3. Vers des organisations
responsabilisantes
On sait que l'industrie du futur nécessitera une plus
grande autonomisation et responsabilisation des salariés. On observe
aussi que des organisations du travail construit sur la responsabilisation des
salariés renforcent l'engagement de ces derniers et améliorent la
performance globale de l'entreprise. En intégrant la réflexion
sur le travail (les tâches, les relations, les processus) et la
qualité du lien social aux changements de l'organisation, les
entreprises favorisent l'initiative des salariés et parviennent aussi
à mieux cerner où se crée réellement la valeur.
C'est le cas, par exemple, de Michelin, comme le rapporte Marc
Deluzet, expert associé à la Fondation Jean-Jaurès et
président de l'Institut Érasme.
Depuis 2013, Michelin a décidé de mener une
expérimentation, en sélectionnant une quarantaine d'îlots
de fabrication à travers le monde et en leur donnant carte blanche pour
s'organiser comme ils l'entendent. Précisons qu'un îlot est
formé par une équipe d'opérateurs sur un
périmètre machines, qui se succèdent en continu. Des gains
de productivité ont été observés et la
non-qualité a été fortement réduite. Le taux de
satisfaction au travail des ouvriers de ces groupes a fortement crû et
tend à rejoindre celui des cols blancs, ce qui est rarissimedans une
entreprise industrielle. Auparavant, même s'ils savaient ce qu'il fallait
faire, les ouvriers devaient attendre l'accord de la maîtrise.
Désormais, les problèmes sont résolus en
temps réel par les ouvriers, et le travail de la maîtrise consiste
davantage à faire de l'anticipation. Il est intéressant de noter
qu'aucun des îlots sélectionnés n'a complètement
changé le mode de production des pneus. Il s'est plutôt agi de
favoriser la responsabilisation des acteurs, sans modélisation a priori.
Fort de ce résultat, Michelin a décidé
d'étendre la démarche à plusieurs sites industriels
complets et leur a, notamment, proposé de s'affranchir du reporting. Ce
faisant, le management s'est mis en situation de repenser et d'inventer
l'ensemble du fonctionnement des usines. Le dialogue et l'ajustement sont
intégrés dans le processus de production, avec une mise en avant
du cas par cas et de la responsabilisation des acteurs plutôt que de la
modélisation générale du système.
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