5.1.8 2.2.1. La théorie de la
comparaison ou Relative Standards Theory
Les individus peuvent évaluer leur situation de vie en
faisant une comparaison entre les buts ou objectifs fixés et les
conditions vécues.
La théorie de la comparaison ou Relative Standards
Theory ou encore Discrepancy Theory s'explique en ces termes que nous
empruntons à Schyns (1998 : 5 et 7) :
« ...La théorie de la comparaison affirme
que le bonheur humain dépend de la comparaison entre des standards de
qualité de la vie et la perception des circonstances de vie. Les
standards de qualité de la vie dépendent de divers
développements macro-sociaux tandis que les circonstances de vie, dans
ce contexte, dépendent principalement de critères
économiques (...). En somme, la théorie de la comparaison stipule
que le bonheur est relatif. Un changement dans les conditions objectives de vie
ne se traduira pas nécessairement par un changement dans le niveau de
bonheur, soit parce que les standards de comparaison s'adaptent avec le temps
(Van Praag, Brickman), soit parce qu'à un moment donné le bonheur
du « riche » surpassera le bonheur du « pauvre »
(Easterlin). »
Dans le cadre de notre étude, la théorie de la
comparaison vient nous rappeler que la qualité de vie est un concept
complexe et relatif d'un individu à un autre. C'est-à-dire que
c'est par rapport à l'idéal de vie que chaque individu
bénéficiaire de la construction de la centrale à gaz de
Kribi s'est fixé à atteindre grâce à ce dernier que
nous devons aborder l'amélioration de la qualité de vie. Cela se
comprend au sens de Calman (1984) qui précise que la qualité de
vie mesure l'écart à une période précise, entre les
espoirs, les attentes de l'individu, et l'expérience individuelle
actuelle. Par exemple, un individu qui s'est fixé pour objectif de faire
partie des travailleurs de la centrale gaz pourra parler d'une qualité
de vie améliorée à son niveau s'il y travaille comme
employé et que le revenu de ce travail est proportionnel à ses
attentes selon ses critères de vie et lui permet de satisfaire ses
besoins ou encore de vivre au-dessus du seuil de pauvreté. Par contre un
autre habitant de la même localité travaillant aussi comme
employé dans ladite centrale pourrait avoir une opinion négative
en ce qui concerne l'amélioration de la qualité vie si le projet
est de son point de vue un élément pollueur source de
maladies.
5.1.9 2.2.2. La
théorie de la nature humaine ou des besoins hiérarchiques
développée par Abraham Harold Maslow
Abraham Harold Maslow (1908-1970) a d'abord été
enseignant de psychologie à l'Université du Wisconsin. Puis il a
fait un bref séjour en industrie (1947-1949) avant de revenir prendre un
poste à la Brandeis University du Massachusetts.
Sa théorie repose sur une hiérarchie des
besoins allant des premières nécessités physiologiques
à la réalisation de soi en passant par les besoins sociaux. En
effet, Maslow a réalisé, dans les années 1940, une
hiérarchisation des besoins (physiologiques, de sécurité,
d'appartenance, d'estime et de réalisation de soi) de l'homme sur un
principe pyramidal et établi le fait que sans réponse au premier
de ces besoins le suivant ne peut être envisagé et ainsi de suite.
Une fois satisfaits les besoins physiologiques fondamentaux (chaleur,
nourriture, sexualité), une fois garanti le besoin d'évoluer dans
un environnement sûr et structuré (offrant un abri, de la
protection, de la stabilité), les besoins supérieurs d'amour
(l'acceptation par les autres, l'affection), d'estime (le pouvoir, le prestige,
la responsabilité) et de réalisation du potentiel peuvent
être à leur tour satisfaits (Pierre Louart, 2002). Chez Maslow
donc, la réponse à un besoin en fait émerger d'autres
situés à des niveaux plus élevés. L'homme n'est pas
qu'instinctuel. Il y a des besoins supérieurs qui sont moins animaux,
moins tangibles, plus vastes. Bien que les besoins soient également
déterminés par les règles de la société dans
laquelle la personne vit, dans cette théorie l'accent est mis sur les
résultats, sur la façon dont les gens évaluent
différents aspects de leur vie. On croit en effet que les individus
évaluent positivement les aspects de leur vie qui sont satisfaits et
négativement ceux qui ne sont pas satisfaits. Cette théorie
précise également que « les besoins ont une structure
multidimensionnelle » ; c'est-à-dire' que d'un sujet
à un autre, le niveau de satisfaction de besoins n'est pas le
même. Ainsi, certaines catégories d'individus ignorent certains
niveaux.
L'assouvissement et l'accomplissement de ces différents
besoins participent donc à notre évolution personnelle et
constituent autant un moteur qu'un frein. C'est pourquoi on s'interroge souvent
sur les besoins que nous avons, nous les hommes, et auxquels nous devons, soit
répondre de façon impérative sous peine de
déchéance, soit auxquels la société doit
répondre pour nous, afin de nous permettre d'exister et de nous
épanouir en son sein.
La théorie implique que les conditions
économiques et culturelles sont hiérarchisées mais ont
toutes deux un impact sur le bien-être des personnes.
Maslow hiérarchise les besoins ainsi :
a) Besoins physiologiques : Ils sont
liés à la source ; ils se situent au premier niveau : se nourrir,
faire l'amour, se reproduire, dormir, respirer, se reposer, se vêtir.
Sans l'accomplissement de ces besoins de base, il n'y a pas, ou plus, de vie,
plus d'humanité, mais aussi plus de capacité de progression.
b) Besoins de sécurité :
Ils sont associés aux besoins généraux de se
protéger contre les menaces tant présentes que futures : le fait
de se sentir à l'abri des dangers, de pouvoir vivre sans peurs dans un
milieu structuré, ordonné, stable et prévisible, d'avoir
une vie ou une religion qui permet de donner un sens aux
évènements sont autant de façons de combler ces besoins.
Notre entourage social immédiat peut ou non générer un
sentiment d'insécurité. Si l'on considère
l'accomplissement du premier besoin comme générateur d'attentes
sociales, nous pouvons alors comprendre le besoin de sécurité
dans les étapes qui suivent l'évolution de l'homme.
c) Besoins d'existence et d'amour : Ils
se traduisent par le besoin d'aimer, de se sentir aimé, de donner et de
recevoir des marques d'estime d'affection, d'avoir des contacts intimes et
enrichissants avec un conjoint, des parents, des enfants, de faire partie du
groupe où l'on est accueilli à bras ouverts et de ne pas
être seul, oublié ou rejeté. Ils correspondent au besoin
d'appartenance. Ce besoin est fondamental et indispensable à notre
existence comme composant de notre être pensant et social. Il
découle naturellement de l'état de sécurité, mais
comporte les prémices de notre volonté d'émancipation,
d'autonomie, de liberté. Seuls, nous ne sommes rien.
d) Besoins de reconnaissance ou d'estime :
Ayant atteint, grâce à la satisfaction des trois besoins
inférieurs, un niveau d'humanité sociale, l'homme doit s'attacher
maintenant au développement de sa propre individualité, à
l'affirmation de sa personnalité. Les besoins de reconnaissance ou
d'estime représentent le besoin d'avoir une bonne estime de soi et des
autres. Selon Maslow, toute personne doit pouvoir évaluer ce qu'elle est
et ce qu'elle fait. De la part des autres, l'être humain recherche de
l'admiration et du respect. Le besoin d'avoir un certain statut social, une
bonne réputation et d'être félicité, reconnu et
apprécié par son entourage correspond au besoin d'estime. Ainsi,
en cherchant à gagner son autonomie et à garantir le maintien de
ses acquis sociaux, il rentre dans la phase de l'estime de soi.
e) Besoins d'actualisation : Ils sont
au sommet de la pyramide et généralement très peu de gens
arrivent à combler ce besoin. Selon la théorie, la satisfaction
de ce besoin ne peut survenir que lorsque tous les autres ont été
comblés. Pour un individu, les besoins d'actualisation correspondent aux
désirs que celui-ci peut avoir de se développer au maximum, de se
réaliser complètement, c'est-à-dire d'exploiter toute ses
potentialités et ses talents quels qu'ils soient : imagination -
aptitude psychologique - intelligence - habileté - capacités
diverses, etc., afin de croître, de grandir et de s'améliorer de
toutes les façons. Le besoin de créer et d'innover en est aussi
une manifestation. Un nombre croissant de personnes désirent utiliser
leur potentiel au maximum et avoir toute la latitude pour le faire.
Dans une représentation graphique cela donne une
structure pyramidale, d'où l'appellation de « Pyramide de Maslow
» que voici :
Besoins d'actualisation
Besoins de reconnaissance ou d'estime
Besoins d'existence et d'amour
Besoins de sécurité
Besoins physiologiques
Figure 1:
Pyramide de la hiérarchisation des besoins d'Abraham Harold Maslow
Source : Nkelzok Komtsindi
Valère(2017), psychologie de travail et organisationnelle.
Il faut préciser que ces travaux réalisés
par Abraham Maslow sont utilisés couramment par les acteurs du
développement humain (psychologues, travailleurs sociaux, animateurs,
parfois DRH, etc.). Pourtant, la hiérarchisation des besoins de Maslow a
été critiquée dans la mesure où un résultat
dans un certain niveau ne supprime pas le besoin correspondant.
« Un besoin peut changer de forme ou d'exigences quand il a
été satisfait. Par exemple, y répondre peut devenir un
dû ("j'y ai droit") là où il fallait des efforts ("j'ai
à le gagner"). Tout dépend des interprétations et des jeux
sociaux » (Louart, P., 2002). De leur côté, les
besoins physiologiques restent toujours latents, sortant de leur sommeil en cas
de manque (Korman et al., 1977). Néanmoins, il existe toujours une
hiérarchisation socialement aménagée. Pour un
échantillon de cadres à fonctions plus ou moins
élevées, Porter (1962) a montré que les besoins concernant
les rémunérations, la sécurité d'emploi et les
relations avec les subordonnés étaient assez bien satisfaits. A
contrario, les besoins d'estime et d'actualisation de soi étaient
d'autant mieux satisfaits que les fonctions occupées étaient
importantes. Mais s'agissait-il encore de besoins (qu'on peut rendre objectifs)
ou aurait-il mieux valu parler d'attentes (soumises aux jeux du désir et
de la subjectivité)? De plus, beaucoup de chercheurs ont expliqué
l'action individuelle par d'autres besoins que l'intérêt
matériel (par exemple, à travers l'identification sociale, les
appartenances collectives ou la logique du don et du contre-don). D'autres ont
mis l'accent sur le contexte social et la contingence des formes prises par les
besoins.
Dans le cadre de notre étude, la théorie de
Maslow n'est pas convoquée pour comprendre les motivations des personnes
au travail. Elle sert de grille d'analyse dans le sens de l'amélioration
de la qualité de vie des populations en zone rurale. En effet, la simple
présentation de la pyramide des besoins de Maslow permet d'entrevoir
comment fonctionne l'individu, mais également dans quel sens progressif
devraient se tourner nos sociétés (les acteurs du
développement et les bénéficiaires) et sur quels leviers
elles pourraient s'appuyer pour obtenir de meilleurs résultats en ce qui
concerne la qualité de vie. La théorie des besoins de Maslow a
donc le mérite de permettre une évaluation personnelle des
conditions de vie des personnes vivant en zone rurale à un moment
où le projet structurant (la centrale à gaz de Kribi) n'existait
pas en vue de voir si avec l'implantation de ce dernier, il y a eu une
amélioration.
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