B. Le non-respect du principe de non-refoulement
Le gouvernement australien a mis en place une «
politiques de sécurisation ». C'est le processus par lequel des
sujets sont identifiés, libellés et considérés
comme des menaces sécuritaires pour la communauté. Cela passe par
plusieurs méthodes.
Présenter les migrants comme des vagabonds sans terre,
sans pays, sans État ; la déshumanisation en parlant
d'arrivées en masse en supprimant leur individualité ; la
métaphore de la catastrophe naturelle avec les termes de « vague
migratoire », d' « envahissement », de « submersion »
; une manipulation de la distinction entre réfugiés et migrants
économiques ; l'inversion des risques : le problème est
présenté comme une menace à la sécurité
plutôt que des personnes dont la sécurité est
menacée280.
L'interception et le renvoi des migrants du Minasa
Bone contreviennent profondément au principe de non-refoulement. Ce
refoulement systématique est en totale désaccord avec les
dispositions pertinentes présentées en première partie.
Il n'y a pas de directives claires concernant le respect des
droits humains et les opérations. Il s'agit d'une grande faille.
L'interception avant d'arriver dans les eaux territoriales des pays privent les
migrants du droit de quitter son pays y compris le sien.
L'interception est le synonyme de l'interdiction en mer. Il
s'agit de mesures physiques prises de manière extraterritoriale pour
éviter l'entrée de migrants non désirés sur le
territoire national281. Elle peut être entendue comme incluant
à la fois l'arraisonnement et la visite des navires
soupçonnés de se livrer à une activité interdite,
et quand les soupçons sont fondés, l'arrestation de
l'équipage et la saisie du navire et/ou de la
cargaison282.
La pratique australienne ne respecte donc pas les engagements
internationaux de l'Australie. Et cet état de fait est
entériné par les juridictions australiennes et surtout sa Cour
suprême dans l'affaire Vadarlis283. En 2001,
après le vote du Border Protection Bill, une loi destinée
à chasser le Tampa des eaux territoriales australiennes, deux
procédures ont été
280 Michael PUGH, « Drowning not waving: boat people and
humanitarianism at sea », loc. cit., p. 3.
281 Solène GUGGISBERG, « Le trafic illicite de
migrants en mer », loc. cit., p. 244.
282 Kiara NERI, « La responsabilité de
l'État dans le cadre des opérations d'interdiction maritime
» dans Efthymios D. PAPASTAVRIDIS and Kimberley N. TRAPP (dir.), La
criminalité en mer, Martinus Nijhoff / Académie de Droit
International de la Haye., 2014, p. 559.
283 COUR FÉDÉRALE AUSTRALIENNE, Minister for
Immigration and Multicultural Affairs & Others v. Vadarlis (« Tampa
Appeal »), op. cit.
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entamées le 31 août devant le juge Anthony North
de la Cour fédérale. Le recours déposé par le
Victorian Council for Civil Liberties aboutit à une ordonnance
d'arrêt de la procédure. Le juge North décide que les
demandeurs d'asile ont été détenus arbitrairement et
qu'ils doivent être retournés en Australie. Le gouvernement a fait
appel. La Cour a décidé que le gouvernement a exercé son
pouvoir d'empêcher des étrangers irréguliers d'entrer en
Australie. Les rescapés n'ont pas le droit d'entrer en Australie, ils ne
sont donc pas en détention. La Cour entérine donc la solution de
Pacifique284.
Le Maghreb est l'une des autres régions du monde qui a
également adopté des mesures de criminalisation de l'immigration
irrégulière.
SECTION 2. LA CRIMINALISATION DE L'IMMIGRATION
IRRÉGULIÈRE AU MAGHREB
L'Union européenne a mis en place une politique
d'externalisation de sa politique aux pays du Maghreb que sont le Maroc, la
Tunisie et l'Algérie et la Lybie (Paragraphe 1) en totale contravention
avec le respect élémentaire des droits de l'Homme (Paragraphe
2).
Paragraphe 1. Une externalisation de la politique migratoire
européenne au Maghreb
Le Maghreb a été relégué à
la place de gardien en amont des frontières européennes (B) ce
qui consacre le plan communautaire de l'UE (A).
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