Le storytelling dans le tourisme institutionnel( Télécharger le fichier original )par Myriam Rougier Sup de Pub Paris - Master Direction Artistique 2018 |
PARTIE 2La communication touristique à destination des 18 - 34 ans sous le prisme du storytelling 1. Les mécanismes du storytelling Raconter des histoires fait partie de notre quotidien, que ce soit celle de notre vie pour nous présenter, celle (vraie ou non) pour justifier notre retard ou encore celle que l'on raconte le soir pour endormir son enfant. La publicité au travers du récit est un principe qui existe depuis bien longtemps, mais aujourd'hui son utilisation est de plus en plus fréquente. Dans son essai Storytelling, Christian Salmon définit le phénomène en expliquant que «Du logo on passe aux stories» traduisant ainsi une évolution de la communication et des marques.73 Fonctionnement du storytelling On dénombre 6 émotions de bases chez l'humain : la joie, la peur, la colère, le dégoût, la tristesse et la surprise. Cela nous rappelle les 4 protagonistes du film d'animation Vice Versa, où chacun représente respectivement la joie, la colère, le dégoût et la tristesse. Dans cette histoire, nous voyons comment ces personnages influent sur le comportement d'une petite fille au fil de l'histoire. D'ailleurs, les réseaux sociaux tentent de correspondre à cette réalité en permettant aux usagers d'exprimer leur ressenti, au travers d'outils tel que les réactions de Facebook ou encore les gifs. L'émotion est tout bonnement une réaction naturelle qui, lorsqu'elle est forte, nous permet de réagir de manière plus intense et rapide comme dans des situations d'urgence. La communication a donc saisi tout l'enjeu d'influer sur celles-ci afin de pousser le spectateur à la consommation. Une étude AOL (America Online) pour Iligo, sur l'importance des émotions dans la communication, a comme 74 conclusion que «plus l'émotion est forte, plus la mémorisation du message est élevée.» Pour créer ces ressentis, les marques tentent alors de raconter des histoires, car qu'elles soient vraies ou fausses, notre cerveau traite celles-ci émotionnellement de la même manière. Ce fait 73 Storytelling : la machine à fabriquer des histoires et à formater les gens, La Découverte, Christian Salmon, 2008 74 Article Agence 79C, Le Storytelling, une histoire d'émotion, 2017, (consulté le 27 avril 2018) 19 se remarque d'ailleurs par notre attachement pour les personnages de fiction. Le Storytelling 75 permet dans un même temps de projeter le spectateur dans l'histoire proposée par la marque, comme lorsqu'on lit un livre. Ce récit passe en quelque sorte par une mise en scène de faits, ceux-ci peuvent être réels comme avec l'histoire du fondateur de l'entreprise, de ses employés, de ses clients, ou inventés. La caractéristique principale étant bien entendu que l'histoire ait un lien avec la marque ou le produit. Ce principe de mise en scène avait 76 notamment été utilisé par Aristide Boucicaud pour le premier grand magasin parisien, le Bon Marché (1852). A l'époque, un commerce de cette taille était quelque chose d'intriguant, mais également effrayant au vu de sa taille, ce qui rendait la clientèle frileuse. Il décida de propulser celle-ci dans une histoire qu'elle vivrait véritablement en théâtralisant son magasin. L'agencement donnait l'impression d'évoluer dans un décor mystique, ce qui a permis à la clientèle de vivre une expérience, et donc de devenir familière avec ce lieu, la mettant ainsi dans de bonnes conditions pour consommer.77 Le storytelling est aussi une histoire d'images. Du fait de son mécanisme, il lui arrive d'être utilisé par les marques souhaitant élever leur statut au rang de mythe. Il est d'ailleurs très généralement adopté par les acteurs du luxe, qui ne communiquent jamais sur leurs prix ou les qualités des produits, mais bien sur l'univers de la marque. Elles mettent alors en avant une histoire et un esprit distinguable, afin que le consommateur s'y projette et ait envie d'acheter le produit pour intégrer les valeurs de la marque à son image personnelle. La cible 78 ne s'intéresse donc pas au produit, mais bien à ce que celui-ci peut lui apporter sur le plan identitaire. Les pays anglo-saxon aussi utilisent beaucoup cette technique en temps de crise afin de faire passer plus facilement leur message mais surtout d'humaniser l'entreprise. Le fait que le but premier ne soit pas de vendre via des arguments rationnels, mais de raconter une histoire permet d'être plus proche du consommateur et de créer un lien avec lui, autre que celui de vendeur-acheteur. Dans d'autres cas, le Storytelling permet de rassurer le 79 consommateur, car pour lui une marque qui ne prend pas la peine de communiquer sur les particularités de son produit paraît comme une marque déjà bien installée, qui n'a plus rien à 75 Article Agence 79C, Le Storytelling, une histoire d'émotion, 2017, (consulté le 27 avril 2018) 76 Article Définitions Marketing, Définition : Storytelling , B.Bathelot, 2017, (consulté le 27 avril 2018) 77 Article Wikipédia, Aristide Boucicaut, 2018, (consulté le 30 avril 2018) 78 Les Nouveaux défis du brand content, Pearson, Thomas Jamet, 2013 79 Tous les marketeurs sont des menteurs, Maxima, Seth Gothin, 2006 20 prouver et donc digne de confiance. Par son humanisation, le storytelling permet aux 80 marques d'avoir une image vivante, comme en témoigne le cas d'Oasis. Au travers de la personnification des fruits, la marque donne au sens premier comme au second de la vie à ses produits, en créant des personnages à l'effigie des fruits utilisés pour les recettes des boissons. Ces protagonistes entraînent avec eux le spectateur dans leurs histoires où l'humour y règne provoquant ainsi la joie. La marque séduit alors autant par son univers que par ses personnages attachants.81 Le rôle de l'image dans le storytelling Nous vivons dans un monde où nous sommes sur-sollicités d'informations ,diminuant ainsi notre attention. La photographie permet donc de pallier à cette particularité par sa rapidité de transmission de message ce qui donne tout son sens à l'adage «Une image vaut mille mots» . Par ailleurs, nous remarquons que 90% des informations transmises au cerveau sont visuelles et que 65% de la population a une mémoire visuelle. Mais aujourd'hui, selon 82 Antoine Verdet, «le rôle de l'image n'est plus simplement d'informer le consommateur, mais de l'immerger dans une expérience» . De nombreuses études permettent de montrer la 83 différence entre le texte et l'image, qui relève de la pensée rationnelle, pour le premier, et de l'émotion pour le second. D'ailleurs deux images d'une même situation peuvent provoquer des émotions différentes du fait de leur cadrage, éclairage, qualité... L'image est un langage 84 universel : quelle que soit sa langue, le spectateur saura dire ce dont il est question, à la manière d'un tableau. Cependant, l'interprétation peut avoir des variantes du fait des acquis 85 et de la culture de chacun. Ainsi un indien n'interprètera pas de la même manière qu'un états uniens la photographie d'une vache. Le storytelling dépendra aussi de l'imagination de la personne qui regarde. Pour ce faire, la composition de l'image est alors importante afin de guider la compréhension au travers de codes universels. 80 La Création de contenus au coeur de la stratégie, L'Harmattan, Nicolas Oliveri, Manuel Espinoza, Christelle Waty-Viarouge, 2017 81 Article Social Media for You, Deux marques qui ont réussi avec le storytelling (consulté le 18 mai 2018) 82 Document Le Storytelling par l'image, Frederic Gonzalo, mars 2015 83 Article Le Monde, Le rôle de l'image (...) , Antoine Verdet, 2017, (consulté le 28 avril 2018) 84 Article Cairn, Le pouvoir de l'image : persuasion, émotion et identification, Helene Joffe, 2017, (consulté le 29 avril 2018) 85 Article Storytelling.fr, Visuel storytelling, Lionel Clément 2015, (consulté le 28 avril 2018) 21 Autre point important, une seule image ne montre qu'une partie de la réalité à un instant T. C'est pourquoi selon Anne Ropion, le storytelling via l'image ne peut avoir lieu que s'il y en a plusieurs. Elle ajoute qu'aujourd'hui les outils numériques permettent d'aider cette construction du storytelling par le soutien de narration écrite tels que la localisation, l'humeur mais également un court texte en description afin d'étoffer le récit. L'image installe une 86 ambiance et un contexte, car elle permet une meilleure projection de par son caractère visuel. Cet aspect illustre donc la création d'univers si cher aux marques de luxe. Même chose pour la communication de Red Bull qui cherche à installer son univers et ses valeurs, afin que sa cible acquiert le produit pour s'approprier celles-ci. La marque de boissons énergisantes ne communique pas véritablement sur son produit et ses particularités (et encore moins sur le prix), mais bien sur l'univers de celui-ci, à savoir celui de l'adrénaline. Elle le traduit par de nombreux événements autour des sports extrêmes ou encore la sponsorisation massive de sportifs qu'elle utilise d'ailleurs pour être les relais de ce storytelling. Ce moyen permet donc d'atteindre une cible très spécifique celle des passionnés de sports extrêmes, qui sont les plus à même de consommer la marque. La production d'images de ces opérations permet de diffuser le storytelling de la marque, avec une forte valeur émotive découlant du caractère spectaculaire et expérientiel de celles-ci.87 2. L'utilisation du storytelling par les destinations Internet permettant d'avoir accès à un nombre conséquent d'informations, cela facilite les recherches des consommateurs. Cependant l'acteur du tourisme y voit aussi le fait que l'internaute ait accès à une multitude de destinations en deux ou trois clics. Il lui est donc nécessaire de se démarquer notamment via un Storytelling fort, tout en correspondant aux nouveaux comportements de la cible. 86 Article Your Storyrelling, Une photo fait-elle un storytelling ? , Anne.E Ropion, (consulté le 27 avril 2018) 87 Les Nouveaux défis du brand content, Pearson, Thomas Jamet, 2013 22 Via les réseaux sociaux pour mieux toucher la cible Pour faire venir la cible, il faut déjà la séduire, et cela ne vous a pas échappé, le globe contient autant de lieux qu'il y a de possibilités de faire du tourisme. D'ailleurs, pour ne pas faciliter la tâche, un nombre conséquent de destinations communiquent via les réseaux sociaux. En France, on en dénombre aux alentours de 500 sur environ 5 réseaux sociaux différents, les principaux étant Facebook, Instagram et Twitter. Cela leur permet de créer du lien avec leur cible tout en apprenant à connaître leurs attentes.88 Du point de vue de l'utilisation, les publications Facebook sont créées pour toucher et plaire à un large public du fait que ce média soit le plus important avec plus de 2 milliards 89d'utilisateurs actifs par mois. Les publications y sont majoritairement visuelles car celles ne 90l'étant pas ont généralement un taux d'engagement très bas. Twitter, quant à lui, est utilisé 91 avec une approche très différente. Son contenu est plus généralement à destination des médias et des professionnels du tourisme, mais il est également un très bon outil de relation client. De son côté, Instagram, utilisé par 80% des destinations présentes sur les réseaux 92 sociaux 93, est devenu un véritable enjeu du fait de sa forte croissance et de la place que la photographie y occupe. De plus, le taux d'engagement des destinations sur cette plateforme est bien supérieur à celui de Facebook (6,6% contre 1,7%).94 Ces nouveaux outils ont fait émerger un nouveau métier au sein du tourisme, celui de community manager (CM). Il est alors garant du storytelling de la destination sur les réseaux sociaux ainsi que de la réussite des publications. Les CM ont également la mission de fédérer une communauté qui leur apportera de l'engagement. We Like Travel, une agence social médias spécialisée dans le tourisme, explique d'ailleurs que cet engagement est le résultat d'une forte implication de la destination sur les réseaux sociaux avec notamment une régularité dans les publications, c'est ce que l'on appelle le snack content. Ils doivent 88 Article Nukesuite, Comment les acteurs du tourisme utilisent-ils les réseaux sociaux ? , Clément Cosnier, 2017 (consulté le 6 mai 2018) 89 Article Nukesuite, Comment les acteurs du tourisme utilisent-ils les réseaux sociaux ? , Clément Cosnier, 2017 (consulté le 6 mai 2018 90 Document We Like Travel, Etude social medias : destinations française 2017, 2017 91 Article Nukesuite, Comment les acteurs du tourisme utilisent-ils les réseaux sociaux ? , Clément Cosnier, 2017 (consulté le 6 mai 2018) 92 Article Nukesuite, Comment les acteurs du tourisme utilisent-ils les réseaux sociaux ? , Clément Cosnier, 2017 (consulté le 6 mai 2018 93 Document We Like Travel, Etude social medias : destinations française 2017, 2017 94 Document We Like Travel, Etude social medias : destinations française 2017, 2017 23 également avoir une grande réactivité quant aux sollicitations afin de conserver le lien bâti.95 Pour en revenir à Instagram, sa place chez les 18-34 ans est devenue telle que pour 40,1% d'entre eux, le premier critère de choix d'une destination est son «instagrammabilité», afin de pouvoir publier une photographie de celle-ci. Cette caractéristique est le résultat de 96 l'idéalisation du storytelling, qui par sa composition, permet de raconter une histoire sous son meilleur jour. Instagrammabilité : fait même qu'une situation soit très photogénique, au point qu'elle puisse permettre de récolter un chiffre conséquent de like sur Instagram. Il arrive que certains bars ou restaurants créent des produits ou fassent un décor pour favoriser la publication de photographies et ainsi avoir de la publicité gratuite . 97 Avec 64% des Instagrammeurs qui publient leurs clichés de voyage sur Instagram, l'UGC prend alors une importance toute particulière. Il permet aux destinations d'utiliser ces contenus selon leurs besoins du moment, en y ajoutant une description permettant le storytelling. Cette technique permet une valeur ajoutée à la destination via l'implication de sa communauté.98 UGC : User Generated Content, qui désigne le contenu créé par les utilisateurs des plateformes sociales que ce soit de la notation ou de la publication.99 Pour inciter à la publication, les destinations ont donc créé leur propre hashtag afin que la communauté publie sur celui-ci. A ce propos, Séverine Dubois, responsable des réseaux 100 sociaux à Corrèze Tourisme explique que cette technique permet dans un premier temps des économies, mais aussi et surtout de créer une galerie afin d'avoir tout un horizon d'expériences de la destination, s'adressant ainsi à différentes sensibilités. Par ailleurs, on 101 95 Article We Like Travel, Enseignements et top destinations, 2018 (consulté le 9 mai 2018) 96 Article Independant, «Instagrammability» : most important factor for millennials on choosing holiday destination, Rachel Hosie, 2017, (consulté le 16 mai 2018) 97 Article Définition Marketing, Définition : Instagrammable , B.Bathelot 2018, (consulté le 17 mai 2018) 98 Article Base Sud, 7 avantages d'utiliser Instagram dans le secteur du tourisme, Valentin Giulian, 2017(consulté le 20 mai 2018) 99 Article Définitions marketing, Définition : UGC, B.Bathelot, 2017 (consulté le 20 mai 2018) 100 Le marketing du tourisme (2ème édition), Dunod, Christine Petr, 2015 101 Interview Emilie Boucheteil et Séverine Dubois, 2018 24 remarque que les locaux en sont les plus grands fournisseurs. Cependant, les photographies 102 d'amateurs ont la particularité d'avoir toujours le même regard, avec la recherche du même type de couleur (ciel bleu, nature verdoyante...). Olivier Kmia appelle ce phénomène le «tourisme de masse photogénique» .103 Les réseaux sociaux ont également d'autres façons d'explorer la mise en avant du storytelling via les nouveaux types de publications tel que le format Story qui, rien qu'à son nom paraît comme le support idéal. Sous des airs de reportage, il attire 250 millions d'utilisateurs dans le monde et est utilisé par 50% des marques présentes sur le réseau. Il est très apprécié par les utilisateurs du fait de sa snackabilité, mais également de l'interaction qu'ils peuvent avoir avec les destinations via les sondages. Ces types de publication facilitent le partage des 104 histoires, des instants de vie et permet donc d'humaniser plus encore la communication. Story : format de publication, permettant de publier des photographies ou vidéos à la manière d'une petite histoire. La durée d'accès à ce genre de publication est éphémère, elle dure 24h avec des contenus de quelques secondes.105 Snackabilité : dérivé du mot snack content, signifiant la faculté que peut avoir une publication à être consommable très rapidement.106 L'utilisation d'influenceurs pour la diffusion du storytelling Les destinations impliquent régulièrement les influenceurs professionnels dans la narration de l'expérience du territoire, par le biais de partenariat. Pour Sébastien Gonzalez, spécialiste de la communication digitale pour le site E-Tourisme, leur utilisation permet de toucher les 18 - 34 ans, une cible compliquée avec des codes difficilement accessibles. Il 107 102 Article Cybergeo, Construire l'image touristique d'une région à travers les réseaux sociaux, Dorian Bernadou, 2017, (consulté le 5 juin 2018) 103 Article Konbini, A l'heure des réseaux sociaux nous prenons tous les mêmes photos de vacances, Lisa Miquet, 2018 , (consulté le 5 mai 2018) 104 Document We Like Travel, Etude social medias : destinations française 2017 , 2017 105 Article Junto, Qu'est-ce qu'une story Instagram ? , (consulté le 6 mai 2018) 106 Article Définition marketing, Définition Snackable content, B.Bathelot, 2016 (consulté le 20 mai 2018) 107 Interview Sébastien Gonzalez, 2018 25 est donc fréquent pour les destinations de faire appel à ceux ayant cette cible comme audience, récupérant ainsi leur notoriété. Il peut aussi bien arriver qu'elles fassent appel à 108 des amateurs, ayant de moins grandes communautés. Tous ont la particularité de devenir 109 «ambassadeurs» le temps de quelques publications. L'importance de ceux-ci réside dans le 110 fait que les internautes donnent du crédit aux histoires qu'ils racontent (cet aspect nous rappelle d'ailleurs la confiance dont bénéficient les contenus journalistiques). Ils se font donc relais du storytelling de la destination. Parmi tous les influenceurs dits professionnels, 16,5% sont spécialisés dans le voyage , mais 111 le choix de ceux-ci se fait toujours selon certains critères comme l'importance de leur communauté, mais aussi leur spécialisation (aquatique, exotique, montagnarde, sportive...). Le bon ciblage d'un influenceur peut s'avérer très bénéfique, car en partageant son expérience à sa large communauté, il permet une plus grande visibilité pour l'acteur touristique. Mais il y a également un autre aspect important dans ce type de communication, c'est le relais de ces contenus créés sur les pages de destinations. Par leur qualité et approche du sujet, ils permettent de très bons taux d'engagement. Dans le cas de la Corrèze, la vidéo des influenceurs World Else a réalisé plus d'1,3 millions de vue. Des résultats inédits 112 permettant de remarquer l'impact des influenceurs, comme le souligne Séverine Dubois, en expliquant que quelques années auparavant la destination avait réalisé une vidéo en interne qui fut un flop malgré de gros frais de production. Philippe Constanty, responsable du service promotion communication à Corrèze Tourisme, souligne que cette vidéo était extrêmement scénarisée, ce qui a peut-être moins enthousiasmé. Dans un autre temps, les acteurs touristiques sollicitent également les influenceurs de moins grande notoriété (seulement quelques milliers de followers). Ceux-ci sont généralement des acteurs du territoire qui créent des contenus sur celui-ci régulièrement. Par la mise en place d'Instameet, les destinations peuvent alors mettre en lumière certains aspects du territoire via différents angles de vues, comme parfois avec des lieux habituellement interdits au public. Ce procédé permet également de promouvoir le hashtag de la destination créant par là des 108 Interview Emilie Boucheteil et Séverine Dubois, 2018 109 Article Le Quotidien du Tourisme, Blogueurs Influenceurs , 2018 (consulté le 26 mai 2018) 110 Le marketing du tourisme (2ème édition), Dunod, Christine Petr, 2015 111 Article Journal du CM, Etudes influenceurs et marques en 2018 , 2018, (consulté le 20 mai 2018) 112 Interview Emilie Boucheteil et Séverine Dubois, 2018 26 contenus de qualité sur celui-ci, qui pourront être repris ultérieurement par le compte de la destination.113 114 Instameet : rassemblement collectif d'une dizaine voire d'une vingtaines d'instagrameurs amateurs ayant pour but de produire des photographies sur un thème.115 Grâce aux nouvelles technologies et notamment aux réseaux sociaux, le storytelling à su s'imposer dans la communication d'aujourd'hui, permettant ainsi une approche différente. Pour les 18 - 34 ans cela permet de créer de nouvelles relations, quant aux acteurs institutionnels du tourisme, cela engendre une communication plus vivante et moins froide. Par ailleurs, sur Facebook ou Instagram, les principales plateformes les plus utilisées, l'image y a une place centrale. Une aubaine pour ceux-ci qui ont l'habitude de communiquer via l'image, mais également un défi dans la construction du storytelling. De leurs côtés, l'utilisation d'UGC et d'influenceurs sont aujourd'hui devenus monnaie courante dans le tourisme, mais ces nouveaux procédés sont-ils efficaces ? 113 Article E-Tourisme, L'Instameet, une opportunité touristique !, Sébastien Gonzalez, 2015 (consulté le 26 mai 2018) 114 Interview Emilie Boucheteil et Séverine Dubois, 2018 115 Article Reporter Numérique, C'est quoi un Instameet ? , Aurélie Leclercq, 2017 (consulté le 26 mai 2018) 27 MÉTHODOLOGIE DE L'ÉTUDE DE TERRAIN Au travers de sa première partie, la revue de littérature m'a aidé à définir les enjeux et divers fonctionnements de la communication touristique mais également de celle à destination des millennials. La seconde partie m'a, quant à elle, donné les clés afin d'appréhender le storytelling et son utilisation par les acteurs institutionnels du tourisme. Ces différentes recherches m'ont permis d'amorcer la réponse à la problématique «L'utilisation du storytelling dans le tourisme institutionnel via les outils digitaux a-t-elle une véritable influence sur les 18 - 34 ans dans la sélection de leur destination touristique ?». Cependant plusieurs hypothèses ont fait leur apparition :
Afin de répondre à ces différentes hypothèses, plusieurs types d'analyses ont été mis en place. La première, qualitative, avec des interviews de professionnels dans le but de répondre aux 3 hypothèses. Pour ce faire, j'ai sollicité dans un premier temps Sébastien Gonzalez, journaliste chez E-Tourisme, pour son analyse et sa connaissance globale du secteur. Dans un second temps de Sidney Chesneau, community manager à We Like Travel, une agence de social médias spécialisée dans la communication touristique, nous a fait part de son témoignage. Dans un troisième temps, j'ai demandé à lesdroners et cloetclem leurs avis en temps qu'influenceurs. Et enfin, j'ai questionné Emilie Boucheteil et Séverine Dubois, chargées de communication à Corrèze Tourisme, afin d'avoir leur avis en temps qu'acteurs directs du tourisme institutionnel. La seconde, une analyse quantitative, a pour but de répondre elle aussi à ces 3 hypothèses. Elle a été réalisée sous forme de 2 questionnaires Google Form postés pendant 1 semaine pour l'un et 5 jours pour l'autre sur les groupes Facebook Vie de voyageur, Compagnon de 28 voyage, Voyager au féminin en sac à dos et Promo SP4 2017-2018 . Ces questionnaires ont également été diffusés sur Twitter, dans mon entourage ainsi que celui de mes collègues de stage à Corrèze Tourisme. Parmis les 172 répondants du premier questionnaire, 138 correspondent à la tranche d'âge 18 - 34 ans. Pour le second, parmi les 106 répondants, 96 sont des millénnials. Pour répondre au mieux à ces problématiques, nous nous concentrerons uniquement sur les résultats de cette catégorie. Enfin, afin d'étayer la réflexion concernant la 3ème hypothèse, j'ai tenté d'analyser le comportement des gens et de leur perception du storytelling de différentes destinations. Avec une sorte de mécanique inversée du jeu Memory, j'ai sélectionné 2 morceaux d'une dizaine de comptes Instagram de destinations. Après les avoir mélangés, j'ai demandé aux personnes de retrouver quels morceaux allaient ensemble afin de vérifier si une lecture visuelle était possible. 29 I. Vérification de la première hypothèse : le storytelling est-il véritablement efficace chez les 18 - 34 ans face à des arguments qualitatifs ? Dans la revue de littérature, nous avons vu que la génération des 18 - 34 ans étaient plus propice au voyage, souhaitant profiter de l'instant et non investir sur le long terme. Cependant, il paraît tout de même intéressant de se pencher sur l'importance ou non du storytelling. Si cette cible a une appétence pour le voyage, peut-être le pratique t-elle dans un soucis d'économie ? Afin de répondre à cette hypothèse, j'ai décidé, dans un premier temps de faire appel à l'avis de professionnels du tourisme sur la question. Puis dans un second temps, pour vérifier si leur analyse fonctionne, j'ai sollicité directement les premiers intéressés, à savoir les 18 - 34 ans. L'avis des professionnels Pour Sébastien Gonzalez, journaliste à E-Tourisme, il n'y a aucun doute sur l'importance du storytelling dans la communication touristique via les réseaux sociaux. Pour lui, le client souhaite avant tout «vivre une expérience» , il est en recherche de ressenti, de découverte et ne souhaite pas «être simplement consommateur» . Le storytelling intervient donc en passeur d'émotion, à la manière d'un échantillon pour donner envie. Sidney Chesneau nous explique que les acteurs du tourisme recherchent de plus en plus à raconter des histoires, confirmant ainsi l'ancrage du storytelling dans la communication actuelle. Ce qu'approuve Emilie Boucheteil, responsable de la ligne éditoriale de Corrèze Tourisme, qui relate que la destination a opéré un changement de stratégie en plaçant le storytelling au centre de sa communication. Les influenceurs spécialisés dans le voyage Claudia et Clément, plus connus sous le nom de cloetclem , sont eux aussi affirmatifs sur l'importance du storytelling en expliquant qu'il est «ce qui rend la destination intéressante» . Cependant pour eux, la photographie a une place plus importante que le texte dans le storytelling. Les différents acteurs du tourisme interpellés sont unanimes quant au rôle prépondérant du storytelling, voire même du rôle de l'image. Cependant, la seule vérité est 30 celle des consommateurs. Afin d'aller plus loin, l'analyse quantitative est donc nécessaire pour tenter de vérifier les propos des professionnels. L'avis des 18 - 34 ans Parmis les 138 répondants de 18 - 34 ans du premier questionnaire, 69,6% affirment pratiquer le tourisme plusieurs fois par an et 14,5% une fois par an. Ce qui fait 84,1%, soit un pourcentage très important de personnes voyageant au moins une fois par an. Par ce chiffre, nous constatons bien que le tourisme prend une place importante dans leur vie, en faisant donc une cible sensible aux offres et à la communication touristique. Comme vu dans la revue de littérature, les réseaux sociaux ont aussi une place prépondérante puisque 94,2% d'entre eux s'y connectent plusieurs fois par jour, le reste se connectant une fois par jour. Dans leur rapport aux réseaux sociaux, 62,3% déclarent suivre un compte de destination (ville, département, région, pays...). La raison principale de cette démarche est notamment dans un but d'inspiration pour 76,7% d'entre eux. Pour ceux choisissant de ne pas suivre ces comptes, ils évoquent la qualité des contenus mais aussi un manque de confiance comme frein. Chez ceux qui suivent ces comptes, 90,6% disent que les publications leur ont donné envie, seul 4,7% déclarent avoir eu envie et décidé d'y aller par la suite. Pour les 4,7% restant, ils n'ont ni eu envie et ni choisi de s'y déplacer. Dans le questionnaire, il a été demandé quelle importance ont l'histoire, l'esprit et l'expérience du lieu dans le choix de la destination. La réponse devait être un chiffre sur une échelle de 0 à 10, 10 étant le plus important. La moyenne des 138 participants s'élève à 7,27, plaçant ainsi le storytelling comme un critère fort dans le processus de choix de la destination touristique. Par ailleurs, on remarque que 75,4% préfèrent les descriptions de publication faisant référence à l'expérience que l'on se fait du lieu (ex : Après une balade sportive dans les vignes, nous nous sommes arrêtés prendre une glace dans une petite auberge...). alors que 24,6% des répondants préfèrent les descriptions factuelles sur l'histoire du lieu et ses caractéristiques (ex : Bâti en 1609, cette tour mesurant près de 34m... ). Nous pouvons alors conclure que le storytelling, au travers de l'expérience humaine, est préféré à un storytelling plus factuel. 31 La deuxième analyse quantitative a comme particularité de demander aux répondants de choisir entre 2 types d'offres d'une même destination. La première comportait une photographie du lieu et le prix en description «Un week-end à Chevilly pour 143€», la seconde également une photographie du lieu mais avec des personnes et une en description de leur l'expérience du lieu «Après-midi cueillette à Chevilly sous le soleil couchant...». Sur les 96 répondants de 18 - 34 ans, 67,3% préfèrent la première offre. Cependant, nous remarquons que parmi leurs justifications, la beauté de la photo y joue beaucoup pour 57,5%, vient ensuite la particularité que le prix soit affiché pour 21,2%. Pour le reste, ce choix est le résultat d'une meilleure projection du fait qu'il n'y ait personne dessus. Les deux analyses quantitatives nous ont permis de remarquer deux choses. La première a confirmé ce que nous avons vu précédemment au travers des interviews de professionnels : le storytelling, et notamment l'expérience du lieu est véritablement un critère de choix pour les 18 - 34 ans. Elle montre également que les destinations touristiques ont raison de changer de stratégie puisque, pour le moment, les publications n'incitent pas véritablement au passage à l'acte. La seconde analyse a permis de remarquer que l'image joue un rôle essentiel dans le choix de la destination, et ce devant le prix. 32 II. Vérification de la deuxième hypothèse : les influenceurs sont-ils un passage obligé pour les acteurs institutionnels du tourisme afin d'atteindre les 18-34 ans ? Aujourd'hui, dès lors que nous sommes présents sur les réseaux sociaux, nous constatons l'ampleur du phénomène des influenceurs. D'ailleurs il arrive que les destinations fassent appel à eux pour qu'ils partagent à leur communauté leur expérience de la destination, cela permet également aux destinations de réutiliser les contenus produits par ceux-ci. Afin de voir si l'implication de ces personnalités est devenue une nécessité pour les acteurs touristiques institutionnels, j'ai commencé par demander leurs avis aux personnes en charge de la communication touristique ou qui l'analysent. Comme lors de la précédente hypothèse, j'ai voulu observer si la vision qu'ont les professionnels se vérifie sur le terrain au travers d'une analyse quantitative. L'avis des professionnels Sébastien Gonzalez estime que les 18 - 34 ans sont une cible particulière dans le sens où ils sont ultra-connectés, comme vu précédemment lors de la revue de littérature. Pour lui, les influenceurs sont donc une véritable aubaine pour les destinations qui souhaitent les toucher, car cette cible est en recherche de conseils et d'inspiration via les réseaux sociaux. Cependant, il met en garde sur le bon choix des influenceurs, ce que nous verrons plus en détails dans l'analyse quantitative. L'impact de ces personnalités se traduit par un taux d'engagement élevé. Séverine Dubois, responsable des réseaux sociaux à Corrèze Tourisme, nous explique d'ailleurs le cas du partenariat avec WorldElse . Leur vidéo de destination a été vue par plus 1,3 million de personnes. Cette forte activité des communautés d'influenceurs s'explique en partie par le fait que ces personnalités sont très proches des internautes notamment en «répondant à chaque commentaire» selon lesdroners . cloetclem vont jusqu'à parler d'une relation de «confiance» avec cette cible. Séverine Dubois explique que les destinations en profitent également pour profiter de leur notoriété et ainsi, gagner plus d'abonnés. Une petite précision est toutefois nécessaire selon Sidney Chesneau, pour lui les influenceurs sont un passage nécessaire et non obligé. Il explique que certaines destinations comme Tignes n'y font jamais appel et ne le souhaitent pas pour le futur, car leur communication actuelle fonctionne très bien telle qu'elle est. 33 Monsieur Chesneau ajoute que les influenceurs interviennent différemment qu'ils ne le faisaient il y a 10 ans. A l'époque, on faisait appel à eux pour qu'ils écrivent des articles sur leurs blogs afin de faire gagner de la visibilité aux destinations. Aujourd'hui ils sont aussi sollicité comme créateurs de contenus. Ce milieu s'est d'ailleurs professionnalisé via des contrats concernant l'utilisation de leurs productions. Encore une fois, les professionnels du tourisme sont unanimes quant à l'importance de l'implication des influenceurs dans la diffusion du storytelling. Ici aussi, il me paraît nécessaire de vérifier cette hypothèse sur le terrain. L'avis des 18 - 34 ans Pour cette étude quantitative, nous nous baserons sur le premier questionnaire. 62,3% des répondants de 18 - 34 ans déclarent suivre un ou des comptes d'influenceurs spécialisés dans le voyage. Les raisons principales évoquées sont, pour 86%, l'inspiration que leurs publications provoquent mais également la qualité des contenus pour 65%. A l'inverse, pour les 37,7% qui n'en suivent pas un manque de confiance est évoqué mais aussi une démarche perçue comme trop publicitaire. Parmi ceux suivant les comptes d'influenceurs, 81,4% déclarent avoir eu envie d'aller dans une destination visitée par ceux-ci, 14% disent avoir eu envie et choisi d'y aller par la suite. Enfin pour 4,6%, cela ne leur a ni donné envie, ni décidé. Nous pouvons noter que le pourcentage de personne ayant décidé d'aller dans cette destination est nettement supérieur pour les influenceurs que pour les destinations elles mêmes (4,7%). Nous remarquons donc que la relation qu'ont les influenceurs et les personnes qui les suivent est plus efficace que celle entre les destinations et leur propre communauté. Toutefois, nous relevons que de manière générale chez les 18-34 ans, 46,4% sont contre le fait que les acteurs touristiques fassent appel aux influenceurs. Cependant, lorsque nous nous concentrons sur les résultats de ceux suivants des comptes d'influenceurs, ce taux diminue à 23,3% (graphique ci-joint à gauche). Mais d'un autre côté, ceux suivant des comptes de 34 destinations mais pas d'influenceurs, ont un taux qui atteint des sommets avec 87,5% de personnes contre cette démarche (graphique ci-joint à droite). Celles-ci expliquent y voir une démarche trop publicitaire et un manque de confiance, alors que ceux étant pour expliquent avoir confiance en leurs publications, les voyant comme de vrais touristes. Cette différence est encore plus frappante visuellement avec les deux graphiques ci-dessous. Ceux suivant des influenceurs Ceux ne suivant pas d'influenceur Nous constatons donc que deux approches doivent être faites vis-à-vis de l'utilisation d'influenceurs. Comme l'a signalé Sébastien Gonzalez précédemment, le choix de ces personnalités doit se faire de manière réfléchie, car il y a un très gros risque que la communauté de la destination en tire une image négative. Cependant, s'il s'agit seulement de toucher la communauté de ces personnalités et non générer du contenu pour la destination il n'y a pas d'inconvénient. Nous notons donc que le recours aux influenceurs dans la diffusion du storytelling n'est pas un passage obligatoire et que celle-ci doit se faire de manière très réfléchie. D'un côté, la communauté de ces personnalités leur fait confiance et n'est pas gênée par un quelconque partenariat, alors que d'un autre côté, ceux ne les suivant pas voient ce type de pratique d'un très mauvais oeil. 35 III. Vérification de la troisième hypothèse : l'utilisation d'UGC par les destinations ne dilue-t-elle pas la lecture du storytelling ? L'utilisation de contenus générés par les touristes ou locaux est une pratique courante (voire systématique) pour les destinations. Cependant, cette façon de faire usant des photographies amateurs et donc de visions toutes aussi différentes, ne diluera-t-elle pas le storytelling lorsque la cible sera dans sa recherche de destination sur les réseaux sociaux ? Dans un premier temps j'ai demandé l'avis sur la question aux professionnels, vérifiés par une analyse de terrain. Afin d'appuyer plus encore cette hypothèse j'ai mis en place un test afin de vérifier si le storytelling visuel des destinations est efficace. L'avis des professionnels A la question de savoir si l'utilisation d'UGC permet le storytelling, Sébastien Gonzalez est clair, celui-ci se doit «d'être entièrement maitrisé» et donc, par conséquent, ne doit pas être réalisé par les touristes. Pour lui, les destinations doivent devenir créatrices de contenus tout en poussant la communauté à publier pour ensuite en valoriser une certaine partie afin de créer un lien avec celle-ci. Sydney Chesneau est lui aussi en accord avec ce que nous avons vu précédemment. Cependant il ajoute qu'un équilibre entre UGC, influenceurs et création de contenus en interne est à trouver. De son côté, Séverine Dubois admet que l'utilisation d'UGC dilue de manière visuelle le storytelling, mais que celui-ci s'opère par l'apport de narration dans un second temps. A la différence, la cohérence visuelle est plus flagrante chez les influenceurs qui ont recours aux retouches via des logiciels adaptés, ce que les amateurs ne font qu'avec les fonctionnalités que les applications comme Instagram proposent. Claire et Arthur ( lesdroners) disent ne pas utiliser la retouche dans un but de tromper la communauté, mais bien pour «retranscrire ce qu'ils voient durant leurs voyages», expliquant également que «les couleurs des clichés sont plus fades que la réalité». Pour Sydney Chesneau, une patte visuelle est indispensable pour les destinations car elle ont besoin d'avoir un univers propre à elles correspondant à leur storytelling, à la manière de marques comme Burger King. Il ajoute également que la manière de s'exprimer via les descriptions des publications est importante. 36 Pour les professionnels, l'utilisation d'UGC empêche une certaine cohérence visuelle et par là donc la lecture du storytelling, même si celui-ci est relayé dans un second temps par l'apport de narration écrite. Ici encore, nous devons nous pencher sur la perception qu'en a la cible. Pour cela, dans un premier temps nous utiliserons l'analyse quantitative et, dans un second temps, nous regarderons les comportements des gens vis-à-vis des différents types de publication. L'avis des 18-34 ans Pour 72,5%, le principe d'utiliser des contenus produits par des fans (premier assemblage ci-dessous) est pertinent dans le sens où, pour eux, ce sont de véritables témoignages authentiques. Cependant, ils sont 55,1% à préférer visuellement les publications ayant une cohérence visuelle (deuxième assemblage ci-dessous). Ce pourcentage augmente à 60,5% chez ceux présents sur Instagram, réseau social où la photographie y a une place centrale. Utilisation d'UGC Création de contenu A la question « Trouvez-vous qu'utiliser du contenu produit par les internautes, et donc par là des photos de qualité et de visions différentes, permet une image forte ?» avec en illustration l'assemblage de comptes utilisant l'UGC (ci-dessus), ils sont 88,4% à trouver que ça ne le permet pas. 37 Cette étude permet donc de comprendre l'importance de la photographie dans l'image de la destination, mais il y a toutefois un attachement pour l'expérience des touristes ou locaux. L'étude de comportement Au cours de mes recherches, alors que je regardais diverses captures d'écran de comptes de destinations, je me suis aperçue que je confondais les publications de la région Paca avec celles du Morbihan, alors que ce sont pourtant deux destinations situées à l'opposé l'une de l'autre. J'ai donc décidé de comprendre pourquoi visuellement je n'arrivais pas à saisir leurs storytellings. Après plusieurs recherches, je me suis aperçue qu'en réalité les destinations avaient toutes le même type de photos avec les mêmes tonalités, propre à l'UGC. Voulant voir si ce n'était relatif qu'à ma vision, j'ai alors mis en place un test où je présentais plusieurs morceaux de comptes Instagram de destinations, composé de 9 photographies. Le but consistait à retrouver quels étaient les morceaux issus du même compte afin de voir si visuellement les destinations avaient une identité. Le résultat de ce test a permis de mettre en lumière que les comptes usant beaucoup d'UGC sont ceux dont les gens trouvent le moins de cohérence dans les publications. Si les résultats de certaines personnes sont relativement bons, nous devons noter que ce sont aussi ceux qui ont mis le plus de temps dans l'analyse. Les comptes ayant une logique visuelle sont aussi ceux qui ont été trouvés le plus facilement. Parmis eux nous retrouvons un influenceur, Vagabondiary, ayant une patte visuelle, il y a également les Îles Féroé qui font appel à des influenceurs sur des périodes de 6 à 9 photographies avec toujours le même esprit visuel et enfin Auvergne Rhône-Alpes qui prend le parti de ne mettre en avant que le même type de paysage. Chacun, à leur manière, arrive à se créer une identité visuelle, permettant également une meilleure lecture du storytelling. Ce test nous permet de comprendre que l'utilisation systématique d'UGC empêche la lecture visuelle de l'identité de la destination et par là donc de son storytelling. 38 Si l'UGC permet de créer un lien avec la communauté, il dilue de manière visuelle le storytelling de la destination. Une utilisation exclusive de contenus généré par les touristes ou locaux n'est au final qu'un assemblage de différents storytelling. Selon les professionnels équilibre entre UGC et production de contenu est donc à trouver. Confirmé par la suite via l'étude quantitative ainsi que l'étude de comportements. 39 |
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