agricoles des Etats Unis. Pour faire face à la concurrence, vers 1964 et 1967 fut signé l'accord de GATT entre l'Europe et les Etats Unis99, lequel conduiront à inclure une convention alimentaire comprise dans le plan internationaux sur les céréales puis sur le manioc100. La raison pour laquelle l'aide alimentaire, en répondant à beaucoup d'autres objectifs que la gestion de crises alimentaires d'urgence, a véritablement transféré des instabilités de marché vers les pays d'approvisionnement ou de livraison de l'aide au développement. Enfin, la charte d'aide fut négociée et signée par les Etats africains. La charte d'aide alimentaire la positionne comme un instrument de sécurité alimentaire et des politiques de développement. Elle consacre la nécessité d'adapter, sur les plans qualitatifs et quantitatifs et dans la mesure du possible, l'aide alimentaire aux besoins de 98 Le club du Sahel et de l'Afrique de l'ouest (CSAO), Op. Cit, p.20. 99 Les Etats Unis arrivent à la négociation en défendant la thèse selon laquelle l'Europe devrait renoncer à produire des céréales et les oléagineux et se spécialiser sur la production animale. 100 Du GATT à l'Organisation mondiale du commerce, 15 fiches pour comprendre, anticiper, débattre, Solagral, 1995, p.14 [37] populations cibles, dans des conditions telles que les productions locales n'aient à souffrir ni de dépréciation en valeur ni de difficulté d'écoulement. Un autre concept est apparu, « droit à l'alimentation » pour justifier l'évolution de la notion de sécurité alimentaire. Il désigne le droit à une nourriture suffisante de chaque homme, chaque femme et chaque enfant seul ou en communauté avec d'autres, à accéder physiquement et économiquement accès à tout moment à une nourriture suffisante et aux moyens de se procurer101. Jean ZIEGLER ajoute que le droit à l'alimentation est le droit d'avoir accès régulier, permanent et libre, soit directement au moyen d'achats monétaires à une nourriture quantitativement et qualitativement adéquate et suffisante correspondant aux traditions culturelles du peuple dont est issu le consommateur et qui assure une vie psychique et physique individuelle et collective, libre d'angoisse, satisfaisante et digne102. Ainsi consacré par la Déclaration universelle des droits de l'homme103, et ensuite précisé dans le Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels104, ce droit constitue un droit fondamental qui aspire à la notion du concept de sécurité alimentaire. Il est plus coercitif, sévère que politique ou stratégique. Vers les années 80, 10 ans après la naissance de la notion de sécurité alimentaire, va sonner le glas des ambitions « d'autosuffisance alimentaire » déclinées à l'échelle nationale. C'est la période des ajustements macro-économiques et financiers qui ne vont pas épargner le domaine de l'agriculture et de l'alimentation. A nouveau, la question alimentaire va se traiter dans un cadre plus englobant et n'échappera pas aux prescriptions des consensus de Washington qui fonde les programmes d'ajustement structurel en général et des PASA pour le secteur agricole en particulier. L'autosuffisance alimentaire vise la disponibilité des vivres, l'accessibilité des ménages et des individus à l'alimentation, le fonctionnement et la stabilité des marchés et l'utilisation des aliments (dimension nutritionnelle et sanitaire). Elle va dès lors laisser la place à la sécurité alimentaire. De la politique, le concept devient technique et s'inscrit dans le contexte de libéralisation externe (démantèlement des productions aux frontières) et interne (retrait de l'Etat de la production et de la gestion des marchés) des économies. La question de savoir qui 101 Comité des droits économiques, sociaux et culturels, Observations générales n°12. 102 Jean. ZIEGLER, Rapport spécial sur le droit à l'alimentation de la Commission des droits de l'homme, E/CN.4/2001 103 Art. 25 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948. 104 Art. 11 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels adoptés en 1966 et entré en vigueur en1976. [38] produit la nourriture nécessaire à l'alimentation de la population devient secondaire. La sécurité alimentaire s'appuie sur une définition commune des institutions internationales notamment le FAO, l'OMS et la Banque mondiale : « c'est l'accès par tous à tout moment à une alimentation suffisante pour mener une vie saine et active »105. Enfin, un autre concept « souveraineté alimentaire » a été promue dès le sommet mondial de l'alimentation en 1996 par le mouvement paysan via CAMPESINA et les ONG. Il exprime « le droit pour les peuples et leurs gouvernements de définir les politiques agricoles et alimentaires de leur choix »106. Alors que le débat sur les variantes de définitions de la sécurité alimentaire n'est pas épuisé et les enjeux socioculturels, les préférences alimentaires ne sont pas intégrées. De ce qui précède, un adage populaire dit « ventre creux n'a point d'oreilles ». Cela parait logique dans la mesure où l'homme affamé perd ses forces et par conséquent il ne saura pas travailler. Comme pour dire, il faut que les ménages soient bien entretenus pour répondre aux besoins (alimentaires) de l'homme. Car ce dernier « doit manger suffisamment ni trop peu ni trop, des aliments d'une qualité organoleptique, sanitaire et nutritionnelle satisfaisante du point de vue individuel et social »107 . La voie la mieux indiquée pour cette fin reste valablement l'agriculture. Ainsi, au cours d'un de ses sommets, la FAO déclare : « si les ménages manquent des produits alimentaires, mais possèdent des terres, les efforts visant à accroitre la production, fourniture de facteur de production et des techniques réduisant l'effort humain, stabilité de propriété foncières devraient se traduire par un accroissement de la consommation108. Ainsi, MBOSO N'KODIA PWANGA parlant du Zaïre dira : « l'agriculture doit devenir le secteur moteur de développement et de la croissance économique. Après voir couvert les besoins alimentaires de nos populations, le secteur agricole doit assurer l'essor de l'agro-industrie locale et ensuite développer l'exportation des produits transformés et améliorés »109. Ainsi, Il sera question dans le cadre de cette section de voir la définition de la sécurité alimentaire (§1), et ensuite la réalité de la sécurité alimentaire à Kinshasa (§2). 105 http://www.peoplesfoodsoverignty.org , consulté le 05 février 2021, à 15H40. 106 Extrait de la déclaration adoptée lors du sommet mondial de l'alimentation tenu à Rome du 13 au 17 novembre 1996 107 J-L. RASTOIN, et G.GHESI, Le système alimentaire mondial, Paris, Quae, 2010, p.407 108 FAO, Intégration de la nourriture dans les projets de développement agricole et rural, p.5GHESI, Le système alimentaire mondial, Paris, Quae, 2010, p.407. 109 MBOSO N'KODIA PWANGA, Programme économique du MPR, dans quelle économie pour le Zaïre, Kinshasa, 1985, p.249 p.5 [39] §1. Définitions de la sécurité alimentaire Le concept de sécurité alimentaire est loin d'être unique et universel. Depuis son apparition, il a en effet, évolué à tel point que plus de trente définitions ont pu être repérées. Ce qui montre la diversité des approches. Les auteurs l'ont défini, semble-t-il, en se fondant sur des considérations très économiques ou quantitatives vers des considérations plus humanistes ou qualitatives. Il est question pour ce faire de confronter les idées des auteurs afin de nous permettre à donner la définition qui nous convient. Dans son observation générale n°0014, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a défini la sécurité alimentaire comme étant le droit pour chaque homme, chaque femme, chaque enfant seul ou en communauté avec d'autres d'accéder physiquement économiquement à tout moment, à une nourriture suffisante et aux moyens de se la procurer110. Ici, la sécurité alimentaire se confond au droit à l'alimentation. Il insiste en effet, sur la disponibilité de la nourriture sans tenir compte de la qualité. Mais, son accès par l'individu et les familles, dépend des moyens pour l'acquérir. La présence de la nourriture sur le marché n'est pas une solution. De là, la sécurité alimentaire est perçue comme la capacité des pays déficitaires ou des régions déficitaires à atteindre des niveaux de consommation111. Cette définition s'appuie sur la capacité d'accès et les problèmes de production nationale ou régionale des denrées alimentaires comme cause des manifestations ou de la faim112. Elle établit à cet effet un lien univoque entre la production et la satisfaction des besoins en nourriture. Dans la même perspective, en 1990, l'USDA a défini la sécurité alimentaire comme, un accès par tous les individus à tout moment à une nourriture suffisante pour mener une vie saine et active113, mais sans tenir comptes des moyens pour en disposer. Ainsi, la Définition du sommet mondial de l'alimentation (FAO 1996), « La sécurité alimentaire, c'est l'accès pour tous et à tout moment à une alimentation suffisante pour une vie saine et active, en respectant les habitudes alimentaires»114. 110 La sécurité alimentaire, un sujet actuel en RDC, http://www.caridisdev.cd , consulté le 07 Février 2021 111 Algérie, Finlande, Israël, Norvège, Synthèse de l'obligation alimentaire : étude du droit comparé, Tome 4, Paris, CNRS, 1988, p.10. 112 N. STAUBLE et B. SOTTAS, Op. cit, p.67. 113 Le Club du Sahel et de l'Afrique de l'Ouest (CSAO), Op. Cit, p.13. 114 Agronome et vétérinaire sans Frontières, Agricultures Paysannes et Souveraineté Alimentaire, AVSF, 2010, [40] Lors du sommet mondial sur la sécurité alimentaire en 1996, les experts réitérèrent sur leur déclaration que la sécurité alimentaire est un droit fondamental de chaque être humain d'avoir accès à une nourriture saine et nutritive, conformément à une nourriture adéquate et au droit fondamental de chaque être d'être à l'abri de la faim115. Cela supposerait qu'au plan qualitatif, la sécurité exige non seulement que les aliments doivent être sains, c'est-à-dire exempts de toute maladie, sans risques pour la santé du consommateur, mais également riches en valeur nutritive ou contenir abondamment des éléments ayant la propriété de nourrir. A l'heure actuelle, estime l'OMS, plus de la moitié des jeunes enfants vivants en Asie du Sud souffrent de la carence en protéines et en calories. Les estimations pour l'Afrique subsaharienne ne situent la prévalence qu'environ trente pourcent116. Cette situation risque de compromettre à la sécurité alimentaire. C'est ainsi que le FAO explique que la sécurité alimentaire au niveau individuel, familial, national, régional et mondial existe lorsque tous les êtres humains ont à tout moment, un accès physique et économique à une nourriture suffisante, saine et nutritive, leur permettant de satisfaire leurs besoins énergétiques et leurs préférences alimentaires pour mener une vie saine et active117. Nous pouvons retenir avec Jean ZIEGLER que la sécurité alimentaire est la possibilité ou le droit d'avoir un accès régulier, permanent et libre, soit directement, soit au moyen d'achats, à une nourriture quantitativement et qualitativement adéquate et suffisante, correspondant aux traditions culturelles du peuple dont est issu le consommateur et qui assure une vie psychique et physique individuelle et collective libre d'angoisse, satisfaisante et digne118. En 2001, la RDC a, pour sa part, relevé que la « sécurité alimentaire est assurée quand toutes les personnes, en tout temps, ont économiquement accès à une alimentation 115 Extrait de la déclaration adoptée lors du sommet mondial de l'alimentation tenu à Rome du 13 au 17 novembre 1996 116 Marchés tropicaux et méditerranés, n°29966, 13 septembre 2002 117 Consultation d'expert FAO sur la santé des aliments : science et éthique, FAO, Rome, 2002, p.28 118 J. ZIEGLER, Rapport spécial sur le droit à l'alimentation de la commission des droits de l'homme, 2001, p.14. [41] suffisante, sûre et nutritive qui satisfait leurs besoins nutritionnels et leurs préférences alimentaires pour leur permettre de mener une vie active et saine »119. Si pour les pays moins avancés de la planète, la sécurité alimentaire se confond à l'autosuffisance alimentaire, en revanche dans les pays développés, elle désigne la sécurité sanitaire des produits destinés à l'alimentation humaine120. Le législateur congolais définit la sécurité alimentaire comme la disponibilité et l'accessibilité permanentes aux aliments121. Allant dans le même sens, la Banque mondiale a défini la sécurité alimentaire comme l'accès de tous les individus à tout moment à suffisamment de la nourriture pour mener une vie saine et active122. Il ressort des définitions qui précèdent que la finalité de la sécurité alimentaire est d'assurer en tout et à tous les citoyens l'accès matériel et économique aux aliments de base dont ils ont besoin à tout moment. La sécurité alimentaire se résume en deux éléments ci-après : la disponibilité des biens de consommation, c'est-à-dire la disponibilité en quantité suffisante et capacité des citoyens à acquérir ces biens, donc l'accès facile et permanent par les individus et les familles ou encore, les ménages à cette nourriture. Par sa finalité, la sécurité alimentaire a pour objectif d'améliorer les conditions alimentaires de la population. Ainsi, il sera mieux de voir les composantes de la sécurité alimentaire. L'analyse des différentes définitions telles que présentées ci-dessus nous convient de ressortir dans le concept sécurité alimentaire, deux composantes qui divisent les points de vue. Elles sont à la fois quantitatives et qualitatives. 1. Composante quantitative La sécurité alimentaire réfère à la disponibilité des aliments en quantité suffisante et permanente pour permettre à chacun de manger à sa faim. Mais cela ne suffit pas, il faut 119 La sécurité alimentaire, un sujet actuel en RDC, http://www.caridisdev.cd , consulté le 07 février 2021. 120 R. POURTIER, L'Afrique centrale et les régions transfrontalières. Perspectives de reconstruction et d'intégration, Paris, OCDE, 2003, p.89. 121 Art 3 point 3, 6 et 22 de la loi n°11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux relatifs à l'agriculture, J.O.R.D.C., n° spécial du 27 décembre 2011 122Banque mondiale, la pauvreté et la faim, cité par G. Azoulay et J-C Dillon, p.126. [42] ajouter en cette composante, l'idée de l'accessibilité individuelle objective123. La demande doit être solvable et acheter/produire des vivres devient un droit.
L'accès est la capacité des ménages à se procurer des vivres disponibles pour une période de consommation donnée. Ceci à travers leurs propres réserves, leurs productions domestiques, les transactions de marché, l'aide alimentaire et d'autres formes de transfert125. C'est un droit de tous à des ressources adéquates permettant d'acquérir de nourriture suffisante et nutritive. C'est-à-dire, l'ensemble des biens auxquels une personne est susceptible d'accéder en raison du contexte juridique, politique et social de la communauté dans laquelle elle vit y compris certains droits traditionnels tels que l'accès aux ressources communes126. Les types d'accès sont : physiques, social et économique. En effet, il ne suffit pas seulement de procurer des vivres disponibles à tous mais la capacité de générer aussi le revenu suffisant pour se nourrir et réaliser les autres droits de base tels que la santé, l'éducation127. Bref, l'accès à la nourriture implique le pouvoir d'achat, le niveau de prix, la stabilité des marchés et les infrastructures. C'est l'Etat qui est l'ultime responsable pour assurer que la sécurité alimentaire soit réalisée et protégée pour ses citoyens en ce qui concerne la disponibilité et l'accessibilité des vivres, les politiques et pratiques agricoles et sociales128. 123 G. TSHIONZA MATA et P. VANDERHUSLT, Op. cit, p.18. 124 Idem. 125 La sécurité alimentaire, un sujet actuel en RDC, http://www.caridisdev.cd , consulté le 19 mars 2021 à 16h30. 126 GAMBEMBO GAWIYA, Situation des lois coutumières et des droits des femmes en RDC, Kinshasa, Ministère des affaires sociales et familles, 1999, p.23. 127 La sécurité alimentaire en RD Congo, Op. Cit, p.5. 128 La sécurité alimentaire en RD Congo, Op. Cit, p.5. [43] 2. Composante qualitative Au-delà de l'aspect quantitatif qui tient à la peur très ancienne de manquement de la nourriture du fait de l'augmentation de la population, la sécurité alimentaire intègre aujourd'hui l'hygiène et la santé publique par des conditions de la stabilité et salubrité.
La salubrité au plan qualitatif de la sécurité alimentaire exige la propreté des aliments, c'est-à-dire, l'accès à une nourriture saine et nutritive conformément à l'hygiène des produits vivriers adéquats pour chaque individu d'être à l'abri de la faim mais exempté de toute maladie, de microbe et sans risque pour la santé du consommateur. Elle suppose l'abondance des éléments ayant la propriété nutritive au moment de la consommation. Car la présence des éléments nutritifs dans les aliments ne suffit pas. Il y a des produits insalubres à cause de la durée, ces produits sont périmés et deviennent insalubres ou impropres à la consommation130. En RDC, la sécurité sanitaire des aliments n'est pas bien assurée, et peu développée au niveau de frontières par l'OCC et la DGDA mais corrompue. A l'intérieur, c'est le prix qui détermine les produits salubres et insalubres. Dans les pays développés, c'est la salubrité qui compte. La sécurité alimentaire désigne pour eux la sécurité sanitaire qui comprend : la qualité sanitaire et l'équilibre nutritionnelle. 129 La sécurité alimentaire en RD Congo, Op. Cit, p.5 130 Idem. [44] §2. Réalité de la sécurité alimentaire à Kinshasa Le droit à la sécurité alimentaire fait partie des droits fondamentaux de l'homme et l'une des missions de l'Etat est d'assurer à sa population la sécurité alimentaire. Il s'agit d'une finalité dont la mise en oeuvre dépend aussi de la manière dont les terres agricoles sont gérées. Les systèmes agricoles sont dans l'ensemble de type familial et très lacunaire. A Kinshasa, le système agricole est partagé entre les cultures maraîchères et les cultures vivrières. Dans ce cas, l'accès au financement et aux intrants d'excellente qualité est la contrainte majeure, ce qui limite le niveau des productions131. Ainsi, l'Etat congolais à travers le ministère de l'agriculture est censé de venir en aide aux exploitants agricole dans sa politique comme l'indique l'article 6 de la loi portant principe fondamentaux relatif à l'agriculture qui dispose que : « le Gouvernement définit et met en oeuvre la politique agricole nationale en vue de la promotion et de la croissance de la production agricole ainsi que du développement rural et de la sécurité alimentaire. Cette politique constitue la base de programme pour les provinces. Elles comprend les grandes orientations concernant notamment le régime agraire, l'exploitation, la formation et la recherche agricoles, la promotion, la production et la commercialisation des intrants et des produits agricoles, le développement de l'agro-industrie et des infrastructures de base, la conservation et l'utilisation durable des ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture ainsi que le financement de celle-ci »132. Il sied de signalée que l'Etat à travers le gouvernement centrale est en difficulté de mettre en oeuvre les dispositions ci-haut évoquée. L'article 7 al 1er de la même loi dispose que : « le Gouvernement provincial élabore, conformément à la politique nationale visée à l'article 6, le programme agricole de sa province et en fixe les objectifs quantitatif et qualitatifs »133. Malheureusement, il est difficile que cela soit respecté car, tout commence par la base c'est-à-dire les entités territoriale décentralisée à travers les exploitants agricole et l'inspecteur chef des services qui sont là pour aider l'Etat à avoir une politique concrète mais cela ne se fait pas. 131 J. NKULU MWINE FYAMA et Augustin. NGULUNGU NTALABULU, Sécurité alimentaire et systèmes d'alerte précoce en RDC, Kinshasa, Konrad Adenauer Stiftung, 2018, p.29. 132 Article 6 de la loi n°11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux relatifs à l'agriculture, J.O.R.D.C., n° spécial du 27 décembre 2011 133 Idem, Article 7 al 1er. [45] A cet effet, le professeur KALAMBAY LUMPUNGU note que : « L'exploitation doit produire en fonction de la demande, en quantité et en qualité. Elle doit produire au moindre coût, d'où, la nécessité d'une très bonne organisation technique »134. La conséquence à tirer de ce propos, est qu'il existe un lien entre la production agricole et la demande. En effet, la population produit en priorité ce qu'elle doit consommer. A Kinshasa la production est insuffisante à la demande de la population qui augmente chaque jour face à la superficie qui reste statique. L'accès à la nourriture est difficile et conduit à ce que l'on qualifie de l'insécurité alimentaire. Cette situation ne peut bien s'illustrer que dans l'état actuel de la consommation de la population tel que constaté sur terrain. Dans bon nombre des familles de Kinshasa, le repas traditionnel préféré devenu onéreux, a été substitué par une nourriture moins coûteuse, sans forcément tenir compte de la qualité135. La même étude renseigne que 65% des ménages kinois vivent de deux repas par jour. Le repas le plus consistant est pris le soir136. Faute d'accéder aux principaux produits alimentaires de base préférés, le matin et le soir, les familles se contentent d'un repas léger constitué soit du reliquat de la veille soit du pain et du thé137. Dans certains quartiers périphériques de Kinshasa, l'on note que 25% de ménages n'accèdent plus qu'à un seul repas par jour138. Le régime alimentaire des Kinois est donc déficitaire tant du point de vue qualitatif que quantitatif. Face à ce défis, Kinshasa recourt à la production en provenance de l'intérieur du pays ou de l'importation ; ce qui est à l'origine de la hausse des prix sur le marché. Parmi les principaux produits alimentaires importés par la République Démocratique du Congo on compte le maïs, le riz, les produits halieutiques salés et fumés, la viande et les abats ainsi que le blé139. Certains de ces produits alimentaires d'importation ne sont pas suffisamment contrôlés, ils sont susceptibles de contenir des organismes génétiquement modifiés. C'est le cas notamment du maïs, du riz, de la viande et abats, du blé et de la farine de blé, de l'huile de table, des fruits etc. Et, ces organismes peuvent provoquer des maladies. 134 G. KALAMBAY LUMPUNGU, Droit agricole et forestier, cours polycopié, Université de Kinshasa, Faculté des sciences agronomiques, 2010-2011, p.16. 135 MBUANGI MBUKU LELO, (Dir)., Monographie de la ville de Kinshasa, Comité Provincial de la Stratégie pour la Réduction de la Pauvreté Ville-Province de Kinshasa (CPVPK), Kinshasa, 2005, p.61. 136 Idem, p.63. 137Ibidem. 138Ibidem. 139 Ministère de l'Agriculture, Programme National de Sécurité Alimentaire (P.N.S.A), document principal, version amendée après l'atelier national du 16 Décembre 2010, p.25. 140 Art 42 de la loi n°11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux relatifs à l'agriculture, J.O.RDC, n° Spécial du 27 décembre 2011. [46] Pour un peuple qui fait face au défi de l'insécurité alimentaire, il n'y a pas mieux que la production des denrées alimentaires. La Constitution garantit le droit à la santé et à la sécurité alimentaire ; dans ce sens, l'article 42 de la loi sur l'agriculture dispose que la sécurité alimentaire et la production agricole priment sur l'exploitation des bioénergies140. Il s'agit là, d'une priorité que le gouvernement national que local doit se fixer. A Kinshasa, cette volonté exprimée par législateur à travers les textes se traduit à ce jour, par la mise en place du domaine agricole à KINGAKATI, la remise en activité de la ferme DAIPEN et plus récemment, la relance du domaine présidentielle de la N'sele sans perdre de vie il y a de cela cinq ans la remise des tracteurs au gouvernorat de la ville. Il en est de même du Parc agro-industriel de BUKANGA LONZO qui malheureusement n'a pas produit comme on s'entendait. Toutefois, cela ne peut produire un résultat escompté que dans la mesure où cette activité s'inscrit dans un programme agricole clairement défini et mise en oeuvre de façon efficiente. SECTION II. LES TERRES AGRICOLES KINOISES ET LEUR CONTRIBUTION A LA SECURITE ALIMENTAIRE Dans cette étude, il sera question de démontrer comment les concessions agricoles kinoises n'apportent rien en matière de sécurité alimentaire. La gestion des terres et l'ingérence des chefs coutumiers ne garantissent pas aux exploitants agricoles l'accès facile et sécurisé aux terres. Les répercussions sont ressenties dans les ménages. Les ménages vivent dans une situation d'insécurité alimentaire. En dehors des étendues des terres qui sont gelées sans mise en valeur, les terres rurales de Kinshasa sont utilisées de manière anarchique. Elles sont envahies de plus en plus par les phénomènes majeurs ci-après : l'extension urbaine incontrôlée et l'extension des cimetières ; le changement de destination et l'accumulation des concessions par certains particuliers sans aucun signe de mise en valeur. Nous pensons qu'une ville ne peut continuer à s'étendre jusqu'à l'infini et les cimetières ne peuvent pas occuper toutes les terres susceptibles d'exploitation agricole. L'Etat, propriétaire du sol, doit utiliser ses terres à bon escient pour assurer à sa population le bien-être et la sécurité alimentaire. [47] Il sera question dans le cadre de cette section de faire une analyse sur l'exploitation des terres agricoles kinoises (§1), et les défis auxquels les terres agricoles font face (§2). §1. L'exploitation des terres agricoles kinoises L'affectation d'une partie du sol à une activité quelconque n'a de réussite que lorsqu'elle se réalise dans le cadre d'une bonne connaissance des capacités et qualités propres à ce sol. En effet, la connaissance du sol agricole relève du domaine de l'agrologie, de la pédologie, de la biologie, de l'agronomie, de la géographie et de la géologie : ? L'agrologie, est une science qui s'intéresse à la couche cultivable, définit le sol agricole comme la partie de la couche superficielle de l'écorce terrestre qui, grâce à sa structure meuble et sa composition physico-chimique, est en mesure d'assurer un développement normal des végétaux cultivés141. ? Dans le même ordre d'idées, la pédologie définit le sol comme la formation naturelle de surface à structure meuble et d'épaisseur variable, résultant de la transformation de la roche- mère sous-jacente sans l'influence de divers processus, physiques, chimiques et biologiques. Ces différentes définitions permettent de comprendre la valeur du sol dans l'aspect de ses potentialités agricoles. La loi foncière par l'article 65 dispose : « Les terrains sont concédés sous réserve des droits des tiers et sans garantie quant à leur qualité propre ou leur valeur industrielle, agricole, commerciale ou résidentielle »142. Autrement dit, les personnes désireuses de pratiquer l'activité agricole ne sont pas assurées en avance quant à la qualité et la capacité de production du terrain qu'ils reçoivent de l'Etat. Par ailleurs, la loi portant principes fondamentaux relatifs à l'agriculture de 2011 dispose : « Les ministres ayant les affaires foncières et l'agriculture dans leurs attributions font procéder, par région naturelle et par nature des cultures ou par type d'exploitation, aux études nécessaires à l'appréciation de la superficie à exploiter »143. Cette disposition était devenu lacunaire ou inadéquates c'est ainsi que la proposition de loi modifiant et complétant 141 G. KALAMBAY LUMPUNGU, Droit civil : Sol et développement durable, Cours polycopié, 3ième cycle, Université de Kinshasa, Faculté de Droit, 2011-2012, p.22. 142Art 65 de la loi n°73-021 du 20 juillet 1973 portant régime général des biens, régime foncier et immobilier et régime des sûretés, J.O.Z., n°3 du 1er février 1974, p. 69 dispose : « Les terrains sont concédés sous réserve des droits des tiers et sans garantie quant à leur qualité propre ou à leur valeur industrielle, agricole, commerciale ou résidentielle ». 143 Art 11 de la loi n°11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux relatifs à l'agriculture, J.O.R.D.C, n° Spécial du 27 décembre 2011. 144 Art 11 de la proposition de la loi modifiant et complétant la loi n°11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux relatif à l'agriculture. (Inédit) [48] la loi n°11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux relatifs à l'agriculture dispose ce qui suit : « Les ministres ayant les affaires foncières et l'agriculture dans leurs attributions font procéder, par région naturelle et par nature des cultures ou par type d'exploitation, aux études nécessaires à l'appréciation de la superficie à exploiter. Ces études sont menées par une commission interministérielle d'harmonisation des concessions, composée des experts des ministères concernés à l'alinéa précédent ainsi que des délégués provinciaux. Un décret du premier ministre , délibéré en conseil des ministres, sur proposition du ministre ayant l'agriculture dans ses attributions , détermine les modalités de fonctionnement de cette commission »144. Ces dispositions, contrairement à celles de la loi foncière, nous laissent envisager que les terres agricoles avant d'être données aux particuliers, devront faire l'objet d'une étude systématique au sein de la commission interministérielle ainsi que des délégués provinciaux pour déterminer leurs capacités de production. Dans tous les cas, il en va donc de l'intérêt de l'Etat et de celui qui veut faire l'exploitation agricole de s'assurer de l'état du sol quant à sa productivité. La mise en valeur des grandes étendues des terres agricoles exige un mode approprié d'exploitation. L'exploitation artisanale telle que pratiquée à ce jour, ne peut pas favoriser l'augmentation de la production. Sur le plan agricole, Kinshasa connaît trois types d'agriculture :
[49] L'usage des instruments rudimentaires tels que : machette et houe demande beaucoup de temps et d'efforts physiques pour la réalisation de la mise en valeur agricole conséquente. Pour améliorer la production, l'exploitation agricole doit se faire en fonction des nouvelles techniques culturales à savoir : l'usage des intrants, des semences améliorées ainsi que la mécanisation. En effet, l'usage des intrants et semences peut permettre à produire en quantité considérable ; l'emploi des machines pourra permettre de cultiver des grandes étendues, économiser le temps et améliorer les récoltes145. Ceci aura l'avantage de permettre à la population d'avoir accès facile aux produits alimentaires de base et l'Etat pourra économiser les devises qu'il débourse pour l'importation des produits alimentaires. La question de mécanisation agricole est essentielle et liée au financement des activités agricoles et, à l'environnement. Elle pose le problème du respect de la législation en matière de la protection de l'environnement et des subventions de l'activité agricole. On doit le savoir, la mécanisation poussée peut entraîner les conséquences néfastes sur le plan environnemental suite au labour profond qui peut détruire la structure du sol et, rendre ainsi le terrain susceptible de déboisement, à l'érosion et à la pollution. D'où, l'article 66 de la loi sur l'agriculture soumet toute activité agricole à une étude d'impact environnemental et social avant la mise en valeur de la concession. Cette étude a pour but de permettre à l'Administration de n'autoriser que l'exploitation agricole présentant le moins possible de risques sur l'environnement. Dans le même ordre d'idées, l'agriculture moderne nécessite des capitaux assez importants tant pour les individus que pour l'équipement collectif rural146. La mécanisation suppose l'achat des engins, des intrants etc. Fort de cette réalité, il est important que l'activité agricole soit, si pas totalement financée par l'Etat, elle doit tout au moins être soutenue par ses subventions. 145 MAFWILA MBONA, Les neufs questions d'éthique agricole, Kinshasa, Editions Academic, Express-Press, 2006, p.10. 146 G. KALAMBAY LUMPUNGU, Op. Cit, p.34. [50] Sur ce point précis, l'Etat congolais a déjà fait une expérience, avant l'indépendance, qui lui a permis de réaliser les meilleurs rendements dans le domaine agricole. Pas plus longtemps, la création des banques des crédits agricoles et la SOFIDE ont été créées à cette fin. Ces institutions ne parviennent plus à financer l'agriculture. D'où, le résultat est médiocre. Cette réalité est prise en compte par la loi du 24 décembre 2011 sur l'agriculture qui a créé un Fonds national de développement agricole, dénommé : Fonds destiné à financer l'agriculture147. Ainsi, 10 ans après la promulgation cette loi, il apparait nécessaire de compléter l'article 56 pour prévoir des mesures réglementaires devant déterminer les modalités de gestion et d'application du fonds national de développement agricole148. §2. Les défis auxquels les terres agricoles font face Il y'a quelques dizaines d'années encore, la principale tâche de l'agriculture consistait à produire des denrées alimentaires de qualité et en quantité suffisantes. Les surfaces agricoles furent peu convoitées, depuis longtemps, pour d'autres usages. Avec les rapides transformations de la situation économique et géopolitique des dernières décennies, la situation a aussi changé radicalement pour l'agriculture. Ce secteur d'activité s'est développé vers une agriculture orientée vers les marchés, qui contribue grandement au développement de l'espace rural, et qui demande aussi à être inclue dans les processus de décision. En effet, dans le cadre de la gestion foncière agricole Constantin KAKESE KUNYIMA souligne que, les devoirs de l'agriculture d'aujourd'hui montrent trois missions principales : ? L'approvisionnement en denrées alimentaires de qualité et le maintien de la capacité de production ; ? La conservation des ressources naturelles (sol, eau, air,
paysage, biodiversité) 147 A56 de la loi n°11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux relatifs à l'agriculture, J.O.R.D.C, n° Spécial du 27 décembre 2011. 148 Art 56 de la proposition de la loi modifiant et complétant la loi n°11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux relatif à l'agriculture. (Inédit) [51] ? L'occupation décentralisée du territoire et le renforcement de l'espace rural (par exemple : élargissement de l'offre agritouristique et des prestations sociales)149. Pour être en mesure d'atteindre cet objectif afin de réussir face, il faut relever les défis, qui pourtant restent ignorés par les décideurs politiques et administratifs. Les défis à relever : - La spoliation des terres agricoles : La spoliation à grande échelle des terres agricoles au profit des lotissements sociaux entraine une disparition progressive des sites maraîchers dans la ville de Kinshasa. Ces petits producteurs n'ont pas caché leur indignation lors d'une émission télévisée, soulignant que depuis quelques années, la pression démographique urbaine les dépossède de leurs sites d'exploitation. Par exemple du site N'djili SECOMAF etc... De ce fait, dans plusieurs communes semi-urbaines de Kinshasa, les activités agricoles sont actuellement en baisse. - Manque d'accès aux engrais à des prix bas Puisque les terres agricoles sont devenues extrêmement chères en Afrique plus précisément en RDC, la plupart des agriculteurs étant pauvres n'ont pas d'autre choix que de cultiver la même terre à plusieurs reprises. Étant abusée, la terre se dégrade et perd ses composantes nécessaires pour une bonne production agricole. Pour faire face à cette situation, les cultivateurs font de l'usage des engrais artificiels leur principale méthode afin de travailler la même terre autant de fois que possible. Comme ces engrais (chimiques) coûtent assez chers, ils sont au-delà de la portée des pauvres paysans ou ne sont pas disponibles sur les marchés ruraux. Dans des pays où il y a des subventions d'engrais, une partie de la population rurale est mise à l'écart de la distribution. - Manque de bons réseaux routiers et bons marchés Après la production agricole, il faut de bonnes routes pour transporter les produits vers les marchés. Les routes n'existent pas du tout ou celles qui sont connectée aux grands marchés sont dans de mauvais états. C'est un enjeu majeur pour l'agriculture en RDC. Faute de systèmes de stockage efficaces et appropriés, les produits qui résistent très mal aux conditions climatiques tels que les tomates, les oignons, les légumes verts, etc. pourrissent. D'où le gaspillage alimentaire. 149 C. KAKESE KUYIMA, Op.Cit, p.45 [52] - Manque de soutien financier Beaucoup de pays africains n'ont pas de systèmes formels de soutien financier aux cultivateurs comme la RDC, qui leur permettront de développer et maintenir leur production agricole. Bien qu'il existe aujourd'hui plusieurs groupes de micro-finance travaillant dans ce domaine, les cultivateurs sont très peu à avoir accès à ces groupes ; la majorité d'entre eux ignore les procédures requises pour pourvoir accéder à un soutien de financement à long terme ou les conditions mises en place par ces institutions financières ne peuvent pas être remplies par les pauvres exploitants. SECTION III. PERSPECTIVES EN MATIERE DE GESTION DES TERRES AGRICOLES A KINSHASA Il sera question d'aborder le rôle de l'Etat (§1) et ensuite le rôle de l'exploitant privé (§2). §1. Le rôle de l'Etat Les lois congolaises ont la particularité de contenir en elles-mêmes, une politique de gestion et les aspects de planification des actions dans le secteur agricole. L'Etat doit assurer l'encadrement des exploitants agricoles par la promotion des coopératives pour améliorer les récoltes, ses services qui ont en charge la gestion des secteurs foncier et agricole, sont obligés d'assurer de manière permanente et effective un contrôle des conditions prescrites dans les textes de lois ainsi que dans les contrats signés entre l'Etat et les exploitants. En vue d'apporter une réponse au problème de l'insécurité alimentaire, il est question, pour minimiser les importations et la dépendance de la population de Kinshasa en matière alimentaire, de favoriser la production agricole locale, pour cela, nous avons répertorié une gamme des propositions à savoir : V' l'aménagement spatial foncier ; V' l'application stricte de la législation ; V' la planification de la production agricole ; V' l'encadrement des exploitants agricoles ; V' le suivi, le contrôle et les sanctions constituent des préalables d'une gestion efficace et rationnelle susceptible de répondre à ce défi. 150 Article 3 point 10 de la proposition de la loi modifiant et complétant la loi n°11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux relatif à l'agriculture. (Inédit) [53] Bien appliquées, ces recommandations permettront à l'Etat de maîtriser les problèmes d'extension urbaine, d'économiser les devises pour permettre à la population kinoise d'avoir au prix convenable, l'accès facile et stable aux denrées alimentaires de base. §2. Le rôle de l'exploitant privé La loi n°11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux relatif à l'agriculture à son article 3 point 8, est considéré comme exploitant agricole toute personne physique ou morale qui exerce, à titre professionnel, toute activité agricole. Dans les mêmes ordres d'idées, la loi modifiant et complétant la loi n°11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux relatif à l'agriculture dispose à son article 3 point 10 est exploitant agricole toute personne physique ou morale qui exerce des activités agricoles150. L'exploitant agricole assure la surveillance et la direction de l'exploitation, participe de façon effective aux actes nécessaires de l'exploitation, bénéficie des résultats et en supporte les pertes. Son activité correspond à la maitrise et l'exploitation d'un cycle biologique de caractère végétal ou animal et constitue une ou plusieurs étapes nécessaires au déroulement de ce cycle. Rappelons que les activités de l'exploitant agricole sont dans le prolongement de l'acte de production où les activités auxquelles il se livre pour valoriser le cheptel et les produits de l'exploitation. A côté de celles suscitées, certaines activités autorisées comme celles de l'hébergement à usage touristique où de loisir, celle de la restauration réalisé par un exploitant sur le site de l'exploitation à conditions qu'elles soient assurées principalement au moyen des produits de l'exploitation et qu'elles respectent la règle en matière d'hygiène, de sécurité et protection de l'environnement. Les responsabilités de l'exploitant agricole sont entre autres d'assurer la direction, le contrôle et la surveillance de l'exploitation, de participer de façon effective aux actes nécessaires à l'exploitation afin de bénéficier des résultats et supporter les pertes dans le cas échéant. Il peut toutefois déléguer la gestion effective de son exploitation à une tierce personne en qualité de gérant placé sous son autorité, en accomplissant sa mission sous sa seule responsabilité. Au regard de la loi, l'exploitant agricole a l'obligation de respecter le contrat agricole, d'aviser l'autorité administrative lorsqu'il constate l'existence des organismes nuisibles dans sa concession... 151 Le projet d'aménagement de 28ha dans la vallée de N'Djili en 1951, destinée à la production de légumes frais [54] |
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