L'interference entre les voies d'execution et les procedures collectivespar Adama SEL COULIBALY Université Mohamed V de Rabat FSJES-SOUISSI - Master II juriste d'affaires 2019 |
Paragraphe 2 : Le sort des paiements effectués par des tiersA. La notion du tiersLe tiers désigne en droit celui qui n'est pas partie à un contrat ou à un litige. La doctrine développa la notion de penitusextranei177(*) « les tiers absolus », pour marquer une véritabledistinction entre les parties et les tiers178(*). Ce concept trouva écho chez le législateur marocain. Ainsi, l'article 228 D-O-C dispose que : « les obligations n'engagent que ceux qui ont été parties à l'acte : elles ne nuisent point aux tiers et elles ne leur profitent que dans les cas exprimés par la loi. ». Cette disposition met en évidence l'effet relatif du contrat et autres conventions179(*). En revanche, la notion de « tiers » n'est pas que l'apanage du droit privé. On la rencontre également en droit public180(*) et dans beaucoup d'autres disciplines sociales. Donc, on peut en déduire qu'il s'agit d'un « concept flottant » du droit. C'est dans ce sens que M. J. GHESTIN a proposé un renouvellement de la distinction entre parties et tiers181(*). A vrai dire, la distinction n'est plus très nette, si les tiers doivent assumer des obligations et encourir des sanctions182(*) à l'occasion d'une relation entre un créancier et son débiteur. La proposition tient donc, tant qu'elle se rapporte aux spécificités de chaque domaine du droit où la notion de tiers est évoquée183(*). En ce qui concerne le droit des voies d'exécution, il a sa propre conception de la notion du « tiers », à travers sa doctrine184(*) et la jurisprudence. Ainsi, pour une partie de la doctrine, « le tiers désigne la personne qui détient des biens appartenant au débiteuren vertu d'un pouvoir propre et indépendant »185(*). Pour l'autre partie, c'est « la personne qui se retrouve dans un lien de droit avec le débiteur et à qui la mesure pratiquée impose des obligations »186(*). Quant à SOULARD, est« tiers, non seulement celui qui est détenteur d'un bien [...] appartenant au débiteur ou d'une créance, mais également celui qui aurait des informations permettant par exemple de connaître mieux l'étendue du patrimoine du débiteur, voire sa nouvelle adresse »187(*). De ce qui précède, on constate que la notion de « tiers », dans le droit des voies d'exécution, est « globalisante et intégrative » de plusieurs catégories sociales, susceptibles de jouer un rôle important dans les procédures de saisie188(*). Toutefois, ces définitions prises individuellement, ne permettent guère de saisir suffisamment le sens de la notion de tiers en droit des voies d'exécution. Il faut alors les jumeler. Finalement, en droit des voies d'exécution : est tiers, le détenteur d'un bien, d'une créance ou d'une valeur appartenant au débiteur, voire d'une information relative à l'identification du patrimoine de ce dernier, enfin, est tiers, celui contre qui une mesure d'exécution peut être pratiquée à cause de sa relation juridique avec le débiteur. * 177 V. GATSI (J), Nouveau dictionnaire juridique, Douala, PUL, 2010, p. 312, V° Tiers. - CABRILLAC (R), Dictionnaire du vocabulaire juridique, édition du Jurisclasseur, Litec, 2004, p. 377, V° Tiers. - CORNU (G), Vocabulaire juridique, Ass. H. Capitant, PUF, 2007, p. 921, V° Tiers. - DELMAS-SAINTHILAIRE (PH), Le tiers à l'acte juridique, op. Cit. 2000. - AUSSEL, « Essai sur la notion de tiers en droit civil français », Thèse, Montpellier, 1952. Cité par BIBOUM BIKAY François : « Le tiers dans le droit des voies d'exécution de L'OHADA » Thèse de doctorat ; UNIVERSITE DE DOUALA. 2009-2010. P. 5. V. aussi, Olivier Deshayes : « Contrat et tiers » : * 178 GHESTIN (J), « La distinction entre les parties et les tiers au contrat ». p. 3628 et suiv. * 179 L'effet relatif est important dans la consolidation des relations juridiques et la protection des personnes non intéressées. * 180BIBOUM BIKAY François : « Le tiers dans le droit des voies d'exécution de L'OHADA » Thèse de doctorat ; UNIVERSITE DE DOUALA. 2009-2010. : « L'intérêt doit notamment être porté en droit public interne, avec le trésor public qui dispose d'un privilège en matière d'exécution, où le tiers est parfaitement connu. Il s'agit de l'avis à tiers détenteur. Le tiers est alors ici une personne qui n'est pas intéressée à la relation qui lie l'administration fiscale à son débiteur ». p. 5 à 6. * 181 GHESTIN (J), « Nouvelles propositions pour un renouvellement de la distinction des parties et des tiers », p. 789. - AUBERT (J.-L), « A propos d'une distinction renouvelée des parties et des tiers » RTD.civ.1993. p. 263. V. aussi : Morgane Reverchon-Billot : LE CONTRAT ET LES TIERS - REGARDS FRANÇAIS SUR LE PROJET DE REFORME ESPAGNOL DU DROIT DES CONTRATS. La recodification du droit des obligations en France et en Espagne, Colloque ERDP et Grupos de investigation derecho privado européo y de conflictu legum, 8 et 9 octobre 2015, 2016. ffhal-02154873f. * 182 V. art. 104 CRCP * 183 BIBOUM BIKAY François ; op. cit. p. 8 à9. * 184 V. LEBORGNE (A), Voies d'exécution et procédures de distribution, Paris, 1ère éd., Dalloz, 2009. - DONNIER (J.-B) et DONNIER (M), Voies d'exécution et procédures de distribution, Paris, 8e éd, Litec, Editions du Jurisclasseur, 2009. - PIEDELIEVRE (S), Droit de l'exécution, coll. Thémis, Paris, PUF, 2009. - FRICERO (N), Droit des voies d'exécution, coll. Mémentos LMD, éd. GUALINO, 2007. - GUINCHARD (S) et MOUSSA (T), Droit et pratique des voies d'exécution, Dalloz action, 2004. - PERROT (R) et THERY (PH), Procédures civiles d'exécution, Paris, 2e éd., Précis Dalloz, 2005. - COUCHEZ (G), Voies d'exécution, 7e éd., Armand colin, 2003. ASSI-ESSO (A.M), et DIOUF (N), OHADA, recouvrement des créances, coll. Droit uniforme africain, Bruxelles, Bruylant, 2002. - JULIEN (P) et TAORMINA (G), Voies d'exécution et procédures de distribution, Paris LGDJ, 2000. - PERROT (R), Procédures civiles d'exécution, Paris Dalloz, 2000. - ANOUKAHA (F) et TJOUEN (A.- D), Les procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution en OHADA, coll. Droit uniforme, Yndé, PUA, 1999. - BOUBOU (P), Voies d'exécution et procédures de recouvrement des créances, t. 2, éd. Avenir, 1999. - VINCENT (J) et PREVAULT (J), Voies d'exécution et procédures de distribution, 19e éd., Précis Dalloz, 1999. - TENDLER (R), Les voies d'exécution, Paris, Ellipses, 1998. - DONNIER (M), Voies d'exécution et procédures de distribution, Paris, 4e éd., Litec, 1996. Cité par BIBOUM BIKAY François ; op. Cit. p.9. * 185 Par référence à la définition fournie par la Jurisprudence à propos du tiers saisi. V. CCJA arrêt n° 09/2005 du 27 janvier 2005 : Sté AFROCOM-CI c/ CITIBANK, Le Juris-Ohada, n° 1/2005, janvier mars 2005, p. 28 ; www.ohada.com ; Ohadata J-05-191. Lire par ex. POUGOUE (P.-G) et TEPPI KOLLOKO, La saisie-attribution des créance OHADA, coll. VADE-MECUM, Yndé, PUA, 2005, p. 20 et suiv. - LEBORGNE (A), « L'obligation de concours du tiers-saisi », p. 151. - LANDZE (R.-D), « Le concours des tiers saisis dans la saisie-attribution de l'OHADA ». * 186 Cass. 24 janvier 1994, Bull. civ., n° 4 ; RTD civ. 1994, p. 428, obs. PERROT. V. COUCHEZ (G), Voies d'exécution, n° 239. - DONNIER (M), Voies d'exécution et procédures de distribution, n° 904. - VINCENT (J) et PREVAULT (J), Voies d'exécutions et procédures de distribution, n° 137 et 138. * 187 SOULARD (R) : Procédures civiles d'exécution. p. 86. * 188 BIBOUM BIKAY François ; op. cit. p. 10. |
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