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La protection juridique des droits de l’enfant en situation de conflit armé: l’exemple de la république centrafricaine


par Stephane YOUFEINA
Universite de Nantes en France - Master 2 en Droit International et Europeen des Droits Fondamentaux 2017
  

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Paragraphe1: La faiblesse des institutions gouvernementales

La difficile mise en oeuvre du programme national de désarmement démobilisation et réinsertion des enfants soldats (A) et la faiblesse du système judiciaire centrafricain (B) sont les faiblesses au niveau institutionnel pour la protection des droits de l'enfant.

A. La difficile mise en oeuvre du Programme National du Désarmement Démobilisation Réinsertion (DDR)

La sécurité ne saurait être garantie et le niveau de violations des droits de l'enfant ne saurait diminuer en Centrafrique si les groupes armés ne sont pas démobilisés et le nombre d'armes en circulation n'est pas réduit de manière drastique71(*). Il incombe donc aux autorités de mettre en place un programme cohérent de démobilisation et de désarmement des groupes armés et des milices. L'échec du processus du DDRR mise en place depuis 2016 traduit en réalité que les enfants en situation de conflit armé en Centrafrique ne sont pas au bout de leur souffrance. La Commission Nationale du DDRR en faveur des enfants recrutés et utilisés durant le conflit armé depuis 2016 sous les auspices de la Présidence de la République est une structure nationale du Gouvernement pour la protection des enfants soldats en Centrafrique72(*). La Commission Nationale devant piloter le programme DDRR a été mis en place, mais n'a pas fonctionné jusqu'à ce jour. En juin 2018, 3000 enfants avaient été démobilisés des groupes armés sans avoir reçu un accompagnement du gouvernement tel que prévu dans le document stratégique qui est financés par les bailleurs. Les enfants, pour la plupart, qui ont pris part au programme sont retournés dans les plantations pour travailler afin de subvenir à leurs besoins et près de 300 enfants sont retournés à l'école avec l'appui de leurs parents. 1800 enfants soldats ont reçu une formation à un métier73(*) grâce à l'appui de la Minusca. En avril 2018, selon les informations recueillies du bureau de la Commission de Désarmement et de Réintégration, le Gouvernement, dans le cadre de la démobilisation, a ressemblé plusieurs centaines de combattants Anti Balaka dans un centre dénommé : « Don Bosco » dans la capitale. Depuis mars2018 la démobilisation de 500 enfants soldats musulmans retirés des rangs des seleka était en cours jusqu'à ce jour. Pour certains enfants, des efforts continuent d'être faits pour les parents de ces victimes. On note à ce jour 700 enfants réinsérés depuis 201674(*). Notons que ce n'est pas la première commission de DDR qui est mise en place dans le pays. Le président Ange Felix Patassé a mis en place une commission de DDR en 1996 qui n'a jamais abouti. Le président François BOZIZE a mis en place deux commissions nationales du DDR respectivement en 2004 et encore en 2010 mais ces deux commissions n'ont jamais fini leurs missions. Ces différentes commissions ont échoué par rapport au phénomène de détournement de fonds alloués aux activités que les bénéficiaires n'ont jamais reçu. En novembre 2018, certains membre de la commission actuelle du DDR ont démissionné et ont accusé le coordonnateur d'avoir détourné l'argent du DDR. Neufs des quatorze représentants des groupes armés ont aussi quitté la commission pour le même motif.

B. Les systèmes judiciaire et pénitentiaire non opérationnels

L'International légal Assistance Consortium (ILAC) a conduit une évaluation du système judiciaire de la République Centrafricaine en octobre 2016. Elle a rendu officiel le rapport de l'enquête et les recommandations applicables. En effet, d'après le rapport de l'évaluation,l'arrivée au pouvoir de l'ex-Séléka a été accompagnée de nombreuses exactions qui, entre autres, ont affecté le fonctionnement du système judiciaire. À Bambari (préfecture de l'Ouaka) par exemple, le chef local de l'ex-Séléka occupait la résidence du président de la cour d'appel. Le climat d'insécurité qui a résulté des actions de l'ex-Séléka a poussé les magistrats à quitter leurs lieux d'affectation dans des provinces pour aller se réfugier à Bangui. En novembre 2013, une grande partie de ces magistrats étaient encore dans la capitale. Pourtant, l'insécurité a fini par gagner Bangui; le 16 novembre 2013, le magistrat Modeste Martineau Bria, directeur général des services judiciaires, et son aide de camp ont été abattus par des individus non identifiés.

Le pillage systématique et généralisé ainsi que les destructions de biens perpétrés par l'ex-Séléka n'ont pas épargné les systèmes judiciaire et pénitentiaire. L'état des lieux des infrastructures et équipements des systèmes judiciaire et pénitentiaire dressé en août 2013 par le Ministère de la justice est particulièrement instructif. Tribunaux, prisons, maisons d'arrêt, résidences du personnel ont été pillés et saccagés. Selon la Direction de l'administration pénitentiaire, sur 38 établissements pénitentiaires, quatre étaient encore fonctionnels à Bangui, Bimbo, Berberati et Bouar. Au cours de l'attaque menée le 5 décembre 2013 par les anti-Balaka contre les ex-Séléka à Bangui, la prison de Ngaragba a été pillée et saccagée, et les détenus ont été libérés75(*).

* 71FROUVILLE (O. de), L'intangibilité des droits de l'homme en droit international. Régime conventionnel des droits de l'homme et droit des traités, Paris, A. Pedone, 2004, p.107

* 72M. MAYSTRE«Les enfants soldats en droit international, problématique contemporaine au regard du droit international humanitaire et du droit international pénal», Paris, Pedone, 2010, p.41-43.

* 73Victoria Madonna, Fondation pour la recherche stratégique, « De la reconstruction à la réconciliation nationale?: « les défis de la sortie de crise centrafricaine », note du 25 novembre 2015. Publié le 25 juillet 2017 sur le site: https://www.frstrategie.org/publications/notes/de-la-reconstruction-a-la-reconciliation-nationale-les-defis-de-la-sortie-de-crise-centrafricaine consulté le 29 juin 2018

* 74Roland Marchal, « Premières leçons d'une « ?drôle? » de transition en République centrafricaine », Politique africaine, no 139 (29 décembre 2015).

* 75 Rapport de l'International Legal Assistance Consortium (ILAC) sur le système judiciaire de la République Centrafricaine publié en octobre 2016 sur le site: http://www.ilacnet.org

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