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Vulnerabilité sociale des ménages liée au paludisme dans la ville de Yaoundé: une approche spatiale


par Cherif BECHIR BEN
Université de Yaoundé I - Master professionnel 2018
  

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CHAPITRE II : SOLUTIONS GEOMATIQUES ET PALUDISME: ETAT

DE L'ART

Introduction

Le discours sur le paludisme dans le monde a fait et continue de faire l'objet d'une curiosité scientifique. Cet engouement vis à vis des maladies tropicales est à l'origine d'une littérature abondante et variée. En effet, l'analyse des relations entre la vulnérabilité, l'occupation des bas-fonds et le paludisme en milieu urbain nous contraint à nous pencher d'abord sur les liens qui existent entre le milieu de vie de l'homme et la qualité de sa santé, ensuite aux facteurs à risques liés au paludisme et enfin aux différentes stratégies exogènes et endogènes de lutte contre le paludisme.

2-1. DIFFERENTS FACTEURS ASSOCIES AU PALUDISME 2-1-1. Paludisme et statut socioéconomique

Le paludisme est généralement associé à la pauvreté (Worrall E, Basu S, Hanson K. Sonko ST, Jaiteh M, Jafal D'Alessandro U, Camara A, et al.). Au niveau mondial, le paludisme est principalement localisé dans les pays en développement. Au sein de ces pays, la maladie sévit de manière plus importante en milieu rural ( Zoungrana A, Chou Y-J, Pu C.). Certaines études, en se référant au cadre global de l'interrelation entre la pauvreté et la santé, évoquent l'idée de la dualité de relation entre la pauvreté et le paludisme ( Somi MF, Butler JR, Vahid F). Le paludisme et la pauvreté forment un cercle vicieux qui aggrave les inégalités sociales de santé et les inégalités de niveau de vie (Somi MF, Butler JR, Vahid F et Tusting LS, Willey B, Lucas H,).

Les pays développés ayant réussi l'élimination du paludisme ont mis l'accent sur le développement socioéconomique et l'amélioration du cadre de vie des populations. À côté des interventions antipaludiques traditionnelles, certains auteurs suggèrent d'agir aussi sur les déterminants sociaux de la maladie ( Sonko ST, Jaiteh M, Jafali J, Jarju L, et Obaldia N.). L'analyse du lien entre le paludisme et la pauvreté permet la conception des interventions cohérentes et efficaces permettant de réduire simultanément le paludisme et la pauvreté.

Par ailleurs, si dans la littérature les auteurs s'accordent à dire que l'élimination du paludisme passe par une approche multisectorielle (Obaldia N.), le lien entre le statut socioéconomique et le paludisme est complexe et diversement interprété.

2-1-2. Paludisme et comportement des populations

Pour Trape J. et Rogier (1996) cité par Gantcho S. E. (2004), la recrudescence du paludisme est liée aux comportements adoptés par la population pour la prévention et le traitement de la maladie. C'est l'utilisation anarchique des médicaments anti-palustres qui serait à l'origine de l'émergence de certaines formes de résistances aux antipaludique et due à la persistance de l'endémie. Ils pensent aussi que le recourt tardif des malades au dispensaire ou à l'hôpital, la primauté qu'ils accordent à l'automédication et parfois à la tradi-thérapie, la non survie du traitement et les changements d'itinéraires thérapeutique à contre temps qui sont à l'origine de l'émergence du paludisme.

2-1-3. Paludisme et situation géographique

Trape J. F. (1986) pense que le paludisme en milieu urbain appartient aux fronts d'urbanisation et quartiers d'urbanisation récente à haute densité de population, zones directement riveraines des espaces à vocation maraîchère préservée, zones industrielles et leur périphérie immédiate.

Dans une étude sur l'exploitation des bas-fonds et la transmission du paludisme en milieu urbain réalisée par Adja A. M. et al (2008), à Abidjan, les résultats ont montré que les populations vivant à la périphérie sont trois fois plus exposées au paludisme que celle vivant au centre de la ville. Ils pensent par ailleurs que cette forme de propagation est due en partie par l'exploitation des bas-fonds qui offrent facilement des gîtes favorables au développement des agents vecteurs du paludisme. D'après le site http/paludisme.htm (20 janvier 2011), le paludisme résiste aujourd'hui plus dans les pays tropicaux et subtropicaux, notamment en Afrique subsaharienne, Asie du Sud-est. De même, la construction des systèmes d'irrigation et ses réservoirs dans certaines pentes du monde peuvent avoir un grave impact sur la distribution du paludisme et sur l'intensité de sa transmission. Ainsi, l'OMS estime que la principale charge de morbidité due au paludisme (90%) est située en Afrique subsaharienne avec un nombre estimé de décès dépassant un million par an. Dans la même lancée, le Réseau Sida Afrique (2007) dans une étude menée sur la cartographie de la lutte contre le paludisme au Cameroun, nous montre la liste des ONG/associations de coordination ainsi que leur répartition sur le territoire nationale pour une meilleure mise en oeuvre du PNLP.

2-2. DIFFERENTES APPROCHES D'ANALYSE DE LA VULNERABILITE 2-2-1. Vulnérabilité et risque

Le concept de vulnérabilité a sa propre histoire dans des disciplines et champs spécifiques. En médecine et épidémiologie, il se réfère souvent à des processus biologiques et physiologiques, mais en raison de la transition de la santé (ou du risque) cette compréhension s'est élargie pour inclure les aspects sociaux et économiques, par exemple dans la recherche sur le SIDA (Delor et Hubert, 2000) et sur d'autres maladies liées à la pauvreté telles que la tuberculose et la malaria (Bates et coll., 2004a; Bates et coll., 2004b). La définition de la vulnérabilité de Chambers a été largement citée, et son approche continue à stimuler la recherche, à la fois dans le champ académique et dans les champs appliqués, en particulier dans les études sur le développement, la sécurité et la globalisation (Bohle, 2001; Watts and Bohle 1993; Watts, 2002; Krüger et Macamo, 2003). En ce qui concerne la recherche sur la santé, cela fournit clairement une nouvelle perspective pour examiner les liens complexes entre la santé et la pauvreté. Dans cette perspective, la vulnérabilité va bien au-delà des dispositions physiques et mentales et doit être étudiée en référence aux dimensions sociales et économiques qui façonnent le « livelihood » des personnes.

Au cours des décennies passées, de nombreuses études épidémiologiques ont été menées pour décrire l'étendue, la nature et la distribution des problèmes de santé des populations urbaines et pour mesurer l'impact sur la santé de nombreux facteurs (Satterthwaite, 1993; Harpham et Tanner, 1995; Atkinson et coll., 1996; Harpham et Molyneux, 2001; Mc Granahan et coll., 2001). Les risques urbains de santé varient entre les aspects tangibles de l'environnement physique (tels que la qualité de l'eau et de l'habitat, la disposition des déchets et la qualité du sol) et une synergie complexe de facteurs de risques physiques et sociaux, de stress chronique, et à court terme, de blessures et de violence.

Ces études se centrent généralement autour du concept de risque. Elles décrivent qualitativement et analysent quantitativement les facteurs de risque pour fournir une base à la planification basée sur des éléments tangibles et les interventions de santé. Ces interventions sont souvent avantageuses en termes de coût, mais font face au problème de la conformité si les risques sont mesurés et les interventions formulées sans inclure le point de vue des bénéficiaires visés.

2-2-2. Vulnérabilité urbaine

Moser (1998) a appliqué l'approche de Chambers à l'étude de la vulnérabilité urbaine dans le contexte des livelihoods urbains, en particulier dans les villes affectées par des crises macroéconomiques. Elle définit la vulnérabilité comme «insécurité et sensitivité dans le bien-être des individus, des ménages et des communautés face à un environnement changeant, et implicitement, leur capacité de réponse et la résilience aux risques qu'ils affrontent durant de tels changements négatifs.» (Moser, 1998).

L'approche de Moser (1998) identifie trois grandes caractéristiques de la vulnérabilité urbaine: la marchandisation, les aléas environnementaux, et la fragmentation sociale. La marchandisation se réfère au fait que dans l'économie urbaine, un abri, la nourriture, l'eau et de nombreux autres biens et services constituent des marchandises. Les gens ont besoin d'argent pour les payer. On pourrait dire que plus leur niveau de revenu est bas, plus ils ont de difficultés à obtenir l'accès aux nécessités de base, et plus haut est leur risque de destitution. Les aléas environnementaux principaux que Moser mentionne sont la faible qualité de l'habitat et l'approvisionnement inadéquat en eau, en systèmes d'égouts et de traitement des déchets solides. En ce qui concerne la fragmentation sociale, Moser signale qu'une plus grande hétérogénéité sociale et économique peut affaiblir la communauté et les mécanismes de confiance et de collaboration internes au ménage, spécialement dans des conditions de difficulté économique.

L'approche de Moser fournit donc un cadre pour examiner divers aspects du cercle vicieux de la pauvreté et de la santé: les pauvres sont plus exposés au risque de santé, et non seulement cela les rend plus faibles physiquement, mais cela épuise également leurs ressources, réduit leur productivité et ainsi les pousse d'autant plus vers la pauvreté.

Nous vivons dans un monde qui s'urbanise rapidement. Pour la première fois dans l'histoire, le monde aura bientôt plus de résidents urbains que ruraux (ONU, 2004). En Europe, Amérique du Nord, Amérique du Sud et Caraïbes, une majorité vit déjà dans les espaces urbains. En Afrique et en Asie, les niveaux d'urbanisation sont plus bas, mais ils les rattrapent rapidement. La croissance urbaine en Afrique s'est produite essentiellement au cours des cinquante dernières années, passant d'environ 32 millions en 1950 à plus de 350 millions en 2005. La vitesse et l'échelle de cette croissance posent de formidables défis à la région et aux différents pays.

L'urbanisation influence clairement de nombreux aspects de la santé et du bien-être des gens (Galea et coll., 2005,): ce qu'ils mangent, l'air qu'ils respirent et l'eau qu'ils boivent, où ils travaillent, l'habitat qui les abrite, les arrangements familiaux, où ils se rendent pour les soins de santé, le danger qu'ils rencontrent dans la rue, et qui est disponible pour le soutien pratique, émotionnel et financier. L'urbanisation ne constitue pas forcément une menace pour la santé, comme le montre l'expérience de nombreuses villes dans des pays riches. Toutefois, si la croissance urbaine rapide se combine avec le déclin économique, la mauvaise gestion et/ou les troubles politiques, les administrations des villes ne sont plus capables de protéger les habitants des aléas naturels et humains, incluant les effets négatifs de la globalisation (Tabibzadeh et coll., 1989). C'est le cas dans de nombreuses villes africaines où environ 50 pour cent de la population vit dans des bidonvilles, manifestation physique et spatiale de la pauvreté urbaine et de l'inégalité intra-ville caractérisée par un habitat de moindre qualité ou informel, le manque d'accès aux services de base, la pauvreté et l'insécurité (ONU-Habitat, 2003).

2-3. CONTRIBUTION DE LA GEOMATIQUE A LA SANTE PUBLIQUE

La géomatique avec son approche systémique et ses méthodes d'analyses spatiale et temporelle joue de plus en plus un rôle clé d'interface entre l'environnement, la santé et l'épidémiologie.

C'est au début des années 70 qu'un ingénieur géographe employa pour la première fois le mot « géomatique » pour faire allusion au mariage des sciences de l'étude et des mesures de la Terre avec l'informatique. De nos jours, la géomatique est définie comme étant un champ d'activités qui a pour but d'intégrer les moyens d'acquisition et de gestion des données à référence spatiale en vue d'aboutir à une information d'aide à la décision, dans un cadre systémique. La notion de système explique la prise en compte de tout ce qui concourt à la réalisation d'un projet de géomatique : les données, les équipements, les logiciels, les spécialistes, le cadre physique de travail ainsi que les procédures qui les coordonnent.

Des expressions synonymes du mot géomatiques sont utilisées dans d'autres langues; c'est le cas de l'anglais avec l'expression « Geographic Information System (GIS) » qui est souvent traduite en français par « Système d'Information Géographique (SIG)». Depuis la fin des années 90, les scientifiques utilisent de plus en plus l'expression « science de l'information géographique » pour éviter la confusion dans la désignation du domaine de la géomatique et des logiciels qui supportent cette dernière.

Si la géomatique s'adresse avant tout à des objets relativement à leur position sur la Terre, les scientifiques, par abus de langages, intègrent dans son champ, d'autres activités traitant d'objets dont la référence n'est pas notre planète : c'est le cas entre autre de certaines applications médicales où la référence est l'être humain.

2-3-1. Liens complexe entre la santé, l'environnement humain et physique (Territoire)

Les interactions entre l'environnement et la santé publique se situent à plusieurs niveaux. Avec le développement industriel, les espaces ouverts ont pris du recul; les substances chimiques potentiellement toxiques sont plus rependues et la pollution complexe change le climat global.

Comment peut-on contribuer à la recherche de cette situation globale en mettant l'accent sur les interactions entre les phénomènes multiples suivants: la description des patrons spatiaux de la mortalité et de la morbidité, les facteurs socio-environnementaux associés à ces patrons, l'étiologie et la diffusion d'une maladie, la distribution spatiale, la diffusion et la régionalisation des ressources dédiées à la santé, l'accessibilité et l'utilisation des ressources relatives à la distribution d'un service sanitaire particulier, les espaces spatiaux et temporels des interactions entre la maladie et la disponibilité et l'offre des soins de santé (Quénel, 1995)?

C'est à cette que les géomaticiens en collaboration avec les géographes et les spécialistes de la santé publique tente d'apporter des éléments de solution efficaces et robustes. Les effets environnementaux et de santé ont un point commun : ils s'articulent dans l'espace et sur le territoire et peuvent donc être analysés et gérés à l'aide des outils de la géomatique : télédétection, cartographie, SIG, modélisation. Mais ces outils, qui relèvent de la haute technologie, ne sont pas toujours utilisés au mieux de leurs possibilités. En effet, un rapport de l'OMS (1999) met en évidence le fait que l'analyse spatiale et la cartographie appliquée à l'épidémiologie sont connues depuis longtemps mais jusqu'à une époque récente leur utilisation en santé publique est restée limiter. En guise d'exemple, citons Wartenberg et al. (1993) et Stallones et al. (1992) qui ont intégrés des méthodes de surveillance d'épidémiologie dans les SIG pour identifier les personnes à risque dans le voisinage des lignes hydroélectriques de haute tension pour les premiers et aux abords de sites d'enfouissement des matières dangereuses pour les seconds.

2-3-2 Cartographie du risque de paludisme entre 1900 et 1960

La science et l'application de la cartographie du risque de paludisme en Afrique connaît une longue histoire sur le continent. Seulement quelques années après la découverte par Sir Ronald Ross du rôle joué le vecteur-moustique, ont commencé à être développées des cartes

détaillées des zones de reproduction des moustiques par rapport aux lieux d'habitat humain pour la ville de Freetown en Sierra Leone. Rassembler les connaissances cartographiques des hôtes humains par rapport aux lieux de reproduction des moustiques, à la topographie, au climat et à l'agriculture était crucial pour les efforts précoces de lutte contre le paludisme en Algérie, au Maroc et dans les centres européens de commerce et d'administration établis, dont la Guinée, le Burkina Faso, le Malawi et la Tanzanie (Le Lannou 1936). Ces cartes fournissaient aux agences de lutte une opportunité de planifier le contrôle des larves, la gestion de l'environnement, l'administration massive des médicaments ainsi que les réponses douteuses et non éprouvées telles que la ségrégation raciale.

La portée globale et les risques posés par le paludisme ont été cartographiés pendant les années 1930 (Le Lannou 1936). Cependant, les informations utilisées pour développés ces cartes n'ont jamais été documentées et l'on peut même présumer qu'elles étaient largement qualitatives, des avis experts sur la graduation des zones en partant des zones exemptes de paludisme aux zones à faible et forte « endémicité ».

Au début de la Seconde Guerre mondiale, l'armée américaine commençait à développer des cartes mondiales de risques de maladies, dont le paludisme, en préparation aux engagements militaires à l'étranger. Cela a résulté en un atlas, Global epidemiology: a geography of disease and sanitation (Epidémiologie mondiale: géographie des maladies et des installations sanitaires), publié en 1944 (Sergent E. 1905). À partir des années 1950, de nombreuses représentations cartographiques de la répartition mondiale du paludisme ont été développées par des paludologues et la toute nouvelle Organisation mondiale de la santé (OMS) (Douglas M. 1985). Après la Seconde Guerre mondiale, George Macdonald offrait la carte la plus précise en matière de risque de paludisme dans le monde, fondée sur la répartition des vecteurs formant 12 éco-zones zoographiques faiblement connectées à ses concepts de stabilité (Douglas M. 1985).

2-3-3. La renaissance de la cartographie du risque de paludisme au cours des années 1990

En 1996, une collaboration panafricaine a vu le jour pour faire renaître la cartographie du paludisme. Le Mapping Malaria Risk in Africa/Atlas du Risque de la Malaria en Afrique (MARA/ARMA) a débuté comme collaboration entre les instituts africains de recherche pour rassembler un recueil de données disponibles déjà publiées ou pas sur la prévalence de l'infection paludique, les espèces vectrices de paludisme dominantes des complexes An. gambiae et An. funestus, les taux d'inoculation entomologique et le taux d'incidence. Les recherches ont été menées dans des bibliothèques nationales de recherche et à partir de

matériel publié en utilisant cinq noyaux régionaux. En 1998, la collaboration avait regroupé des informations sur la prévalence des parasites dans 2529 lieux d'enquête entreprises entre 1926. En 2001, le financement de la première phase de ce projet africain a pris fin. En 2006, l'Institut tropical et de santé publique Suisse, à Bâle, a continué de recueillir environ 13 000 données d'enquête sur la prévalence du parasite (OMS 2010).

La phase initiale de la collaboration MARA/AMRA a fourni de nombreux résultats importants qui ont commencé à modeler la valeur attachée à la cartographie du risque de paludisme après avoir été négligé en Afrique pendant de nombreuses années. Premièrement, la collaboration a recueilli des informations sur la prévalence du parasite à partir d'une grande variété de sources d'archives nationales, ce qui n'avait pas été le cas depuis plus de 30 ans. Cela a permis de mettre en lumière une richesse d'informations disponibles dans les bibliothèques nationales et ministères de la santé à travers le continent africain. 64% de l'ensemble des informations disponibles ont été recueillies auprès de ministères de la santé ou de rapports non publiés (Dubois R. 1973).

Deuxièmement, alors qu'elles ne sont pas basées sur des données empiriques, de nombreuses données climatiques basées sur des modèles de répartition du paludisme et la saisonnalité de la transmission du paludisme (Dubois R. 1973) ont été développées. Ces cartes peuvent encore être trouvées dans les bureaux des Programmes nationaux de lutte contre le paludisme et sont souvent utilisé pour illustrer les risques paludiques dans les stratégies nationales, les demandes auprès des bailleurs de fonds et les examens des programmes. Cependant, malgré le fait que la carte relativement floue sur les conditions climatiques favorables à la transmission stable du paludisme P. falciparum a été une étape importante de la cartographie du paludisme en Afrique, elle demeure largement mal interprétée. En effet, elle représente une mesure de la probabilité que la transmission stable peut avoir lieu, plutôt qu'une échelle d'intensité de la transmission, comme cela est souvent présumée dans les programmes nationaux.

Les avancées informatiques, les systèmes d'informations géographiques, les données satellites dans des procédés de télédétection sur le climat et l'écologie et le développement de méthodes géostatistiques basées sur un modèle (MBG) (OMS, 1999) ont révolutionné la cartographie des maladies infectieuses (Dubois R. 1973), en particulier le paludisme. L'unique avantage du MBG dans la cartographie des maladies est la gestion des incertitudes. L'interpolation de données d'enquêtes rares et souvent mal échantillonnées afin de prédire la prévalence d'une maladie dans de grandes régions donne lieu à des cartes de risques d'une précision intrinsèquement variable, avec le niveau d'incertitude variant spatialement en fonction de la

Pour pallier à ces contraintes, nous suggérons une solution globale avec sur la collaboration entre géographes, épidémiologistes et géomaticiens. Pour ce faire, le géomaticien doit

densité, de la qualité et de la taille de l'échantillon de données disponibles, et modéré par la variabilité spatiale sous-jacente de la maladie en question.

2-3-4. Epidémiologies et géomatique

L'épidémiologie étudie la distribution spatiale d'une maladie ou d'une condition psychologique de la population et les facteurs qui influencent cette distribution. Un exemple classique est celui de John Snow en 1854. Les connaissances des variations géographiques et des migrations de population contribuent à la découverte des facteurs de risques dans de nombreuses maladies : le lymphome de Burkitt en Afrique et le virus Epstein-Barr, les immigrants japonais aux Etats-Unis et le cancer gastrique. Les grands centres urbains et certains modes de vie sont à la base de risques pour des maladies comme le SIDA.

L'introduction des outils de géomatique dans la pratique de l'épidémiologie doit surmonter un certain nombre de contraintes pour atteindre les objectifs souhaités. En effet, les méthodes épidémiologiques actuelles ne sont pas capables d'utiliser ou de synthétiser les données distinctes provenant de petites unités géographiques d'une façon statistiquement acceptable, comme peuvent le faire aisément les SIG (Mott et al., 1995). La technologie de géomatique permet mieux que tout autre outil de faire ressortir les tendances, les corrélations et les interrelations entre environnement et santé, et de ce fait, elle constitue un excellent moyen de visualiser et d'analyser les données épidémiologiques (OMS, 1999). Les contraintes à surmonter sont les suivantes (Richards et Croner, 1999):

- La difficulté de production et la rareté des données géo-référencées utiles à l'épidémiologiste (handicap non négligeable).

- L'interprétation des phénomènes épidémiologiques en fonction de l'échelle spatiale des données: le non spécialiste de la manipulation des DRS se trouve confronté au problème de gestion des détails et de la généralisation de l'information; avec des données numériques et la cartographies assistée par ordinateur (CAO), les effets de ce problème pourraient être réduis mais encore faut-il offrir à des coûts raisonnables ce genre de produit.

- Parce que les SIG sont puissants dans l'intégration ou la fusion des données de sources de données et d'échelles diverses, le praticien peut être tenté de sauter rapidement aux conclusions quant à l'interprétation et l'utilisation des résultats. Il peut courir ainsi le risque de la « technology push ».

comprendre et savoir appliquer les principes de bases de l'épidémiologie qui se résument en termes de : analyse des besoins, formulation des questions et spécification des indicateurs correspondant aux réponses anticipées. Synthèse des hypothèses de travail, relation entre les causes et les effets (dualité Environnement-maladie) qualité des données, formulation et représentation des informations d'aide à décisions. Quant à l'épidémiologiste et aux géographes de la santé, ils doivent s'initier aux sciences des technologies de la géomatique, l'appréciation des mesures et images (GPS et de Télédétection). Interprétation des informations produites à l'aide des outils de la CAO. Traitement d'images et de SIG, c'est seulement dans ce cadre que l'on pourra profiter des retombées du mariage entre épidémiologie et géomatique, compte tenu de l'hyper spécialisation de systèmes de formation actuel.

Les exemples de pathologies présentées ci-dessous ont un point commun : elles se transmettent à l'être humain à partir des vecteurs vivants dans son milieu environnant. C'est pourquoi il faut souligner la nécessité d'une collaboration entre les zoologistes, les vétérinaires, les agents de santé publique, les géographes de la santé, les technologues de l'information à référence spatiale.

Mott et al. (1995) ont mis en évidence la contribution de la géomatique à la compréhension des facteurs environnementaux qui influence les distributions de certaines maladies telles que la maladie de Chagas. La schistosomiase, la leishmaniose et des infestations par les trématodes. La maladie de Chagas de plus en plus présente dans les zones urbaines et périurbaines, voit son mode transmission par le biais des produits sanguins s'accroitre rapidement. Aussi peut-on comprendre l'urgence de pouvoir bien retracer son évolution ?

Dans le cas de la Leishmaniose, l'analyse spatiale, bien peu démonstrative dans la mise en relief du bien rural entre les observations environnementales et épidémiologiques a permis de mettre en évidence l'efficacité des mesures de lutte standard axées sur des considérations géographiques. Connor et al (1996) ont utilisé les SIG dans l'identification et le contrôle des facteurs environnementaux associés à la transmission des maladies liées aux agents vecteurs. Leurs travaux sur le lalebansese dans le sud du Soudan, ont permis d'identifier et de définir les sites accessibles de favoriser la survie de l'agent vecteur dans les régions forestières peuplées essentiellement d'acnés. Ils ont abouti à des cartes de distribution spatiale de l'agent vecteur et par conséquent de l'évolution spatiale de la maladie.

2-4. PALUDISME ET ETAT DES LIEUX DE CETTE ENDEMIE AU CAMEROUN

Le paludisme (malaria en anglais) est une maladie infectieuse due à un parasite du genre Plasmodium. Le parasite est transmis à l'homme par une piqûre de moustique infecté du genre Anophèles. Le Rapport sur le paludisme dans le monde, publié en décembre 2016 par l'OMS, rappelle que près de la moitié de la population mondiale a été exposée au risque de contracter le paludisme en 2015 dans 91 pays, qu'on a compté 212 millions de cas de paludisme et 429 000 décès. Mais le Rapport souligne qu'entre 2010 et 2015, l'incidence du paludisme a reculé de 21% au niveau mondial et que le taux de mortalité a baissé de 29%. On estime que 6,8 millions de décès dus au paludisme ont été évités depuis 2001.

2-4-1. Généralités sur le paludisme

Dans la plupart des cas, le paludisme est transmis par les piqûres d'Anophèles femelles (voir figure 1). Il existe plus de 400 espèces moustiques différentes de moustique Anophèles, dont une trentaine sont des vecteurs très importants du paludisme. Toutes les espèces importantes vectrices du paludisme piquent entre le crépuscule et l'aube. L'intensité de la transmission dépend de facteurs liés au parasite, au vecteur, à l'hôte humain et à l'environnement.

Les larves d'anophèles se développent dans des collections d'eau naturelles ou d'origine anthropique de tailles variables. Le cycle de vie des anophèles comporte quatre stades successifs : l'oeuf, la larve, la nymphe et l'adulte (figure 1). Les trois premiers stades se déroulent au-dessous de la surface de l'eau, et le dernier stade est aérien.

Figure 1: Le cycle biologique des anophèles (Source: OMS)

Les Anophèles pondent leurs oeufs dans l'eau. Ces oeufs éclosent en larves puis deviennent des moustiques adultes. Les moustiques femelles recherchent un repas sanguin pour nourrir leurs oeufs. Chaque espèce a ses préférences; certaines par exemple préfèrent l'eau douce de faible profondeur comme celle des flaques et celle présente dans les empreintes laissées par les sabots d'animaux, que l'on trouve en abondance pendant la saison des pluies dans les pays tropicaux.

La transmission est plus intense aux endroits où les espèces de moustiques ont une durée de vie relativement longue (ce qui permet au parasite d'achever son cycle de développement à l'intérieur du moustique) et piquent plutôt les êtres humains que les animaux. La longue durée de vie et la forte préférence pour l'homme des espèces africaines de vecteurs expliquent que près de 90% des cas de paludisme surviennent en Afrique.

La transmission dépend aussi des conditions climatiques qui peuvent influer sur l'abondance et la survie des moustiques, telles que le régime des précipitations, la température et l'humidité. À beaucoup d'endroits, la transmission est saisonnière avec un pic pendant ou juste après la saison des pluies.

En 2015, près de la moitié de la population mondiale était exposé au risque de contracter le paludisme. La plupart des cas de paludisme et des décès dus à cette maladie surviennent en

Afrique subsaharienne. Toutefois, l'Asie du Sud-Est, l'Amérique latine et le Moyen-Orient sont également affectés. En 2016, 91 pays étaient confrontés à une transmission continue du paludisme selon le rapport annuel de l'OMS.

Certains groupes de la population courent un risque beaucoup plus élevé que d'autres de contracter le paludisme et d'être gravement atteints: les nourrissons, les enfants de moins de 5 ans, les femmes enceintes, les personnes atteintes du sida, les migrants non immunisés, les populations itinérantes et les voyageurs. Les programmes nationaux de lutte contre le paludisme doivent prendre des mesures particulières pour protéger ces groupes du paludisme, en tenant compte de leur situation.

Selon les dernières estimations de l'OMS, publiées en décembre 2016, on a compté en 2015, 212 millions de cas de paludisme et 429 000 décès. Entre 2010 et 2015, l'incidence du paludisme a reculé chez les populations exposées de 21% au niveau mondial tandis que le taux de mortalité a baissé de 29%. On estime que 6,8 millions de décès dus au paludisme ont été évités dans le monde depuis 2001.

La Région OMS de l'Afrique supporte une part disproportionnée de la charge mondiale du paludisme. En 2015, 90% des cas de paludisme et 92% des décès dus à cette maladie sont survenus dans cette région. 76% des cas de paludisme et 75% des décès dus à cette maladie surviennent dans 13 pays principalement en Afrique subsaharienne. Entre 2010 et 2015, le taux de mortalité chez les enfants de moins de 5 ans a baissé de 29% au niveau mondial. Toutefois, le paludisme demeure toujours un facteur majeur de mortalité chez les enfants de moins de cinq ans et un enfant en meurt toutes les deux minutes.

La lutte antivectorielle est un élément essentiel de la prévention du paludisme. Lorsque la couverture est suffisamment large, la lutte antivectorielle permet de réduire ou d'interrompre efficacement la transmission du paludisme. Les deux mesures de base, largement applicables, pour protéger l'homme contre les piqûres de moustiques vecteurs du paludisme sont les moustiquaires à imprégnation durable (MID) et la pulvérisation intradomiciliaire (PID). Dans des endroits donnés et dans des circonstances particulières, ces interventions de base contre les vecteurs (les MID et la PID) peuvent être complétées par d'autres méthodes telles que :

- La gestion des gîtes larvaires (modification ou manipulation de l'habitat, traitements larvicides et lutte biologique) ;

- La pulvérisation intradomiciliaire (PID) ;

- Les mesures de protection individuelle.

L'OMS recommande d'assurer une lutte antivectorielle efficace pour protéger toutes les populations exposées au risque de contracter le paludisme. Plusieurs formes de lutte antivectorielle sont efficaces dans beaucoup de situations telles que: les moustiquaires imprégnées d'insecticide, la pulvérisation d'insecticides à effet rémanent à l'intérieur des habitations et la gestion des gîtes larvaires.

2-4-2. Etat des lieux de la lutte contre le paludisme au Cameroun

L'institutionnalisation de la lutte contre le paludisme rend compte de l'engagement des pouvoirs publics à promouvoir la santé publique. Cet engagement se matérialise concrètement par cinq actes institutionnels importants : la déclaration d'une politique générale du gouvernement sur la lutte antipaludique, la création d'un groupe de travail national pour la lutte anti-paludisme, l'adhésion à l'initiative mondiale Roll back malaria, la ratification de la déclaration d'Abidjan sur la lutte contre le paludisme en Afrique et enfin l'élaboration du plan stratégique national de lutte contre le paludisme. Dans la pratique, les pouvoirs publics se dotent d'un programme gouvernemental spécifique pour lutter contre le paludisme avec une structure nationale de pilotage. Cette structure est intégrée dans l'organigramme du ministère de la santé publique. Un Système National d'Intervention Sanitaire (SNIS) basé au niveau périphérique (district de santé) est mis sur pied ainsi qu'un système de surveillance épidémiologique du paludisme. Une approche régionale de gestion est adoptée à travers la création de dix unités régionales du programme national de lutte contre le paludisme.

Samé Ekobo (2005) souligne que : « de 1965 à 1990, le Cameroun a perdu en moyenne 1,3 % du taux de croissance annuelle à cause du paludisme. Si cette maladie avait été éradiquée 35 ans plutôt, le Produit Intérieur Brut (PIB) augmenterait de 32 % par rapport à son niveau de l'an 2000. Cette augmentation représente environ 1000 milliards de dollars USD, soit 9 fois plus que l'aide au développement accordée à l'Afrique en 1999. Entre 1980 et 1995, le Cameroun aurait perdu à cause du paludisme, environ 4227 millions de dollars USD, soit 318 dollars USD par tête d'habitant ». Le rapport des comptes nationaux de la santé précise que : « En 2011, la dépense pour le paludisme est estimée à 134,4 milliards de FCFA soit 28,6% de la dépense courante de Santé. 28,8% des dépenses liées au paludisme sont financées par les transferts issus des revenus nationaux de l'administration publique, 19,8% par les transferts directs étrangers et la plus grande part soit 48,2% par les autres revenus nationaux (ménages, entreprises, ONGs nationales,...) ». En 2013, la représentante de l'OMS affirmait que

l'investissement fait au Cameroun dans le cadre de la lutte contre le paludisme s'est multiplié par 20 de 2000 à 2012.

Le Programme National de Lutte contre le Paludisme a adopté divers plans stratégiques d'intervention avec des objectifs précis et d'importants moyens mobilisés par l'Etat et les multiples partenaires internationaux. La prévention contre le paludisme est davantage promue avec l'exonération des taxes et droits de douane sur les moustiquaires et insecticides. Plus de 60 millions de Moustiquaires Imprégnées de Longue Durée d'Action (MILDA) ont été distribuées de 2002 à 2015 avec des pics tels que 9 000 000, 8 115 879 et 12 600 000 de moustiquaires MILDA distribuées respectivement en 2009, 2011et 2014. De janvier à juin 2015, 12,2 millions de moustiquaires MILDA ont été distribuées aux populations. De 2007 à 2009, les pouvoirs publics ont approvisionné les formations sanitaires de 9,5 milliards de doses de médicaments antipaludiques subventionnés et plus de 55 milliards de FCFA ont été alloués à la lutte contre le paludisme.

Ces initiatives expliquent l'augmentation du taux d'utilisation des moustiquaires qui est passé de33 % en 2011 (INS, 2011) à 63,7 % en 2012 (INS, 2012) et à 65,6% en 2013 (INS, 2013). Selon INS (2013), « Pour les enfants de moins de 5 ans, le taux d'utilisation passe de 19% à 46% et pour les femmes enceintes, il passe de 17% à 41%. » dans la même période. Si le coût unitaire de la moustiquaire imprégnée reste élevé par rapport au revenu moyen des populations (3 500 FCFA), les multiples partenariats précédemment évoqués ont favorisé la vulgarisation de la prévention avec la moustiquaire. Enfin, dans le cadre du projet « Scaling up malaria control for impact in Cameroon 2011-2015 (SUFI), financé par le Fonds Mondial de Lutte contre le SIDA, la Tuberculose et le Paludisme, le gouvernement camerounais s'est engagé à atteindre la couverture universelle des populations en Moustiquaires Imprégnées d'Insecticide à Longue Durée d'Action (MILDA), afin de diminuer d'une manière significative la morbidité et la mortalité dues au paludisme ».

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