3. Industrie 4.0 et développement
durable
Sur le plan économique, la numérisation de la
fabrication industrielle sera avantageuse pour les compagnies et les
gouvernements, et elle pourrait également favoriser le
développement durable. La production numérisée permet aux
compagnies d'utiliser les matières premières d'une façon
plus efficiente, et l'utilisation de puces IRF permet de sauvegarder
l'information sur l'assemblage des produits concernant les matériaux
utilisés dans tels ou tels composants. Le démontage et le
recyclage s'en trouvent facilités; le gaspillage des ressources,
réduit. Ce résultat est le fondement de ce que l'on appelle
l'« économie circulaire », l'un des principaux avantages sur
le plan de l'environnement et celui qui intéresse le plus les
gouvernements.
L'exploitation accrue de petites productions locales d'une
énergie renouvelable (par exemple, des cellules photovoltaïques
installées sur un toit), assortie d'une consommation d'énergie
contrôlée numériquement et de technologies de gestion de
l'énergie artificiellement intelligentes, pourrait aboutir à la
décentralisation de la production d'énergie et, tôt ou
tard, à la décentralisation du réseau
d'électricité lui-même. Cette tendance existe
déjà : en Europe, de nombreuses usines de papiers pratiquent
déjà la production combinée de chaleur et
d'électricité, laquelle sera, ou est déjà, une
réalité pour d'autres secteurs également, dans les usines
qui sont alimentées en électricité par leur propre groupe
électrogène. Le rejet thermique peut être transformé
en énergie utilisable grâce à des systèmes de
récupération de la chaleur perdue. Les compagnies pourraient de
plus en plus être alimentées par des énergies renouvelables
(énergies solaire, éolienne ou hydraulique). Le surplus
d'énergie produit par les usines industrielles - c'est à dire la
quantité d'énergie qui excède l'énergie
nécessaire à la fabrication de leurs produits - peut être
déversé dans le réseau d'électricité qui
dessert les collectivités voisines.
L'existence de nombreux petits sites de production
d'énergie obligera à modifier le réseau
d'électricité, conçu pour répondre aux besoins d'un
nombre relativement petit de vastes générateurs
électriques. L'application de ces principes permettra de réduire
considérablement le gaspillage d'énergie. L'Industrie 4.0
accentuera cette récente tendance vers la décentralisation des
réseaux électriques.
Certains chercheurs prévoient des impacts positifs sur
les infrastructures énergétiques des régions plus
précaires de la planète, en Afrique notamment. La
disponibilité de sources d'énergie de remplacement pourrait,
selon ces prédictions, non seulement améliorer le niveau de vie
des populations, mais également inciter les compagnies à employer
les ressources humaines régionales, stimulant par le fait même les
économies locales. Par contre, dans les centrales électriques ou
dans les services publics d'électricité, de nombreux emplois
seront perdus ou transformés.
D'un point de vue plus pessimiste, la capacité accrue
de répondre rapidement et avec souplesse aux désirs des
consommateurs risque d'accélérer le cycle de vie des produits et
de provoquer leur obsolescence de plus en plus rapidement. Il s'ensuivrait une
augmentation de la demande en ressources, suivie d'une augmentation de la
production de déchets. L'instauration des nouvelles technologies
numériques nécessite l'utilisation de ressources
supplémentaires, par exemple : des métaux du groupe des terres
rares pour les puces; d'autres minéraux pour l'équipement
numérique.
L'Industrie 4.0 pourrait représenter des avantages pour
l'environnement, mais elle risque aussi de faire peser des menaces sociales sur
les travailleurs, leur famille et leur collectivité, si la
sécurité des emplois n'est pas garantie pendant la
transformation. Jusqu'à présent, aucune transformation
économique induite par les technologies n'a pu être
stoppée, mais les syndicats doivent insister pour que les droits des
travailleuses et travailleurs soient améliorés par le changement
technologique, et non diminués. L'histoire a montré que les
révolutions industrielles de cette ampleur ne peuvent être
maîtrisées que si l'expertise et le savoir des travailleuses et
travailleurs sont pris en compte. S'ils sont négligés dans le
processus de transformation, de riches sources de connaissances et des
innovations futures seront gaspillées.
Les disparités entre les pays développés
et les pays en développement devraient particulièrement attirer
l'attention des gouvernements sur la façon de gérer cette
transformation en accordant la priorité aux conséquences
positives sur la société et en réduisant au maximum les
coûts pour la société.
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