La responsabilité de l'état en matiàƒÂ¨re de protection du patrimoine mondial : cas du Burkina Faso et des ruines de Loropénipar Ada Rudolph AZIKIBA Université de Limoges - Master2 2015 |
CONCLUSION GÉNÉRALEIl est nécessaire de préserver notre héritage commun. La plupart des États qui se sont engagés dans cette voie de sagesse n'ont peut-être pas atteint les objectifs escomptés, mais ont le mérite de ne pas effriter leur souveraineté d'autant plus renforcée par le droit international en la matière, avec de facto des rebondissements dans les différents ordres juridiques internes. En effet, la responsabilité de l'État en l'espèce ouvre un débat de principe sur la primauté du droit international dans l'ordre juridique interne. Dans la pratique néanmoins, les États reconnaissent la supériorité du droit international conventionnel et relatif aux questions environnementales. C'est le cas d'ailleurs s'agissant de la Convention du patrimoine mondial. Des pays comme le BURKINA FASO tentent ainsi d'honorer leur part de responsabilité en préservant leur patrimoine, et aussi en réprimant les atteintes à l'égard de ce patrimoine. Le cas spécifique des Ruines de Loropéni nous offre à découvrir un schéma institutionnel et matériel qui brille par la détermination des organes à assumer une responsabilité qui échappe au contrôle national. Mais le développement durable est une question difficile à encadrer pour la quasi-totalité des pays du Sud, de sorte qu'ils ne doivent leur salut qu'au rayonnement d'une pleine application du principe des responsabilités communes mais différenciées. Évidemment, le développement durable est un concept qui varie en fonction des pays et qui est fortement tributaire de la lutte contre la pauvreté ; mais il emporte avec ce principe une justice environnementale qui n'est pas de nature à perturber les efforts de chacun d'eux en matière de protection. Un autre type de difficulté majeure constatée est la faiblesse dans l'existence d'une autorité normative capable d'encadrer les politiques d'intégration ainsi que les plans de gestion de l'héritage commun. C'est pourquoi l'on ne peut redorer le blason des mécanismes de protection prévus à cet effet en occultant premièrement la notion d'éthique environnementale, indispensable pour l'instauration d'une stratégie nationale de protection propre. Antoine de Saint-Exupéry soulignait justement à ce propos que : « Nous n'héritons pas la terre de nos ancêtres. Nous l'empruntons à nos enfants ». Cela dit, on comprend à présent tous les enjeux des principes généraux du droit international de l'environnement, qui servent de base à certains principes directeurs dans les législations nationales et dont le plus essentiel est la coopération internationale. Celle-ci donne d'ailleurs à penser à la solidarité, à la complémentarité, à la paix, autant de valeurs indispensables à la mise en oeuvre des instruments substantiels de protection du patrimoine de l'humanité. C'est la raison pour laquelle le fait pour les différents ordres juridiques communautaires d'être effectifs tant dans la forme que dans le fond, contribuerait à rendre opérationnelle la responsabilité de l'État dans la protection des éléments du patrimoine mondial ; mais puisqu'en droit la forme tient le fond en l'état, le tout résidera dans un long processus normatif au sein duquel une large place doit être accordée à la codification. Il est cependant nécessaire d'analyser d'abord les tenants et les aboutissants d'une entreprise qui peut paraitre « encombrante » puisqu'il existe une sorte de hiatus entre les principes fondamentaux régissant le droit de l'environnement et la pratique des États sur la scène internationale. En attendant que les uns et les autres fournissent les moyens adéquats pour combler cet écart dont les tentacules se veulent grandissantes, il faut admettre deux préalables. Premièrement, il s'agit de l'autorité du droit international à couvrir par tous les moyens les matières que l'humanité considère comme relevant de son patrimoine. Ensuite, garantir la coopération internationale en tant que moyen souple et adapté de la mise en oeuvre des responsabilités communes mais différenciées. Tout compte fait, la question de la responsabilité internationale de l'État à protéger les éléments de l'héritage commun relève tant de l'éthique que du droit environnemental, avec cependant une prédominance du premier aspect sans doute parce que ce patrimoinen'est pas effectivement entendu comme un droit de l'homme117(*)qui reflètel'universalité et qui prend de la hauteur par rapport aux cloisons tracées par les ordres internes. De ce fait, le droit du patrimoine mondial n'est pas encore parvenu à se « soustraire » de la conception qui l'assimile mécaniquement au cadre général offert par l'environnement. Et même si le droit international a servi de fondement pour l'édiction, sur le plan national, de normes d'intérêt « universel », il n'en demeure pas moins que la transposition tardive ou partielle du droit international explique la réticence des États118(*)à ébranler leurs compétences au profit de règles, fussent-elles perméables à l'internationalisation du droit interne. Visiblement, les États devraient exploiter les formes de coopérations économiques comme principal atout dans la normalisation des règles en rapport avec l'obligation de protéger l'héritage commun de l'humanité. Ce faisant, l'on ne peut s'empêcher de méditer ces propos du journaliste et écrivain français Edwy Plenel119(*) pour qui : « Il ne suffit pas de partager un patrimoine commun, encore faut-il vivre dans le même monde. ». * 117 La CEDH a offert à ce titre plusieurs « désillusion » quand on pensait avoir atteint le droit à un procès équitable et au respect des biens en matière environnementale, en témoigne l'arrêt LUGINBÜHL C/ SUISSE du 17 janvier 2006 qui s'analyse comme un recul dans l'application de l'article 6 de la Convention en matière de procès équitable. MARGUENAUD (Jean-Pierre) Cours de Master 2 DICE sur Le droit de l'environnement et la cour européenne des droits de l'homme (CEDH). * 118 Sévérine NADAUD, op. cit. * 119 Edwy Plenel, Secrets de jeunesse, Paris, Stock, 2001. |
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